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Altérations génétiques impliquées dans l’apparition des mélanomes :

I Le mélanome cutané

C- Altérations génétiques impliquées dans l’apparition des mélanomes :

Dans les mélanomes, comme dans la plupart des cancers, l’apparition du phénotype tumoral résulte de la survenue de modifications génétiques qui altérent des voies de signalisation cellulaires impliquées dans la prolifération, la survie, la senescence ou l’apoptose.

1) La voie de signalisation Ras / Raf / MEK / Erk :

La cascade de signalisation des MAPK (Mitogen Activated Protein Kinase) (Ras /Raf /MEK/Erk) joue un rôle clé dans la prolifération des mélanomes. La voie des MAPKinases est une voie essentielle activée au cours de la prolifération cellulaire, en réponse a de nombreux ligands. Le point central de cette réponse est l'activation des GTPases Ras. Ces protéines sont ancrées dans la partie cytosolique de la membrane plasmique par leur extrémité C-terminale fortement hydrophobe. L’activité biologique des protéines Ras est contrôlée par les cycles GTP/GDP. En effet, elles existent sous une forme inactive liée au GDP (Guanosine Diphosphate) et une forme active liée au GTP (Guanosine Triphosphate).

(Barbacid et al., 1987 ; Buday et al., 1993). Les protéines Ras possèdent la capacité

intrinsèque d'hydrolyser le GTP en GDP et d'échanger le GDP en GTP mais cette réaction est trop lente pour être efficace. Les facteurs d'échange (comme Sos) permettent de passer de la forme Ras-GDP à la forme Ras-GTP alors que d'autres protéines : les GAP (GTPase activating factor) stimulent l'hydrolyse de la forme Ras-GTP en Ras-GDP (Figure 18). Les signaux extracellulaires qui permettent d'activer ras sont multiples : des facteurs de croissance, des cytokines, des hormones ou encore des neurotransmetteurs. Prenons l'exemple d'un facteur de croissance pour suivre la voie de signalisation qui permet d'activer Ras (Figure 19). La fixation de l'EGF (Epidermal Growth Factor) sur son récepteur à activité tyrosine kinase (EGFR) provoque l’autophosphorylation de tyrosines dans la partie cytoplasmique du récepteur. Ce domaine phosphorylé interagit avec des domaines SH2 de

Figure 18 : Cycle d’activation des GTPases Ras.

Figure 19 : Activation de la voie des MAPK par les facteurs de croissance.

La voie des Mitogen Activated Protein Kinases (MAP kinases) constitue l’une des voies principales de transmission des signaux de prolifération apportés par les facteurs de croissance. Cette voie, après activation des récepteurs, implique, par l’intermédiaire de protéines adaptatrices, l’activation d’une protéine Ras, à l’origine de la cascade des activités de phosphorylation : Raf (MAP kinase kinase kinase), Mek (MAP kinase kinase) et Erk (MAP kinase). Cette dernière, transloquée dans le noyau cellulaire, phosphoryle alors les facteurs de transcription qui activent la transcription de l’ensemble des gènes responsables de la réplication de l’ADN et de la mise en route du cycle cellulaire (ADN polymérases, cyclines, etc.).

la protéine Grb2 (elle même associée au facteur d'échange Sos) ce qui a pour effet de transloquer le complexe Grb2/Sos à proximité de la protéine Ras sous la membrane plasmique. La protéine Sos peut alors promouvoir l'échange GDP en GTP sur Ras (Feig et

al., 1994). La protéine Ras-GTP recrute à la membrane plasmique la protéine Raf qui est

une sérine-thréonine kinase (Stokoe et al., 1994). Après avoir été activé par un facteur encore inconnu, Raf phosphoryle la protéine MEK (Mitogen-induced Extracellular Kinase) (ou MAPKK pour mitogen-activated protein kinase kinase) qui à son tour phosphoryle la protéine ERK (Extracellular signal-Regulated Kinase) (ou MAPK) qui se transloque dans le noyau. Cette cascade de phosphorylation permet l'activation de facteurs de transcription comme c-Jun, c-Myc ou c-Fos impliqués dans la régulation de l’expression de gènes, qui contrôlent la prolifération cellulaire. Ainsi, il a été montré que la voie des MAP Kinases activée par la protéine Ras-GTP, entraîne une augmentation de la cycline D1 ce qui permet à la cellule de passer de la phase G1 à la phase S, et ainsi d'induire une prolifération cellulaire (Lavoie et al., 1996). Dans 90% des mélanomes on trouve une hyper activation de la protéine ERK (Cohen et al., 2002). Dans les mélanomes ERK peut être activé par la production de facteurs de croissance autocrines (Satyamoorthy et al., 2003), ou par des mutations activatrices présentes sur des récepteurs des facteurs de croissance (Willmore-

