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IV. DISCUSSION :

4. Appréhensions et difficultés :

a) Appréhensions et difficultés citées :

i. Difficultés logistiques :

Les difficultés d’ordre comptable et administratif ont été largement citées par les participants de notre étude. C’est également le cas dans la littérature : P.Bouché (9) liste les difficultés administratives auxquelles ont été confrontés les remplaçants, en tête desquelles arrivent les accidents de travail (qui par contre n’ont pas posé de difficulté à nos participants), les demandes d’aides à domicile, « d’allocations en tous genres », les demandes de 100% et d’entente préalable. J.Deschaumes (10) comptabilise 61% de remplaçants ayant rencontré des difficultés avec la comptabilité et les formalités administratives.

La gestion du temps de consultation a été évoquée par plusieurs des participants de notre étude. C’est aussi le cas dans l’étude J.Deschaume (10).

Le maniement de l’outil informatique (logiciels de dossiers médicaux) a été largement cité comme source d’appréhension dans notre étude, mais a en réalité posé peu de réelles difficultés. Y. Livanen (31) révèle que les jeunes généralistes remplaçants ont le plus souvent appris seuls à manipuler un logiciel professionnel, et qu’ils auraient préféré en acquérir les bases lors de leur formation initiale qu’ils estimaient insuffisante. Il constate cependant que l’appropriation de l’outil informatique dans leur pratique est tout à fait satisfaisante.

D’autres plaintes de nos participants n’ont pas été relevées ailleurs dans la littérature : il s’agit de l’absence de matériel ou du rangement de celui-ci dans le cabinet du médecin remplacé ; du manque d’informations sur les patients ; du recours aux spécialistes et aux hôpitaux ; et de la méconnaissance des différents modes de règlement et de remboursement.

ii. Difficultés d’ordre médical :

Les participants de notre étude ont spontanément cités peu de grandes disciplines parmi les problématiques d’ordre médical, au contraire des autres études qui détaillent les difficultés dans chaque discipline. Ceci s’explique par le fait que les deux autres études étaient des questionnaires, tandis que la nôtre laissait plus de liberté au participant en posant des questions ouvertes. Parmi les disciplines citées par nos répondants, on retrouve :

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- La pédiatrie, en lien avec la non réalisation du stage - Les gestes techniques en rhumatologie (infiltrations) - La psychiatrie

- La gynécologie, également en lien avec l’absence de pratique en stage.

Ces résultats concordent assez bien avec ceux de P.Bouché (9), qui citait déjà, il y a 25 ans, dans les difficultés les plus importantes la gynécologie-obstétrique (52% des remplaçants), la pédiatrie (41%), la psychiatrie (31%), la dermatologie (30%) et l’ORL et l’ophtalmologie (27%). En revanche, il est étonnant de constater que dans le travail de J.Deschaume (10), la pédiatrie n’était jamais citée, et que la dermatologie représentait une difficulté pour plus de 50% des remplaçants, alors qu’elle n’a jamais été citée dans notre étude.

Autre fait étonnant : la gestion de l’urgence, largement citée dans notre étude, n’était jamais abordée dans les deux études suscitées. Est-ce parce que cela semble évident, ou parce que les remplaçants interrogés s’y sentaient bien préparés de par leur formation hospitalière ? Cette absence de référence à l’urgence n’est pas discutée dans ces travaux.

Enfin, les participants de notre étude se sentent insuffisamment formés dans le domaine des pathologies propres à la médecine générale, et à la prise en charge dite « symptomatique ». P.Bouché (9) fait également état de ce type de difficultés dans ce qui est regroupée sous l’appellation réductrice de « petits bobos, pathologie fonctionnelle et médicaments de confort ». J.Deschaume (10) cite également dans les difficultés rencontrées, la prise en charge des « petites pathologies rencontrées en médecine générale ». Le mépris avec lequel sont qualifiées ces pathologies ou ces symptômes est assez révélateur du manque de considération dont ils sont victimes, aussi n’est-il pas étonnant de les voir peu abordés au cours des enseignements.

iii. Difficultés d’ordre déontologique :

Les désaccords avec les pratiques du médecin remplacé ont été largement cités dans notre étude. Ils sont également cités dans le travail de J.Deschaume (10). Ceci prouve que les remplaçants gardent leur libre arbitre et leur réflexion au cours du remplacement, et ne se contentent pas d’être un « substitut » au médecin remplacé.

