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Chapitre 5 Expérimentation 2 : L’évaluation de la planification de l’action

5.6 Méthodologie de l’essai clinique Planification et Réalité Virtuelle

5.6.4 Analyse des données

L’analyse des données a été conduite sur trois catégories de variables : la connaissance sémantique liée à la tâche, la vitesse de planification et l’organisation spatio-temporelle. 5.6.4.1. Connaissance sémantique liée à la tâche

Cette analyse, qui étudie la compréhension de la tâche et mesure son taux de réalisation ainsi que le taux d’erreurs, est réalisée au travers des variables suivantes :

- Nombre de bonnes actions (BA) : ces bonnes actions concernent la prise des produits dans le supermarché, puis le dépôt et la reprise des produits sur le tapis roulant et enfin le paiement. Pour qu’une séance se déroule de façon optimale, le participant doit réaliser 12 bonnes actions.

- Nombre de mauvaises actions (MA) : ces mauvaises actions concernent la prise de produits erronés, ou la prise multiple de produits de la liste, mais aussi toutes les erreurs lors du passage aux caisses et lors du paiement.

- Taux de réalisation : douze bonnes actions sont nécessaires pour réaliser la tâche. Le taux de réalisation est donc le pourcentage de bonnes actions réalisées (BA*100/12). - Taux d’erreur : il s’agit du pourcentage de mauvaises actions parmi toutes les actions

réalisées lors de la séance (MA*100/(BA+MA)).

La connaissance sémantique liée à la tâche interfère avec la capacité à définir le but. 5.6.4.2. Vitesse de traitement de l’information

Cet élément est fondamental dans les processus de planification et peut jouer un rôle important dans les performances (Salthouse, 1996).

Son analyse est réalisée grâce à l’observation des variables suivantes :

- Temps de mise en mouvement : le temps qui s’écoule entre l’apparition de la position de départ dans le supermarché et le moment où le sujet commence à se déplacer. C’est en fait la durée du premier arrêt.

- Temps de la première action : le temps qui s’écoule depuis le démarrage jusqu’au premier achat

- Temps mis pour payer : le temps qui s’écoule entre l’apparition du montant à payer et le clic sur le porte monnaie

- Vitesse de réalisation de la tâche : le rapport entre la distance parcourue et la durée de la séance (m/min)

Le temps de mise en mouvement peut être assimilé à « l’initial thinking » i.e. le temps initial de planification. Cet élément est également un reflet de la capacité à formuler un but.

123 5.6.4.3. Organisation spatio-temporelle

Cette analyse étudie d’une part certaines performances enregistrées lors de la séance et d’autre part des variables calculées à partir de ces performances et décrivant la trajectoire parcourue (Beaufrère and Prêcheur, 2005). Les variables mesurées lors du déroulement de la séance sont : la distance parcourue, la durée de la séance et le nombre d’arrêts

Les variables calculées sont obtenues à partir des variables mesurées de la façon suivante :

- Score de classement catégoriel :

La tâche consiste à réaliser une liste de courses dont les articles peuvent être regroupés en 4 catégories : Fruits et légumes ; Vêtements ; Pains et dérivés ; Produits d’entretien. Ces catégories revêtent un caractère temporel (on achète les pommes et les artichauts successivement, l’ordre n’ayant pas d’importance) mais aussi spatial (les artichauts et les pommes sont situés dans le même secteur géographique du supermarché). Un score de classement catégoriel peut donc être calculé afin de rendre compte de la performance dans le séquençage de la tâche, mais aussi de la dispersion des catégories dans la liste.

Notre objectif n’est pas de mesurer la pertinence d’avoir commencé par telle catégorie plutôt que par telle autre mais seulement le fait de faire tous les achats d’une même catégorie ensemble. De même, cette fonction ne mesure pas l’opportunité de commencer par tel produit d’une catégorie plutôt que par tel autre. L’ordre n’est donc pas un critère pour cette fonction, qui pour l’instant ne s’intéresse qu’à la séquence des achats sans tenir compte des intrusions. Le score de classement catégoriel est obtenu en mesurant l’écart moyen entre deux produits d’une même catégorie. Notre liste de courses bien exécutée mène à un score minimal de 1.5, tandis que exécutée dans sa totalité mais mal organisée elle peut conduire à un score maximal de 6. Les scores supérieurs à 6 sont signes d’un oubli, ou de passages aux caisses inopinés.

- Score de maintien de plan :

L’angularité de la courbe (trajectoire), évaluée grâce au cumul des angles et à l’angle moyen, est en rapport avec le maintien des objectifs, une angularité élevée évoquant une difficulté dans le maintien. Ce score cherche à discriminer les trajectoires « zig-zagantes » des trajectoires plus « lisses ».

Rappelons que les positions du participant ont été enregistrées toutes les trois secondes, ce qui correspond à une vitesse de déplacement d’environ 1m par seconde. Nous avons choisi d’éliminer les micro déplacements inférieurs à 20 cm, que nous considérons comme du bruit et qui peuvent être causés par une manipulation non adéquate de la souris. Ainsi nous disposons d’un sous-ensemble des positions enregistrées.

