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PARTIE III. Proposition d’une méthodologie de prédiction de la résistance

I.4. Application de la méthodologie

I.4.1. Introduction

Les trois méthodes proposées pour contrôler la résistance limite d’un micropieu ont été appliquées sur les micropieux de 9 m de longueur (groupe A) réalisés sur le site expérimental sur lequel s’appuie ce travail et déjà présenté dans la deuxième partie (cf. Partie II, § II.4.1). Nous avons utilisé les résultats sur les micropieux du groupe A, car sur les quatre micropieux réalisés des essais d’arrachement (USLT) et d’essais de chargement dynamique à faible déformation (LSDT) ont été effectués. Il est donc possible sur ces micropieux de comparer le comportement estimé avec celle mesuré.

Nous avons également appliqué le modèle analytique sur les micropieux de 6 m de longueur (groupe B, C et D) afin de justifier le choix du paramètre f pour faire le calage dans les méthodes B et C. Pour faire la calibration du modèle, nous laissons un paramètre constant et l’on fait varier l’autre jusqu’à caler la courbe analytique avec la courbe mesurée dans l’essai USLT. Le paramètre qui reste constant est f car d’après les observations sur les micropieux du site expérimental, le paramètre f varie moins que le paramètre g sur les différents micropieux testés (cf. tableau III.1).

I.4.2. Sur les micropieux du site expérimental

(a) Méthode A

Afin d’appliquer la méthodologie, nous avons calibré le modèle analytique sur l’essai de chargement statique du micropieu A1 (figure III.5.a). Les valeurs des paramètres de calage sont f = 0,97 et g = 0,56. Ensuite, nous avons calculé la raideur obtenue avec des impacts à très faible énergie (masse manuelle de 5 kg) sur les micropieux à contrôler. La raideur obtenue à partir de l’essai LSDT sur chaque micropieu testé est introduite dans le modèle. La figure III.5.b présente les résultats de cette méthode appliquée aux micropieux A2, A3 et A4.

La résistance de calcul Rt qui apparaît sur les figures est un fait la résistance liée au

frottement latéral Rs. Sa valeur, calculée avec la méthode pressiométrique, est de 331 kN (cf.

tableau II.14).

La comparaison des prédictions à partir du modèle analytique avec la courbe de référence qui est l’essai USLT réalisé sur le micropieu A1, montre que le micropieu A2 est apparemment moins résistant car la raideur obtenue est plus petite contrairement aux micropieux A3 et A4 où la prédiction est plus grande que la résistance mesurée dans l’essai statique sur le micropieu A1.

(a) (b)

Figure III.5. a) Calage du modèle analytique avec l’essai d’arrachement sur le même micropieu (A1). b) Comparaison du comportement estimé à partir du modèle analytique sur les micropieux

A2, A3 et A4 avec l’essai USLT sur le micropieu A1

Le fait que nous ayons réalisé des essais d’arrachement sur tous les micropieux, nous permet de vérifier chacune des prédictions. Par exemple, sur la figure III.6.b on peut observer que la prédiction dans le cas du micropieu A3 est très correcte, même si nous n’avons pas atteint la rupture dans l’essai statique. Par contre, sur le micropieu A2 (figure III.6.a) la prédiction commet une erreur d’environ 33 %. Dans ce cas, la charge limite estimée est beaucoup plus petite que celle mesurée : l’estimation est sécuritaire. En revanche, pour le micropieu A4 (figure III.7) la prédiction montre un comportement plus raide et une résistance estimée largement supérieure à celle calculée (Rt) et à celle que l’on pourrait extrapoler à partir de l’essai statique.

(a) (b)

Figure III.6. Comparaison entre le modèle analytique et l’essai d’arrachement pour les micropieux a) A2 et b) A3

Figure III.7. Comparaison entre le modèle analytique et l’essai d’arrachement pour le micropieu A4

L’application de la méthode A sur les micropieux de 9 m a mis en évidence les limites de cette méthode. Même si le modèle prédictif a été calé sur un essai très précis comme l’essai de chargement statique, l’erreur qu’on peut commettre peut être très importante. Cette erreur est causée par deux phénomènes : la variabilité spatiale et temporelle et la sensibilité à un changement de raideur sur la résistance limite. En effet, l’augmentation de la raideur statique à faible déformation n’est pas toujours suivie par une augmentation de la résistance limite, comme le montrent les essais réalisés sur le micropieu A4.

