• Aucun résultat trouvé

Chapitre IV : Confrontation entre résultats expérimentaux et théorie

IV.2. Variation de la mobilité apparente à bas champ

IV.2.2. Application aux données expérimentales

Dans la littérature, d’après la partie précédente, c’est généralement la conductance qui est étudiée en fonction des paramètres de fabrication. Pour les dispositifs Si NN-FET, la conductance à tension de grille constante ne semble pas être un bon paramètre électrique pour comparer les propriétés de transport des dispositifs, notamment à cause de la dispersion en tension de seuil d’un dispositif à l’autre. Il nous a d’abord paru plus pertinent d’analyser la mobilité bas champ apparente µ0, en supposant que la variation de µ0 suit les mêmes évolutions que la conductance dans les Équation IV-2 et Équation IV-3.

Pour donner du crédit à cette hypothèse, il faut se rappeler que µ0 est une mobilité apparente, car non normalisée par la largeur et la longueur de canal physique. Il en résulte qu’une augmentation de largeur physique ou une diminution de longueur physique de canal va entrainer une augmentation de µ0. Or, pour une conductivité fixée, la conductance va varier de la même façon avec les paramètres géométriques physiques du canal.

La Figure IV-3 représente la variation de µ0 en fonction de la densité de nanofils pour différentes valeurs de Lmasque pour les dispositifs expérimentaux. On voit qu’il est possible de lui superposer un modèle de variation correspondant à l’ Équation IV-2, c’est-à-dire une loi de puissance avec  considéré égal à 4/3. A noter que la densité critique est ajustée à la main afin d’obtenir une bonne correspondance entre le modèle et les données expérimentales. La correspondance est assez réussie mais quelques points expérimentaux restent éloignés du modèle, ce qui peut être expliqué par le faible nombre de dispositifs mesurés (20 dispositifs mesurés pour chaque choix de paramètre de réseau) et par la variation assez importante de mobilité d’un dispositif à l’autre.

Grâce à la correspondance réussie entre le modèle et les points expérimentaux, la densité critique est de nouveau extraite pour différentes valeurs de Lmasque. Par exemple, pour Lmasque = 30 µm, une densité critique de 0,19 nanofils.µm-2 peut être extraite. De nouveau, il y a augmentation de la densité critique avec Lmasque.

92

Figure IV-3: Mobilité apparente bas champ µ0 extraite pour les dispositifs expérimentaux en fonction de la densité pour différentes valeurs de Lmasque. Les points représentent les valeurs médianes expérimentales et les zones colorées représentent 50 % des valeurs de µ0 autour de la médiane de la distribution. Les lignes de couleur représentent le modèle de l’Équation IV-2, pour différentes valeurs de densité critique. Ces densités critiques ont été choisies de manière à faire correspondre le modèle aux points expérimentaux.

La Figure IV-4 montre l’équivalent de la Figure IV-3 pour les données simulées. La correspondance entre le modèle de l’Équation IV-2 et les données est bien réussie, et permet de nouveau d’observer une augmentation de la densité critique avec Lmasque.

Figure IV-4: Mobilité apparente bas champ µ0 extraite pour les dispositifs simulés(Rjonction = 1 Mꭥ) en fonction de la densité pour différentes valeurs de Lmasque. Les points représentent les valeurs médianes et les zones colorées représentent 50 % des valeurs de µ0 autour de la médiane de la distribution. Les lignes de couleur représentent le modèle de l’Équation IV-2, pour différentes valeurs de densité critique. Ces densités critiques ont été choisies de manière à faire correspondre le modèle aux points expérimentaux

93

En conclusion, à Lmasque fixé et en régime percolant, µ0 dépend de la densité en suivant une loi de puissance. Cette évolution est à relier avec l’évolution de la largeur de canal et de la longueur de canal physique du dispositif.

Pour modéliser la variation de µ0 en fonction de Lmasque, l’Équation IV-3 peut servir de base, mais en se souvenant bien que µ0 est déjà normalisé par Lmasque. Donc l’équation utilisée pour modéliser cette dépendance est :

µ

0

= constante L

masque

L

baton

× (L

baton

L

masque

)

m Équation IV-4

D’après cette équation, dans le cas où m = 1, c’est à dire pour le régime dit « ohmique », la mobilité est bien indépendante de la longueur de canal comme attendu pour un matériau homogène.

Sur la Figure IV-5 est représentée µ0 en fonction de Lmasque pour quelques valeurs de densité ainsi que le modèle de l’Équation IV-4. La valeur de m extraite diminue avec la densité, jusqu’à atteindre 1, ce qui se traduit par un plateau de mobilité avec Lmasque.

Figure IV-5: Mobilité apparente bas champ µ0 extraite pour les dispositifs simulés (Rjonction = 1 Mꭥ) en fonction de Lmasque pour différentes valeurs de densités. Les points représentent les valeurs médianes et les zones colorées représentent 50 % des valeurs de µ0 autour de la médiane de la distribution. Les lignes de couleur représentent le modèle de l’Équation IV-4, pour différentes valeurs de m. Ces valeurs de m ont été choisies de manière à faire correspondre le modèle aux points expérimentaux.

La Figure IV-6 montre l’équivalent de la Figure IV-5 pour les données expérimentales. La valeur de m extraite est bien plus importante pour les dispositifs expérimentaux que pour les dispositifs simulés.

