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Énergie mécanique convertie Énergie électrique appliquée

C. Amélioration de la performance électromécanique des polymères

Dans le cas des élastomères diélectriques et des polymères électrostrictifs, les équations I-18 et I-27 indiquent qu’une augmentation de la constante diélectrique doit conduire à une augmentation de la déformation pour un champ électrique donné. De plus, la déformation étant inversement proportionnelle au module d’Young du matériau, l’amélioration de la performance électromécanique des EAPs peut être réalisée en ajustant ces deux paramètres cruciaux.

Ceci peut être obtenu en optimisant le procédé de synthèse du polymère. L’élaboration de composites est également intéressante pour obtenir à la fois une grande déformation électromécanique et un module élastique renforcé, ce qui permet d’augmenter la densité d’énergie mécanique.

C-1 Modification des matériaux de base

Plusieurs voies sont intéressantes pour accroître la constante diélectrique des matériaux, afin d’augmenter leur réponse électromécanique. Les propriétés des matériaux peuvent être modifiées notamment par la structuration des différentes phases amorphes et cristallines et le procédé de préparation : irradiation, polarisation, dispersion et séparation de phases (cas de matériaux polyphasés ou mélange de matériaux immiscibles).

C-1.1 Modification de la cristallinité par substitution chimique ou irradiation des polymères

C’est une technique très fréquemment utilisée notamment pour des copolymères à base de PVDF. Le principe est de modifier la morphologie de la phase cristalline du polymère. Le cas des copolymères P(VDF-TrFE) décrit ci-dessus montre que le couplage électromécanique se produit soit grâce aux effets piézoélectriques, soit par électrostriction selon les modifications apportées à leur structure chimique par l’ajout d’une quantité adéquate de CTFE (chloro-trifluoro-éthylène).

Comme on l'a évoqué plus haut, l'irradiation aux électrons est connu pour pouvoir amorphiser certains états cristallins dans les polymères. Dans ces exemples, la diminution de fraction cristalline fait passer le couplage électromécanique majoritairement d'origine ferroélectrique vers un comportement électrostrictif ("polymère ferroélectrique relaxeur") [Zha2000].

C-1.2 Plastification des polymères

Dans ce §, on cherche à diminuer la rigidité des matériaux pour leur permettre une déformation plus importante.

Sen et al. [Sen1984] ont essayé d’incorporer des plastifiants lourds à 65% en masse pour tenter d’améliorer l’activité électromécanique. Mais ces plastifiants sont aussi amorphes et inactifs

électriquement ; finalement ils diminuent le module d’Young, la permittivité et finalement la déformation électrostrictive.

Nguyen et al. [Ngu2009] ont ajouté un plastifiant de dioctyl phthalate (DOP) dans la matrice élastomère synthétique d’acrylonitrile butadiène pour diminuer le module d’Young. Le DOP diminue également la constante diélectrique de la matrice. Ils observent néanmoins une augmentation de la déformation électromécanique axiale à haute énergie élastique selon la fraction de DOP ajouté. En revanche, le champ de claquage a été réduit ce qui limite la performance.

C-2 Composite avec une deuxième phase diélectrique

Il est possible d’introduire une deuxième phase à haute constante diélectrique ou conductrice sous forme de poudre dans la matrice polymère. Le composite ainsi élaboré présente donc des propriétés électriques qui dépendent de celles de la matrice et de la phase dispersée. Il est possible d’estimer les propriétés diélectriques du composite à l'aide d'une loi des mélanges (voir par exemple les cas des poudres céramiques ou de mélanges de polymères [Van1967] [Bot1978]).

Cependant, l’augmentation de la constante diélectrique dans le cas de composites est généralement associée à une augmentation de la rigidité (module élastique) du matériau. Il faut faire attention à trouver le meilleur compromis entre les valeurs de constante diélectrique et de module élastique car une plus grande rigidité conduit à une plus faible déformation. Néanmoins, une grande rigidité augmente la densité d’énergie et la force d’actionnement, ce qui peut parfois être favorable.

