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Les apports de la FHHt dans la compréhension du paradoxe de l’aldostérone

OSR1/SPAKNCCP

5. WNK1, WNK4, CUL3, KLHL3 ET PHYSIOPATHOLOGIE DE LA FHHt

5.1 Les apports de la FHHt dans la compréhension du paradoxe de l’aldostérone

Le maintien de la balance du Na+ et du K+ est essentiel à la survie de la plupart des espèces. Le néphron distal joue un rôle clé dans le maintien de cette balance. Les situations d’hypovolémie et d’hyperkaliémie entrainent le déclenchement de réponses différentes pour maintenir l’homéostasie. Au cours de l’hypovolémie, la stimulation de la réabsorption de Na+ permet de maintenir le volume de fluide extracellulaire et de garantir le maintien de la pression artérielle et la perfusion des organes. En cas d’hyperkaliémie, la sécrétion de potassium doit être stimulée afin de limiter les complications cardiaques et neuromusculaires. Ces deux situations différentes stimulent la sécrétion d’une même hormone, l'aldostérone. Le fait que cette hormone puisse avoir des effets différents sur le transport de Na+ et K+ en fonction de la situation physiologique a été nommé le « paradoxe de l’aldostérone ». En cas d’hyperkaliémie, les glandes surrénales sécrètent de l’aldostérone afin de stimuler la sécrétion de potassium sans modifier la balance du sodium. Dans le cas d’une hypovolémie, la sécrétion d'angiotensine II et d'aldostérone est stimulée, de façon à augmenter la réabsorption de sodium sans modifier la balance du potassium. L’étude de la FHHt a permis d'expliquer ce paradoxe grâce à la découverte des kinases L-WNK1 et WNK4, qui jouent un rôle clé dans le « switch moléculaire » permettant au rein soit de réabsorber du Na+, soit de sécréter du K+. Plusieurs études ont montré que l'abondance à la membrane apicale de NCC et ENaC augmente dans le rein de souris et de rat soumis à une déplétion sodée (Castañeda-Bueno et al., 2012; Loffing-Cueni et al., 2006). Dans le cas d'une hyperkaliémie, ENaC est stimulé alors que NCC est inhibé (Sorensen et al., 2013; Vallon et al., 2009). Il a été clairement démontré que l'augmentation de ENaC dans ces deux situations est la conséquence de la stimulation de l'aldostérone (Arroyo et al., 2011). Lors d'une hypovolémie, l'angiotensine II stimule l'activité kinase de WNK4, qui va à son tour stimuler NCC (Castañeda-Bueno et al.,

2014, 2017). Des études ayant montré qu'une perfusion chronique d'aldostérone stimule NCC (Chiga et al., 2008; Kim et al., 1998; van der Lubbe et al., 2012), il restait donc à comprendre comment le cotransporteur est inhibé lors d'une hyperkaliémie. Deux éléments ont permis de répondre à cette question. Tout d'abord, si l'aldostérone est capable de stimuler NCC, ce n'est pas grâce à la fixation sur son récepteur (MR) puisque la régulation de NCC est intacte chez une souris porteuse d'une inactivation du MR (Czogalla et al., 2016). Il est donc possible que la stimulation de NCC par une perfusion chronique d'aldostérone soit due à l'utilisation d'une dose supra-physiologique. Ensuite et surtout, des expériences ont montré qu'une augmentation de la concentration extracellulaire de K+ conduit à une augmentation de la concentration intracellulaire de chlorure et donc une inhibition de WNK4, d'où une baisse de la phosphorylation de NCC (Hennings et al., 2017; Zhang et al., 2014).

