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Chapitre 1 Introduction

1.5 Diabète associé à la FK (DAFK)

1.5.4 Anomalies de la tolérance au glucose dans la FK

Pour étudier la pathophysiologie de l’intolérance au glucose et de l’insuline dans le DAFK, la méthode la plus utilisée est l’HGPO. Une étude publiée en 2007 provenant de notre équipe a démontré que, même chez une population adulte de patients avec la FK considérée

comme NGT, l’excursion glycémique durant l’HGPO est plus élevée que celui d’un groupe contrôle apparié (187) (voir Figure 6). Ces observations ont aussi été rapportées par d’autres équipes (185, 188). En divisant par quartile l’aire sous la courbe (AUC) de glucose au cours de l’HGPO, on a aussi observé que le quartile le plus élevé était associé à des niveaux plus faibles de la fonction pulmonaire et à des niveaux plus élevés de marqueurs de l’inflammation systémique, dont la protéine C réactive (CRP) et le fibrinogène (187).

La sécrétion d’insuline, suite à une charge de glucose, se manifeste en deux phases : la première phase qui correspond à l’insuline déjà présente dans les granules sécrétoires du pancréas et la deuxième phase qui présente la synthèse de nouvelles molécules d’insuline. La première phase de sécrétion d’insuline chez tous les patients avec la FK est diminuée en réponse d’une charge de glucose orale ou intraveineuse combinée ou non à une stimulation additionnelle d’arginine (187, 189, 190). De plus, en divisant une population de FK en quartile d’AUC de la première phase de sécrétion d’insuline, le quartile le plus bas était associé à une diminution significative de la fonction pulmonaire (187).

Au delà de l’impact sur la régulation de la glycémie, il est possible que la baisse de la sécrétion de l’insuline joue un rôle sur d’autres paramètres cliniquement importants. Selon une étude effectuée par Cotterill et ses collègues, pour un même âge, les enfants avec la FK avaient une taille moyenne inférieure à la population d’enfants sains. D’ailleurs, le taux de croissance étaient considérablement anormal chez près de 40% des enfants avec la FK. De façon intéréssante, le taux de croissance était associé à la sécrétion d’insuline et non à la tolérance au glucose (191). Ainsi, la baisse de la sécrétion d’insuline tôt dans la vie pourrait en partie contribuer à cette baisse de la taille moyenne observée chez les enfants avec la FK. Quelques années au par après, une étude rétrospective par Cheung et al. démontra que les enfants avec le DAFK avaient généralement un taux de croissance encore plus ralenti comparés à ceux qui n’étaient pas atteints du DAFK (192).

Il est probable aussi que les incrétines, des hormones endogènes sécrétés par les cellules endocrines du tube digestif dont la cholécystokinine (CCK), le glucagon-like-peptide-1 (GLP-1) et le glucose-dependent insulinotropic peptide (GIP), potentialisent la sécrétion glucodépendante de l’insuline et soient partiellement responsable de l’apparition d’une intolérance au glucose ou du DAFK (193, 194). D’ailleurs, dans la FK, les niveaux de CCK sont augmentés alors que les niveaux de GLP-1 et de GIP sont diminués (193, 194). La réduction de ces incrétines pourrait contribuer aux anomalies de la tolérance au glucose. Une étude clinique qui est d’ailleurs en cours utilise un inhibiteur de la DPP-4 (l’enzyme qui dégrade le GLP-1 et le GIP) pour améliorer la tolérance au glucose des patients atteints de la FK (PI: Stecenko; ClinicalTrials.gov: NCT00967798).

Un autre régulateur important de la glycémie est la production de glucose hépatique. Ce mécanisme physiologique est d’ailleurs augmenté à la fois chez les enfants et les adultes atteints de la FK (195, 196). Cette augmentation de la production de glucose hépatique dans la FK peut être le résultat de deux mécanismes qui seraient augmentés : la glycogénolyse et la gluconéogenèse. L’un des rôles importants de l’insuline dans le corps humain est de supprimer la gluconéogenèse lorsque les niveaux de glucose sanguin sont normaux. Dans une étude effectuée chez une trentaine de patients adultes avec la FK, une augmentation de la gluconéogenèse a été détectée, ce qui expliquerait en partie cette dysglycémie. D’ailleurs, cette augmentation de la néoglucogénèse serait en grande partie causée par les bas niveaux de sécrétion d’insuline (197).

Ainsi, les patients avec la FK présentent une très importante fréquence d’anomalies de la sécrétion d’insuline et de la tolérance au glucose dont l’apparition est précédée d’une accélération de la perte de poids et de la fonction pulmonaire. Le test d’HGPO reste encore le seul outil qui permet de documenter et d’étudier l’implication des mécanismes sous-jacents à ces anomalies.

Figure 6. Excursions A) glycémique et B) insulinémique lors d’un test d’HGPO de 2 heures (1,75 g / kg) chez les patients adultes avec la FK. Patients FK normotolérants (CF-NGT); patients FK avec intolerance au glucose (CF-IGT); patients avec le DAFK (CFRD); •: P<0.05 versus Controls; †: P < 0.05 versus CF-NGT; ‡: P < 0.05 versus CF-IGT. Adaptée de (187).

Les anomalies de l’action de l’insuline sont plus discutées et moins bien caractérisées. Alors que certains auteurs ont rapporté que les patients atteints de la FK avaient une sensibilité à l’insuline (capacité de l’insuline à faire baisser la glycémie) augmentée, d’autres ont rapporté soit une sensibilité normale ou réduite lorsque comparée à un groupe contrôle sain (198). Parmi les facteurs qui pourraient expliquer une baisse de la sensibilité à l’action de l’insuline chez les patients atteints de la FK, on peut citer l’inflammation chronique, les surinfections et l’usage des stéroïdes. En utilisant des indices dérivés de l’HGPO, plusieurs groupes dont le nôtre ont rapporté une baisse de la sensibilité à l’insuline ajustée pour le niveau de sécrétion au fur et à mesure que la tolérance au glucose se détériore chez les patients avec la FK (187). La présence de résistance à l’insuline contribuant à l’hyperglycémie est démontrée à l’occasion des surinfections (198).

L’index de disposition consiste à ajuster le niveau de sécrétion de l’insuline en fonction du degré de sensibilité, ce qui permet d’estimer avec une seule valeur la contribution des 2 facteurs clefs dans la survenue des anomalies de la tolérance au glucose. On peut utiliser des indices dérivés de l’HGPO qui mettent en évidence que les anomalies de la tolérance au glucose dans le DAFK sont principalement dues à une réduction de la capacité de sécrétion de l’insuline avec une contribution additionnelle probable d’une moindre sensibilité à l’action de l’insuline. De plus, ces anomalies se majorent progressivement avec l’aggravation de la dysglycémie (Voir Article 3, Figure 2).