Payne et al., 2005). Cependant, un mécanisme plus commun est associé à des mutations

de l’oncogène NRAS (un des trois gènes Ras avec HRAS et KRAS). NRAS est muté dans 15 à 30% des mélanomes et la mutation la plus commune conduit à une substitution d’une glutamine en une leucine en position 61 (Q61L) (Davies et al., 2002). Un autre composant de cette voie, fréquemment muté est l’oncogène BRAF (un des trois gènes RAF avec ARAF et CRAF). BRAF est muté dans 70% des mélanomes (Davies et al., 2002) et la mutation la plus courante induit la substitution d’une valine par un acide glutamique en position 600 (V600E) (Davies et al., 2002). BRAF V600E stimule de façon constitutive la voie ERK et stimule la prolifération, la survie et la croissance tumorale (Gray-Schopfer et al., 2005). BRAFV600E contribue aussi à la néo-angiogenèse en stimulant la sécrétion de VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) (Sharma et al., 2005). La mutation BRAF V600E contrôles également l’expression de plusieurs gènes participant à la transformation tumorale

des mélanomes tel que le facteur de transcription MITF. (Wellbrock et al., 2005) (Goodall

et al., 2004)(Bhatt et al., 2005)(Gray-Schopfer et al., 2006 ; Michaloglou et al., 2005).

2) Le facteur de transcription MITF :

MITF (Microphtalmia-associated transcription factor) est un facteur de transcription essentiel dans les mélanocytes. Il est même considéré comme le plus important régulateur de la biologie de ces cellules, car il est impliqué dans la régulation de l’expression de protéines de la mélanogenèse comme les tyrosinases et les protéines MelanA/MART-1. Ces protéines sont présentées sous formes de peptides par les mélanomes et sont reconnues par les lymphocytes T anti-tumoraux (Melan-A MART-1) (Levy et al., 2006).

MITF est aussi retrouvé dans de nombreux mélanomes humains ou son expression est essentielle pour la prolifération et la survie tumorale (Levy et al., 2006). Cependant MITF est plus fortement exprimé dans les mélanocytes normaux que dans les mélanomes. Son niveau d’expression semble conditionner les capacités de prolifération du mélanome. En effet, il a été montré qu’un niveau élevé de MITF inhibe la prolifération des cellules de mélanome

(Wellbrook et al., 2005) par un mécanisme associé à un arrêt du cycle cellulaire impliquant

le contrôle de l’expression de protéines régulatrices du cycle cellulaire (p16, Cdk2, p21cip). De façon paradoxale, une diminution du niveau de MITF dans les mélanomes, favorise également une diminution de la prolifération cellulaire, car à de faibles doses, MITF n’agit pas sur le cycle cellulaire mais induit un mécanisme d’apoptose. Il semble donc que seul un niveau intermédiaire de cette protéine MITF favorise la prolifération des mélanomes.

3) La voie de la PI3K :

Une autre protéine joue un rôle important dans la prolifération des mélanomes, il s’agit de la Phosphatidyl-Inositol3Kinase (PI3K) (Figure 20). La PI3K est un complexe dimérique composé de la sous-unité catalytique p110 et de la sous-unité régulatrice p85. Cette protéine, est une kinase qui catalyse la phosphorylation du phospholipide : phosphatidylinositol (4,5)-biphosphate (PIP2) en phosphatidylinositol (3,4,5) (PIP3) triphosphate en réponse à des facteurs de croissance ou à des cytokines. Une fois

Figure 20 : La Phosphatidyl-Inositol3Kinase (PI3K)

Une fois activée par des récepteurs aux facteurs de croissance, la PI3K catalyse la transformation du phosphatidylinositol (4,5)- biphosphate (PIP2) en phosphatidylinositol (3,4,5) (PIP3) triphosphate . Ces lipides membranaires vont jouer le rôle de second messager et permettrent l’activation de signaux intra- cellulaires. L’inactivation de ces voies survient après déphosphorylation des lipides par la phosphatase PTEN (Phosphatase and TENsin homolog). Dans les mélanomes, la protéine PTEN peut être mutée entraînant l’activation constitutive des voie de signalisations induites par la PI3K

phosphorylés ces lipides membranaires jouent le rôle de seconds messagers (Shaw et al.,

2006), capables d’activer plusieurs voies de signalisation (Cantley et al., 2002) impliquées

dans la prolifération, la survie , la croissance et la mobilité cellulaire. L’inactivation de ces voies survient après déphosphorylation des lipides par la phosphatase PTEN (Phosphatase and TENsin homolog) (Figure 20). La PI3K régule ces voies de signalisations qui sont hyper actives dans les mélanomes. Cette hyperactivité est associée à plusieurs évènements comme des mutations de la PI3K (Omholt et al., 2006), des pertes de fonction ou d’expression de la phosphatase PTEN (Whu et al., 2003), ou une surexpression des effecteurs de la PI3K.

4) Mutations des voies de survie et d’apoptose :

Il est intéressant de noter que certaines altérations génétiques survenant dans les mélanomes augmentent la résistance de ces tumeurs à l’apoptose. C’est le cas des mutations NRAS et BRAF, de la surexpression de la protéine Bcl2, du facteur de transcription NFkB (Nuclear Factor kappa B) et de la perte d’expression de PTEN. D’autres signaux de survie cellulaire peuvent provenir de mutations de la voie signalisation β caténine/APC (Adénomatous Polyposis of Colon) ou de la perte d’expression de protéines telles que nAPAF-1 (Apoptotic Protease Activating Factor 1).