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Nous appliquons maintenant les méthodes de simulation développées sur le CHO à l’ablateur dopé au silicium (CHOSi).

L’isotherme à 300 K : Du fait d’une contrainte liée à la durée d’une thèse et au temps que prennent les calculs de dynamique moléculaire quantique, nous n’avons cependant pas pu générer une isotherme propre à l’ablateur CHOSi. Nous avons néanmoins déduit une isotherme à 300 K à partir des calculs effectués sur le CHO.

Lors du calcul de l’isotherme à 300 K du CHO, nous avons montré que l’ajout d’atome d’oxygène dans la composition chimique de l’ablateur n’impacte pas l’isotherme dans le plan pression-compression (partie 4.3.4). Des différences ont été observées lors de la dissociation qui se produit à température am- biante pour de très fortes compressions (supérieures à 5 × ρ0). L’absence d’oxygène a alors eu pour

principal effet de changer la densité standard du système. De la même façon, nous supposons que le sili- cium agit uniquement sur la densité standard de l’ablateur. On peut argumenter que le silicium possède un numéro atomique et une proportion atomique proche de celle de l’oxygène dans l’ablateur. Dans ce

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FIGURE4.19 : Fonctions de distributions radiales des deux pôles simulés dans les conditions normales de densité et de température pour le CHO en haut, et le CHOSi en bas, après une trempe d’une température de 3 000 K jusqu’à300 K.

cas, nous générons l’isotherme à 300 K du CHOSi à partir de l’isotherme du CHO et d’un redimension- nement de la densité, tel que :

ρ 7−→ ρ

ρ0CHOρ

CHOSi

0 , (4.19)

où, ρ0CHO = 1, 07 g/cm3 est la densité standard du CHO, et ρCHOSi

0 = 1, 14 g/cm3 la densité standard

du CHOSi. On applique cette transformation à la forme analytique AP2 (équation 4.5), qui peut être introduite dans l’équation d’état tabulée.

Courbes d’Hugoniot : On génère ensuite des isochores pour obtenir la courbe d’Hugoniot du CHOSi. On s’intéresse alors aux densités entre 2, 6 et 3, 2 g/cm3, espacées de 0, 1 g/cm3de façon à avoir suffi- samment de points sur l’Hugoniot pour caractériser la dissociation.

Les valeurs du pôle ont été obtenues à partir d’une trempe. Les atomes sont mélangés à 3 000 K pendants quelques picosecondes, puis refroidis à 2 000 K, puis à 1 000 K et à 300 K. Les fonctions de distributions radiales de la structure générée dans les conditions normales de températures et de densités sont présentées sur la figure (4.19). On remarque que l’on n’a pas créé de liaisons carbone-carbone C≡C triples. Ces liaisons étaient donc probablement des artefacts de calculs liés à la trempe réalisée sur le CHO. Seuls les pics correspondant aux liaisons C−C simples, et C=C doubles sont visibles. On utilise alors la valeur de l’énergie interne à 300 K, que l’on moyenne sur les dernières configurations atomiques à l’équilibre. L’énergie interne dans les conditions normales est de : E0= −836, 25 Ha.

FIGURE4.20 : Courbes d’Hugoniot des ablateurs CHO et CHOSi dans le plan pression-compression (a), et le plan température-compression (b). Les erreurs sur les points de dynamique moléculaire quantique proviennent de l’incertitude de0, 02 g/cm3sur la mesure de la densité standard ρ0.

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FIGURE 4.21 : Fonctions distributions radiales entre les atomes carbone-carbone gC-C(r) (a) et carbone- hydrogène gC-H(r) (b) sur l’Hugoniot principale de l’ablateur CHOSi.

La figure (4.20) présente la courbe d’Hugoniot obtenue pour le CHOSi et pour le CHO. Les fonc- tions de distributions radiales entre les atomes de carbone-carbone et de carbone-hydrogène sont indi- quées sur la figure (4.21). Les courbes d’Hugoniot dans les plan pression-compression et température- compression ont la même forme. On remarque un plateau en compression pour ρ/ρ0 < 2, 7 puis la

pression et la température augmentent rapidement. Nous avons vu dans le cas de l’ablateur CHO que ce phénomène est dû à la dissociation chimique. Les fonctions de distribution radiale le long de l’Hu- goniot du CHOSi confirment ces conclusions sur la figure (4.21). Les liaisons C−H sont complètement dissociées pour des densités supérieures à 3, 1 g/cm3 (c’est-à-dire ρ/ρ0≈ 2, 7) et des températures su-

périeures à 12 000 K. Les liaisons C−C subsistent au-delà de ces valeurs. Notons que les petits écarts entre les courbes d’Hugoniot du CHO et du CHOSi proviennent de l’incertitude sur la densité solide des ablateurs. Par exemple, une incertitude de ∆ρ0= 0, 02 g/cm3sur la densité normale mesurée du CHOSi

fournit une incertitude de ∆(ρ/ρ0) ≈ 0, 05 sur la compression pour ρ/ρ0= 3.

Par conséquent, le dopant introduit dans l’ablateur n’affecte pas ses propriétés thermodynamiques de ce dernier. Il agit uniquement sur la densité normale. Par exemple, le silicium étant un élément chimique plus lourd que le carbone ou l’oxygène, la densité solide du CHOSi (ρ0= 1, 14 g/cm3) est supérieure

à celle du CHO (ρ0= 1, 07 g/cm3). Cette conclusion sur l’effet du silicium est plutôt réconfortante en

ce qui concerne la conception des capsules de FCI puisque le rôle de silicium est d’agir sur les proprié- tés d’absorption du rayonnement de la cavité de conversion et non pas de changer l’équation d’état de l’ablateur.