C-2.1 Lois de mélange Diélectrique-Diélectrique

Pour déterminer les propriétés diélectriques des mélanges diélectrique-diélectrique, on trouve dans la littérature plusieurs lois. Les paramètres sont d'une part la constante diélectrique εm et la fraction volumique fm de la matrice, et d'autre part, la fraction f de la deuxième phase (souvent dispersée) la constante diélectrique correspondante, εf. On a donc f = −1 fm.

On considère généralement que les deux phases ont des pertes diélectriques négligeables. Afin d'éviter l'effet des relaxations diélectriques, certains auteurs considèrent de plus que la fréqunec est suffisamment élevée pour la constante diélectrique effective du composite soit constante (ε) [Van1967].

Pour un composite constitué d’une matrice ayant une faible constante diélectrique

ε

m et d’une deuxième phase à haute constante diélectrique εf soit donc εm << εf, il est possible d’estimer la constante diélectrique du composite contenant une fraction volumique

f

de particules sphériques dispersées en utilisant les trois principaux modèles suivants :

L’équation logarithmique du modèle de mélange de Lichtenecker [Mon1947] [Goo1991]:

lnεc = −(1 f) lnεm+ flnεf I -34

L’équation de Smith [Jay1993] :

3 ( ) 3 (1 ) . 1 2 ( 2 ) 3 ( ) 3 (1 ) . 1 2 ( 2 ) f m m m f f m f m c f m m f m f m f f f f f f ε ε ε ε ε ε ε ε ε ε ε ε ε ε ε ε ε     − +   + + +         =    −  − +   + + +         I -35

L’équation de Maxwell-Wagner [Max1892] [Wag1914] :

2 2 f m c m c m f m f ε ε ε ε ε ε ε ε − − = + + I -36

Les conditions d'utilisation de ces équations ne sont pas vraiment explicites. Par ailleurs, pour des morphologies différentes (phases co-continues, etc.) il faut développer d'autres équations de couplages diélectriques, plus compliquées [Pal1973].

C-2.2 Poudres de Céramiques ferroélectriques

Le but est bien sûr d’augmenter la constante diélectrique de la matrice polymère en incorporant une poudre céramique ferroélectrique ayant une constante diélectrique élevée. Des composites à base de copolymères de P(VDF-TrFE) et de poudres ferroélectriques Pb(Mg1/3 Nb2/3)O3 - PbTiO3 ont été élaborés par Bai et al. [Bai2000]. Avec 60 %v d’ajout céramique, le composite attient une constante diélectrique de 250 avec une faible dépendance avec la température (dans les conditions d'utilisation).

La poudre fine de PMN-PT de taille inférieure à 100 µm a été ajoutée à une matrice à base de silicone. La constante diélectrique, le facteur de perte, et le module d’Young augmentent avec la fraction de poudre ajoutée. Pour le composite avec 30 %v de céramique, la constante diélectrique augmente jusqu’à environ 30, à 100 Hz [Gal2007].

De même, le PVDF mélangé à 40 %v de la poudre céramique de CaTiO3 conduit à un composite ayant une constante diélectrique

ε

r'= 13. Mais le composite montre une certaine porosité [Hu2011].

C-2.3 Mélange de deux polymères diélectriques

Un mélange de polymères de P(VDF-TrFE) et P(VDF-CTFE) permet d’obtenir un matériau homogène. Pour améliorer les performances électromécaniques, la polarisation maximale et le ratio entre polarisation maximale et polarisation rémanente sont des paramètres importants. Il est possible par exemple d’obtenir une polarisation de 60 mC/m2 pour un champ électrique de 150 V/µm avec une

faible polarisation rémanente,

P

r< 10 mC/m2. Ce type de mélange de polymères est essentiellement électrostrictif et intéressant pour les applications électromécaniques [Li2004].

