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Méthodes échographiques pour la caractérisation de matériaux

3. Viscosimétrie à ondes longitudinales

3.3.3. Analyse d’un fluide rhéofluidifiant : jus de mangue

Pour terminer cette étude en ondes longitudinales, la procédure testée et validée sur fluides et matériaux modèles Newtoniens a été appliquée toujours en collaboration avec l’UMR Qualisud (M.Valente) à un jus réel, le jus de mangue qui, comme nous allons le voir présente un comportement rhéologique complexe. Nous allons voir que l’analyse ultrasonore haute fréquence est en parfait accord avec les mesures rhéologiques, plus lourdes, plus longues et utilisant un matériel beaucoup plus onéreux.

Deux lots de variété Kent (respectivement 41 et 25 fruits) et un de variété Keitt (42 fruits) ont été achetés chez un producteur de mangues en Andalousie. Les fruits ont été récoltés à leur stade de maturité commerciale. Les fruits de chaque lot ont été divisés en différents cartons qui ont été placés dans une chambre de maturation (Binder KBF 720) de 720 L. Température et humidité ont été respectivement fixés à 22 ° C et 80% d'humidité relative pendant trois semaines. Cinq à six fruits ont été choisis périodiquement au hasard tous les deux ou trois

Partie 2: méthodes échographiques pour la caractérisation de matériaux viscoélastiques.

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jours et analysés afin d’obtenir des fruits ayant une large gamme de maturité. Après épluchage et découpe, tous les morceaux ont été introduits dans un presse-agrumes (Whole Fruit Juicer LTK7189) pour séparer le jus de la fraction solide. Le jus obtenu a été ensuite centrifugé pendant quinze minutes à 10000 rpm (Avanti - JE, Beckman Coulter Inc.) afin d’éliminer les débris cellulaires et les petites particules. Les échantillons de surnageant ont été prélevés et congelés pour être analysés plus tard. La teneur en sucres (en °BRIX, noté aussi SSC pour Soluble Solid Content) a été mesurée par réfractométrie optique à 20 ° C à l'aide d'un réfractomètre numérique portable, Atago (Tokyo, Japon) allant de 0,0 à 33,0° Brix. Dans la suite nous utiliserons la notation SSC plutôt que Brix.

Les mesures de viscosité de cisaillement apparente ont été effectuées en utilisant un rhéomètre Physica MCR301 (Anton Paar, Allemagne) équipé d'une cellule de mesure Couette (DG27/T2000/SS). La température des échantillons a été fixée à 20 ± 0,1 ° C en utilisant un système Peltier et un fluide circulateur (Viscotherm VT 2) contrôlé directement à partir du viscosimètre. Après 5 min de stabilisation thermique, chaque échantillon de 11 ml a été soumis à un test d’écoulement pour des taux de cisaillement allant de 10 à 400 s-1. Les mesures ultrasonores ont été réalisées en suivant la procédure précédemment décrite. Le système transducteur, moteurs, récipient contenant le jus, a été placé dans une étuve thermostatée à 20° (Figure 14).

Figure 14. Système expérimental pour l’étude ultrasonore des jus de mangues.

L'évolution de la vitesse longitudinale à 20 ° C en fonction du SSC est reportée Figure 15a. Il est à noter que pour l’eau nous avons trouvé 1482  2 m.s -1

. Un tel résultat est en parfait accord avec la valeur recommandée pour l'eau par Briggs [BRIG-10]. Pour les jus de mangue, la précision est également 2 m.s-1 menant à la conclusion que la variabilité observée figure 15a pour un même SSC, n'est pas due au protocole expérimental mais à des changements dans la composition des jus de fruits. D’un point de vue qualitatif, on peut observer que pour des SSC supérieurs à 12-13% la pente de la courbe est plus élevée que celle observée pour les SSC inférieurs à 12-13 %. Comme il est bien connu qu'il est très difficile d'établir un lien qualitatif précis entre vitesse et composition pour les système complexes comprenant plusieurs composés [CONT-92], nous avons décidé de concentrer notre attention sur

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l'atténuation (mesurée avec un transducteur à 25 MHz) qui est généralement plus sensible à la composition. Ainsi, l'analyse de la vitesse restera ici qualitative.

La principale conclusion est qu'il semble que, après 12-13 % SSC, un autre paramètre qui n'est pas un sucre simple inclus dans le SSC a une influence sur les données. La figure 15b montre l'atténuation en dB.m-1 en fonction du SSC tous les échantillons de jus. Pour l'eau, nous avons trouvé 148 dB.m-1 ce qui est en accord avec la valeur recommandée par Briggs. Ici nous avons utilisé les dB (comme Briggs) et non les Neper ou m-1. La conversion est triviale : dB=8.68 (Néper ou m-1

). Ces mesures d'atténuation sont données avec une précision moyenne de  30 dB.m-1

.

Là encore, deux grandes zones ont été clairement définies. De 0 à 12-13 SSC, l'atténuation n'augmente pas beaucoup. Au-delà, la variabilité est très élevée et pour un SSC donné, l'atténuation peut être multipliée par un facteur deux en fonction de l'échantillon analysé. On peut soupçonner les effets des substances pectiques solubles qui apparaissent au cours de la maturation des mangues en raison du ramollissement de la pulpe et de la destruction les parois cellulaires.

Afin d'aller plus loin, et de confirmer que la grande variabilité était vraiment due à la composition de jus et pas à un autre paramètre (par exemple de petites particules causant la diffusion des ondes ultrasonores), des essais d'écoulement ont été réalisés pour les échantillons sélectionnés Figure 15b.

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Figure 15b. Atténuation longitudinale à 25 MHz en fonction du SSC.

En particulier, deux échantillons ayant des SSC valant 18 % et 19,8% peuvent sembler hors tendance (le plus sucré étant moins atténuant donc moins visqueux) et les résultats des essais d'écoulement seront très intéressants. Les échantillons sélectionnés pour les essais d'écoulement ont été choisis de telle manière que, pour un SSC donné on couvre toute la variabilité observée sur l'atténuation mesurée par ultrasons.

Pour tous les échantillons ayant un SSC inférieur à 13% le comportement s’est avéré Newtonien. Au contraire, au-delà de 13% SSC tous les échantillons analysés pour des taux de cisaillement entre 10 et 400 s-1 ont présenté un comportement rhéofluidifiant confirmant le rôle joué par les substances pectiques solubles. En effet, les pectines étant de très longues molécules, les forts taux de cisaillement ont tendance à les aligner et à fluidifier le système. Pour les échantillons Newtoniens, la corrélation entre L et s a donné L4s ce qui assez proche de la solution simple (eau/ saccharose). Il n’est pas étonnant de trouver une valeur un peu différente car d’autres sucres simples comme le fructose ou le glucose sont quand même présents. Pour les échantillons rhéofluidifiants, cette corrélation dépend du taux de cisaillement.

Sur la figure 16 qui représente les courbes d’écoulement on peut constater que les deux échantillons à 18 et 19.6 % SSC présentent aussi un comportement étrange, l’échantillon 19.6 % SSC étant moins visqueux que celui à 18 % SSC.

Ainsi, même si les fréquences d’analyses sont très différentes, les comportements globaux sont identiques avec les deux approches. Dans ce contexte, la méthode ultrasonore, plus rapide peut à mon avis constituer un pré test pour sélectionner des échantillons intéressants pour lesquels une analyse rhéologique complète est nécessaire.

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Figure 16. Viscosité mesurée en écoulement Couette.

4. Rhéoacoustique à ondes longitudinales pour l’étude des