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Christophe SERENO - IFV

Jean-Michel BOURSIQUOT - Montpellier SupAgro Patrick AIGRAIN - VINIFLHOR

PRODUCTION MONDIALE DE VINS ROSÉS

Jusqu’à une période récente, il était difficile de cerner précisément la production mondiale de vins rosés car les statistiques ne distinguaient pas les rosés des vins rouges. Aujourd’hui il est possible d’affirmer que les rosés représentent un peu plus de 8,5 % de la production mondiale de vin soit 21,5 millions d’hectolitres en 2006 (sources diverses OIV notamment, estimation : CIVP et Viniflhor).

Quasiment les trois quarts des volumes sont produits en Europe : 28 % en France qui occupe la place de premier producteur mondial de vins rosés soit 6 millions d’hectolitres, et notamment la région Provence qui représente à elle seule pratiquement près de 5 % de la production mondiale avec 1 million d’hectolitres de vins rosés produits par an. Environ 40 % sont produits par l’Italie et l’Espagne avec respectivement 4,45 et 3,85 millions d’hectolitres, enfin l’Allemagne avec 770.000 d’hectolitres soit 3 % de la production mondiale.

Après l’Europe occidentale, on trouve les États-Unis (18 %), l’Amérique du Sud (4 %), l’Afrique du Nord et l’Europe de l’Est (2 % pour chacune de ces deux régions du monde).

ENCÉPAGEMENT DES PRINCIPAUX PAYS PRODUCTEURS DE VINS ROSÉS

L’aptitude des cépages à produire des vins rosés est un sujet ayant été peu abordé jusqu’à présent. Le manque de références dans ce domaine peut partiellement s’expliquer par le fait que les vins rosés ont longtemps été considérés comme des produits dérivés des vins rouges classiques. Ainsi, la grande majorité des cépages dont les baies ont des pellicules colorées peuvent potentiellement produire ce type de vin. En réalité, nous allons voir qu’il existe une approche beaucoup plus précise et fine permettant le choix des variétés les mieux adaptées à l’élaboration de vins rosés, en fonction des pays et des caractéristiques intrinsèques de chaque cépage.

Parmi les variétés noires (ou bleu-noir d’après les codes internationaux de description ampélographique), les grands cépages internationaux aptes à produire des vins rouges de garde peuvent servir à l’élaboration des vins rosés (ou des vins gris).

Le tableau ci-dessous regroupe ces principales variétés :

Variétés Pays

Cabernet-Sauvignon N France, Afrique du Sud, Argentine, Uruguay, Chili Cabernet franc N France, Afrique du Sud

Merlot N France, Etats-Unis, Afrique du Sud, Uruguay, Nouvelle-Zélande Pinot noir N France, Suisse, Allemagne, Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande Syrah N France, Etats-Unis, Afrique du Sud, Chili, Australie

Grenache noir N France, Espagne, Tunisie, Algérie, Maroc, Etats-Unis, Australie Mourvèdre N Espagne, France, Tunisie, Afrique du Sud

Cot N France, Argentine, Afrique du Sud Tannat N France, Uruguay

Carignan N France, Tunisie, Algérie, Maroc Sangiovese N Italie, France, Australie Primitivo N Italie, Etats-Unis Pinotage N Afrique du Sud Touriga nacional N Portugal

Ces cépages vont apporter un certain nombre de caractéristiques organoleptiques intéressantes pour les vins rosés : fruité, arômes, volume, acidité, équilibre et finesse. Cependant, au cours du procédé de vinification, il sera nécessaire de maîtriser couleur et structure tannique de ces variétés afin d’obtenir un maximum de qualité.

En dehors des cépages mondialement connus cités ci-dessus, on peut trouver un certain nombre d’autres cépages à diffusion plus restreinte, dont les caractéristiques sont particulièrement appropriées à l’élaboration de vins rosés.

