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Algorithme d’équilibrage biproportionnel RAS

2) Analyse causale des modèles

Nous examinerons en premier lieu les méthodes d’analyse habituellement mises en œuvre pour recueillir toutes les informations des modèles. Puis nous essaierons de nous livrer à une réflexion systémique de la modélisation.

1˚- Les méthodes d’analyse des modèles

L’intérêt des modèles macroéconométriques ne réside pas exclusivement dans les ré-sultats de simulations. Des analyses complémentaires peuvent fournir de précieux rensei-gnements sur la description que le modèle fournit de la réalité économique. Il peut s’agir d’analyse apportant des précisions sur les caractéristiques du modèle et sa pertinence vis à vis de l’économie décrite (méthodes externes) ou d’analyse expliquant davantage les mécanismes de l’économie décrite (méthodes internes).

Les méthodes externes - Il existe plusieurs types de méthodes externes. Nous

présente-rons seulement ici l’analyse des valeurs et vecteurs propres et l’analyse des multiplicateurs.

i - L’analyse des valeurs et des vecteurs propres - Dans le cas des modèles

dyna-miques, sous certaines conditions de présentation. À partir de la forme réduite du modèle représenté en variables d’état : X(t) = A(t).X(t − 1) + B(t).Y (t) – où X est le vecteur des variables endogènes et Y le vecteur des variables exogènes. On pourra ainsi tirer des valeurs propres de A des enseignements sur la stabilité de l’économie ([48], p.127).

Tableau 3.4 – Comportement du modèle et valeurs propres de A

MODULE

ARGUMENT > 1 ≤ 1 = 0 mod 2π Divergent Non Cyclique Stable Non Cyclique 6= 0 mod 2π Divergent Cyclique Stable Cyclique

ii - L’analyse des multiplicateurs - Un multiplicateur mesure l’effet sur une variable

endogène d’une variation unitaire d’une variable exogène (lorsqu’il est dynamique à τ périodes, il mesure l’effet de t à t+τ). On peut ainsi cibler les résultats de simulations sur

une variable particulière. Toutefois, dans le cas des modèles non linéaires cette démarche revient à linéariser le modèle et peut entraîner des contresens dans l’interprétation des multiplicateurs.

Les méthodes internes - Nous présenterons sommairement ici, la méthode du choc de

structure et la méthode, l’analyse des interdépendances, la méthodes des stuctures de résolution et la méthode des maquettes.

i - Le choc de structure - Cette méthode consiste à perturber le niveau d’une variable

importante du modèle pour observer les effets sur la solution générale fournie par le système. En générale cette analyse est effectuée conjointement avec des analyses de valeurs et vecteurs propres.

ii - L’analyse des interdépendances - Toutes les variables n’ont pas le même degré

de dépendance vis à vis des autres variables, au sein du système d’équations. Si les va-riables exogènes sont, par définition, indépendantes des autres, les vava-riables endogènes peuvent être représentées par un graphe d’interdépendance [531]. Cette démarche consti-tue une première approche d’analyse causale des modèles. D’une manière générale ce type d’analyse renvoie à la décomposabilité de la matrice du système d’équations. La décomposabilité de la matrice permet de distinguer les dynamiques de court terme des dynamiques de long terme.

iii - La méthode des structures de résolution - Elle se propose de donner une

interpré-tation économique claire du fonctionnement du système étudié à partir d’une discrimi-nation entre variables de cohérence et variables de bouclage (les secondes permettant de déterminer récursivement les premières). Ce type de méthode permet d’interpréter éco-nomiquement les résultats de simulation (en termes offre/demande, réalisé/désiré etc.), de distinguer les effets ex ante sur les variables de cohérence et les effets ex post sur les variables de bouclage, d’étudier l’impact des chocs, d’étudier les algorithmes de résolution alternatifs et de distinguer les effets de court et de moyen terme.

iv - La méthode des maquettes - Il s’agit de la méthode la plus synthétique de toutes

mo-dèles, sur des critères théorique ou empirique (local, sectoriel etc.) pour obtenir un modèle réduit, une maquette. La sélection constitue la principale et la plus délicate étape. La seconde étape consiste à choisir le mode de simplification (agrégation etc.).

