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Ce premier travail d’extraction d’invariants nonlin´eaire s’appuyant sur des outils d´evelopp´es par d’autres ´equipes nous a permis d’initier nos propres d´eveloppements m´ethodologiques, ´egalement bas´es sur la th´eorie des syst`emes dynamiques nonlin´eaires, pour effectuer des pr´evisions visant `a caract´eriser la pr´evisibilit´e du cycle de la v´eg´etation de mani`ere tr`es empirique.

Pour les r´egions semi-arides comme le Sahel, la possibilit´e de disposer de pr´evisions saisonni`eres du cycle de la v´eg´etation serait utile pour soutenir la gestion des ressources naturelles et contribuer

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a la mise en place de syst`emes d’alerte pr´ecoce. Le climat de la bande sah´elienne est d´ecoup´e en deux saisons. La saison des pluies est contrˆol´ee par le r´egime de mousson africaine [9], dont les premiers

´ev´enements pluvieux peuvent d´emarrer d´ebut Juin et s’´etaler jusqu’`a la fin du mois de Septembre ; la saison s`eche est compos´ee des mois restants. L’agriculture pluviale et les activit´es pastorales sont les principales activit´es ´economiques de la r´egion, ce qui en fait une r´egion faiblement anthropis´ee.

La soci´et´e est en cons´equence tr`es d´ependante des conditions climatiques et de leurs al´eas. Cette d´ependance donne une importance pratique `a l’´etude de la pr´evisibilit´e du cycle de la v´eg´etation de cette r´egion. Bien que pr´esentant un int´erˆet potentiel, les horizons de pr´evisibilit´e d´eduits de l’entropie de corr´elation (cf.§1.5.1) pr´esentent toutefois une forte sensibilit´e au bruit et ne peuvent pas ˆetre pleinement conclusives.

Une autre approche propos´ee ici vise `a estimer un horizon de pr´evisibilit´e effectif HE, bas´e sur l’estimation des capacit´es pr´evisionnelles effectives, d’une s´erie temporelle par elle-mˆeme, sans disposer de mod`ele dynamiquea priori. L’approche s’appuie ´egalement sur la th´erorie des syst`emes dynamiques (cf. chapitre 2,§2.2) et n´ecessite de disposer d’un plongement du signal observ´e (Figs.

1.11 & 1.12). Ce plongement, constitu´e d’un ensemble d’´etats successivement visit´es par le syst`eme, nous fournit – en principe – un portrait multidimensionnel non ´equivoque de la dynamique. Une approche pr´edictive peut ˆetre mise en œuvre en s’appuyant sur ce plongement. L’approche consiste `a rechercher les ´etats analogues, pr´ealablement visit´es par le syst`eme observ´e, et `a suivre l’´evolution de ces ´etats au cours du temps. L’approche pr´edictive pr´esente l’avantage de ne n´ecessiter que trois param`etres : (1) le d´elai utilis´e pour reconstruire le portrait de phase ; (2) la dimension de plongement dE; et (3) r le rayon d’influence correspondant `a l’´eloignement maximum des ´etats analogues recherch´es `a l’´etat courant d’o`u est effectu´ee la pr´evision.

Ne n´ecessitant que peu de param`etres, et ´etant directement bas´ee sur les donn´ees, l’approche peut ˆetre utilis´ee pour caract´eriser la pr´evisibilit´e de la dynamique observ´ee, en se basant sur la croissance de l’erreur de pr´evision.

De mani`ere pratique, la croissance de l’erreur de pr´evision peut ˆetre obtenue en s´eparant la s´erie temporelle en deux parties. La premi`ere partie est une partie informative, utilis´ee pour mettre en place l’approche pr´edictive et effectuer la pr´evision ; la seconde partie est une fenˆetre de validation, retir´ee et conserv´ee pour estimer l’erreur de pr´evision. Afin de disposer d’une information statistique de la croissance d’erreur, cette op´eration peut ˆetre r´ep´et´ee en d´epla¸cant la fenˆetre de validation sur l’ensemble de la p´eriode observ´ee. Une courbe de croissance d’erreur en fonction de la date courante t(ou de la date de pr´evisiont+δt) et de l’horizon de pr´evision hpeut ainsi ˆetre obtenue. Et une analyse statistique de cette erreur peut ˆetre effectu´ee. La dimension de plongementdEn’´etant pas toujours facile `a estimer de mani`ere robuste (en particulier en contexte bruit´e), l’approche peut ˆetre appliqu´ee pour diff´erentes dimensions de reconstruction dr. Cette statistique de la croissance d’erreur a pu ˆetre appliqu´ee avec des dimensions de reconstructiondr= 2 `a 8, et pour diff´erentes

´echelles d’agr´egation (cf. Fig 1.13). Ces travaux ont permis de montrer l’efficacit´e de cette m´ethode en comparaison de deux autres approches, l’une bas´ee sur une simple climatologie, l’autre sur un mod`ele saisonnier.

