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Conclusion de la première partie

Partie 2. De l’eau potable pour Versailles (1854-1894)

2.2. Le rôle des analyses dans le choix des eaux alimentaires

2.2.1. Les analyses chimiques (1865-1884)

Thibierge : l’eau de la Seine en « quatrième position »

Le 25 octobre 1865, la question de la qualité des eaux de Versailles a fait l’objet du mémoire de Thibierge, présenté à la séance du Conseil d’hygiène de la Seine-et-Oise. En constatant l’insuffisance des eaux fournies à Versailles, fait dont les Versaillais ne s’aperçoivent pas toujours « grâce à l’extrême bon vouloir de l’administration des eaux et à l’infatigable persévérance de M. le maire de Versailles »54

, Thibierge vise à présenter dans son mémoire « quelles eaux sont fournies à Versailles, quelle est l’étendue de la consommation, dans quelle limite les divers services sont assurés » et à rechercher « par quels moyens il serait possible de doter Versailles d’une abondante distribution d’eau, sans priver les communes environnantes de leur participation aux ressources créées par la nouvelle machine de Marly »55.

L’analyse des sels, jugée pertinente à l’époque pour les eaux à boire, et, dans certains cas, de l’« air », a été effectuée sur les eaux de la Seine, l’eau de la fontaine de la Sainte-Vierge, les eaux des étangs (Trappes et Saclay) et des sources (du Chesnay et de Rocquencourt) (Figure 24 et Figure 25). Ces diverses analyses, comparées entre elles, ont montré qu’en 1865, « dans l’ordre de leur plus grande pureté, les eaux consommées à Versailles devraient être ainsi classées :

1. Eaux de l’étang de Trappes 2. Eaux de l’étang de Saclay 3. Eaux de sources

54 AD 78 7M 2, la séance du Conseil d’hygiène de la Seine-et-Oise du 25 octobre 1865.

4. Eaux de Seine

5. Eaux de la fontaine de la Sainte-Vierge »56.

Figure 24 : Analyse de l’eau de la Seine pour la séance du Conseil d’hygiène de la Seine-et-Oise du 25 octobre 1865 (AD 78 7M 2).

Figure 25 : Analyse de l’eau des étangs pour la séance du Conseil d’hygiène de la Seine-et-Oise du 25 octobre 1865 (AD 78 7M 2).

Le docteur Thibierge conclut des analyses que « ces différences, quoique notables, n’entraînent nullement le devoir de rejeter l’une ou l’autre de ces eaux », que « dans une

grande partie de l’année, les eaux fournies à Versailles sont de bonne qualité, leur aération est parfaite et que celles surtout qui ont traversé les filtres au charbon […] sont irréprochables, lorsque le renouvellement du charbon est assez fréquent. Il est bien à désirer que des filtres au charbon soient appliqués à tous les réservoirs de la ville, alors la saveur qui est quelquefois reprochée aux eaux privées de ce puissant moyen d’épuration disparaîtra complètement »57

. Retenons de ces conclusions que l’eau de la Seine, quoiqu’en quatrième position après celle des étangs et des sources, est considérée en 1865, quatre ans après l’achèvement de la construction du collecteur d’Asnières, comme potable sur le critère des sels et de l’aération, mais aussi compte tenu du filtrage au charbon et de la saveur.

Pour compléter l’insuffisance de distribution, Thibierge propose trois ressources : 1. « l’eau des couches supérieures » qui pourrait être amenée par un puits artésien » ; 2. l’étang de Clagny, desséché en 1736 suite à la dégradation de son état par les eaux des égouts et des fosses d’aisance, mais dont il juge possible le réaménagement ; 3. la pièce d’eau des Suisses. Si les deux premiers réservoirs n’étaient pas tout de suite disponibles, la pièce d’eau des Suisses, située au sud du château dans le parc (voir plus le loin Partie 3, Chapitre 3.1.2), se prêtait bien aux puisements.