Tableau 3.5 – Méthodes d’analyse des modèles macroéconométriques

MÉTHODES OBJECTIFS M É T H O D E S E X T E R N E

S Tests économétriques Validation

Simulations ex post déterministes Validation, analyse temporelle Simulations ex ante Analyse des prévisions

Multiplicateurs étude du fonctionnement déterministe Valeurs propres étude des modes

Simulations stochastiques étude des propriétés cycliques validation des modèles non linéaires Caractéristiques spectrales idem

M É T H O D E S IN T E R N E

S Chocs de structure Simplification (mécanismes importants ou secondaires, associations modes/ mécanismes)

Sensibilité des valeurs propres Association modes/mécanismes, analyse Analyse des interdépendances Mise en évidence de hiérarchies et

de sous-systèmes

Structure de résolution Interprétation économique qualitative et quantitative des résultats de simulation

Maquettes et études analytiques Simplification et maîtrise du modèle

2˚- Réflexions systémiques sur la construction et l’utilisation des modèles macroéco-nométriques

Partant de la constatation que le rôle du modélisateur (en particulier du conjonctu-riste) n’est pas neutre sur l’objet de son travail, une autre manière [180, 182] de recon-sidérer les problèmes d’efficacité des modèles macroéconométriques pourrait consister à prendre en compte tous les acteurs de la modélisation (agents économiques mais aussi modélisateurs, producteurs de données, utilisateurs de statistiques etc.) et à représenter leurs interactions. Pour cette analyse, la logique systémique nous a paru la plus perti-nente. Appelons "système de modélisation"46le système composé de la réalité économique (acteurs, enjeux etc.), de ses représentations et de leurs rapports mutuels. Notre but est 46. - Habituellement, les modélisateurs font l’hypothèse de la neutralité de l’observateur intégré à son propre champ d’observation.

de mettre en évidence les éléments qui interviennent dans ce système (les acteurs à tra-vers leurs moyens et leurs fins, les outils etc.) pour en déterminer des évolutions possibles. Nous nous appuierons sur l’examen des critères fondamentaux des systèmes :

1˚ - les éléments et leur organisation modulaire, soumis au principe de conservation des systèmes puis,

2˚ - la dynamique du système, basée sur le besoin de variétés et les échanges avec l’environnement [339]. Tout au long de notre propos, nous serons alors amenés à établir une comparaison entre le "système économique" – i.e. la représentation de la réalité éco-nomique par les scientifiques et le "système de modélisation" – i.e. le couple observateur-observés.

Si l’on fait l’hypothèse que la macroéconomie ferait l’étude d’un système d’agents en concurrence ou en coopération dans la poursuite de leurs fins propres, alors cela nous amène à reconsidérer la typologie des acteurs économiques (ménages, entreprises, Etats etc.) pour y introduire les notions de décision, information et régulation. Nous proposons trois catégories d’agents : ceux qui prennent des décisions, ceux qui influent sur les déci-sions mais n’en prennent pas significativement eux-mêmes et enfin ceux qui encouragent ou contrarient les décisions économiques individuelles et/ou collectives et contribuent à réguler l’activité47. Conformément à l’analyse de systèmes, on peut décrire le com-portement des acteurs ainsi : Munis d’informations de qualités diverses fournies par les informateurs, les décideurs arbitrent entre consommation ou l’épargne, travail ou loisir, production ou stockage, taxation ou subventionnement etc. tandis que les régulateurs arbitrent entre des parties en conflit (justiciables, employeurs vs salariés et épargnants vs investisseurs). Tous veulent connaître l’état du système dans lequel ils sont impliqués.

