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3. La recherche

3.2 L’autoconfrontation croisée

3.2.4 Analyse par théorie ancrée

Vial et Caparros-Menacci (2007) relèvent en citant Kaufmann que « tout entretien est d’une richesse sans fond et d’une complexité infinie, dont il est strictement impensable de pouvoir rendre compte totalement » (p. 248). Il serait donc illusoire de prétendre que cette présente analyse permettra de détecter

Information, geste Le moment de

l’autoconfrontation

Ce qui est dit

Le numéro de l’intervention L’intervenant

tous les détails et toutes les subtilités de ces différents entretiens de mentorat ainsi que de cette autoconfrontation croisée. L’analyse qui va suivre permettra néanmoins d’être un point d’entrée à une réflexion sur ce que font réellement les mentors sur le terrain avec leur mentorés mais également quelles sont les préoccupations ou les doutes de ces derniers.

Le verbatim de l’autoconfrontation croisée a été traité avec la technique d’analyse par théorisation ancrée (Paillé, 1994). Cette technique a comme particularité de se différencier d’une analyse systémique par plusieurs critères : on ne compte pas les mots pour les éléments classés selon une grille et on se base sur un processus itératif en 6 étapes : la codification, la catégorisation, la mise en relation, l’intégration, la modélisation et la théorisation.

Cette approche a l’intérêt de partir non pas d’hypothèses prédéterminées mais des données du terrain pour en faire remonter une théorie. Afin d’éviter de partir directement avec des interprétations ou de manière trop guidée dans l’analyse du verbatim de l’autoconfrontation, ce type d’analyse s’est imposé comme une évidence pour notre travail. Les 6 étapes proposées par Paillé vont ainsi être développées dans les chapitres suivants.

La codification

Comme Paillé l’indique dans sa présentation de la méthode (1994, p. 157), la difficulté de la codification réside dans le fait de trouver le juste milieu entre la prudence empirique et la pétulance interprétative. Il a ainsi été décidé de coder chaque intervention du verbatim d’un seul trait, en cherchant à trouver le juste milieu entre ces deux pôles. Le code a été ajouté en vert en dessus des interventions :

Figure 11 Exemple de codification

Lors du dialogue entre les mentors un code a été donné à chaque changement d’interlocuteur. Lorsqu’un mentor parle de plusieurs éléments différents dans une même intervention, un nouveau code a été donné au milieu de l’intervention.

Figure 12 Exemple de codifications différentes au milieu d'une même intervention

Le document complet avec les codifications se trouve en annexe.

Ce codage a été réalisé en une seule fois, sans revenir ou modifier les codes par la suite pour chercher à rester le plus neutre possible (éviter cette fameuse pétulance interprétative). Aucune contre-codification (une autre codification par quelqu’un d’autre) n’a été réalisée. Ceci aurait pu être une procédure intéressante, néanmoins comme le dit Paillé (1994) « Il faut laisser de côté la logique classique du codage se voulant exhaustif et objectif, logique qui ne correspond nullement au caractère itératif de l’analyse par théorisation ancrée. » (p. 156). Il a ainsi été décidé de rester sur cette première codification faite d’un trait, sans retour en arrière, afin de ne pas générer des décalages ou des surinterprétations.

La catégorisation

L’idée de la catégorisation consiste à regrouper les différentes codifications (Paillé, 1994, p. 164). Ainsi derrière chaque code donné dans l’étape précédente, une catégorie a été ressortie.

Cette étape de catégorisation a été faite en plusieurs parties. Tout d’abord, une liste de catégories a été dressée sur la base du verbatim.

Neuf catégories ont été sorties : Instauration du climat | Validation du travail du mentoré | Adaptation aux besoins du mentoré | Adaptation au profil du mentoré | Accompagnement sans jugement | Aider le mentoré à prendre conscience | Fixer les objectifs avec le mentoré | Accompagner au-delà du professionnel | Etre à l’aise dans le rôle du mentor.

Ensuite les différents codes du verbatim ont été placés dans l’une ou l’autre de ces catégories (uniquement une seule catégorie par intervention préalablement codée, celle qui semble la plus pertinente ou la plus marquée).

Le résultat complet se trouve en annexe.