Le cumul des angles est obtenu en mesurant, à chaque position du sous-ensemble, l’angle dont le sujet a tourné, puis en sommant les valeurs absolues de ces angles.

L’angle moyen est obtenu en moyennant le cumul des angles par le nombre d’angles mesurés. - Score d’errance :

La recherche des intersections avec le trajet antérieur a pour but de déterminer si le patient revient souvent sur ses pas pour effectuer deux achats successifs. Ces intersections dans la trajectoire sont le résultat d’hésitations autour d’une zone, d’errances sur toute la superficie du supermarché. Un tracé idéal ne comporte pas d’intersections. Ce score est obtenu, après élimination des micro déplacements, en calculant le nombre d’intersections dans les sous parcours entre achats successifs. Le score idéal est donc nul.

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5.7 Résultats

Les résultats des tests neuropsychologiques concernant les patients MP sont présentés globalement dans le Tableau 9 et le Tableau 10, et de façon détaillée dans l’Annexe 7. Les performances des treize patients MP (5 femmes, 8 hommes ; âge : 71.1 ± 4.7) et des onze sujets C (8 femmes, 3 hommes ; âge : 67.2 ± 5.6) réalisées dans le supermarché sont résumées dans le Tableau 11 : moyennes et écarts-types, étendue des valeurs. Elles sont regroupées selon les catégories que nous avons définies pour l’analyse de données. Toutes les mesures ont été analysées avec le test non paramétrique de Mann-Whitney. Les données détaillées des participants relatives à leur performance dans le supermarché peuvent être consultées en Annexe 8 et 9. Les résultats concernant l’organisation temporelle de la tâche sont détaillés dans les Annexes 10 et 11. L’ensemble des trajectoires des patients et des sujets contrôle peut être consulté en Annexe 12 et 13.

Alors que nos deux groupes ont en moyenne un niveau d’éducation semblable (2.1 ± 0.8), le score moyen de la Mattis des patients MP est significativement plus bas que celui des sujets C (MP : 132.7 ± 6.5 ; C : 139.5 ± 4.0), révélant en moyenne une atteinte cognitive légère. Parmi les autres tests cognitifs, seuls le BP3 et la fluence « Animaux » révèlent des différences

significatives.

Les patients MP ont expérimenté le SV plus longtemps que les sujets C (MP : 11.2 ± 5.3 ; C : 6.9 ± 1.7 ; p=0.018) et pourtant, les performances des patients MP, enregistrées dans le SV, sont dans leur ensemble significativement inférieures à celles des sujets C, comme nous le verrons dans l’analyse des données ci-dessous.

5.7.1 Connaissance sémantique liée à la tâche

Les patients MP ne diffèrent pas des sujets C dans le nombre de bonnes actions réalisées mais ont toutefois exécuté un nombre de mauvaises actions supérieur, sans que cette différence atteigne un seuil significatif (Tableau 11).

Le taux de réalisation de la tâche est donc quasiment optimal pour tous (MP : 98.7% ; C : 100%), tandis que le taux d’erreur est légèrement plus élevé chez les patients (MP : 12.1 ± 12.8 ; C : 8.4 ± 7.5), avec une dispersion élevée de ce taux d’erreur.

La connaissance sémantique liée à la tâche ne diffère donc pas de façon significative entre patients MP et sujets C, mais on suppose qu’elle est altérée chez certains patients après l’analyse individuelle de certains patients par rapport aux contrôles (Annexe 8 et Annexe 9). 5.7.2 Vitesse de traitement de l’information

Chez les patients MP, le temps mis pour effectuer le premier achat et le temps mis pour payer sont significativement plus élevés, tandis que leur vitesse de réalisation de la tâche est significativement plus basse (Tableau 11).

A l’apparition du caddie, au début de la séance d’évaluation, les patients MP sont plus lents à se mettre en mouvement que les sujets C, sans que cette différence soit significative.

125 5.7.3 Organisation spatio-temporelle

Les patients MP restent plus longtemps dans le supermarché que les sujets C et y parcourent une distance plus longue, marquée par de nombreux arrêts, toutes ces différences étant significatives (Tableau 11). Leurs trajectoires sont caractérisées par de nombreuses hésitations pour atteindre les objectifs, des mouvements circulaires autour des mêmes étagères, un tracé anguleux (Figure 54). Notre objectif est de quantifier toutes ces informations qui ne sont pour l’instant que visuelles.

Le score de classement catégoriel est plus élevé chez les patients MP que chez les sujets C notamment en raison des performances de deux patients qui ont fait un oubli et d’un autre qui est passé plusieurs fois aux caisses.

Le score de maintien de plan, exprimé par le cumul des angles sur la trajectoire, est significativement plus élevé chez les patients. Il révèle de façon quantitative cette angularité de leurs trajectoires, que nous constatons visuellement.

Le score d’errance, exprimé par le nombre d’intersections de la trajectoire, est significativement plus élevé chez les patients. Il exprime le fait que les patients reviennent beaucoup sur leurs pas, explorent de façon inadéquate les différentes zones.