En prenant leurs décisions, les acteurs tiennent compte des autres acteurs - voir Fig. 3.4. Les décideurs considèrent en effet leurs marchés en y intégrant le jeu des in-formateurs, lesquels considèrent leur réalité observable en y intégrant le jeu des décideurs 47. - En dehors des Décideurs, les acteurs habituels (ménages, entreprises et administrations), nous introduisons les Informateurs : Médias et Conjoncturistes qui informent les autres acteurs, et les Régu-lateurs : la Banque centrale (indépendante de l’Etat) qui décident des taux directeurs, les Partenaires sociaux qui décident des taux de la rémunération salariale et du financement de la protection sociale, et le Pouvoir judiciaire qui représente la jurisprudence et peut modifier à moyen ou long terme les décisions des autres agents économiques [191].

etc. Ils disposent d’informations relatives aux opérateurs habituels, mais également sur eux-mêmes tels qu’ils sont perçus par les autres opérateurs. En sens inverse (les informa-teurs auraient été de rang 1 – i.e. le numéro figurant dans la pastille noire) on obtient le schéma de la modélisation macroéconomique48. En ce qui concerne les régulateurs, leur action a un impact indirect sur le jeu des autres acteurs, à long terme (pouvoirs judiciaires, partenaires sociaux) ou a court terme (banque centrale, partenaires sociaux). Le sous-système régulateurs a donc un rôle de rétroaction sur l’ensemble du sous-système. La question que l’on se pose alors est : Comment le système maintient-il un état stationnaire ? Le système qui nous occupe repose sur un mécanisme d’équilibration49. Si les informateurs perdent leurs récepteurs (qui sont en même temps leurs sources d’informations) et/ou si les décideurs perdent leurs informateurs (conjoncturistes, presse spécialisée, cabinet d’audit etc..) aucune activité ne peut être entreprise. Les parties en conflit sont la raison d’être des régulateurs.

48. - La Nouvelle théorie classique suggère que les agents connaissent le modèle.

49. - Il existe deux sortes de mode de conservation des systèmes qui conduisent à un état stationnaire : la régulation, de nature cybernétique [339], pp.7–32) – i.e. le système comporte des mécanismes de com-pensation, des boucles de rétroaction (négatives, positives) permettant de maintenir un état stationnaire, et l’équilibration ou homéostasie qui concerne la régulation chez les êtres vivants. La différence entre ré-gulation et équilibration tient dans le fait que les éléments qui permettent l’équilibration ne survivent pas au système auquel ils appartiennent, lorsque celui-ci disparaît.

Figure 3.4 – Ouverture du système

Certaines modifications affectent la dynamique du système. 1˚- le degré d’élaboration des outils conceptuels : état de la recherche en science, en générale et des mathéma-tiques en particulier. Il permet de proposer des modèles plus performants soit en termes de prédiction, soit en termes de progrès théoriques ; 2˚ - le degré de communication des opinions publiques : quantité et qualité des informations disponibles pour les opinions pu-bliques par les mass média. Il concerne non seulement les informations (vraies ou fausses) auxquelles les opinions publiques ont accès, mais également les canaux par lesquels elles peuvent réagir.

Ces deux composantes de l’environnement mettent ainsi en lumière le rôle joué par l’information aussi bien dans le sous-système des décideurs, que dans celui des infor-mateurs. Dans leur quête d’informations, les acteurs sont en compétition. Les décideurs souhaitant disposer des informations pertinentes avant leurs concurrents (marchés finan-ciers, technologie etc.), toutefois, les décideurs peuvent ne pas disposer (ou pas en temps utiles) des informations fournies par les informateurs professionnels ; dans ce cas ils uti-lisent leurs propres expériences (phénomène d’apprentissage) ou cèdent à l’impression ambiante (comportements moutonniers) pour prendre leurs propres décisions. Ils forment des anticipations dont l’impact est non négligeable sur l’ensemble des décideurs. La struc-ture des réseaux d’informations joue un rôle important (les agences mondiales de presse acheminent l’information généraliste ou spécialisée sont en nombre limité et constituent de ce fait un oligopole d’émission qui filtre les informations). Les professionnels de l’in-formation, à quelque échelon de la logistique où ils soient, choisissent les informations qui vont devenir pertinentes50.