Dans l’exemple ci-dessous, le code est en vert alors que la catégorie est en jaune.

Figure 13 Exemple de catégorisation

Pour nombre de catégories choisies, d’autres catégories auraient également pu être utilisées. La décision a néanmoins été prise de ne garder que la première catégorie qui semblait la plus marquée dans chaque extrait. Face à la difficulté de catégoriser les éléments, Paillé (1997) précise : « La catégorie constitue un outil analytique très puissant, mais aussi, il faut bien le dire, énigmatique. Un chercheur d'expérience pourra forger facilement des catégories, mais sera parfois incapable d'expliquer comment il s'y est pris ou ce qui différencie sa catégorie d'une autre expression qui ne serait qu'un simple code ou qui n'aurait pas la richesse conceptuelle voulue. » (p. 160).

Il s’agit donc de se faire confiance et de tenter de faire remonter au mieux ce qui est ressenti dans les différentes interventions. C’est également une raison pour laquelle il a été décidé de laisser certaines phrases, souvent des phrases de transition sans autre signification (par exemple « C’est toujours difficile de savoir à quel moment arrêter » dans l’exemple ci-dessous) sans aucune catégorie.

Figure 14 Exemple d'élément sans catégorie

Dans l’exemple ci-dessous, la catégorie « Instauration du climat » a été utilisée. Cette catégorie est une des plus énigmatiques de toutes pour ce travail. La littérature ne l’aborde que peu mais il se passe néanmoins un grand nombre d’actions et de réflexions propres à l’instauration de ce climat et de cette atmosphère propice avant de pouvoir aborder les thèmes principaux d’accompagnement.

Figure 15 Exemple de codage d’instauration du climat

La dernière intervention dans l’extrait ci-dessus montre également une catégorisation que l’on peut considérer comme une catégorisation « par la négation ». Luc remarque que lui et son mentoré ne se regardent pas. Dans ses propos lors de l’autoconfrontation, il relève qu’il n’est pas satisfait de cette constatation et qu’il regrette de ne pas avoir établi un contact visuel avec son mentoré pour acquiescer sur ses propos. Le fait d’acquiescer est ici considéré comme étant de la validation du travail du mentoré. Ainsi dans cet extrait, la catégorie « Validation du travail du mentoré » est retenue parce que Luc regrette justement de ne pas l’avoir fait.

Figure 16 Autres exemples de catégorisation par la négation

L’exemple ci-dessus reprend également ces mêmes catégorisations « par la négation ». Luc trouve son débit de parole trop rapide, il n’est pas satisfait de ce qu’il fait sur l’extrait qu’il observe. Les catégories gardées pour ces extraits sont ainsi celles qui se rapportent à ce que Luc regrette de ne PAS avoir fait lors de son entretien.

La mise en relation

La mise en relation permet de mieux comprendre les liens entre ces catégories. Paillé (1994) indique pour cette étape que « l'opération s'accomplit à la lumière de questions précises : Ce que j'ai ici est-il lié avec ce que j'ai là ? En quoi et comment est-ce lié ? » (p. 167).

Dans un premier temps, nous avons donc noté ces catégories sur une feuille pour envisager des liens entre chacune d’entre elles. Seuls les liens qui sont apparus comme les plus pertinents et naturels ont été gardés.

Les différentes catégories retrouvées dans le verbatim peuvent ainsi être mises en relation selon la logique suivante.

Figure 17 Mise en relation

On constate ainsi que toutes ces catégories sont liées entre elles et qu’aucune catégorie n’est totalement isolée.

Trois catégories (Instauration du climat, Etre à l’aise dans le rôle du mentor, Validation du travail du mentoré) peuvent être considérées comme des entrées dans ce modèle. Pour les autres catégories, un mouvement de boucle apparait et place l’action d’accompagnement dans une logique itérative.

Comme indiqué par Paillé (1994, p. 171), cette étape a permis de clarifier certaines catégories et de les redéfinir de manière plus claires.