Thibierge a rencontré deux objections à l’utilisation des eaux de la pièce des Suisses : 1. elles étaient souvent confondues avec la pièce dite puante et 2. il semblerait qu’elles recevaient les eaux des égouts du quartier de Saint-Louis. Comme le montre l’auteur du mémoire, la pièce puante « était placée dans la partie de la plaine à l’Ouest de la pièce des Suisses », infectée par les matières provenant des fosses d’aisances et exhalant « une si mauvaise odeur, qu’on l’avait stigmatisée du nom de Pièce puante », elle avait été alors « desséchée et mise en culture en 1730 »58. En ce qui concerne l’égout, il existait avant la création de la pièce d’eau des Suisses et se déversait dans le ru de Gally. L’analyse des eaux de la pièce des Suisses, effectuée à plusieurs reprises, confirmait leur qualité potable. Placées après celles de la Seine dans la classification de Thibierge, elles pouvaient au moins être destinées « à l’arrosement des rues, des avenues et des places, et au lavage des ruisseaux. Or, une eau limpide et abondante se trouve dans la pièce d’eau des Suisses, il suffit de venir la puiser »59. Il ne semble pas que ces propositions de Thibierge aient été suivies d’effet.

57 AD 78 7M 2, la séance du Conseil d’hygiène de la Seine-et-Oise du 25 octobre 1865.

58 AD 78 7M 2, la séance du Conseil d’hygiène de la Seine-et-Oise du 25 octobre 1865.

Les personnes qui se sont par la suite investies dans la question de la qualité des eaux distribuées à Versailles et dans la région et dont les rapports, cohérents entre eux ont été identifiés dans les archives sont : Edouard Eugène Rabot, vice-président du Conseil d’hygiène départemental, Boutmy, chimiste expert auprès du tribunal civil de la Seine, Auguste Gérardin, inspecteur des établissements insalubres à Paris, et Maximilien Gavin, inspecteur principal du service des eaux de Versailles. Certaines de ces personnes ont déjà étudié la Seine à Paris et dans sa proche banlieue, comme nous l’avons montré dans la première partie.

La crainte de la mauvaise qualité de l’eau remplace celle de sa pénurie

Edouard Eugène Rabot, membre du Conseil d’hygiène et pharmacien, possède un laboratoire d’essais et analyses chimiques. Sur ses rapports on lit : « E. Rabot, docteur es-sciences, pharmacien de 1re classe, pharmacien du Sénat et de la chambre des députés, 33, rue de la Paroisse, Versailles »60. Début 1873, suite à l’épidémie de diarrhée à Versailles, il est sollicité par la préfecture de Seine-et-Oise et la mairie pour en rechercher les causes. Cette année précède deux années marquées par la mortalité piscicole importante à Marly et par la constitution, le 22 août 1874, par le ministère des Travaux publics d’une commission, présidée par Boudet et chargée d’évaluer le niveau de la pollution de la Seine. Ses conclusions, rendues en 1875, sont accablantes pour la ville de Paris ; les rejets de ses collecteurs d’eaux usées sont considérés comme la principale source de dégradation du fleuve (Bellanger, 2010, p. 324).

Dans son premier rapport du 2 mars 1873, Rabot reconnaît l’existence de l’altération de la Seine, mais hésite à y voir la cause unique des épidémies à Versailles, d’autant plus que plusieurs sources alimentent la ville et que depuis deux mois la machine de Marly ne fonctionnait pas à cause des crues : Versailles était alors en grande partie alimentée par les étangs61. Il attribue l’infection de la Seine aux dépôts provoqués par les égouts de Paris et propose à l’administration versaillaise d’intervenir auprès du conseil municipal de Paris pour qu’il arrête de « considérer la Seine exclusivement comme un collecteur et un moyen de transport », de s’unir avec les villes de Saint-Denis, Argenteuil, Bezons pour plus de poids, et

60 AM 78 N3 1710.

de reporter les prises d’eau en amont de Paris selon l’avis du Comité consultatif d’hygiène publique62.

Il conseille l’épandage agricole des eaux d’égout de Paris dont il a étudié l’application en Angleterre, en le préconisant tout autant pour les eaux usées de l’agglomération versaillaise. Pour le cas de Paris, il analyse les données moyennes de deux ans du jaugeage du débit des collecteurs : « pour Clichy, débit de 2,50 m3/s, soit 220 000 m3/j ; pour Saint-Denis : débit de 0,50 m3/s, soit 40 000 m3/j ; total : 3 m3/s, soit 260 000 m3/j. C’est presqu’un vingtième du débit de la Seine au niveau de l’étiage. Ce vingtième de la Seine renferme des sels ammoniacaux, des sulfures, des matières organiques en voie de décomposition, des éléments nuisibles à l’économie animale, en proportion telle que 130 à 140 m3

d’eau d’égout sont à peu près l’équivalent de 1 000 kilos de fumier !!! Les cultures de Gennevilliers absorbent chaque jour 6 000 m3 d’eau d’égout ; restent 254 000 m3 jetés en Seine où ils produisent chaque année 120 000 tonnes de dépôt solide […] où ils deviennent à leur tour une source d’infection permanente car ils sont en formation continuelle. A 500 mètres en aval des collecteurs, ces dépôts contiennent en moyenne 12 à 13 pour cent de matière organique »63.