Nous avons appliqué la méthode A sur les micropieux de 6 m de longueur afin de justifier le choix du paramètre f pour faire le calage dans les méthodes B et C. Le tableau III.1 présente les coefficients trouvés sur les micropieux de 9 et 6 m de longueur en faisant le calage en fonction des résultats de l’essai LSDT sur chaque micropieu et l’essai USLT sur le micropieu du même groupe. Par exemple, les micropieux B2, B3, B4 et B5 ont été calés par rapport à l’essai USLT sur le micropieu B1. Les résultats montrent que le paramètre f est moins variable que le paramètre g et que la valeur moyenne de f est égale à 0,97.

Tableau III.1. Coefficients de calage f et g sur les micropieux de 9 et 6 m de longueur Micropieu Longueur du micropieu f g

A2 9 m 0,91 0,80 A3 9 m 0,97 0,59 A4 9 m 0,99 0,40 B2 6 m 0,98 0,68 B3 6 m 0,98 0,49 B4 6 m 0,99 0,63 B5 6 m 0,99 1,05 C2 6 m 0,99 0,80 C3 6 m 0,97 0,75 D2 6 m 0,96 0,36 D3 6 m 0,96 0,58 Moyenne 0,97 0,65 Ecart type 0,02 0,20 CV 0,02 0,31

(b) Méthode B

Les données d’entrée du modèle analytique sont la raideur calculée par l’essai LSDT et le coefficient  de variation du module de cisaillement calculé à partir du module de Menard. Le calage du modèle a été réalisé en prenant un point de l’essai LSDT. Les résultats sont présentés sur les figures III.8 et III.9.

Pour faire le calage de la courbe avec les points de l’essai LSDT nous avons varié le paramètre g en conservant le paramètre f constant. La valeur moyenne de f ainsi obtenue est égale à 0,97 (cf. tableau III.1).

Figure III.8. Application de la méthode B sur les micropieux A2 et A3

Figure III.9. Application de la méthode B sur le micropieu A4

Les résultats montrent que la méthode reproduit assez bien les courbes charge-enfoncement des essais d’arrachement (essai USLT). Pour l’essai A2, l’erreur dans l’estimation de la charge limite estimée est de 12 % pour le déplacement à la rupture conventionnel. Pour les autres micropieux, il n’a pas été possible de calculer la résistance limite car les essais USLT ne sont pas atteint la rupture.

(c) Méthode C

La méthode C a été appliquée également sur les micropieux de 9 m, la seule différence par rapport à la méthode B repose sur l’évaluation du coefficient  de variation verticale du module de cisaillement. Pour calculer ce coefficient, nous avons réalisé des essais de pénétration à une distance de 0,5 m du micropieu à contrôler, pour les micropieux A2, A3 et A4. Nous avons donc réalisé trois essais de pénétration.

Dans la méthode B la valeur du coefficient  utilisée est de 1,44. Dans la méthode C, ce coefficient est différent pour chaque micropieu : micropieu A2 : = 0,24, micropieu A3 : = 0,29, micropieu A4 : = 0,43. Les résultats obtenus avec ces valeurs sont montrés sur les figures III.10 et III.11.

Figure III.10. Application de la méthode C sur les micropieux A2 et A3

Figure III.11. Application de la méthode C sur le micropieu A4

D’après la comparaison des méthodes B et C, nous pouvons observer que la prédiction du comportement ne diffère pas considérablement entre les deux méthodes. Par contre, la méthode C inclue dans son modèle des paramètres du sol obtenus au voisinage du micropieu à contrôler, ce qui réduit les problèmes causés par la prise en compte de la variabilité spatiale.

I.4.3. Sur des micropieux en conditions réelles

La méthodologie a été testée sur les chantiers de Montluçon et Metz présentés dans la deuxième partie (cf. Partie II, § III.3). Le micropieu contrôlé à Paris n’est pas analysé avec la méthodologie de contrôle de la résistance limite car pour ce chantier, l’essai statique USLT a été réalisé sur un autre micropieu de longueur différente et ayant une résistance limite de calcul presque deux fois supérieure à la résistance du micropieu testé. Une comparaison du comportement à grande déformation n’était donc pas envisageable pour ce chantier.

(a) Chantier de Montluçon

Pour rappel, sur ce chantier nous avons réalisé un essai USLT de contrôle (c’est-dire 1,3 fois la charge de service à appliquer). Ensuite, sur le même micropieu, nous avons réalisé un essai LSDT. Du fait que nous n’avons pas mesuré la charge limite avec l’essai USLT, il n’est pas possible de calculer l’erreur dans la prédiction. Par contre, une comparaison du comportement estimé à partir du modèle analytique avec la courbe de réponse charge-déplacement de l’essai USLT a été réalisée et nous avons étudié la variation de la résistance limite estimée en tenant compte du résultat de l’essai statique.

