Le cas de Marion Minvielle
Marion Minvielle est suivie par le Samsah depuis septembre 2009, date de l’ouverture du service. Le premier entretien est effectué à son domicile, un appartement dans une résidence, calme petit village de la banlieue de Rochefontaine. Lors de cette première rencontre, Marion parle de sa situation et évoque sa solitude ; elle entend bénéficier d’un soutien psychologique. Ses demandes correspondent à l’offre du Samsah. Ses angoisses entravent sa mobilité, et le service peut lui proposer une aide dans ce domaine. Lors des échanges suivants, elle montre quelques inquiétudes par rapport à ses dépenses courantes et avance une première solution : changer de logement. De leur côté, en prenant progressivement connaissance de la situation, les professionnelles repèrent d’autres champs possibles d’intervention : l’alimentation (trop de Mac Do et de pizzas, nourriture peu équilibrée), l’hygiène de vie, l’investissement du domicile et des relations familiales.
Hospitalisée sous contrainte (HDT), Marion a en effet été absente de son domicile pendant un certain temps. Lorsque le Samsah intervient, elle l’a regagné depuis un peu plus de deux mois et vit avec son fils de dix ans, Kevin. Elle est en « sortie d’essai » et, selon les médecins, n’est « pas stabilisée ». Sa sortie peut être qualifiée de « sortie sous contrainte » : pendant six mois, elle doit passer trois jours par semaine dans un Hôpital de Jour et subir tous les quinze jours une injection retard de Risperdal, un antipsycho-‐ tique. Elle voit son psychiatre une à deux fois par mois. Si elle ne se présente pas à l’Hôpital de Jour, les infirmières sont tenues de signaler son absence au médecin chef, qui à son tour avertit les autorités locales de venir la chercher, à son domicile ou ailleurs.
Lorsque le Samsah est mandaté auprès de Marion, elle fait déjà l’objet de plusieurs soutiens. Au cercle familial sur lequel nous allons revenir s’ajoutent plusieurs dispositifs. En premier lieu, l’Hôpital de Jour comme nous venons de le voir. Ensuite, l’infirmière libérale qui lui fait une injection de Risperdal tous les quinze jours, son psychiatre (qui depuis peu est un homme) tous les deux mois (il n’a pas accepté de nous rencontrer). À ces interventions médicales s’ajoute une intervention sociale, puisque Kevin bénéficie d’une mesure d’AEMO (Action Éducative en Milieu Ouvert), qui sera transformée en juin 2010 en une mesure de placement. Le médecin lui a dit qu’elle était schizophrène, mais elle n’en sait pas plus. Comme ses parents, elle reproche aux équipes médicales de ne pas donner suffisamment d’explications. Elle demandera d’ailleurs à une infirmière du Samsah ce que signifie le mot schizophrène. L’infirmière plaide d’abord l’incompétence pour éviter de répondre, mais finalement se ravise et se tourne vers le dictionnaire : « dédoublement de la personnalité » dit-‐elle. « Ah oui, ça correspond » réagit Marion.
L’histoire personnelle de Mme Minvielle
Marion est née au printemps de l’année 1967 dans une famille modeste. Son père, mineur, meurt dans un accident de travail (« un coup de grisou… ») et la laisse orpheline peu après sa naissance. Sa mère se débrouille d’abord seule. Elle doit travailler et confie souvent l’enfant à sa grand-‐mère. Puis elle se remarie et a d’autres enfants. Marion poursuit une scolarité satisfaisante et, munie d’un BTS, devient secrétaire. Sa mère la décrit à cette époque comme une personne discrète, qui « n’a jamais été démonstrative », timide voire renfermée, mais « toujours coquette, toujours impeccable ». La jeune fille se marie et c’est au moment de son premier accouchement – il y a 21 ans – qu’elle commence à faire l’objet d’un suivi médical. Son médecin généraliste lui prescrit des antidépresseurs. Sa mère pense à des problèmes familiaux et ne s’inquiète pas trop. Elle-‐ même a aussi connu des périodes difficiles et elle imagine que, comme elle, sa fille les surmontera. Mais lors d’un second accouchement, les choses s’aggravent. Marion consulte un psychiatre. Elle choisit une femme qui la suivra jusqu’en 2009.