Il est aussi possible de réaliser un mélange de Nylon-11 et de PVDF, tous deux semicristallins [Gao2000]. L’interaction entre ces deux polymères provoque une diminution de la température de transition vitreuse et de la température de fusion du Nylon-11 quand la concentration de PVDF augmente. L’analyse FTIR indique une interaction particulière entre le groupe amide CO-NH polaire du Nylon-11 et le groupe CF2 du PVDF. La structure cristalline de Nylon-11 organisée avec des liaisons hydrogène est désordonnée par la présence de PVDF. Il se développe une plus grande proportion de phase cristalline polaire dans le mélange à haute concentration de Nylon-11 par comparaison avec la phase non-polaire du PVDF. Dans le mélange, la transformation de phase PVDF non-polaire vers une phase cristalline polaire ordonnée est complétée par traction uniaxiale. Ce changement structural fait augmenter la réponse piézoélectrique et améliore significativement la stabilité thermique à haute température, jusqu’à 160 °C.

C-3 Composite à deuxième phase conductrice

C-3.1 Théorie universelle de percolation

Les composites inorganique-organiques à matrice isolante contenant des particules conductrices dispersées aléatoirement présentent un phénomène de percolation. Il s’agit d’un phénomène critique qui a lieu quand le pourcentage volumique de la partie conductrice est supérieur au seuil de percolation. Au voisinage du seuil de percolation, la conductivité électrique et la permittivité diélectrique du composite augmentent très fortement.

Afin d’estimer expérimentalement le seuil de percolation, on peut utiliser l’équation ci-dessous pour décrire la conductivité électrique à partir de la théorie statistique de percolation :

0 1 t c f c f f f σ =σ −   : f > fc I -37

σ0 et σf sont la conductivité volumique de la matrice isolante et du composite, respectivement. Cette équation n’est valable que quand la fraction volumique f est supérieure au seuil de percolation fc du système. L’exposant critique est en principe universel t.

Généralement, les résultats expérimentaux sont tracés sous la forme logσf fonction de

[ ]

log ffc . L'exposant t dépend de la forme des particules conductrices, il est proche de 2 pour les particules sphériques et proche de 3 pour celles en forme de bâtonnets [Sah1994] [Fla2000] [Dan2003]. t dépend en fait des systèmes composites étudiés sans doute parce que le caractère aléatoire des dispersion n'est pas totalement assuré lors de la mise en œuvre.

De même, la constante diélectrique peut s’écrire : ' ' q c f m c f f f ε ε  −  =   : f < fc I -38

ε

m' et

ε

'f sont les constantes diélectriques (permittivités relatives) de la matrice isolante pure et du composite, respectivement. Cette équation n’est valable que quand la fraction volumique f est inférieure au seuil de percolation fc du système. L’exposant critique q du système est trouvé expérimentalement vers 0,8 – 0,9 pour les composites à base de matrice élastomère [Zoi2001]. Dans certains cas de particules non sphériques, on peut trouver une autre valeur d’exposant critique plus élevée, comme par exemple q = 1,78 pour le composite PU à particules carbonées se présentant sous forme d’oignons [Mac2009].

Avec la même loi puissance les pertes diélectriques du composite sont estimées par [Ezq1990] [Mam2002] :

tan tan . r

c p f

δ = δ I -39

où tan δp est le facteur de perte diélectrique de la matrice polymère, tan δc est le facteur de perte diélectrique du composite et r est l’exposant critique pouvant être relié aux exposants précédents par la relation suivante :

2

r= −t q I -40

C-3.2 Poudres Métalliques

Nous avons relevé quelques exemples parmi de nombreux travaux qui témoignent d'une très forte activité de recherche dans ce domaine. Des composites polymères-métaux à base de polyéthylène (PE), polyoxyméthylène (POM), polyamide (PA), mélange de PE-POM et particules de fer (Fe) de petit diamètre de 3 µm, ont été préparés par extrusion. L’exposant critique t est trouvé égal à environ 3,0 sauf pour le système Fe/PE-POM qui donne un exposant critique très élevé : t = 8 [Mam2002]. Dans ce dernier cas, c’est parce que les particules de Fe ne se dispersent préférentiellement que dans le POM, ils obtiennent donc un seuil de percolation anormalement faible (<9%v). Ce phénomène de dispersion explique probablement que l'équation générale de la percolation ne se l’applique pas. Au voisinage du seuil de percolation, la constante diélectrique passe de l'ordre de 2 pour la matrice pure à environ 100 pour les composites avec un exposant critique q de 0,7 – 0,8. Ces systèmes de composites vérifient la relation r = t – 2q.