En résumé, lors d'une hyperkaliémie, l'augmentation du potassium extracellulaire inhibe NCC alors que l'aldostérone stimule le couple ENaC-ROMK. Ces deux phénomènes permettent d'augmenter la délivrance de Na+ dans le CNT et le CCD, donc la réabsorption de Na+ et la sécrétion de K+ par ROMK. De plus, l'augmentation du débit urinaire provoqué par la surcharge potassique stimule le BK, ce qui permet de maximiser la sécrétion de K+. Lors d'une hypovolémie, l'angiotensine II stimule NCC et l'aldostérone stimule ENaC afin de maximiser la réabsorption de Na+. Comment expliquer alors que l'activation de ENaC ne conduise pas à une perte de K+ ? Quelques études ont mis une évidence une diminution de l'excrétion urinaire de K+ chez des rats soumis à une déplétion sodée chronique (Malnic et al., 1966), ce qui suggère qu'une diminution de la concentration urinaire de sodium dans le canal collecteur médullaire stimule la réabsorption de K+, permettant ainsi le maintien de la balance du K+.

L’angiotensine II stimule l’activité de WNK4, qui phosphoryle NCC, augmentant ainsi son abondance à la membrane apicale (Castañeda-Bueno et al., 2012; San-Cristobal et al., 2009). Afin de maximiser la réabsorption de sodium, l’aldostérone est également capable d’activer ENaC (Figure 20). Comme je l’ai précédemment décrit, ENaC est contrôlé positivement par l’aldostérone capable d’induire rapidement et fortement l’expression de SGK1. L'activité de Nedd4-β est inhibée par la kinase SGK1, ce qui entraine une diminution de l’ubiquitination et de la dégradation d’ENaC (Arroyo et al., 2011; McCormick et al., 2005).

De plus, il a été montré que l’angiotensine II peut inhiber ROMK le long de l’ASDN (Kahle et al., 2008; Yue et al., 2011). En effet, la kinase c-Src capable d’inhiber la phosphorylation

de WNK4 par SGK1 voit son expression augmenter consécutivement à un régime pauvre en potassium ou à une infusion d’angII (Yue et al., 2011).

Ensemble, ces effets favorisent la réabsorption électroneutre de Na+ en ne modifiant pas la sécrétion de K+ (Figure 20). Ces données permettent de comprendre comment le néphron distal sensible à l’aldostérone répond à l’hypovolémie.

Figure 20. Paradoxe de l’aldostérone et implication de WNK4 en réponse à une hypovolémie.

L’angiotensine II n’est activée qu’en cas d’hypovolémie. Les flèches symbolisent une régulation positive, les flèches à bouts ronds symbolisent une régulation négative.

Comme présenté dans le paragraphe 4.2 de cette introduction, les ions chlorures jouent un rôle essentiel dans la régulation de NCC par le potassium. Lorsque la concentration [K+]e est haute, comme c’est le cas lors d’une hyperkaliémie, les efflux de chlorure sont inhibés et la [Cl-]i est haute dans les cellules du DCT. Dans ces conditions, WNK4 est inhibé par les ions chlorure et ne peut plus phosphoryler et activer NCC. La diminution de NCC consécutive à un régime riche en K+ a également été confirmée chez la souris (Vallon et al., 2009). Par ailleurs, NCC est rapidement déphosphorylé, dans les 15 minutes après la prise orale de K+ (Sorensen et al., 2013). La réduction de l’activité de NCC dans le DCT résulte en une augmentation de la délivrance de NaCl dans le CNT et le CCD. Cela augmente la sécrétion de K+ couplée au Na+ par ENaC et ROMK, ce qui stimule la sécrétion de potassium. D’autre part, l’absence

d’AngII et de la kinase c-Scr permet à l’aldostérone d’activer ROMK (Yue et al., 2011) (Figure 21). Ces données sont en accord avec le fait qu’un régime riche en K+ entraine une augmentation de l’expression de ROMK et une diminution de celle de NCC chez des rats contrôles (Frindt and Palmer, 2010). Ces données récentes permettent de comprendre comment le néphron distal sensible à l’aldostérone répond à l’hypovolémie.

Figure 21. Paradoxe de l’aldostérone et implication de WNK4 en réponse à une hyperkaliémie.

Les flèches symbolisent une régulation positive, les flèches à bouts ronds symbolisent une régulation négative.

La découverte de l’implication de WNK4 dans la FHHt ainsi que l’ensemble des études concernant la régulation physiologique de WNK4 et de NCC ont permis de mettre en évidence le rôle central que ces deux protéines jouent donc un rôle dans le paradoxe de l’aldostérone.