D’autres difficultés ou tout du moins interrogations déontologiques sont citées dans notre étude : le fait de prescrire en l’absence du patient, la présence d’un mineur non accompagné, le respect du secret médical lorsqu’un tiers est mis en danger. Ceci prouve que ces jeunes remplaçants sont attachés aux règles de bonne pratique et attentifs quant à la déontologie.

140 iv. Difficultés d’ordre relationnel :

Les deux études qui concernent les difficultés des remplaçants restent très générales sur ce point : Le travail de J.Deschaume (10) se contente de signaler des difficultés dans « la relation médecin/malade ». Le travail de P.Bouché (9) quantifie les « problèmes relationnels avec la clientèle » : 49% des remplaçants en ont rencontré.

Les participants de notre étude apportent quelques précisions supplémentaires : les principales difficultés rencontrées sont la méfiance à l’égard du remplaçant (à rapprocher de la « désaffection du cabinet » rencontrée par 27% des participants à l’étude de P.Bouché (9)) ; le refus de prestation injustifiée (prescription de traitement, examen complémentaire, arrêt de travail…) ; et les patients perçus comme potentiellement agressifs (patients psychiatriques, toxicomanes, patients issus de « zones sensibles »).

Il est important toutefois de souligner que si les participants à notre étude signalent un certain nombre de difficultés sur le plan relationnel, ils se considèrent d’une façon générale comme particulièrement à l’aise sur le plan de la relation médecin/patient, pour certains cela a d’ailleurs été un critère pour le choix de la médecine générale. Ceci rejoint le constat de C.Manjarres (18) : les remplaçants interrogés dans son étude, qu’ils aient réalisé ou non un SASPAS, se sentaient à l’aise vis-à-vis de la communication avec le sujet ou son entourage.

b) Appréhensions et difficultés selon le profil :

i. Difficultés d’ordre logistique :

Concernant le début de l’activité de remplacement, les internes n’ayant jamais remplacé présentent un certain nombre d’appréhensions quant aux démarches administratives préalables au remplacement et quant au fait de trouver des remplacements. Ces notions n’ont jamais été citées comme des difficultés par les remplaçants.

Les internes n’ayant pas remplacé présentent beaucoup d’appréhensions quant au maniement des logiciels médicaux, qui n’ont en réalité posé problème qu’à un seul remplaçant. Ceci montre que les remplaçants s’adaptent rapidement sur le terrain au maniement de ces outils, ce que confirme le travail de Y.Livanen (31) cité plus haut. Le SASPAS ne semble pas jouer de rôle dans ce cas, ce qui laisse penser que l’appropriation de ces outils se fait rapidement.

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En revanche certaines difficultés rencontrées par les remplaçants n’ont pas été citées par les internes n’ayant pas remplacé : il s’agit du manque d’information sur les patients, de la gestion du temps, et des documents administratifs. Ces deux dernières difficultés sont par ailleurs moins citées dans le groupe des remplaçants ayant réalisé un SASPAS, ce qui tend à suggérer un rôle positif de celui-ci dans ces domaines, bien que l’étude de C.Manjarres (18) ne retrouve pas de différence entre les remplaçants qui ont réalisé un SASPAS et les autres dans « le domaine administratif, la gestion de l’entreprise médicale et la comptabilité ». L’étude de J. Bompas (32) explique cette absence de différence par le fait que les internes en SASPAS ne sont pas ou peu confrontés à ces questions au cours de leur stage. Cette différence s’explique peut-être par une approche différente du SASPAS par les maîtres de stage de notre étude.

ii. Difficultés d’ordre médical :