1.5. DYNAMIQUE DE LA V ´EG ´ETATION EN AFRIQUE DE L’OUEST 33

Figure1.11 – La trajectoire g´eom´etrique de la s´erie chronologique NDVI (voir Fig. 1.12) recons-truite dans un espace `a 3 dimensions en utilisant les coordonn´ees retard´ees. La fl`eche noire indique la direction du flot (temps croissant). Les derniers ´etats visit´es par le syst`eme sont repr´esent´es par une ligne rouge ´epaisse, le grand carr´e rouge correspond au dernier ´etat visit´e par le syst`eme d’o`u sera lanc´ee la pr´evision, et consid´er´e comme l’´etat courant. La ligne en pointill´es rouges repr´esente la suite de la trajectoire dont on cherche `a faire la pr´evision, mais que l’on a retir´ee ici pour analyser les capacit´es pr´evisionnelles de l’approche. Les ´etats pr´ealablement visit´es par le syst`eme dans le proche voisinage de l’´etat courant sont marqu´es par de petits carr´es bleus. Le suivi de ces ´etats voisins apr`es un horizonhest repr´esent´e par de petits cercles bleus. La valeur r´eellement observ´ee

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a l’horizonh et que l’on cherche `a pr´evoir est indiqu´ee par la croix ´epaisse rouge. La trajectoire de la pr´evision est d´elimit´ee par les grands points noirs. Les mˆemes symboles correspondant `a ces diff´erents ´etats sont utilis´es dans la repr´esentation temporelle (Fig. 1.12).

Figure1.12 – La ligne verte repr´esente le signal original informatif. Les derniers ´etats visit´es par le signal sont repr´esent´es par la ligne ´epaisse rouge, jusqu’au dernier ´etat d’o`u la pr´evision doit ˆetre lanc´ee. Les petits cercles bleus correspondent aux ´etats proches de l’´etat courant (voir Fig.

1.11). Les petits cercles bleus repr´esentent l’´evolution temporelle apr`es un horizonh. Le cercle noir repr´esente la pr´evision obtenue `a partir des valeurs moyennes pond´er´ees de l’´evolution des ´etats voisins (calcul´ees dans l’espace des phases, voir Fig. 1.11). Cette pr´evision peut ˆetre compar´ee.

L’observation est repr´esent´ee par une croix rouge. Les points noirs repr´esentent les pr´evisions interm´ediaires, tandis que la ligne en pointill´es rouge correspond aux ´etats interm´ediaires observ´es qui ont ´et´e temporairement retir´es pour tester les capacit´es pr´evisionnelles de l’approche.

1.5. DYNAMIQUE DE LA V ´EG ´ETATION EN AFRIQUE DE L’OUEST 35

Figure1.13 – Erreur de pr´evision (en %) pr´esent´ee en fonction de l’horizon de pr´evisionh: (a) pour les donn´ees non agr´eg´ees (IA= 1), puis (b) pour les donn´ees agr´eg´ees `aIA= 5 et (c)IA= 8. Une repr´esentation logarithmique de l’horizon de pr´evision a ´et´e choisie pour rendre le d´eveloppement initial de l’erreur plus visible tout en permettant de suivre les comportements observ´e `a horizons longs. Le trait gras rouge est obtenu `a partir d’une simple climatologie et la ligne en pointill´es rouges `a partir d’un mod`le statistique saisonnier. Les autre lignes sont obtenues grˆace `a l’approche pr´edictive pr´esent´ee dans le pr´esent paragraphe (§1.5.2) et correspondent `a diff´erentes dimension de reconstruction :dr= 2 (lignes pointill´ees),dr= 3 (trait plein noir) etdr= 4 (tirets-pointill´es), dr= 5 `a 8 (autres lignes vertes).