Marion perd son emploi, mais elle attaque son employeur aux prud’hommes pour licenciement abusif et obtient gain de cause. Le conflit n’était pas en lien avec sa maladie. Une assistante sociale de l’ANPE lui conseille de demander une mise en invalidité professionnelle. Elle travaille à nouveau l’année suivante, comme secrétaire à l’hôpital voisin, mais le poste ne lui convient pas : elle est seule à ranger des papiers et ne s’y plaît pas. L’AAH lui est accordée en 2003.
La mort de sa grand-‐mère en 2000 est une véritable épreuve pour Marion. Elle tente de se suicider et par la suite fera plusieurs tentatives. Sa vie familiale est alors un peu chaotique : la PMI constate une « comportement obsessionnel » et, en 2001, procède à un signalement. Le rapport fait état de nombreux problèmes chez les enfants, « isolement et
trouble du comportement alimentaire » chez l’aînée, « dépression et troubles majeurs du comportement » pour le deuxième, et enfin « instabilité psychomotrice et intolérance à la frustration » chez le petit Kevin, alors âgé de deux ans. Le puîné est placé dans un
internat. Pendant toute cette période, Marion Minvielle multiplie les aventures extraconjugales, qui sont sources de tensions avec son mari. Elle lui ment, élabore divers stratagèmes pour lui cacher ses aventures. Pour éviter des questions gênantes de la part de son mari, elle n’hésite pas à lui dire qu’elle vient d’avaler une boîte entière de Lexomil. Le couple se sépare, se reforme. C’est finalement elle qui demande le divorce en 2008. Elle rapporte que son ex-‐mari lui a dit qu’il « ne revivrait plus jamais avec une
femme malade ». Elle ajoute qu’« il a supporté ça pendant quatorze ans ». Aux
intervenantes du Samsah elle raconte que son mari ne supportait plus ses tentatives de suicide à répétition. Mais elle éprouve une certaine nostalgie à l’égard de cette union.
Marion vit très mal les fêtes de fin d’année 2008. Elle est déprimée, visiblement très mal. Voilà maintenant plusieurs mois qu’elle vit seule avec son cadet. Elle ne se nourrit pas beaucoup et ne pèse plus que 46 kilos. Elle se tourne vers sa mère car elle craint de ne pas supporter le réveillon toute seule. Sa mère ne réagit pas. Elle se tourne alors vers sa tante (qui est aussi sa marraine). Celle-‐ci vient passer la nuit avec elle, la calme et la rassure. Mme Minvielle a des « impatiences » (ou « mal des jambes sans repos » : ses membres inférieurs tremblent d’eux-‐mêmes et deviennent incontrôlables). La tante veille jusqu’au petit matin sa filleule qui finit par s’endormir un peu apaisée. Dès le lendemain, Marion se rend chez sa psychiatre, qui ne la laisse pas repartir et sollicite la
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mère de Marion pour une HDT. Celle-‐ci dit qu’elle n’a pas eu d’autres choix que de donner son consentement et sa signature. Aujourd’hui, Marion ne lui reproche pas son intervention. Elle reconnaît que l’hospitalisation était nécessaire. Dans un premier temps, l’équipe médicale est pessimiste et annonce à la famille que Marion ne sortira très probablement jamais de l’hôpital. Elle est attachée pendant deux mois, et ne se lave quasiment pas. Elle était « dans un état lamentable », dit-‐elle, ce que confirme sa mère. Mais après deux mois et demi, elle va mieux et une sortie d’essai lui est proposée. Elle rejoint son fils Kevin alors hébergé chez sa mère. Celui-‐ci a dû changer d’établissement scolaire pendant l’hospitalisation de sa mère. Il est jugé plus sage de ne pas le faire changer une nouvelle fois d’école. Marion et son fils ne regagnent leur domicile qu’au début du mois de juillet, soit deux mois et demi avant le début du suivi Samsah.