Des composites à base de PMMA et de poudres de cuivre (Cu) de différentes tailles sont préparés [Pob2009]. Le seuil de percolation du système composite augmente avec la diminution de taille φ des particules de Cu, passant de fc ~ 14%v pour φ ~ 80nm à fc ~ 9%v pour φ ~ 4µm. Par contre, tous les composites conduisent à un même exposant critique t = 2.

C-3.3 Composite à polymère conducteur

Huang et al. ont élaboré un système composite à base de P(VDF-TrFE-CTFE) avec un polymère conducteur de polyaniline (PANI) [Hua2004]. Le composite présente un seuil de percolation de 26 %v de PANI. Un peu avant le seuil, le composite à 25,1 %v PANI a une constante diélectrique remarquable de 7000 mesurée à 100 Hz. En outre, le composite présente une activité électromécanique sous un champ électrique particulièrement faible. Par exemple, le copolymère P(VDF-TrFE-CTFE) se déforme de -1,5 % sous un champ électrique de 75 MV/m alors que pour la même déformation, le composite contenant 23 %v PANI n’exige qu’un champ électrique de 9,5 MV/m.

C-3.4 Composite à base de matériaux carbonés : CB, CNT, C-fibre, Graphite

Les nanoparticules carbonées sont de plus en plus utilisées en tant qu’additif dans les matrices polymères pour améliorer les propriétés, mécaniques, électriques et thermiques. Les nanoparticules carbonées sont en général conductrices ou au moins semi-conductrices d’où leur potentiel pour des applications électriques, comme par exemple : effet antistatique, décharge ou dissipation électrostatique, dissipation électromagnétique, transformation conductrice et amélioration de la constante diélectrique.

Le carbone peut être utilisé sous diverses formes : poudre de noir de carbone (CB pour l’acronyme anglais Carbon Black) qui est la forme la plus simple, feuillets de graphène ou multicouches de graphite, nanofibres de carbone (CF), nanotubes de carbone mono-paroi (SWCNT) ou en multi-parois (MWCNT). Comme ces particules vont être mélangées au sein de la matrice polymère, le paramètre le plus important et influant sur la globalité des propriétés est la compatibilité entre la matrice et la phase ajoutée, considérée en terme de dispersion, de distribution, d’interaction à l’interphase et de solubilité.

C-3.4.1 Composites au noir de carbone :

Les noirs de carbone ont une microstructure complexe multiéchelle. Ils se présentent sous forme d'agrégats, souvent peu compacts mais rigides, (la Fig. I-14) constitués d'un grand nombre de particules élémentaires de dimension caractéristique de l'ordre de la dizaine de nm.

Suivant la compacité de ces agrégats, on différencie les noirs de carbone en deux catégories : les CB fortement structurés et les CB faiblement structurés, la Fig. I-15. On conçoit bien que la percolation des agrégats impliquera une fraction de CB dépendant directement de leur compacité. Par ailleurs, la taille très faible des particules élémentaires, conduit à des distances interparticulaires moyennes elles aussi très faibles, ce qui favorise d'autres mécanismes de conduction que celle par contact direct. En effet, l'effet tunnel devient très important à ces échelles.

Figure I-14 : Schémas des différentes formes de CB : particule primaire, agrégats, et agglomérats [Acc1999].

Figure I-15 : Visualisation schématique de CB selon la taille de particule primaire, la structure, et la surface spécifique [Acc1999].

Une théorie non-universelle a été proposée en considérant le comportement de la conductivité électrique d’un système composite polymère-CB [Bal1987], avec deux formes différentes de noirs de carbone (hautement et faiblement structurés). Le modèle montre que la valeur universelle t = 2 s'applique bien dans le cas général des noirs de carbone fortement structurés qui présente un seuil de percolation très faible. Au contraire, les noir de carbone faiblement structurés conduisent à un seuil plus élevé et présentent une valeur très élevée de t (jusqu’à t = 6.4) qui s'écarte notablement du comportement universel. Ce comportement s'explique par l'effet tunnel couplé à la percolation [Bal1987] [Rub1999] [Jag2001].

