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Une analyse des cadres théoriques mobilisés analysant le comportement physique des consommateurs en point de vente consommateurs en point de vente

PRODUITS DE TERROIR EN MAGASIN

SECTION 1.- LA GRANDE DISTRIBUTION

1. L’évolution du merchandising

2.3 Une analyse des cadres théoriques mobilisés analysant le comportement physique des consommateurs en point de vente consommateurs en point de vente

Dans le but de comprendre le lien entre l’implantation des produits en magasin et le comportement du consommateur, nous nous sommes appuyés sur la psychologie de l’espace. Le principe de la psychologie de l’espace permet d’aborder le comportement du consommateur en magasin en étudiant comment il se repère dans l’espace et quelles stratégies il mobilise pour trouver les rayons et les produits qu’il recherche (Schmitt, 2009).

Ladwein (2003) offre une synthèse des différentes perceptions de l’espace par un individu. L’espace peut être vu comme un champ de contraintes quand le consommateur est amené à suivre un parcours défini imposé par le distributeur. Aussi, il peut être vu comme un champ d’attractivité quand le consommateur se déplace en fonction des expériences qu’il souhaite vivre ou des zones qu’il juge attractives. Enfin, l’espace peut être considéré comme un labyrinthe composé de quelques dimensions en fonction du nombre d’étages du magasin, dans lequel le consommateur doit fournir des efforts cognitifs pour se repérer et utiliser les différents éléments qui le composent (signalisation, vendeurs, etc.).

Différentes théories sont mobilisées pour étudier le repérage des consommateurs dans l’espace et qui sont la théorie de la carte mentale (Lynch, 1960) et la théorie de wayfinding que nous présentons ci-dessous.

La carte mentale permet d’étudier la représentation spatiale par l’individu de son environnement. Elle est un ensemble de schémas d’actions ou de connaissances procédurales (Kitchin, 1994) qui ressemble à un plan d’architecte (Pocock 1976). En marketing, certains travaux (MacKay, 1975 ; Sommer & Aitkens, 1982). ont appliqué la carte mentale dans le domaine de la distribution (Ladwein, 1995). Il s’agit d’apprécier la capacité des individus à repérer des produits et des catégories de produits au sein de supermarchés. En effet, on demande à une personne de dessiner le plan d’un lieu et d’y placer les différents éléments qui composent ce lieu (Kitchin, 1994). Selon Schmitt (2009), il s’agit d’un outil fiable pour étudier les perceptions spatiales des individus (Blades, 1990). En outre, Sommer et Aitkens (1982) ont utilisé cette théorie pour les points de vente en demandant à des consommateurs de replacer des produits et des rayons sur le plan d’un supermarché ; l’objectif étant d’apprécier la capacité des individus à repérer des produits et des catégories de produits au sein d’un magasin.

Les conclusions de Sommer et Aitkens (1982) indiquent que les individus se souviennent mieux des produits placés en périphérie du magasin, en comparaison avec ceux situés au centre. Ils soulignent l’intérêt des cartes dans la représentation mentale qu’ont les acheteurs de leur environnement commercial, notamment en tant qu’outil pouvant contribuer à l’amélioration de l’organisation de l’espace de vente. De nombreux autres articles (Grossbart & Rommohan 1981 ; Foxal & Hackett 1992 ; Ouvry & Ladwein 2008) ont depuis repris cette théorie (cf. Figure n° 20).

Figure 20- Exemples de cartes mentales d’hypermarché

Une autre théorie utilisée est celle du wayfinding (Passini, 1977). Il s’agit du processus psychologique par lequel les individus passent pour parvenir à une destination précise (Arthur et Passini 1992).

Le wayfinding a été développé par Golledge (1997, 1999), un géographe qui a étudié les processus de repérage dans l’espace, les décisions d’évolution directionnelle et les processus cérébraux liés à la représentation spatiale. D’abord utilisé par les urbanistes, les architectes et les psychologues, le wayfinding s’est étendu à d’autres disciplines, notamment celle du marketing, qui l’a appliqué à des univers nouveaux comme les magasins ou les sites Internet. Les applications de la théorie wayfinding en marketing sont nombreuses. À titre d’exemple, Titus & Everett, (1996) ont exploré le wayfinding des consommateurs en hypermarché selon l’utilisation de leur liste de courses dans le but de développer une structure préliminaire pour améliorer la compréhension des stratégies de navigation utilisées par les consommateurs dans les points de ventes de détail. Chebat, Gélinas-Chebat, & Therrien, (2003) ont étudié le rôle des caractéristiques individuelles (sexe, connaissance du lieu de vente, valeurs utilitaires et hédonistes du shopping) sur le processus de wayfinding. Ils ont démontré que les consommateurs hédonistes aiment parcourir les magasins, ce qui améliore leur plaisir

Carte mentale peu détaillée d’un homme fréquentant rarement l’hypermarché

Source : Ladwein (2003)

Carte mentale détaillée et structurée d’une femme habituée à l’hypermarché

expérientiel des achats. A l'opposé, la lisibilité de l'environnement et l’utilisation des points de repères affectent plus les stratégies des acheteurs utilitaires que celles des acheteurs hédonistes.