Le critère de qualité choisi par Rabot pour juger de l’eau est l’ammoniaque. La référence est la quantité d’ammoniaque dans l’eau de Seine à Port-Marly dans les réservoirs de la machine en temps ordinaire : de 0,07 m/L à 0,25 mg/L, suivant les saisons et les circonstances atmosphériques64. Les analyses ont été faites sur le parcours jusqu’à Versailles depuis deux mois. Le mode opératoire n’est pas défini dans le rapport, mais il est question de trois prélèvements à chaque passage pour calculer la moyenne, le nombre des passages étant de quatre. Les moyennes des analyses ont donné :

1. 3,40 mg/L 2. 5,12 mg/L 3. 3,80 mg/L 4. 2,17 mg/L.

L’indicateur de dégradation de la qualité de l’eau est l’accroissement de la quantité d’ammoniaque, « une preuve incontestable de l’altération que la constitution primitive de

62 AM 78 N3 1709, Versailles, 2 mars 1873.

63 AM 78 N3 1709, Versailles, 2 mars 1873.

l’eau subit »65

. Les mêmes réflexions sont propres à Boudet qui analyse l’aptitude de l’eau de la Seine à être potable dans les années 1860 (cf. Chapitre 1.1.1).

Rabot procède de la même manière à l’analyse des eaux des étangs dans un rapport rendu en avril 187366. Pour lui, ces eaux sont des eaux potables de bonne qualité « quoique salies par la présence de traces d’argile en suspension »67

. Il se réfère au mémoire de Thibierge du Conseil d’hygiène du département qui a « jadis » classé premières les eaux des étangs dans la liste des eaux potables de Versailles. Il énumère les causes de la suppression en partie de ces eaux pour Versailles :

1. Le développement de l’agriculture qui a diminué le rendement des surfaces versantes ;

2. La quantité d’eau déversée dans la Bièvre ;

3. La construction de la machine de Marly, assez puissante pour satisfaire à tous les besoins ;

4. Des sécheresses.

Les résultats d’analyse des eaux des étangs ont présenté des quantités anormalement élevées d’ammoniaque : 0,90 mg/L le 1er

mars, et 0,68 mg/L, le 10 mars. Les causes « passagères », selon Rabot, de cette augmentation sont les pluies rapides : en temps normal, les eaux filtrent lentement à travers les terres et coulent « limpides » dans les rigoles, mais en 1872 les rigoles étaient desséchées quand les pluies continuelles les ont remplies brusquement : « Ces masses d’eau, après avoir saturé les terrains en culture, les ont lavés et ont entraîné une quantité énorme de matières organiques dont il est facile d’expliquer l’origine : la culture aux environs de Versailles emploie les engrais en abondance et surtout les gadoues, les engrais animalisés, les guanos naturels ou artificiels, les vidanges … c’est-à-dire les engrais qui contiennent le plus de matières organiques en voie de décomposition »68. La circulation rapide de l’eau dans les rigoles maintient en suspension une partie des matières organiques qui arrivent dans les réservoirs d’alimentation de Versailles ; on y trouve aussi, mais en moindre proportion et après la filtration, les matières en solution exprimées en ammoniaque (0.45 mg/L à la date du 10 mars) et des matières organiques dissoutes non

65 AM 78 N3 1709, Versailles, 2 mars 1873.

66 Conformément à la demande du maire de Versailles du 11 mars 1873.

67 AM 78 N3 1709, Versailles, mars 1873.

modifiées qui forment sur les parois des récipients des « dépôts glaireux comportant des algues microscopiques dont les rameaux entrelacés sont peuplés de bactéries, etc. »69.

