• Aucun résultat trouvé

2.3 Dynamique locale par QENS : ´etude ph´enom´eno-logique

2.3.3 Dynamique aux temps courts

2.3.3.2 Analyse mono-lorentzienne

Principe et Ajustements. Nous nous focalisons ici sur les m´ecanismes diffusifs, cor- respondant `a des transferts d’´energies inf´erieurs `a 0, 2 meV . Dans cette approche, les processus plus rapides sont consid´er´es comme des signaux parasites. La mani`ere la plus simple de s’en affranchir est de se concentrer sur le signal quasi-´elastique ´etroit en ajus-

tant les donn´ees sur une fenˆetre restreinte en ´energie (typiquement ± 1 meV `a 5 ˚A et ±

0,5 meV `a 8 ˚A). Dans cette fenˆetre, on consid`erera que les m´ecanismes rapides donnent

une contribution quasi-´elastique suffisamment large pour ˆetre trait´ee sous la forme d’un bruit de fond lin´eaire. La figure 2.14 illustre l’ajustement typique d’un spectre S(Q, ω), et montre l’accord satisfaisant obtenu entre la fonction de diffusion exp´erimentale et la

fonction th´eorique employ´ee8 :

S(Q, ω) = DW [A(Q)L(ω) + P (Q)] ⊗ Re(Q, ω) + Bdf (2.4)

Figure 2.14 – Spectres quasi-´elastiques d’une membrane Aquivion hydrat´ee `a 52% HR `a

Q=0,45 et Q=1 ˚A−1. L’ajustement (rouge) est obtenu avec une composante ´elastique (vert),

une Lorentzienne (bleu) et un bruit de fond plat (pointill´e).

Analyse des donn´ees `a λinc= 8 ˚A. La figure 2.15 repr´esente l’´evolution de la HWHM,

Γ, `a λinc = 8 ˚A et de l’int´egrale du signal quasi-´elastique en fonction de Q pour trois ´etats

d’hydratations. On observe tout d’abord une variation de la largeur Γ qui est typique d’un mouvement de diffusion confin´ee : un plateau autour de HWHM 20-30 µeV est observ´e syst´ematiquement `a petits Q, suivi d’un accroissement important `a partir d’une valeur

seuil Q⋆ (typiquement 0,3 ˚A−1), dans la gamme 20-100 µeV . D’autre part, l’int´egrale

quasi-´elastique, Iqel est correctement ajust´ee par la fonction A(Q) caract´eristique d’une

diffusion confin´ee (nous faisons le choix ici d’utiliser l’EISF du mod`ele Gaussien) :

Iqel = A(Q) × DW = A × (1 − exp(Q2σIqel2 )) × exp(−Q

2 < u2 >

3 ) (2.5)

8. Les donn´ees sont repr´esent´ees en ´echelle semi-log dans tout le document, afin d’exalter les ailes quasi-´elastiques et la qualit´e des ajustements.

o`u 2σIqelest la taille de confinement obtenue par l’ajustement de l’int´egrale quasi-´elastique.

Nous avons donc affaire `a un processus diffusif en situation de fort confinement. On peut le caract´eriser en utilisant la variable hydratation.

Figure 2.15 – Evolution de a) la largeur (HWHM) et b) l’int´egrale du signal quasi-´elastique

de l’Aquivion `a trois hydratations diff´erentes. Toutes les hydratations ne sont pas montr´ees par mesure de clart´e. Les lignes continues repr´esentent l’ajustement de l’int´egrale avec l’´equation 2.5.

L’augmentation de la teneur en eau dans la membrane induit : 1. une augmentation continue de la valeur maximale de la HWHM,

2. un d´eplacement de Q⋆ vers les petits Q,

3. une augmentation continue de l’intensit´e quasi-´elastique, 4. un d´eplacement du maximum de A(Q) vers les grands Q.