L’intégration

Cette étape consiste à remettre ces résultats dans le contexte de la recherche. Selon Paillé (1994) :

« Étrangement, en analyse par théorisation ancrée, il arrive parfois que le plus difficile réside dans la détermination précise de l'objet d'étude. » (p. 172). Le but de cette analyse étant de comprendre ce que font concrètement les mentors sur le terrain, il est intéressant d’analyser la présence ou non des différentes catégories aux différents moments des entretiens.

Figure 18 Nombre de catégories par mentor

Dans un premier temps, il est à mettre en évidence à ce point-là de l’analyse que ces catégorisations ne sont pas présentes en quantité équivalente dans les propos de Luc et dans ceux de Clément durant l’autoconfrontation croisée. Ainsi les catégories « Instauration du climat », « Adaptation au profil du mentoré » et « Adaptation aux besoins du mentoré » sont plus marquées dans le discours de Clément que dans celui de Luc. A contrario les catégories « Accompagner au-delà du professionnel », « Validation du travail du mentoré » et « Fixer les objectifs avec le mentoré » sont plus présentes dans le discours de Luc.

La catégorie « Aider le mentoré à prendre conscience » a une importance majeure identique dans les deux discours.

Le profil du mentor joue ainsi un rôle sur les catégories présentes dans leur discours. Le fait d’avoir dans notre cas deux mentors aux genres différents est ainsi particulièrement intéressant.

Il est ensuite intéressant de remettre en perspective ces activités en fonction des moments clés de l’entretien de mentorat. Pour ceci une première analyse temporelle est parlante :

Tableau 20 Durée des discussions lors de l'autoconfrontation croisée

Durée des discussions Pourcentage

Mise en train 00 :23 :00 24%

Auto-évaluation 00 :17 :00 18%

Conseils 00 :32 :00 34%

Objectifs 00 :23 :00 24%

En comparant ces pourcentages avec la moyenne de ceux obtenus lors de l’analyse des durées des entretiens filmés par les mentors (Tableau 19), nous pouvons relever des différences importantes :

Tableau 21 Comparaison des pourcentages de temps entre les entretiens filmés et l'autoconfrontation

Pourcentage moyen

durant les entretiens Pourcentage durant l’autoconfrontation

Mise en train 26% 24%

Auto-évaluation 44% 18%

Conseils 16% 34%

Objectifs 15% 24%

Ainsi, si la partie « Auto-évaluation » du mentoré prend en moyenne relativement beaucoup de temps lors des entretiens de mentorat, la discussion à ce sujet n’a pas été très longue lors de l’autoconfrontation. A l’inverse, le moment des conseils qui ne prend que peu de temps lors des entretiens de mentorat a été plus longuement débattu et analysé. Manifestement l’auto-évaluation, gourmande en temps lors de l’entretien de mentorat, implique moins de réflexions (et peut-être de doutes) que le moment des conseils pourtant plus rapide lors de l’entretien. Ce moment de conseils est ainsi un instant qui semble soulever le plus grand nombre de questionnements chez les mentors.

L’évolution de la présence des catégories au fur et à mesure des entretiens de mentorat est également à mettre en évidence. En effet, comme expliqué précédemment, l’autoconfrontation a été organisée en

analysant les différents moments typiques d’un entretien de mentorat (la mise en train, l’auto-évaluation, les conseils et les objectifs). En mettant la présence des catégories en relief avec ces moments clé, on constate que certaines catégories sont plus présentes lorsque les mentors se confrontent sur certains moments des entretiens que sur d’autres.

Figure 19 Répartition des catégories par moment de l'entretien d’autoconfrontation

Les quatre catégories « phares » de chaque moment ont été mises en couleur dans la représentation ci-dessus.

Cette mise en perspective des catégories en fonction des moments de l’entretien éclaire sur plusieurs points intéressants. Tout d’abord, il est à relever que certaines catégories ne sont présentes qu’à certains moments spécifiques de l’entretien. Par exemple la catégorie « Etre à l’aise dans le rôle du mentor » intervient presque uniquement lors du moment des conseils. C’est également durant cet instant de conseils que la catégorie « Instauration du climat » prend une place de choix. Nous pouvons également souligner que le moment des conseils est non seulement celui qui prend le plus de temps (comme relevé précédemment) mais également celui pour lequel le plus grand nombre de catégories sont activées. C’est de plus le seul moment durant lequel aucune catégorie n’est laissée de côté. Cet instant, relativement rapide lors des entretiens de mentorat (que 16% de la durée des entretiens de mentorat) peut ainsi bien être considéré comme celui soulevant le plus de questionnements et de doutes pour le mentor.