94

Figure IV-6: Mobilité apparente bas champ µ0 extraite pour les dispositifs expérimentaux en fonction de Lmasque pour différentes valeurs de densités. Les points représentent les valeurs médianes et les zones colorées représentent 50 % des valeurs de µ0 autour de la médiane de la distribution. Les lignes de couleur représentent le modèle de l’Équation IV-4, pour différentes valeurs de m. Ces valeurs de m ont été obtenues par régression linéaire sur les données expérimentales.

Pour expliquer cette différence, les valeurs de m sont aussi extraites à partir des valeurs de Id à l’état ON (Vg = -25 V pour les données expérimentales et Vg = -20 V pour les données simulées), qui est proportionnel à la conductance à Vg constant. La Figure IV-7 représente l’évolution de Id à l’état ON en fonction de Lmasque pour différentes densités, pour les données expérimentales (Figure IV-7-a) et pour les données simulées (Figure IV-7-b).

Figure IV-7: Courant de drain Id à Vg constant pour les dispositifs expérimentaux (Vg = -25 V) (a) et les dispositif simulés (Vg = -20 V) (b) en fonction de Lmasque pour différentes valeurs de densités. Les points représentent les valeurs médianes et les zones colorées représentent 50 % des valeurs de µ0 autour de la médiane de la distribution. Les lignes de couleur représentent le modèle de l’Équation IV-3, pour différentes valeurs de m. Ces valeurs de m ont été obtenues par régression linéaire sur les données.

95

En comparant les Figure IV-6 et Figure IV-7-a, on constate que les valeurs de m extraites à partir de la variation de Id à l’état ON et de µ0 sont proches dans le cas des dispositifs expérimentaux. A l’inverse, en comparant les Figure IV-5 et Figure IV-7-b, les valeurs de m extraites à partir de la variation avec Lmasque de Id à l’état ON et de µ0 peuvent être assez différentes pour les dispositifs simulés, notamment pour les dispositifs de faible densité de nanofils. Nous avons donc cherché à comprendre cet écart de comportement entre Id à l’état ON et µ0 pour les dispositifs simulés.

Pour les dispositifs simulés, la variation de Id à l’état ON peut être liée à la variation de différents paramètres :

- La variation de la longueur ou de la largeur physique du canal ; - La présence de résistances de jonction le long du canal.

Dans le cas des simulations, ces deux contributions n’agissent pas de la même façon sur la variation de µ0. Cela peut se vérifier en simulant des dispositifs sans résistance de jonction (Figure IV-8).

Figure IV-8: Mobilité apparente bas champ µ0 extraite pour les dispositifs simulés (Rjonction = 100 ꭥ) en fonction de Lmasque pour différentes valeurs de densités. Les points représentent les valeurs médianes et les zones colorées représentent 50 % des valeurs de µ0 autour de la médiane de la distribution. Les lignes de couleur représentent le modèle de l’Équation IV-4, pour différentes valeurs de m. Ces valeurs de m ont été choisies de manière à faire correspondre le modèle aux points expérimentaux.

On observe que m est toujours du même ordre de grandeur, pour les dispositifs simulés, que l’on prenne en compte ou non les résistances de jonction. Cela signifie que la variation du µ0 avec Lmasque est seulement liée à la variation de longueur ou de largeur physique de canal. La prise en compte de la

96

résistance de jonction est faite grâce à 1. Ainsi, on comprend mieux pourquoi les valeurs de m sont différentes en se basant sur Ion ou sur µ0.

Dans le cas des données expérimentales, le µ0 extrait est sensible à la fois à la variation de dimension du canal physique et à la présence de jonctions résistives, ce qui explique pourquoi les valeurs de m extraites à partir de µ0 et du courant de drain soient similaires.

Pour le moment, nous ne sommes pas tout à fait certains de pouvoir expliquer pourquoi le µ0 des dispositifs expérimentaux est plus sensible à la présence de résistance de jonctions que le µ0 des dispositifs simulés. Nous pensons que cela peut s’expliquer par une variation de la valeur des résistances de jonction, dans le cas des dispositifs expérimentaux, par effet de champ. La dépendance à Vg des résistances de jonction conduirait à une prise en compte de ces résistances de jonction dans le µ0 extrait.

Nous notons cependant que la forte valeur de m extraite grâce à la variation de µ0 expérimental est avant tout à lier à la présence de jonctions.

Dans des simulations Monte Carlo de réseaux de nanofils où seules les résistances de jonctions étaient prises en compte dans le calcul de la résistance totale du réseau (sans prise en compte de l’effet de champ) et en ne considérant que les chemins les moins résistifs, des résultats similaires ont été trouvés pour les valeurs de m.[LEG 2017b] Ces valeurs de m, considérés comme trop importantes (par rapport à la valeur de 1,93), étaient expliquées en introduisant un nouveau régime percolant à faible densité, le régime pré-percolant. En réalité, cette valeur limite de 1,93 n’étant valable que pour des fils conducteurs sans jonctions, l’introduction d’un nouveau régime de conduction n’est pas nécessaire pour expliquer ces valeurs de m.

En conclusion, la diminution de la mobilité µ0 expérimentale avec l’augmentation de Lmasque peut s’expliquer par deux raisons :

- La diminution de la largeur physique de canal ; - La présence de résistances de jonctions.

De même, la variation de ces deux paramètres peut expliquer l’augmentation de µ0 avec la densité. En effet, augmenter la densité va conduire à une augmentation de la largeur physique de canal, suivant une loi de puissance. Et cette augmentation va entrainer l’apparition de chemins moins résistifs (avec moins de jonctions) entre source et drain.