La réponse apportée par Rabot suite à son étude des eaux est de filtrer l’eau dans la distribution publique et par les ménages, de mettre en place un filtre à la butte de Picardie, avant les réservoirs d’alimentation, et après le passage dans les conduites de distribution : « l’administration versaillaise, agissant en bonne mère de famille, devrait faire établir quelques fontaines publiques donnant de l’eau filtrée. Trois ou quatre de ces fontaines filtrantes suffiraient pour Versailles et elles seraient le complément nécessaire des concessions à domicile dont une grande partie de la population sera toujours privée »70. Il n’y a pas eu de contre-expertise de la part du service des eaux de Versailles. Le rapport de Rabot pour le compte du Conseil d’hygiène demeure le seul à être pris en compte.

Le directeur du service des eaux, Dufrayer, oppose aux articles des journaux relatifs à l’insalubrité des eaux de Versailles sa vision de la qualité : « point malsaines », « saines », « belle », « parfaite », pour lui c’est d’abord la quantité d’eau qui compte, ensuite, son goût et son aspect, enfin, il avance même la sensibilité différente de différents groupes sociaux à la qualité de l’eau : les quartiers plus riches de Versailles sont plus sensibles aux changements dans l’eau distribuée. Il conteste les analyses parce que l’endroit de prise des échantillons n’est pas bien choisi. Le 12 mars 1873 Dufrayer, écrit au maire de Versailles :

« Les eaux distribuées en ce moment à Versailles proviennent presque toutes des étangs : à mon avis elles ne sont point malsaines, elles sont troubles à cause des grandes pluies qui ne cessent de tomber. Celles de la Seine sont peut-être moins pures et encore moins claires […]. Quant à la qualité des eaux, je ne les ai point analysées : mais M. Rabot avec qui j’ai eu une conférence à ce sujet vous renseignera complètement sur les matières qu’elles renferment. En résumé, les eaux sont saines et n’ont point mauvais goût : elles sont seulement louches, inconvénient auquel il est facile d’obvier en filtrant une ou deux fois d’abord dans un filtre en cailloux et charbon puis, ensuite dans une fontaine filtrante ordinaire. Je vous adresse un échantillon de l’eau ainsi obtenu chez moi. L’eau est la même dans toute la ville et si le

69 AM 78 N3 1709, Versailles, mars 1873.

quartier Saint-Louis se plaint davantage, c’est sans doute que la population en est plus exigeante, peut-être plus impressionnable que celle des autres quartiers »71.

Deux mois plus tard, le 2 mai 1873, Dufrayer informe de nouveau le maire :

« Depuis la création de Versailles jamais la ville n’a été plus largement alimentée d’eau potable : le moment est donc mal choisi pour attaquer l’administration à ce sujet. En effet, nos étangs ont été remplis cet hiver par des eaux pluviales qui, aujourd’hui après décantation, donnent de l’eau très belle. […] L’eau de la Seine, renouvelée pendant quatre mois par des inondations successives, est aujourd’hui parfaite. […] Quant aux résultats des analyses faites sur l’eau de Seine prise soit au Port-Marly où la rivière fait remous, soit près d’Asnières après et pendant des sècheresses prolongées, ils ne peuvent pas être tout-à-fait concluants : c’est à Picardie après les filtres, c’est-à-dire au moment où elle est livrée à la consommation qu’il faut la prendre pour de nouvelles analyses qui certainement donneraient des résultats différents de ceux précédemment obtenus. Jusqu’à ce jour la grande crainte de Versailles était de manquer d’eau : aujourd’hui que l’on est forcé d’abandonner cette thèse et s’attaquer à la qualité qui est cependant supérieure à celle de Paris, surtout cette année »72

. Quelques fontaines avec des filtres ont été établies dans la ville mais l’eau de Seine et des étangs a continué d’approvisionner les Versaillais. Néanmoins, la rupture survenue dans la perception sociale de la qualité des eaux distribuées entre 1873 et 1874 est bien à mettre en relief, il faudra, on le verra, un bon coup publicitaire par la suite pour que les visiteurs et les riches bourgeois n’abandonnent pas l’ex-cité royale.

En 1879, Rabot a été à nouveau sollicité par le maire de Versailles pour analyser les eaux des puits sénoniens de Marly afin de prendre une décision quant à leur usage pour l’approvisionnement en eau. Trois échantillons lui ont été communiqués. Cette fois, les analyses ne comprennent pas le dosage d’ammoniaque.