Doit-on y voir pour les mentors la conséquence d’un doute ou d’un tiraillement déjà largement développé dans les chapitres précédents entre les rôles d’accompagnant et celui momentanément de guide ou d’évaluateur ? Ce tiraillement serait manifestement particulièrement marqué à ce moment stratégique de l’entretien.

Autre élément intéressant à analyser, d’une manière générale, les catégories « Adaptation au profil du mentoré » et « Accompagnement sans jugement » sont présentes de manière continue durant la totalité de l’entretien. Cette préoccupation semble être vécue comme un fils rouge sur la totalité des entretiens de mentorat.

La modélisation

En se basant sur le résultat de l’intégration, on peut imaginer créer le modèle suivant comme étant un modèle des préoccupations des mentors (issu de l’entretien d’autoconfrontation) en fonctions des moments de l’entretien de mentorat qu’ils mènent. Pour ceci, afin de se concentrer sur les préoccupations principales uniquement, seules les quatre catégories les plus représentées de chaque moment (celles mises en couleur dans le graphique précédent) ont été gardées.

Figure 20 Modélisation

Nous obtenons ainsi un modèle en quatre temps :

1. Durant la mise en train : Le mentor instaure un climat propice et valide le travail du mentoré (pour le mettre à l’aise ?) en fonction de son profil et de ses besoins.

2. Durant l’auto-évaluation : Le mentor aide le mentoré (sans jugement) à prendre conscience de ce qui s’est réellement passé. Il valide ses actions selon ses besoins.

3. Durant les conseils : Le mentor donne ses conseils en fonction des besoins du mentoré. Ce moment étant délicat, un climat propice doit être instauré. Il évite d’entrer dans le jugement et cherche à aider le mentoré à prendre conscience de ses actions.

4. Durant les objectifs : Le mentor fixe les objectifs avec le mentoré en revenant sur les éléments dont le mentoré a pris conscience durant l’entretien. A nouveau un climat propice doit être instauré et un soin particulier apporté à éviter de tomber dans le jugement.

Evidemment il faudrait analyser plus d’une seule autoconfrontation croisée, avec plus de mentors différents pour pouvoir en tirer des généralités. Néanmoins, ce modèle permet déjà de mieux situer l’action réelle des mentors sur le terrain.

La théorisation

Afin de faire un lien avec les différents questionnaires envoyés aux enseignants en formation (selon la recherche de Hadchiti, voir chapitre 3.1.1), il est intéressant ici de rapporter ces rôles d’accompagnement sur le modèle obtenu.

Figure 21 Théorisation

Pour chaque catégorie, un seul rôle a été retenu (celui qui semble être le plus en relation avec la catégorie).

La catégorie « Instauration du climat » n’est pas prise en compte, celle-ci ne se rapportant pas directement à un rôle spécifique.

On constate dans la modélisation que les mentors analysés naviguent entre différentes postures d’accompagnement au fil des entretiens qu’ils mènent. La supervision reste relativement présente (spécialement dans le début et la fin des entretiens), mais le counselling et le tutorat sont les rôles les plus en évidence. Les rôles de coaching et d’encadrement professionnel sont eux nettement moins représentés.

3.2.5 Synthèse

L’analyse par théorie ancrée permet de faire remonter bon nombre de concepts. La posture des mentors est à relever. Comme vu lors de nombreux points théoriques en début de ce document, les mentors prêtent une attention particulière à accompagner sans guider et à respecter le mentoré dans sa position actuelle. On est ainsi bien là dans de l’accompagnement comme le définirait par exemple Le Bouëdec (2001) : « Accompagner quelqu’un, c’est être à ses côtés, là où il se trouve. Accompagner ce n’est pas réagir, ni intervenir, c’est s’ajuster » (p. 48). Le nombre de réflexions particulièrement nombreuses et de précautions prises lorsque l’on aborde le moment des conseils aux mentorés le prouvent bien. Nous y retrouvons également bien les trois fonctions essentielles de l’accompagnement que met en avant le même Le Bouëdec (2001, p. 141), à savoir accueillir, participer au dévoilement du sens de ce que vit l’autre et enfin cheminer aux côtés de l’autre pour le confirmer dans le nouveau sens où il s’engage. Les entretiens de mentorat construits de manière assez similaires suivent même ces étapes de manière claire.