Dans le tableau ci-dessous sont regroupés des cépages français et étrangers pouvant être considérés comme particulièrement bien adaptés pour ce type de production :

Cépages Caractéristiques Pays

Aléatico N Aromatique, muscat Italie, France Alvarelhao N Fruité Portugal

Brachet N Finesse France

Brachetto N Aromatique, floral Italie Caladoc N Couleur, équilibre France

Cinsaut N Equilibre, fruité, finesse France, Tunisie, Algérie, Maroc, AfS Gamay N Fruité France, Suisse, Afrique du Sud Grolleau N Acidité, fruité France

Mencia N Fruité Espagne

Montepulciano N Fruité Italie Negro amaro N Fruité Italie Nero d’Avola N Fruité, équilibre Italie Pineau d’Aunis N Fruité France Piquepoul noir N Acidité France

Poulsard N Finesse France

Sciaccarello N Aromatique, fruité France

Tibouren N Finesse France

Tinto Cao N Fruité, équilibre Portugal Touriga francesa N Fruité Portugal

A l’opposé, les cépages blancs (ou vert-jaune) ainsi que les cépages roses ou gris ne permettent pas à eux seuls d’élaborer des vins rosés à cause de leur teneur insuffisante en anthocyanes. Cependant, certains d’entre eux peuvent être utilisés en assemblage afin d’apporter des

caractéristiques complémentaires aux vins. Ils peuvent en effet contribuer à la finesse, à la complexité aromatique, à l’équilibre acide et à la stabilisation de la couleur des vins rosés ainsi élaborés. Nous citerons ici simplement quelques exemples : Clairette blanche B, Ugni blanc B, Vermentino B, Barbaroux Rs, Grenache Gris G, Grolleau gris G…

PERSPECTIVES

L’évolution de la production mondiale de vins rosés est difficile à appréhender pour les prochaines années mais nous pouvons constater qu’elle est en progression régulière depuis au moins 2002 (+8 % en volume entre 2002 et 2006). Cependant, ces chiffres cachent des disparités selon les pays. En effet, la France bien que premier producteur, continue à augmenter ses volumes (+25 % en 4 ans). Mais avec une consommation annuelle de 7 millions d’hectolitres, notre pays a besoin d’importer des vins rosés pour satisfaire la demande des consommateurs. A l’inverse, Italie et Espagne bien que produisant moins que la France, sont plutôt des pays exportateurs. De la même façon, Etats-Unis et Australie consomment relativement peu de rosés mais en exportent notablement. A l’inverse, l’Allemagne qui consomme deux fois plus de vins rosés qu’elle n’en produit, ainsi que la plupart des pays d’Europe du nord, se positionnent comme de forts demandeurs pour ce type de production. Afin de répondre aux exigences de ces pays gros consommateurs et au pouvoir d’achat relativement élevé, une des solutions pourrait être à la fois la spécialisation mais aussi la diversification de l’encépagement destiné à produire des vins rosés.

A titre d’exemple, un vignoble pourrait être composé des variétés suivantes :

• Grenache noir et Grenache gris, Syrah, Cinsaut et Caladoc pour leurs arômes, couleur, volume et équilibre,

• Alvarelhao, Brachet, Brachetto, Sciaccarello, Tibouren et Tinto Cao qui apportent fruité, finesse et équilibre aux vins, ainsi qu’une touche d’originalité nécessaire pour ce type de production.

Pour les pays produisant des rosés plus ou moins sucrés (effervescents ou non), il peut être intéressant d’avoir des arômes relativement marqués. A ce titre, des variétés comme le Muscat à petits grains blancs B ou le Muscat de Hambourg N peuvent être utilisées. Enfin, on peut également trouver dans certaines régions du monde, des vins à saveur nettement foxée, caractéristique de variétés issues de croisements à base de Vitis labrusca (Concord notamment).

REMERCIEMENTS

Laurent Audeguin (IFV),

Charles Visser (Vititec, Afrique du Sud),

Robin Nettelbeck (Yalumba nurseries, Australie), Hal Huffsmith (Trinchero Family Estate, USA) Nick Dokoozlian (Gallo Family Vineyards, USA), Yerko Moreno (Université de Talca, Chili)

Itinéraires d’élaboration