En augmentant le taux de particules conductrices tout en restant en dessous du seuil de percolation (f < fc), la constante diélectrique augmente, comme nous l'avons vu précédemment. Ce phénomène peut être interprété sur la base de la polarisation interfaciale de Maxwell-Wagner entre les additifs et la matrice polymère [Yac1988] [Guy2009a]. Pour un film composite CB-PP de 300 µm,

Zois et al. ont trouvé un seuil de percolation vers 3,1 %v avec une constante diélectrique augmentée à

'

32

r

ε

= , mesurée à 0,1 Hz, et des exposants critiques

s=0, 9

pour la partie diélectrique et

t=1, 93

pour la partie conductrice [Zoi2001]. De la même manière, les pertes diélectriques tan δ augmentent, ce qui s’explique par la nature viscoélastique des composites [Nan2009].

Flandin et al. ont étudié l’influence du noir de carbone dans un système composite composé d’élastomère éthylène-octène et de noir de carbone. Ils ont analysé les relations entre comportement mécanique en traction et la conduction électrique in situ et ont montré une influence de la structure du noir de carbone agrégé [Fla2001].

C-3.4.2 Composites aux nanotubes de carbone :

Constitués d’un ou plusieurs feuillets de graphène enroulés les uns sur les autres pour former des cylindres (la Fig. I-16), les nanotubes de carbone montrent une meilleure conduction électrique que le CB, notamment lorsqu’ils sont de type multi-parois. Ils augmentent la constante diélectrique et l’activité électromécanique des polymères diélectriques EAPs [Par2008].

Figure I-16 : Nanotubes de carbone à mono-paroi SWCNT (haut) et à multi-parois MWCNT (bas).

Cependant, compte tenu de leur facteur de forme, ils sont difficiles à disperser dans la plupart des matrices. Selon la taille des nanotubes et leur dispersion dans le polymère, de très faibles seuils de percolation ont été obtenus,

f

c< 1 %m (≈ 0,5 %v) [All2002]. Pour faciliter la dispersion, plusieurs études ont été menées sur les traitements ou modifications de surface des nanotubes [Cha2009] [Dat2008].

Des CNTs dispersibles ont été développés en greffant leur surface par des polymères. Des MWCNT recouverts de polypyrrole (PPy) ont montré une bonne dispersion dans la matrice diélectrique de Polystyrène (PS) [Yan2009]. Ce système composite présente des propriétés diélectriques stables ; la constante diélectrique vaut

ε

r'= 44 à 100 Hz pour 10 %m (≈ 5 %v) MWCNT/PS avec de faibles pertes diélectriques tan

δ

= 0,07 et un seuil de percolation élevé

f

c> 10 %m MWCNT.

C-3.4.3 Composites à nanofibres de carbone :

Les fibres de carbone (CFs) ont quasiment les mêmes caractéristiques électriques proches que les nanotubes de carbone sauf qu’elles sont beaucoup plus grandes (diamètre > 1 µm et longueur > 1 mm) et présentent une moindre conduction thermique et une résistance à la traction plus faible [Als2008]. Mais surtout à cause de leurs dimensions, les CFs sont donc moins intéressantes pour les micro-applications que les nanotubes de carbone. La modification et le traitement de surface sont également utilisés pour améliorer leur dispersion dans les matrices polymères [Lu2008] [Rim2002].

C-3.4.4 Composites à graphite ou graphène :

Le graphène est un cristal bidimensionnel (monoplan) des atomes de carbone dont l'empilement constitue le graphite, la Fig. I-17. André Geim et Kostya Novoselov furent les premiers, en 2004, à obtenir des couches de graphène à partir de graphite [Nov2004].

Figure I-17 : Le graphite est constitué d'empilement de couches de graphène.