Lorsqu’ils abordent le thème du tutorat dans la formation des enseignants, Chaliès & Durand (2000) mettent en garde contre les risques se cachant derrière cette relation et les entretiens : « Cette relation se caractérise aussi par un manque de franchise (Lemma, 1993). Les tuteurs s'efforcent, en effet, de ne pas entrer en conflit avec les enseignants en formation (Brouillet et Deaudelin, 1994 ; Haggerty, 1995) et

recourent ainsi souvent à de véritables stratégies de masquage ou à des « comportements inauthentiques » (injonctions, requêtes, suggestions, avertissements, expressions de désapprobation...) (Brown et Levinson, 1978 ; Pajak et Segfarth, 1983). […] Elles incitent finalement les enseignants en formation à se conformer aux stratégies d'enseignement de leurs tuteurs (Bean, 1997 ; Glickman, 1992 ; Hawkey, 1996 ; Holland, 1989) par l'intermédiaire d'un « effet miroir » au sein duquel ces derniers transposent directement dans leurs propres pratiques, les modèles souvent idéalisés (Calderhead, 1988) que véhiculent leurs tuteurs (Elliott et Calderhead, 1993 ; Johnston, 1994). » (p. 153). Dans le cas des entretiens analysés et discutés lors de l’autoconfrontation croisée, cette volonté de « non-jugement » très marquée par les mentors pourrait mener à ce genre de dérive. Néanmoins les mentors semblent lutter là-contre. Une importance prépondérante est en effet laissée à ce qui est catégorisé comme « Adaptation aux besoins du mentoré ».

La peur de provoquer un « effet-miroir » est d’ailleurs souvent relevée durant l’autoconfrontation par exemple par Luc dans la position 60 du verbatim.

Dans cet extrait, Luc revient sur sa crainte d’imposer sa façon de faire à son mentor :

Luc : […] Là ce n’est pas une séquence qui me satisfait. Parce que là c’est peut-être comme MOI je l’aurais fait mais on est tous différents. Moi je suis à l’aise peut-être dans une manière de procéder et lui c’est peut-être pas du tout sa manière de fonctionner. Il pourrait peut-être très bien atteindre les mêmes objectifs par SA propre voie où il est lui plus à l’aise. C’est pour ça que moi je me rends compte maintenant que là je suis en train de lui imposer ma manière de faire. Alors oui je lui dis « tu pourrais », peut-être bien mais il le ressent comment lui ? Il se dit « c’est comme ça que je dois le faire, il me dit je pourrais mais en tout cas si je faisais comme ça, ça arrangerait en tout cas le mentor ». C’est pour ça que je dis là je ne le laisse pas assez me proposer quelque chose.

La preuve peut-être que nous sommes là en présence de deux mentors eux-mêmes réflexifs formés, attentifs aux risques cachés derrière leur fonction. Il y a fort à parier que Luc, suite au visionnement de cette séquence, cherchera à corriger ce qui ne lui a pas convenu lors des prochains entretiens.

L’analyse de ces extraits met également en lumière la complexité du rôle de mentor ou d’accompagnant.

Wittezaele (2007, p.130) indique un risque certain d’incohérence entre les messages « sois spontané » et

« sois autonome » passés par les accompagnants. Derrière ces messages, l’interlocuteur qui obéirait à l’un, désobéirait à l’autre. On ressent nettement que derrière les prises de positions, les rôles, les relances des mentors se cachent souvent une large palette d’interrogations entre ces deux pôles.

Stahl (2001, p. 109) répertorie ces questionnements omniprésents et ces doutes en quatre catégories :

 Être à l’écoute ou être confrontant ?

 Se centrer sur la tâche, la mission ou sur la personne ?

 Formation, accompagnement ou développement personnel ?

 Qui attend quoi de qui ?

 Qui attend quoi de qui ?

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