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ACTUALITE DES SA VO IR FAIRE CONVENTIONNELS

L'IMPASSE DU PRESCROTF - CONSTRUCTION CONVENTIONN ELLE ET SYSTEME CON STRUCTIF

L’impasse du prescriptif lkg de béton, 1kg de papier

Le système prescriptif a conduit à un renforcement du contrôle sur les ouvrages, mais en même temps qu’il se donnait les m oyens de ce contrôle, il perdait en souplesse et en rapidité ce qu’il avait gagné en garan­ ties sur l’ouvrage. Conformité aux normes, aux D.T.U., aux règlements sanitaires, à la prévention, autant de documents dessinés ou écrits qui préparent au contrôle et qu’il faut établir. Même si la conception devait se réduire aux seules dispositions décrites par ces normes, à leur retrans­ position pure et simple, le dossier n’en serait pas moins fourni. Leurs présences contractuelles sont nécessaires pour établir la responsabilité des constructeurs.

Une méfiance mutuelle anime ces constructeurs, et ces documents montrent bien l’inquiétude qui la nourrit. «Les bois seront de premier choix sans échauffement ni nœuds vicieux... Les fers sans jarret ni ger­ çures». Il faut préciser également la qualité des peintures, le nombre de couches à passer, la composition des mortiers, la qualité des sables, la nature des procédés d’assemblage, de collage, etc... Préciser si les portes sont coupe-feu, simplement pare-flamme, si les revêtements sont MO M 1 M2..., préciser encore qui assure le gardiennage du chantier, qui fournit la clôture, comm ent se fait le partage des charges de chantier, à la charge de qui incombe le nettoyage ou la pose Jes porte- savons.

. Prescription et adjudication

Cela permet de comprendre aussi pourquoi les entreprises en viennent à tenir peu compte des spécifications du descriptif. Pour obtenir le marché, le prix est considéré comm e une offre à forfait. Une fois les prestations et les quantités délimitées, l’entente entre le maître d’ouvrage et l’entreprise se réduit à un marchandage sur le prix de ce marché («Topez là et j’en ferai mon affaire»). L’entreprise adjudicataire tiendra ses prix, imposera ses techniques constructives, et pourra ainsi optimiser le rendement de sa main-d’œuvre et de son outillage. Toute disposition des plans d’architectes qui y serait contraire est jugée trop onéreuse.

D’elle-même, l’entreprise proposera ses solutions constructives, même quand celles-ci, si elles avaient été préconisées par le descriptif, n’auraient pas permis une offre meilleure. Pour chiffrer une offre, et de façon à garder sa marge de négociations, l’entreprise juge le dossier d’appel d’offre sur la liberté qu’elle a de s’en assurer la maîtrise technique.

Cette contradiction entre les objectifs du descriptif et sa non-résolution (non-observation des documents de consultation) nous permet de compren­ dre pourquoi certains marchés privés se traitent avantageusement de gré à gré avec des descriptifs succincts, voire presque inexistants, et des

plans sommaires. L’entente tacite entre un maître d’ouvrage, un architecte et quelques entreprises est reconduite sur la base des réalisations com­ munes.

. Prescription et déqualification

Jusqu’au milieu de ce siècle, ce sont les règles de l’art et les règles professionnelles qui permettaient de décrire le travail à faire dans sa diversité. Les exigences énoncées sur la qualité des matériaux, le soin nécessaire à leur mise en œuvre se limitaient à reprendre les usages observés par la tradition, sans que la définition d’un travail particulier soit spécifiée. C’est le projet particulier et les dispositions constructives qui en découlent qui complétaient en les précisant ces règles. Mais les D.T.U. (documents techniques unifiés) qui se substituent peu à peu à ccs régies pour les métiers traditionnels, ci ceux élaborés pour les techni­ ques non traditionnelles, débordent largement cette description. La prescription porte sur des détails de mise en œuvre dont le respect per­ met d’obtenir la garantie donnée sur la conception par les assureurs. Ces détails précis constituent de fait la règle minimum sur laquelle peut reposer la répétition. Peu à peu vidé du problème de la diversité et des initiatives qu’elle suppose, le travail se réduit à l’observation des dis­ positions constructives prescriptives, et à leur exécution conforme (cf. notamment les D.T.U. maçonnerie et étanchéité).

La prescription s’est appropriée la maîtrise technique de l’ouvrage, et ce transfert de la maîtrise technique a conduit à une perte de la qualité et de la complexité des tâches des métiers. La nécessité de trouver une main-d’œuvre peu coûteuse qui a conduit beaucoup de grandes entreprises à outiller le chantier, a contribué à simplifier les tâches et en fait à dévalo­ riser le métier.

Le système tout composant et la filière américaine

Peu d’idées, dans le domaine de la construction, auront eu autant de succès que celle d’un meccano sec dont les pièces aux dimensions très précises viendraient «clic-clac» s’ajuster miraculeusement sur le chantier. La fonte et, sans succès apparent, le béton, ont successivement essayé d’appliquer cette idée que les pionniers avaient suggérée. Dans notre recherche sur les problèmes de dimensionnement, nous avons montré les obstacles à un dimensionnement précis et préalable. La construction nécessite des valeurs approchées, et cette approximation est fondamentale, liée à la conception des bâtiments.