L’écoute et le soutien psychologique
Dès ses premières interventions, le Samsah cherche à mesurer quelle est au fond la demande de la bénéficiaire, quel est son moral et quel est son degré d’adhésion à la mesure. Les professionnelles notent dans le journal de bord qui est rédigé après chaque visite : « Mme MINVIELLE semble adhérer à l’accompagnement mais “reste intimidée”
(difficultés à nous regarder) » (premier entretien, le 25/09/09). Les comptes rendus
suivants débutent ainsi : « Mme MINVIELLE était contente de nous revoir » (01/10/09), « Mme s’était “faite belle” pour notre arrivée » (08/10/09). Cela se poursuit de la sorte : « Ne connaissant pas Mme MINVIELLE ni l’une ni l’autre, nous trouvons une personne très
ralentie, figée, le regard vide… » (26/10/09). Si les intervenantes mettent leur propre
écoute en avant, elles sondent également les capacités d’écoute de Mme Minvielle. Elles évaluent son attention et son degré de compliance. Au premier abord, Marion semble intéressée et prête à s’impliquer. Tant ses demandes que son accueil semblent indiquer que le travail du Samsah sera possible, utile et nécessaire. L’une des psychologues de l’équipe est spécialement en charge de la passation des tests neurocognitifs. Ceux qu’elle fait passer à Marion révèlent de petites difficultés d’attention et de mémorisation.
Le problème principal semble être son isolement, sa solitude. Marion demande d’augmenter le nombre de visites. Au bout de trois semaines, le Samsah double leur fréquence et se rend à son domicile deux fois par semaine, parfois trois. Quand Marion va mal, elle appelle le bureau. Dans le tableau de bord le travail d’écoute est mentionné :
…elle nous fait part de ses angoisses concernant les sorties : parfois elle se sent suivie, peur du regard des autres notamment quand elle se rend à l’école pour son fils. À l’intérieur de son logement : peur que des gens rentrent chez elles et solitude. Lorsque son fils n’est pas là (week-‐end chez son père), elle se rend chez sa mère pour le week-‐end car peur de cette solitude. (extrait du tableau de bord, 25/09/09)
Marion Minvielle aurait la possibilité de sortir plus souvent de chez elle. Mais elle n’ose pas. Elle a son permis conduire, mais ne s’aventure que sur les trajets qu’elle connaît, principalement entre son domicile et celui de sa mère, quelques magasins où elle a ses habitudes, et l’école où est scolarisé son fils. Elle va à l’hôpital de jour en VSL et sort donc très peu de chez elle. Le Samsah lui propose de l’accompagner dans ses sorties tout en lui laissant l’initiative. Il suggère aussi qu’elle s’inscrive dans des activités collectives : atelier couture organisé par la municipalité, sorties animées par le Samsah tous les samedis – au zoo, au parc, randonnées, visites… Elle n’en fera rien. Tout en
sortant très peu, elle se montre finalement assez autonome. Elle préfère par exemple se rendre chez son coiffeur au centre ville plutôt que chez celui de son village.
Mme Minvielle se confie régulièrement. Lors de chaque visite, elle évoque ses préoccupations, ses rêves, ses problèmes et ses malaises. Elle expose ses angoisses à propos de sa vie quotidienne, de son mariage, de sa responsabilité maternelle, de son suivi médical, ou encore de sa santé physique, de ses revenus. Qu’elles soient psychologues, assistantes sociales, CESF, aides médico-‐sociales ou infirmières, les professionnelles réagissent de la même manière par l’écoute, le réconfort et le conseil, ainsi qu’en témoigne le compte rendu suivant rédigé par une infirmière :
Mme M m’accueille visiblement soulagée de me voir et très angoissée. Très rapidement, s’effondre et pleure beaucoup. Est littéralement désespérée… Je la quitte un peu soulagée, moins triste mais toujours désemparée. Je lui propose que les collègues l’appellent demain pour prendre de ses nouvelles, cela la touche beaucoup ; mesure que j’ai pu prendre en compte sa détresse. (extrait du journal de bord, 02/08/10)
Marion Minvielle se confie sans retenue sur toutes sortes de sujet :
Elle nous dit être fatiguée physiquement et moralement. Nous lui conseillons d’en parler à son psychiatre, elle ne veut pas par peur d’être hospitalisée. Nous la questionnons sur l’origine de son angoisse, elle nous répond que le déménagement l’angoisse et notamment le dégivrage de son frigo !!! (03/05/10)
Le Samsah cherche à l’apaiser et à la rassurer. Même si tous les sujets sont abordés, ce sont ceux qui concernent son fils Kevin qui sont les plus fréquents. L’enquête sociale en cours l’inquiète beaucoup, tout comme la perspective d’un placement. La cohabitation provisoire avec la mère de Marion est aussi un sujet de discussion.