Conclusions :

Nous avons calculé les courbes d’Hugoniot du CHOSi à partir de calculs de dynamique moléculaire quantique. Nous avons montré un comportement similaire entre les deux ablateurs étudiés. En com- pression, les courbes se recouvrent. On retrouve l’effet de la dissociation chimique sur l’Hugoniot. Les atomes de silicium ne changent pas les propriétés de compression sous choc de l’ablateur des capsules du Laser Mégajoule. Ils agissent principalement sur la densité normale de l’ablateur.

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Méthodes expérimentales

Sommaire

5.1 Objectifs . . . 100 5.2 Les ondes de choc . . . 101 5.2.1 Définition d’une onde de choc . . . 101 5.2.2 Caractéristiques de la matière comprimée par une onde de choc . . . 102 5.2.3 Propagation d’une onde de choc à l’interface entre deux milieux . . . 107 5.3 La désadaptation d’impédance . . . 109 5.3.1 Principe . . . 110 5.3.2 Calcul de l’isentrope de détente . . . 111 5.4 La création d’une onde de choc avec un laser . . . 120 5.4.1 Absorption et transport de l’énergie laser . . . 120 5.4.2 Expansion du plasma et création du choc . . . 123 5.4.3 Les installations laser LULI2000 et GEKKO XII . . . 123 5.5 Les diagnostics optiques . . . 124 5.5.1 Diagnostic actif : interférométrie VISAR . . . 125 5.5.2 Diagnostic passif : mesure de l’émission propre . . . 138 5.6 Le dimensionnement des cibles . . . 144

5.1

Objectifs

Avant d’aborder la partie expérimentale de ce manuscrit, rappelons les principaux objectifs et résul- tats obtenus.

Nous cherchons à améliorer les équations d’état tabulées des matériaux ablateurs des capsules du Laser Mégajoule. Ces tables sont utilisées par les codes d’hydrodynamique radiative pour dimensionner les expériences de fusion par confinement inertiel. Elles ont un effet important sur la chronométrie des chocs [22, 9] ainsi que sur la croissance des instabilités hydrodynamiques [23, 24] et constituent donc un paramètre important qui doit être maîtrisé.

Les équations d’état tabulées sont construites de façon à inclure l’ensemble du chemin thermody- namique de la capsule au cours de l’implosion. Du fait de l’étendue du diagramme de phase, différents modèles théoriques sont utilisés et assemblés. Ces modèles décrivent chacun une région spécifique du diagramme de phase. Des interpolations et des corrections semi-empiriques sont ensuite appliquées pour restituer des données numériques ou expérimentales. Dans le cadre de cette étude, nous avons utilisé le modèle QEOS pour construire les équations d’états tabulées des ablateurs. C’est un modèle simple d’uti- lisation, entièrement analytique et paramétrable.

Nous nous sommes intéressés à un domaine restreint du diagramme de phase qui peut être atteint sur des installations laser de tailles moyennes, comme l’installation LULI2000 à Palaiseau et l’installation GEKKO XII à Osaka au Japon. Ce domaine est défini par des températures de quelques électronvolts et des pressions de quelques mégabars. Il se situe à la frontière des différentes modélisations théoriques utilisées dans les équations d’état tabulées et correspond aux premières étapes de l’implosion d’une capsule.

Jusqu’à maintenant, nous avons utilisé la dynamique moléculaire quantique pour calculer des états thermodynamiques dans le domaine d’étude. Une courbe froide a été calculée puis introduite dans le modèle QEOS. Nous nous sommes ensuite intéressés aux courbes d’Hugoniot car elles constituent la seule partie du diagramme de phase qui nous est accessible expérimentalement. Nous avons ainsi montré les effets de la dissociation chimique sur ces courbes, qui ne sont pas pris en compte dans les modèles d’équation d’état tabulée. Cela nous a conduit à modifier le modèle QEOS pour restituer nos simula- tions. Nous disposons maintenant d’une équation d’état tabulée pour les matériaux ablateurs plastiques utilisable dans un code hydrodynamique.

Nous allons mesurer expérimentalement les états (P, ρ, T ) le long de l’Hugoniot des matériaux plas- tiques CHO et CHOSi. Ces mesures nous permettront de valider nos précédents résultats théoriques. Nous utiliserons les installations laser LULI2000 et GEKKO XII pour générer des chocs dans les maté-

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riaux d’étude dans un schéma d’attaque directe avec des cibles planes. Cette configuration est simple à réaliser et suffisante pour générer des chocs dans le régime voulu.

Dans ce chapitre, nous décrivons les méthodes expérimentales utilisées pour mesurer les équations d’état des matériaux plastiques. Les résultats seront présentés dans le chapitre suivant. Tout d’abord, nous verrons de quelle manière la propagation d’une onde de choc dans un matériau nous permet d’ob- tenir des points d’équation d’état (section 5.2). Nous détaillerons ensuite la méthode de mesure des états (P, ρ) sur l’Hugoniot (section 5.3). Nous aborderons alors les mécanismes de création des ondes de choc par laser (section 5.4). Enfin, nous présenterons les diagnostics optiques qui nous ont permis de caractériser la matière choquée (section 5.5).