Le wayfinding est un processus dynamique composé de trois différents processus (Passini, 1996). Tout d’abord, la perception de l’environnement par l’individu et le traitement de cette information. En effet, et comme développé dans le cadre de la théorie de la carte mentale, l'individu se forme une carte mentale de l'espace qui l'entoure. Puis, vient la prise de décision : l'individu choisit entre plusieurs chemins possibles. Enfin, l’exécution de la décision prise puisque l'individu transforme cette décision en actions de déplacement.

Dans le cadre d’une comparaison entre les deux théories, cartes mentales et wayfinding, (Foxall & Hackett, 1992) ont mesuré auprès des mêmes individus l'intensité de la perception de l’espace. Selon la théorie mobilisée, les résultats sont totalement différents, suggérant que le wayfinding et les cartes mentales ne font pas appel au même processus mental. En effet, les cartes mentales représentent une vision statique d’un environnement alors que le wayfinding, en mettant l’accent sur la capacité de l’individu à trouver son chemin en se déplaçant, constitue un concept dynamique.

Par ailleurs, il est important de souligner que les cartes mentales et le wayfinding étudient le comportement spatial de l’individu exclusivement sous l’angle fonctionnel : comment se repérer pour aller à un endroit où l’on va trouver efficacement un produit. Or, il est nécessaire de tenir compte des composantes hédoniques et émotionnelles du comportement (Schmitt, 2009).

Pour dépasser les seules dimensions fonctionnelles du comportement et prendre en compte la dimension émotionnelle, Bonnin (2003) a proposé la théorie de l’appropriation de l’espace, selon laquelle l’individu cherche à avoir une emprise sur l’environnement dans lequel il évolue. Cette emprise comprend une composante émotionnelle importante en lien avec la recherche de rassurance par l’individu. L’utilisation de la notion de l’appropriation pour les points de vente est un élément constitutif de l’accès à l’offre. L’appropriation de l’interface commerciale par l’acheteur est également un moyen pour lui de vivre une expérience de magasinage, non seulement efficace mais aussi source d’émotions et de plaisir. La notion d’appropriation est intéressante car elle est en lien direct avec la création d’expérience, elle permet de créer la

Dans cette lignée de pensée, Ouvry et Ladwein (2008) ouvrent une autre piste de recherche conciliant l’étude du repérage dans l’espace et celle de l’impact de l’atmosphère du magasin sur le consommateur. Il semble en effet très probable que la connaissance d’un lieu soit liée au plaisir et aux sensations que le consommateur peut ressentir dans le magasin car, s’il n’a pas d’efforts cognitifs à fournir dans ce cas pour se repérer, il peut être beaucoup plus réceptif à l’environnement créé par le distributeur (Schmitt, 2009).

Dans cette perspective, Arnould (2005) a mis en place la « Consumer Culture Theory ». L’idée principale d’Arnould postule que les consommateurs s’engagent dans une activité d’achat afin de réaliser leurs projets. La proposition sous-jacente de cette théorie est que le consommateur ne peut pas être considéré comme passif vis-à-vis de l’offre proposée par les entreprises mais, qu’au contraire, il s’en sert pour réaliser ses propres projets, en utilisant ses ressources culturelles. Selon Arnould et Thompson (2005), il existe autant de moyens de contact dans une logique d’accompagnement au service du consommateur. Les enseignes doivent disposer d’une panoplie de moyens pertinents pour répondre aux sollicitations du consommateur qui mobilise et contrôle lui-même sa navigation dans l’univers commercial et informationnel. Cette façon d’aborder le consommateur représente une rupture radicale avec son approche sous l’angle de la transaction commerciale (choix des marques, réaction post-achat, achat…). La CCT avance que les consommateurs consomment des produits pour leur dimension symbolique, pour le plaisir de consommer, dans un cadre temporel donné, sous la forme d’expériences. Il en résulte qu’il n’est pas possible de comprendre le consommateur sans prendre en compte toutes les dimensions de la consommation idéologique, sociale, culturelle, symbolique, expérientielle (Roederer & Filser, 2015). La CCT a été investiguée en particulier sur les travaux de l’expérience de consommation et du marketing expérientiel (Roederer & Filser, 2015).

Les théories de la carte mentale et de wayfinding ont été élaborées sur le repérage des produits par les consommateurs dans l’espace sous l’angle fonctionnel, sans tenir compte de leurs composantes hédoniques et émotionnelles.