L’un des centres des préoccupations de Marion : ses proches
Si Marion Minvielle parle beaucoup de choses et d’autres, ce sont surtout ses proches qui sont l’objet de ses préoccupations. Elle a la garde de Kevin et voit sa mère très régulièrement. Celle-‐ci joue le rôle « d’aidante » principale. Pendant que Kevin est à l’école, Marion s’ennuie et elle se rend pendant de longs moments chez sa mère. Puis elle va chercher son fils à l’école et passe la soirée avec lui. Certes, le Samsah intervient dans la perspective de soutenir Marion, mais il ne néglige pas le réseau dans lequel celle-‐ci est inscrite. Ainsi, les intervenantes ne manquent-‐elles pas d’observer le comportement de l’enfant lorsque celui-‐ci est présent, et elles s’en inquiètent :
Son fils n’était pas à l’école ce vendredi AM. Mme MINVIELLE, nous dit que l’instituteur était absent et que son fils est rentré seul ???
Nous avons trouvé l’enfant + que discret, n’a pas bougé du salon, n’a pas levé les yeux de son jeu, ni à notre arrivée, ni à notre départ. (journal de bord, 23/09/10)
Kevin vit sous la responsabilité de sa mère, mais les capacités éducatives de celle-‐ci sont mises en doute, comme l’atteste la mesure d’AEMO. Le Samsah n’ignore pas les autres professionnels qui gravitent autour de Kevin et de sa mère. Il contacte donc rapidement l’assistante sociale de secteur puis l’association en charge de la mesure AEMO. Il prend ainsi connaissance de l’histoire des suivis sociaux de tous les enfants et recueille les avis des autres professionnels. Il apparaît que la situation est telle que le placement de Kevin semble inéluctable. Les intervenantes découvrent souvent Kevin au
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domicile de sa mère à l’heure des visites. Selon Marion, tantôt son fils est malade, tantôt l’instituteur est absent. La suspicion de mensonge s’installe. De surcroît, Mme Minvielle n’ose pas trop pousser son fils à s’engager dans des activités extra-‐scolaires. Elle dit avoir peur de rester seule pendant ces moments-‐là. Qu’ils soient du Samsah ou de l’AEMO, les professionnels encouragent Marion à faire preuve d’un peu plus d’autorité sur son fils. Elle cède trop à tous ses caprices. Marion dit tenir compte des conseils qui lui sont donnés. Mais l’angoisse, c’est surtout la perspective de l’expertise psychiatrique (l’expertise aura lieu en avril, elle conduira en effet au placement de Kevin).
Cette expertise à venir est un point d’appui qu’utilise couramment le Samsah pour tenter de normaliser le comportement de Marion. Pour éviter un éventuel placement, elle doit changer certaines de ses attitudes, notamment celles qui concernent l’éducation de son fils. Les intervenantes se saisissent ainsi de l’enquête sociale en cours pour la persuader de porter une plus grande attention à l’alimentation. Si une alimentation plus équilibrée est importante pour elle (elle a été anorexique, elle se plaint de sur-‐poids au printemps 2010), c’est surtout en évoquant Kevin que le Samsah parvient à la mobiliser. Les professionnelles obtiennent que les repas soient pris autour d’une table. Elles demandent quels sont les goûts de Kevin, et proposent à Marion de l’aider à préparer les plats. Rappelant que les fenêtres d’un appartement ne doivent pas rester toujours fermées, elles obtiennent que Marion les ouvre de temps à autre. Elles remarquent que, à dix ans, Kevin ne prend toujours pas sa douche tout seul. Elles s’emploient à faire changer une telle situation, toujours en évoquant le risque du placement, mais aussi en n’hésitant pas à prendre l’exemple de leurs propres enfants.