Le manque de connaissances médicales a été évoqué à plusieurs reprises et à proportions équivalentes parmi les internes n’ayant jamais remplacé et les remplaçants n’ayant pas réalisé de SASPAS. En revanche les remplaçants ayant réalisé un SASPAS n’en ont jamais fait mention. Cette différence ne peut pas être mise sur le compte d’une quelconque prétention de la part de ces derniers, puisqu’ils déclarent au contraire manquer de confiance en eux autant que les remplaçants n’ayant pas réalisé de SASPAS et plus que les internes n’ayant jamais remplacé. Ceci tendrait donc plutôt à démontrer l’importance des connaissances acquises sur le terrain et validées par un maître de stage (d’où l’importance de la supervision indirecte que nous avons déjà évoqué).

iii. Difficultés d’ordre déontologique :

Ces difficultés sont réparties de façon homogène dans les trois groupes. Ceci montre que les difficultés déontologiques sont des difficultés très « personnelles », liées à sa propre perception des choses plus qu’à des connaissances acquises. Par ailleurs les réponses à ces difficultés viennent probablement avec une expérience plus longue que n’a eu le temps d’acquérir aucun de ces jeunes médecins.

iv. Difficultés d’ordre relationnel :

Là encore, les réponses sont homogènes dans les trois groupes, si ce n’est les appréhensions au sujet des patients sous traitement de substitution aux opiacés, citées à trois reprises,

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uniquement dans le groupe des internes n’ayant jamais remplacé. Ceci suggère que ces patients souffrent d’une image très négative, mais ne semblent pas, en pratique, poser de problèmes aux médecins remplaçants.

c) Rôle du SASPAS :

i. Acquisition de confiance en soi :

La réalisation du SASPAS a permis d’améliorer la confiance en soi des participants de notre étude qui en ont réalisé un. En effet, 4 individus déclaraient ne pas se sentir aptes à exercer en autonomie, avant réalisation du SASPAS, contre 0 après sa réalisation. Concernant le manque de confiance en soi, 3 individus déclaraient en souffrir avant la réalisation du SASPAS, contre 0 après. Cette notion est retrouvée dans la littérature : dans l’étude nationale de C. Mari Turret (33), tous les participants ont estimé que le SASPAS leur avait apporté un gain de confiance en eux. C. Ponçot (34) retrouve également cette tendance.

ii. Diminution des difficultés ressenties :

Parmi les participants de notre étude, on constate peu de différence en ce qui concerne les difficultés d’ordre médical strict. Ce constat est cohérent avec les résultats de C. Richard (35) qui constate que la réalisation ou non d’un SASPAS modifie peu les compétences médicales en fin de cursus. En revanche d’après notre étude il semblerait que les remplaçants qui ont réalisé un SASPAS rencontrent moins de difficultés sur le plan logistique et administratif. D’une façon générale, l’étude de C. Maillet (36) dénombre 94 remplaçants sur les 108 interrogés qui considèrent que le SASPAS leur a permis de rencontrer moins de difficultés lors de leurs débuts professionnels, tandis que 95,6% des étudiants interrogés par D.Fraizy (16) sont également de cet avis.

iii. Gain d’autonomie :

Les participants de notre étude s’estimaient majoritairement plus autonomes à l’issue de leur SASPAS (l’un d’eux se qualifiant même de « plus dégourdi » ). Ceci coïncide avec les résultats de D.Fraizy (16) qui relevait que l’autonomie était le point le plus cité (51% des participants) parmi les « points forts » du SASPAS.

143 iv. Sentiment de satisfaction :

Dans notre étude, le SASPAS a satisfait l’ensemble des individus qui l’ont réalisé, l’un d’eux considère même que le SASPAS est « primordial ». Parmi ceux qui n’en n’ont pas réalisé, plusieurs auraient aimé le faire mais n’en n’ont pas eu la possibilité. Ce sentiment de satisfaction est largement retrouvé dans la littérature. C. Mari Turret (33) observe un taux de satisfaction de 85%, et dans cette même étude, 97% des interrogés ont éprouvé un sentiment de plaisir au cours du SASPAS.