Tableau 35 : Analyses des eaux des trois puits sénoniens par Rabot, 23 novembre 1879 (AM 78 N3 1710).

Composition Numéro du puits

1 2 3

Degré oxymétrique 3,5° (eau prise à la 3,2° (eau prise au 5

71 AM 78 N3 1709, lettre du Dufrayer au maire de Versailles, le 12 mars 1873.

surface après son contact avec l’air)

contact de l’air)

A l’ébullition Légèrement trouble Léger trouble Trouble plus marqué à l’ébullition

Titre

hydrotimétrique 34° 36° 64°

Après l’ébullition 24° 26° 48

Résidu sec par

évaporation 0,48 g/L 0,520 g/L 1,11 g/L

Résidu sec après

calcination 0,350 g/L 0,410 g/L 1,03 g/L

Composition du résidu (grammes)

Chaux 0,070

A peu près la même que dans le 1 : il y a

une légère augmentation dans les chiffres mais le

rapport reste sensiblement le même surtout au point de vue des

sulfates

La proportion de sulfates est plus

considérable relativement aux autres sels et rend cette eau impropre à

certains usages domestique : elle doit

être laissée de côté Sulfate de chaux 0,185 Magnésie 0,012 Sulfate de magnésie 0,026 Sulfate de soude 0,020 Chlorures de calcium et de magnésium 0,022 Silice, alumine, oxyde de fer 0,015 Matières organiques 0,000 Poids du résidu calciné 0,350

L’analyse est beaucoup plus développée par rapport à celle de 1873, mais la problématique n’est plus la même. Il ne s’agit plus d’évaluer la pollution de l’eau, mais d’estimer sa potabilité. Les critères évoqués montrent l’accumulation des connaissances et leur application stricte : à l’analyse du titre hydrotimétrique, critère ancien, développé par Boutron et Boudet en 1854, s’ajoute le titre oxymétrique, mis au point par Gérardin. Le critère éliminatoire, pour Rabot, est la présence considérable de sulfate, sans toutefois l’indication des seuils ou de limites admissibles, qui rendrait l’eau impropre à certains usages domestiques.

En 1882, après toutes les spéculations sur la qualité des eaux de la Seine et le début modeste de l’ajout des eaux de nappe sénonienne dans l’alimentation, Rabot entreprend un travail important consistant à regrouper dans un seul ouvrage une partie des analyses extraites des mémoires conservés au Conseil d’hygiène départemental. Le but de l’ouvrage, et donc des analyses qui y sont recueillies, est publicitaire : « faire voir que Versailles possède dès maintenant une quantité considérable d’eau d’alimentation réunissant toutes les qualités réclamées par les hygiénistes […] des eaux salubres dont la composition n’a rien à envier à

celle des eaux qui alimentent la plupart de nos grandes villes » ; car « depuis trop longtemps Versailles est victime d’un préjugé qui lui attribue uniquement l’eau de Seine comme eau d’alimentation. Les réclamations faites par la ville, dans l’intérêt de la salubrité publique contre l’infection de la Seine par les égouts de Paris, au lieu de rassurer la population, n’ont fait qu’aggraver ses craintes, malheureusement exagérées par la presse parisienne. Il en est résulté, parmi les étrangers qui viennent chaque été s’installer à Versailles, une véritable panique dont les effets ont certainement nui aux intérêts d’une certaine partie de la population sédentaire. C’est ce préjugé que nous voulons combattre » (Rabot, 1882, pp. 3-4).

Il indique quatre origines de l’eau à Versailles :

1. Sources venant de la forêt de Marly, de Rocquencourt, de Bailly, de Chèvreloup, du Chesnay (anciens puits de la Reine et Fonds-Maréchaux) et alimentant à Versailles huit fontaines publiques en 188273,

2. Etangs,

3. Nappe sénonienne sous la presqu’île de Croissy et du Vésinet,

4. Seine dont les eaux peuvent être réservées pour le parc et les fontaines et pour les services municipaux et industriels.

Il mentionne en outre la présence dans la ville et dans ses environs de sources qui ne sont pas utilisées, quoique leur composition soit de bonne qualité (Rabot, 1882, p. 5).

Les analyses réunies dans l’ouvrage vont des années 1860, pour les plus anciennes, à