Comme attendu, l’erreur obtenue avec l’approche climatologique est ind´ependante de l’horizon de pr´evisionh(ligne rouge) car elle ne permet pas de prendre en compte l’aspect dynamique du si-gnal observ´e. Les autres approches pr´esentent toutes une claire d´ependance `a l’horizon de pr´evision h, avec des erreurs faibles aux horizons courts, une croissance rapide de l’erreur pour des horizons plus grands, jusqu’`a atteindre une stabilisation se traduisant par de petites oscillations. L’approche saisonni`ere pr´esente des scores m´ediocres, avec un niveau d’erreur raisonnable obtenu uniquement pour des horizons de moins de 3 `a 4 d´ecades. Les erreurs associ´ees `a l’approche bas´ee sur la re-cherche des ´etats analogues dans l’espace des phases pr´esentent un comportement plus complexe.

A horizon court (h` = 1 d´ecade), les meilleurs r´esultats sont obtenus pour des dimensionsdr= 2 `a dr= 4. N´eanmoins, une croissance rapide de l’erreur y est associ´ee, ce qui signifie que la dimen-sion de reconstruction n’est pas optimale (nous reviendrons sur ce point aux paragraphes§2.4.2 et

§2.4.3). Les mod`eles de dimensions sup´erieures pr´esentent une croissance d’erreur beaucoup plus lente et, `a plus long terme, se montrent plus efficaces. La convergence de l’erreur nous fournit une information sur la dimension de la dynamique sous-jacente au syst`eme observ´e [6].

L’analyse des comportements de pr´edictibilit´e `a trois ´echelles distinctes s’est ´egalement montr´ee tr`es informative. En changeant d’´echelle de r´esolution de IA = 1 `a IA = 5 (1.13), la croissance de l’erreurp(h) reste assez similaire. `A l’´echelleIA = 5, le niveau d’erreur devient toutefois plus faible pour les dimensions les plus grandes (dr = 5 et au-del`a, ceci est plus particuli`erement visible aux horizons interm´ediaires de h = 4 `a h = 8). `A cette ´echelle, le niveau de bruit est plus significativement r´eduit par le processus d’agr´egation. Cette r´eduction autorise une meilleure d´etection du comportement d´eterministe sous-jacent `a la dynamique observ´ee et devient accessible en utilisant une dimension de reconstruction suffisamment grande.

A plus grande ´` echelle d’agr´egation (IA = 8), le niveau d’erreur relative devient beaucoup plus faible, quelle que soit l’approche utilis´ee. La pr´evisibilit´e devient beaucoup plus grande. En premi`ere approximation, la dynamique apparaˆıt plus simple. En augmentant la dimension de reconstruction, la vitesse de croissance d’erreur converge d`esdr= 4.

En s’appuyant sur la croissance d’erreur, une estimation de la dimension de reconstruction optimale peut ˆetre effectu´ee, de mˆeme qu’une estimation de l’horizon de pr´evisibilit´e et du niveau de bruit additif. Cette dimension optimale de pr´evision dr est estim´ee `a dr = 5 pour la plupart

des ´echelles d’agr´egation, et `a dr = 4 `a l’´echelle IA = 8. L’horizon de pr´evisibilit´e croˆıt avec la r´esolution, passant progressivement de 2.0 `a 3.3 d´ecades. Le niveau de bruit additif d´ecroˆıt au contraire, passant de 14.5 % `a 10.4 % du signal.

Ces analyses de la dynamique de la v´eg´etation en r´egion semi-aride sah´elienne ont permis de mettre en ´evidence des dynamiques de petites dimensions (dr = 4 `a 5) en coh´erence avec les estimations de dimension de plongement pr´ealablement estim´ees en r´egions Sah´eliennes par un algormithme de faux proches voisins (dE = 3 `a 4 [7]). L’approche introduite ici pr´esente l’int´erˆet de ne n´ecessiter que d’un tr`es petit nombre de param`etres pour estimer une dimension de recons-truction optimale pour la pr´evision et permet ´egalement d’en d´eduire un niveau de bruit additif et un horizon de pr´evisibilit´e effectifHE. L’algorithme utilis´e ´etant un algorithme pr´evisionel, il peut ˆetre envisag´e comme un outil compl´ementaire aux mod`eles utilis´es pour simuler la dynamique des interactions Sol-V´eg´etation-Atmosph`ere. Un approfondissement de ces travaux pourrait consis-ter `a relier la probl´ematique d’optimisation des mod`eles d’efficience (§1.6) `a celle de la pr´evision (§1.5.2). En raison de sa relative neutralit´e, cette approche sera ´egalement utilis´ee comme moyen de validation des mod`eles dynamiques (cf.§2.4.3).

1.6 Mod´ elisation du cycle de la v´ eg´ etation en r´ egion