Du fait que, nous n’avons pas réalisé d’essais pénétrométriques à côté du micropieu contrôlé et que nous ne disposons pas de résultats d’essai statique à la rupture sur un micropieu similaire dans le même site, la seule méthode applicable est la méthode B.

Pour ce chantier, l’information provient d’essais pressiométriques réalisés en phase « projet » pour faire le calcul des micropieux et où la résistance limite calculée Rtest de 573 kN

pour le micropieu testé. La coupe géotechnique obtenue est décrite dans le tableau II.22. Nous avons calculé le coefficient  en fonction de la variation du module de Menard (Em), la valeur de 

est égale à 0,1.

Sur le micropieu nous avons réalisé des essais avec une masse de 5 kg et un marteau de 97 kg. Pour estimer la résistance limite, nous avons besoin des résultats obtenus avec la masse de 5 kg (pour calculer Ks) et des premiers impacts réalisés avec le marteau de 97 kg. Ces impacts

ont été réalisés avec une hauteur de chute de 0,1 et 0,2 m. Le résultat est montré sur la figure III.12.

Figure III.12. Application de la méthode B sur le micropieu du chantier de Montluçon et comparaison avec l’essai USLT sur le même micropieu

La résistance limite estimée Rcestimée à partir du modèle analytique est de 860 kN pour un

charge mesurée est égale à 550 kN, par contre pour le même déplacement la charge estimée avec le modèle analytique est d’environ 610 kN, soit 11 % plus grande. Dans ce micropieu le comportement estimé est légèrement supérieur à la courbe de l’essai USLT.

Si maintenant on refait le calage du modèle en tenant compte du dernier point mesuré par l’essai USLT (figure III.13), la résistance limite estimée Rcestimée à partir du modèle analytique est de

777 kN pour un déplacement à la rupture de 29 mm, 10 % plus petite que la charge estimée dans le premier calage. Cela veut dire que la résistance estimée pour le micropieu testé a une valeur d’environ 820 kN ± 40 kN.

Figure III.13. Deuxième calage en tenant compte du résultat de l’essai USLT

Les résultats de l’application de la méthode B pour le calcul de la résistance limite obtenus sur ce chantier sont très encourageants. Grâce à la réalisation d’un essai USLT de contrôle sur le micropieu, nous avons étudié la variation de la résistance limite en prenant en compte l’essai statique, dans ce cas l’erreur estimée a été de 10 %.

(b) Chantier de Metz

Sur ce chantier nous avons réalisé un essai LSDT sur un micropieu « test » et ensuite sur le même micropieu, nous avons réalisé un essai USLT jusqu’à la rupture. Cet exemple est très intéressant du fait que l’on connait la charge limite mesurée par l’essai USLT sur le même micropieu testé en dynamique. Nous avons ainsi réalisé un calcul de l’erreur de prédiction. Nous avons également étudié la variation de cette erreur en fonction du choix des points de l’essai LSDT pour faire le calage.

La méthode appliquée dans cet exemple est la méthode B car on dispose d’un essai pressiométrique avec lequel nous avons calculé le coefficient  qui est égal à 0,15. Le résultat de la prédiction montré dans la figure III.14 est obtenu en faisant un calage avec les points de l’essai LSDT calculés à partir des impacts avec un marteau de 195 kg et une hauteur de chute de 0,5 m.

Figure III.14. Application de la méthode B sur le micropieu du chantier de Metz et comparaison avec l’essai USLT sur le même micropieu

L’erreur dans la prédiction de la charge limite est de 7 % par rapport à la charge mesurée avec l’essai statique (Rsmesurée) pour le même déplacement. Ce résultat est très satisfaisant pour une

méthode prédictive, mais par contre, si le calage du modèle est réalisé avec un point de l’essai LSDT obtenu avec une énergie moins importante, par exemple avec le même marteau mais avec une hauteur de chute de 0,3 m, la prédiction est moins précise avec une erreur de 17 %. Si l’on réduit encore plus l’énergie de battage en réduisant la hauteur de chute à 0,1 m, la prédiction s’éloigne à près de 23 %. Comme conclusion on peut dire que la précision de la prédiction est fortement dépendante de l’énergie de battage de l’essai LSDT : elle est d’autant plus précise que des énergies testées sont importantes.