Devant cette incertude sur les dimensions du produit et ayant à assurer un marché continu et nécessairement ouvert, l’industrie a peu investi sur le prêt-à-poser (sauf en ce qui concerne les parties traditionnellement détachables). Tout au contraire, l’innovation industrielle a porté sur des semi-produits de plus en plus complexes et performants, et parallèle­ ment sur un outillage forain de plus en plus sophistiqué.

Pourtant l’idée du composant sec, fini, reste vivace ; composant myti- que la plupart du temps, et dont on chercherait vainement la trace dans la production commerciale.

En assurant la vente de semi-produits complexes, adaptables, façonnables, et la diffusion d’un outillage forain de plus en plus sophistiqué, l’indus- trie a permis de nouveaux rapports entre les constructeurs. Une partie importante de la plus-value est transférée sur le produit industriel, mais son adaptation nécessaire s’appuie en partie sur l’habileté professionnelle.

Construction conventionnelle et système constructif • Conventions et architecture contemporaine

Nçtre intérêt poux les conventions en architecture a une origine double. D’une part l’expérience personnelle de la construction et du .chantier,

ressentie comme ia confrontation et souvent l’incommunicabilité entre deux univers techniques, l’un pensé comme projet, l’autre comme processus de réalisation. D’autre part une réflexion sur l’architecture contemporaine qui vise à remettre en cause un «héroïsme» technique et expressif sans réalité sociale et dont le contenu culturel est dérisoire aujourd’hui.

Robert Venturi, dans son livre «L’enseignement de Las Vegas», défend i’idée que l’architecture doit aujourd’hui renouer avec un vocabulaire conventionnel dévalorisé par le mouvement moderne :

«... L’utilisation d’éléments conventionnels dans l’architecture ordinaire que ce soit de simples poignées de portes ou des formes familières des systèmes de construction existants, évoque des associations à l’expérience du passé. De tels éléments peuvent être soigneusement choisis ou intel­ ligemment adaptés à partir du vocabulaire existant ou des catalogues standards, plutôt que créés comme objet unique à partir de données ori­ ginales et de l’intuition artistique».

. Systèmes, conventions et architecture urbaine.

11 s’est opéré un déplacement dans la conception architecturale : l’ex­ pression structurale devient impossible puisque le système doit rester le plus neutre possible, pour être utilisé par de multiples architectes dans des contextes différents. Ce qui domine alors, c’est la définition de bâtiments rapportée à la morphologie urbaine. L’architecture se définit en dehors du systèm e de construction, d’après ses relations avec l’espace extérieur.

De même les immeubles des villes à travers l’histoire ignoraient tout problème de structure : leur forme est dominée par la morphologie urbaine et leur construction tout à fait conventionnelle. Dans cette logi­ que, le détail constructif de l’architecte perdait son sens, en théorie tout au moins. 11 devait être remplacé par la recherche des formes adaptées au tissu urbain et par une ornementation urbaine spécifique ou utilisant un vocabulaire conventionnel (menuiseries, fermetures, barres d’appui, balustrades, etc). Toute mise en forme des panneaux béton (béton architectonique) a été rejetée, car elle ne peut être la base que d’une répétition.

Industrialisation ouverte e t conventions.

L’innovation ne sollicite pas les savoir-faire à elle seule. On ne trouve aucune référence à l’ingéniosité des chefs de chantiers ou de la main d’œuvre dans les souvenirs de ceux qui participèrent à la mise au point des premiers systèmes de préfabrication lourde, dans les années 50.

Les choses semblent se dérouler d’une façon différente avec le système constructif Solfège, autre lieu d’innovation technique. Là, au contraire, les chefs d’équipe des ateliers de préfabrication d’une pan, et les monteurs d’autre part, ont participé de très près aux mises au point. Même les responsables de chantiers ont tenu à comparer les techniques d’autres entreprises affrontées au même problème.

L’industrialisation ouverte pose d’une façon explicite le problème des conventions : il faut des conventions sur les dimensions et sur les joints pour que les composants puissent s’assembler.

Des conventions, émergeant des savoir-faire eux-mêmes et reposant sur l’expérience de la mise en œuvre, se présentent donc comme une solution efficace économique aujourd’hui. C’est d’ailleurs la voie explorée par une partie dynamique de l’industrialisation du bâtiment. Mais cette tendance, comme toute filière technologique majeure, a des implications pour l’ensemble du système du bâtiment : au niveau des produits et des techniques, mais aussi au niveau de la main-d’œuvre et de sa formation, au niveau des pratiques de la conception et de l’architecture.

CENTRE D'ETUDES METHODOLOGIQUES POUR L'AMENAGEMENT

ECOLE D ' A R C H I T E C T U R E DE NANCY C h e m i n d e R e m i c o u r t 5 4 6 0 0 - V i 1 l e r s - l e s - N a n c y