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Dans cette première section, nous aborderons ce qu’est l’ethnographie pour mieux comprendre le choix d’une telle démarche méthodologique.

1.1 Un pas vers l’ethnographie

De manière globale, l’ethnographie est une approche permettant à tout chercheur de mieux comprendre comment un groupe ou un sous-groupe de personnes vit, et ce, en allant directement sur le terrain pour découvrir leur réalité. Selon Pepin (2010), « l’ethnographie est une discipline constitutive des sciences sociales et concourt, […] à une meilleure compréhension de la culture partagée par des communautés ou des sous-groupes singuliers » (p. 42). Cette compréhension d’une culture vécue par un groupe se réalise principalement par un engagement en trois étapes. Il s’agit de l’observer, de la décrire et de la comprendre. En d’autres mots, lorsqu’on parle d’ethnographie, on insiste sur l’art d’observer, de prendre des notes, de les relire, de les assembler et de tirer des éléments de compréhension et d’analyse à partir des données recueillies (Céfaï, 2011). C’est ainsi qu’on arrive à comprendre la culture étudiée puisque le chercheur, qu’on nomme l’ethnographe, s’insère dans cette communauté pour mieux la comprendre et pour interpréter sa réalité. À cet égard, l’approche ethnographique rejoint nos trois objectifs de recherche.

Avant de poursuivre, il importe de préciser que l’ethnographe doit s’adapter à tous les aléas du terrain et à ses sujets (Céfaï, 2003). En participant aux activités usuelles du groupe concerné, l’ethnographe doit d’abord se faire accepter par les acteurs. Ensuite, il doit gagner la confiance et trouver sa place pour savoir quand en sortir (Céfaï, 2011). Une fois ces étapes franchies, l’ethnographe, étant un chercheur de terrain, a ses deux pieds dans la réalité qu’il désire étudier, ce qui lui permet de comprendre ce qui se passe à l’intérieur de celle-ci.

1.2 Comprendre de l’intérieur

C’est à partir de ses observations que l’ethnographe se rendra compte peu à peu de ce qui se passe à l’intérieur d’une communauté. En réalité, « l’ethnographe accèdera graduellement à des éléments, à des fragments de culture qu’il lui faudra reconstituer et réagencer en un tout qui entre dans la logique des acteurs » (Erny, 1981 dans Pepin, 2011). D’après ce que propose Pepin (2011), « comprendre de l’intérieur » est également une

manière de mettre de l’avant « ce que la situation locale contient de global ou, en d’autres termes, ce qu’il y a de général dans un contexte singulier » (p. 36). Donc, en allant directement dans leur milieu de vie, il est possible de mieux comprendre ce qui se passe entre les acteurs en observant comment ils vivent de l’intérieur. En d’autres termes, c’est une façon de mieux comprendre le monde qui se donne à voir, et ce, à partir du terrain lui- même.

1.3 Une présence prolongée sur le terrain

Comme il a été mentionné plus haut, l’ethnographe part à la rencontre du groupe à l’étude en se rendant dans son milieu de vie, ce qui l’amène à assurer une présence prolongée sur le terrain (Pepin, 2010). En fait, une présence prolongée sur le terrain « est un impératif auquel aucun chercheur ne peut se soustraire s’il veut rendre compte fidèlement du sens donné par les membres de la communauté eux-mêmes aux interactions, objets, fonctions ou institutions avec lesquels ils sont continuellement en relation » (Laplantine, 2005; Woods, 1990 dans Pepin, 2010, p. 42). Être présent sur le terrain est nécessaire puisque cette proximité avec le milieu permet de mieux comprendre la réalité de la communauté étudiée. Cet apprivoisement du terrain est bien documenté en ethnographie. Elle est faite de tâtonnements, de questionnements et d’ajustements.

Quand le chercheur décide de s’engager dans une démarche ethnographique, il fait le choix de s’appuyer sur ses observations concernant la culture étudiée, et donc, il choisit de s’adapter selon ce qu’il observe dans le milieu en question. Le travail de l’ethnographe est donc d’enquêter « sur des ordres en train d’émerger, des régularités en train de se faire, des rationalités en train de s’articuler, des légitimités en train de prendre » (Céfaï, 2010, p. 9-10). C’est pourquoi l’ethnographe est constamment en train de s’adapter à la réalité des communautés qu’il étudie. En effet, on pourrait penser que l’ethnographie est un parcours qui semble aléatoire. Il est plus juste de dire qu’en suivant une démarche ethnographique, l’objet d’étude de l’ethnographe prend forme à travers ses observations et les nombreuses descriptions qu’il rédige à la suite de celles-ci. Avant de continuer, regardons comment se fait l’observation en ethnographie.