Avec les progrès des technologies de l’information, les décideurs sont confrontés non pas tant à un rationnement qu’à un problème de tri de la multitudes des informations qui leur parviennent sous toutes les formes ; cela ne préjuge en rien de l’efficacité des décisions prises. Informateurs Décideurs Régulateurs b b b 1 1 2 2 3 4

Figure 3.5 – Relation entre acteurs économiques

50. - Et le "système médiatique" n’est pas neutre. Les dépêches sont triées par les agences de presse. Les raisons de ce tri d’information sont diverses : anticipation d’intérêt du public, consignes de dissimulation interne ou externe etc [186]

Les informateurs se procurent (1) des informations relativement aux autres acteurs (statistiques etc.) puis communiquent (2) des informations (brutes, transformées, gra-tuites, payantes etc.) aux autres acteurs - voir Fig. 3.5. Ces informations comportent une composante qui est l’image des décideurs pour les régulateurs, et inversement celle des régulateurs pour les décideurs51. Par ailleurs, les décideurs requierent (3) les régula-teurs pour que ceux-ci rendent des arbitrages (4). Ce réseau de relation est d’autant plus complexe52 qu’il faut également y voir des décalages, des imperfections (incomplétude, troncatures, dissimulations, mensonges etc.) dans la transmission des informations. Au terme de cet examen systémique simplifié de la modélisation, on peut se demander, même si la tâche paraît très ambitieuse, s’il ne serait pas intéressant de "modéliser la modélisa-tion" elle-même53, sous forme de maquette – initialement le modèle MEREDIT [171, 180]. Mais nous l’avons finalement abandonné au profit du modèle SINGUL [194, 197, 199, 203].

3.2 Les pistes d’enrichissement algorithmique

Dans cette section nous tenterons de mettre en évidence les améliorations que le mo-délisateur peut attendre en utilisant des algorithmes généralement peu utilisés dans ce contexte. Le réexamen des algorithmes est un passage obligé pour tenter des reformu-lations des modèles, voire une restructuration notamment dans des termes plus "analo-giques".

3.2.1 Les voies d’amélioration quantitative

51. - Nous raisonnons ici avec des agents agrégés, mais on peut supposer que les décideurs ont également l’image des autres décideurs à travers l’information qu’ils reçoivent.

52. - L’art de la prévision repose sur deux dilemmes paradoxaux. Il faut en effet choisir entre "prévoir ou expliquer" et "diffuser ou non ses prévisions" au risque que les agents les rendent caduques les prévisions en modifiant leurs décisions [182].

53. - Il y aurait évidemment plusieurs degrés de modélisation du processus de modélisation : le plus fort étant celui implicant les modélisateurs eux-mêmes (endogénéisation des modélisateurs), le plus faible étant les modèles d’anticipations rationelles (la connaissance du modèle par les agents y est implicite).

Dans ce paragraphe nous verrons, en termes d’algorithmes, comment intégrer toutes les dimensions nécessaires à la construction de modèles. Mais au delà de ce problème d’enrichissement des dimensions, se posera la question des limites de la précision, tant instrumentales (jusqu’où les ordinateurs peuvent procurer une précision) que conceptuelle (jusqu’où les systèmes de comptabilité nationale peuvent-ils être précis).

A) Les problèmes d’ordre "métrologique"

La simple indexation des variables dans les modèles - i.e. le passage de X à Xt,roù t est la période et r la région - ne suffit pas toujours à leur faire acquérir les nouvelles dimensions souhaitées. Il convient de proposer des procédures accroissant la précision aux plans tant quantitatif que qualitatif. Cette question renvoie non seulement à la formalisation des modèles mais également plus généralement au problème de fiabilité de comptes nationaux.