Le graphite et le graphène renforcent énormément la résistance mécanique de la matrice polymère. He et al. ont élaboré un système composite de PVDF-graphite ayant une constante diélectrique élevée mais qui, malheureusement du point de vue des propriétés d’actionnement, s’accompagne d’un fort renforcement mécanique. À 20°C, le module d’Young de PVDF est passé de 1,5 GPa à 3 GPa avec 10 %m de graphite [He2008].

C-4 Autres voies d’améliorations

C-4.1 Structuration morphologique de matériaux

Une traction ou compression mécanique suffisante peut modifier la morphologie finale de certains polymères semicristallins comme le PVDF [Fur1989]. Des molécules ou des groupes fonctionnels dipolaires peuvent être orientés dans le sens du champ appliqué et créent une polarisation permanente d’origine piézoélectrique. Une élévation de la température rend généralement la transformation de phase plus facile.

C-4.2 Matériaux multicouches

Des multicouches de PP pur et de composite PP-CB ont été réalisées par la technique de coextrusion, la Fig. I-18. Le but est d’éviter la conduction électrique à travers l’épaisseur de multicouches grâce aux couches isolantes en PP pur [Xu2008a]. Par contre dans la direction d’extrusion, ce système composite multicouche PP/PP-CB donne un seuil faible de percolation et une faible résistivité électrique (inférieure à celle des monocouches de PP-CB).

Figure I-18 : PP/PP-CB composites multicouches. (a) et (b) images de MEB d’un composite à 4 couches. (b) image à plus fort grandissement de la zone encadrée dans (a). (c) Observation en

microscope optique polaire d’un composite à 64 couches [Xu2008a].

C-4.3 Composite à particules structurées

Les nanoparticules actives peuvent aussi être structurées, soit par un champ électrique soit par un champ magnétique. Dans une solution de polymère de faible viscosité, il est possible de répartir les nanoparticules (comme on le fait dans certains fluides électro-rhéologiques) sous forme de chaînes alignées agrégées, qui créent des chemins conducteurs par effet tunnel dans la même direction que celle du champ appliqué. Les matériaux sont ensuite figés par évaporation du solvant [Sch2002] [Pra2003].

Figure I-19 : Réseau orienté de CNF formés dans la résine Epoxy après l’application d’une sollicitation électrique de 400 V/cm à 1kHz.

(a) Avant et après une sollicitation de (b) 1 minute, et (c) 30 minutes [Pra2003].

C-4.4 Synthèse de nouveaux polymères

La synthèse directe de nouveaux polymères permet un meilleur contrôle de leurs propriétés intrinsèques, une fois réglés les problèmes de reproductibilité. La synthèse de copolymères de PVDF permet ainsi d’obtenir de nouveaux polymères à propriétés alternatives [Ang2003] [Rol2004].

Ju-Yeon Lee et Eun-Ju Park [Lee2001] ont synthétisé de nouveaux polyuréthanes comportant différents nombres de groupements tricyanocyclopropylène. Le polyuréthane synthétisé est piézoélectrique avec un coefficient piézoélectrique transversal du film polymère corona-polarisé dans la gamme 1.3 – 2.0 pC/N.

C-5 Conclusion

L’objectif est d’élaborer des matériaux présentant de bonnes performances de transformation effective d’énergie électromécanique et donc de bonnes propriétés d’actionnement. Afin d’améliorer les performances électromécaniques, plusieurs techniques sont envisageables, faisant intervenir des modifications chimiques ou physicochimiques (copolymérisation et irradiation aux électrons), la diminution de la rigidité mécanique par l’ajout de plastifiants, ou encore l’élaboration de composites.

Les composites dont la deuxième phase peut être diélectrique ou conductrice sont élaborés afin d’augmenter la constante diélectrique. Cet ajout entraîne inévitablement un renforcement mécanique, ce qui ne favorise pas de grandes déformations mais peut néanmoins augmenter la densité d’énergie mécanique obtenue. Un paramètre important est la miscibilité ou la dispersiblité de la deuxième phase dans la matrice polymère.