Ce faisceau d’observations traduit (1) l’augmentation du nombre de protons mobiles dans la fenˆetre d’observation, (2) l’acc´el´eration des mouvements mol´eculaires associ´es, et (3) l’augmentation de la taille caract´eristique du domaine de confinement. Pour extraire des param`etres quantitatifs, Γ peut alors ˆetre ajust´ee, en dehors du plateau, par un mod`ele de diffusion par sauts de Hall et Ross [144] (H&R). On obtient ainsi le coefficient de

diffusion translationnelle not´e DH&R et le temps de r´eorientation ´el´ementaire associ´e,

τ (voir figure 2.16). La taille de confinement 2σ est calcul´ee `a partir de la valeur du

plateau de confinement, et de celle du coefficient de diffusion (Γ = DH&R/σ2plateau). Les

variations de ces trois param`etres confirment une mobilit´e protonique accrue quand on hydrate la membrane, et les valeurs absolues sont raisonnables pour de l’eau confin´ee dans une matrice. Notamment, `a forte hydratation le coefficient de diffusion atteint une

valeur DH&R = 1, 8 × 10−5cm2/s, soit quasiment la valeur de l’eau liquide (Dbulk =

2, 3 × 10−5cm2/s). Le temps caract´eristique de la mobilit´e vaut alors 2 ps, contre 1,25 ps

dans l’eau liquide. Ce temps ´el´ementaire est dix fois plus grand `a faible teneur en eau, quand les coefficients de diffusion sont r´eduits d’un facteur deux. La taille de confinement

Figure2.16 – Evolution du coefficient de diffusion (a) et du temps de saut ´el´ementaire (b) en fonction de λ. Comparaison des tailles de confinement (c) obtenues par l’ajustement de l’int´egrale quasi-´elastique et la position du plateau de confinement.

Figure 2.17 – Evolution de la largeur (HWHM)

du signal quasi-´elastique mesur´e par temps de vol sur une membrane Aquivion hydrat´ee `a 52% HR, aux deux conditions de r´esolution λinc= 8 et 5 ˚A.

Analyse des donn´ees `a λinc = 5 ˚A.

L’analyse des donn´ees `a 8 ˚A permet

de capturer les tendances g´en´erales de la dynamique rapide du proton. Tou- tefois, nous avons observ´e que la lar- geur du signal quasi-´elastique Γ d´epend de la r´esolution exp´erimentale (figure

2.17). L’analyse des donn´ees `a 5 ˚A est

satisfaisante du point de vue de la qualit´e des ajustements, mais on ob- tient des HWHM plus ´elev´ees qu’avec

λinc = 8 ˚A. L’´ecart est typiquement

d’un facteur 2 sur toute la gamme en Q. Cette observation est la preuve qu’il n’existe pas un seul temps de relaxation dans le mat´eriau ´etudi´e mais plusieurs modes dynamiques, voire une distribu- tion continue de temps de relaxation.

L’analyse ph´enom´enologique `a une Lorentzienne est donc tr`es limit´ee9, comme c’est le

cas dans un certain nombre de syst`emes complexes ( [153, 155, 156, 175–179]).

Il est clair que, mˆeme si certains processus peuvent ˆetre cach´es dans la fonction de r´esolution (trop lents) et d’autres sortir de la fenˆetre de mesure (trop rapides), l’analyse quantitative de la fonction de diffusion S(Q,ω) via un mod`ele de diffusion donn´e doit ˆetre coh´erente pour un mˆeme ´echantillon quelles que soient les conditions exp´erimentales choisies. Ce mod`ele doit donc d´ecrire correctement chacun des mouvements possibles d’un

9. L’ajustement mono-lorentzien des donn´ees obtenues `a une r´esolution donn´ee ne permet donc pas d’identifier finement les m´ecanismes de diffusion dans l’Aquivion ; ceci dit, cette approche restera utile pour comparer qualitativement diff´erents ´echantillons entre eux, comme on le verra dans le chapitre 3.

proton et leurs couplages ´eventuels.

Les ´ecarts obtenus dans le traitement de donn´ees acquises `a diff´erents λinc d´ependent

principalement du choix de la fenˆetre d’ajustement, et du bruit de fond employ´e. Jusqu’ici, et pour commencer le plus simplement possible, le bruit de fond consid´er´e est un niveau continu lin´eaire. Cependant, les ajustements ne sont pas parfaits, surtout `a grands Q (figure 2.14) : il manque une composante large, ce qui est d’autant plus flagrant dans les

mesures `a 5 ˚A o`u la r´esolution et la fenˆetre en ´energie utilis´ees sont plus larges qu’`a 8 ˚A.

Les mouvements rapides non diffusifs ne peuvent donc pas ˆetre approxim´es correctement par un niveau continu lin´eaire, ils doivent ˆetre inclus sous la forme d’une Lorentzienne additionnelle. Cette composante sera suffisamment large pour apparaˆıtre comme un bruit

de fond lin´eaire dans les ajustements `a 8 ˚A, mais pas `a 5 ˚A.