1.4 L’observation participante

Afin d’observer ce qui se passe dans la culture, le chercheur choisit d’adopter une posture d’observateur assez bien documentée en ethnographie, soit celle d’un observateur participant. En réalité, l’observation participante « se présente bien comme une interaction proprement dite, disons une relation de face à face entre l’observateur et la (les) personne(s) observée(s) » (Piette, 1996, p. 68). Comme son nom l’indique, celui qui observe participe à son observation, ce qui veut dire que le chercheur ne reste pas en retrait pour l’effectuer. Il est plutôt dans l’action.

On peut se souvenir qu’en ethnographie c’est à partir d’un travail de terrain que le chercheur acquiert son expérience (Céfaï, 2003). Effectivement, c’est en participant à leur vie de groupe que l’ethnographe collecte des données sur son objet d’étude. Lorsqu’il fait de l’observation de type participante, « il regarde à quelles situations sont confrontées les personnes qu’il fréquente, comment elles s’y comportent, et puis il discute avec certaines d’entre elles pour connaître leurs interprétations des événements qu’il a observés » (Ibid., p. 350). Regardons maintenant comment l’ethnographe rend compte de ses observations, en abordant son expérience d’écriture par l’entremise du journal ethnographique.

1.5 La tenue d’un journal ethnographique

En ethnographie, la proximité d’un travail sur le terrain demande tout un travail d’écriture qui requiert du temps (Tillard, 2011; Céfaï, 2010). Cette expérience d’écriture ethnographique se réalise par la tenue d’un journal descriptif et réflexif. L’ethnographe a donc la capacité de décrire tout ce qu’il voit et ce qu’il entend (Céfaï, 2011). En fait,

si nous lisons la description ethnographique d’une séquence d’actions ou d’événements et si elle est suffisamment saisissante, elle nous donne l’impression de vivre nous-mêmes ces actions ou ces événements, en direct, en tant que participants ou en tant qu’observateurs (Céfaï, 2003, p. 300-301).

C’est pourquoi l’ethnographe est amené à prendre de nombreuses notes de terrain et à garder une trace de ses observations. Toutes ses observations rédigées sous la forme de notes de terrain « formeront, au fur et à mesure de l’avancée de l’investigation, ce que l’on appelle communément le journal ethnographique » (Hess, 1998 dans Pepin, 2011, p. 38). Cependant, il faut bien comprendre que l’écriture dans un journal ethnographique ne s’arrête pas à une simple description des observations de l’ethnographe (Pepin, 2010). En fait, il faut plutôt essayer de mettre en évidence pourquoi celles-ci nous interpellent et en quoi elles nous aideraient à cerner et à mieux comprendre la culture étudiée (Ibid.).

L’écriture est fondamentale dans toute recherche de type ethnographique. L’ethnographe commence par observer la communauté étudiée pour ensuite la décrire dans son ensemble, puis finalement, il tente d’en dégager un sens. C’est par la tenue du journal que le chercheur exerce sa réflexion et sa pensée critique face aux incidents observés sur le terrain. Ces incidents sont nommés les incidents ethnographiques. Voyons comment ceux-ci sont définis.

1.6 Les incidents dits ethnographiques

En ethnographie, ces incidents sont reconnus comme étant des événements ou des situations non typiques de la culture étudiée, qui paraissent étranges au chercheur (Pepin, 2010). Effectivement, « lors de sa présence sur son terrain d’investigation, l’ethnographe sera inévitablement confronté à de multiples petits incidents » (Pepin, 2011, p. 39). Son travail de recherche consistera à aiguiser son regard de chercheur pour faire ressortir ce qui est inusité dans des situations habituelles, étant donné que les incidents ethnographiques sont reconnus pour être des données révélatrices (Pepin, 2010; Céfaï, 2010). La tâche de l’ethnographe se déploie au travers des dimensions descriptive et interprétative des situations observées pour ainsi développer des explications révélatrices de son étude (Céfaï, 2010; Pepin, 2010).

Ceci dit, c’est donc à la lumière de ces éléments tirés d’une telle méthodologie que s’est déroulée notre étude de type ethnographique. Comme nous voulions explorer le rôle

de l’enseignante quand les enfants jouent, nous trouvions que cette approche était adaptée pour une telle recherche. Nous verrons dans la prochaine section en quoi le recours à une approche ethnographique rejoint bien nos intentions de recherche.