Ce que les professionnels du Samsah déplorent avant tout, c’est une trop grande fusion entre Marion et son fils. Fusion qu’elles expérimentent dés que Kevin fait son apparition. Un jour, elles attendent Kevin à la sortie de l’école en compagnie de Marion et elles notent qu’au moment de l’arrivée du garçon, celle-‐ci ne fait plus attention à elles : « dès l’arrivée de celui-‐ci nous “n’existons plus” ». Plus grave, le fait que Kevin dorme avec Marion inquiète le Samsah. La grand-‐mère du garçon partage cette inquiétude :
La véritable raison de cette tension réside surtout dans le fait que Mme ne puisse arriver à refuser quoi que ce soit à Kevin et la grand-‐mère est très inquiète pour l’avenir de son petit-‐fils et pour son équilibre. Nous reprenons cela en dehors de la présence de la maman. Mme M se montre touchée, avouant ses difficultés à cadrer son fils et semble prendre nos « conseils » pratiques en compte, nous argumentons que la difficulté de la séparation serait majorée si ils dorment encore ensemble ; semble entendre. (12/07/10)
Toutes ces interventions n’auront pas beaucoup pesé sur le diagnostic du psychiatre et la décision du juge. À l’annonce du jugement, Marion « refuse » le placement, « elle est
en larmes » (11/05/10). Les intervenantes lui rappellent que c’est une décision de
justice, décrivent la procédure et expliquent ce qu’implique une telle décision. En contrepoint, la sœur aînée de Kevin, présente lors d’une visite du Samsah, estime que ce placement fera le plus grand bien à son frère car il n’est pas très dégourdi pour son âge, sa mère ne le laissant pas faire grand-‐chose.
Les intervenantes du Samsah s’emploient aussi à réguler les rapports de Marion et de sa mère. La grand-‐mère de Kevin (la mère de Marion) est souvent présente. De temps à autres, celle-‐ci fait « son petit tour » et n’hésite pas à faire un peu de ménage. Marion se rend aussi souvent chez sa mère, chez qui elle habite avec Kevin en juin 2010. Le nouvel
appartement qu’elle va prochainement occuper n’est pas en état. Son beau-‐père, aidé par d’autres membres de la famille, y effectue quelques travaux. Les tensions entre Marion et sa mère sont manifestes. Marion juge que sa mère « gueule tout le temps » (24/06/10), « va même jusqu’à dire qu’elle ne reconnaît pas sa fille » (15/06/10). L’incompréhension et l’agressivité sont réciproques : la mère « semble exaspérée » par sa fille (24/06/10), « la tension entre [elles] est palpable » (12/07/10). Le Samsah s’efforce de réduire ces tensions. Les professionnelles donnent des conseils à Marion, elles lui suggèrent d’aider sa mère dans les tâches ménagères, de faire preuve de courtoisie, de respecter les bonnes manières. Lors du déménagement de juin, elles l’incitent à préparer un picnic pour les déménageurs, et à participer au nettoyage de l’ancien logement et à la restauration du nouveau. Les résultats ne sont pas très probants. Le tableau de bord note que Marion ne fournit pas beaucoup d’efforts : elle est « restée assise à fumer [sa]
clope » tandis que sa mère faisait le ménage, elle n’a « rien fait du tout » (28/05/10) pour
aider son beau-‐père, et n’a pas pris le temps d’acheter quoi que ce soit pour offrir à ses frères et cousins venus aider pour le déménagement.
Vis-‐à-‐vis de la grand-‐mère de Kevin, les intervenantes du Samsah agissent tour à tour ou simultanément, selon divers régimes : l’écoute, l’appui et enfin la neutralisation. En effet, de la même façon qu’elle « écoutent » Marion, les professionnelles écoutent sa mère, surtout lorsque celle-‐ci héberge sa fille et que les visites ont lieu dans son logement. C’est alors la grand-‐mère qui sollicite le Samsah, et qui « prend le devant de la