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Activité solaire et ceintures de radiation électrons : Une dynamique multi-physiques

I.2 La dynamique des ceintures de radiation terrestres

I.2.2 Activité solaire et ceintures de radiation électrons : Une dynamique multi-physiques

Le couplage entre l’activité solaire et la magnétosphère est responsable de l’établissement de plu-sieurs processus d’interactions qui seront entretenus dans la zone d’évolution des ceintures de radiation et qui vont conférer à ces dernières une dynamique temporelle complexe. Dans cette partie, on pré-sente les processus relatifs aux ceintures électrons, qui ont des origines physiques différentes et qui sont étroitement liés à la mécanique des orages magnétiques. Ensuite, on présente une synthèse du fonctionnement de cette dynamique et deux études concrètes d’orages magnétiques, afin d’exposer son étroite relation avec la structure du vent solaire.

I.2.2.1 Les processus d’interactions

La diffusion radiale : La diffusion radiale est l’un des principaux moteurs de la dynamique globale des ceintures de radiation [61][62]. Elle est responsable du transport des particules piégées le long des différentes couches radiales des ceintures de radiation. Elle prend origine principalement dans les varia-tions du champ magnétique et électrique dont les temps caractéristiques sont inférieurs aux périodes de dérive des particules piégées [2]. Les ondes ULF, et en particulier celles de type PC4 et PC5 en sont principalement à l’origine [63]. Son concept a été introduit depuis la découverte des ceintures de radiation pour expliquer leurs existences [62]. Son caractère diffusif vient du formalisme mathématique sous-lequel elle est exprimée, décrivant la moyenne de la contribution des différents processus physiques

de transfert d’énergie dues aux variations temporelles du champ magnétique [62].

La diffusion radiale conserve les grandeurs de mouvement plus rapides, dont en particulier le mo-ment magnétique. Ainsi, les particules transportées sous son effet en direction de la Terre gagneront de l’énergie, et inversement. Elle va donc jouer à la fois la fonction d’un processus de source et de perte [64][65], selon le gradient radial. On peut voir ça notamment dans son rôle de remplissage des ceintures par les particules de faible énergie du feuillet neutre [2][3]. Bien qu’on arrive à la modéliser analytiquement [66][67], elle reste encore un processus complexe et on n’arrive pas encore à bien la maîtriser [3][62]. Cependant, on sait maintenant qu’elle est fortement corrélée à l’interaction du vent solaire et qu’elle s’intensifie fortement en période d’orage magnétique [64][68].

Interaction particule - particule : Les particules piégées vont subir des interactions particule-particule avec celles de la haute atmosphère et la plasmasphère. La haute atmosphère est le lieu de perte par précipitation des particules piégées et l’étendue de l’interaction avec la haute atmosphère n’est pas statique. En effet, son épaisseur se dilate et se contracte sous l’effet de l’émission UV du Soleil. Dans la plasmasphère, les particules des ceintures de radiation vont subir des interactions collisionelles Coulombiennes. Ces interactions sont faibles et rapides et leurs impacts n’est "senti" qu’après plusieurs périodes de dérive (temps caractéristique > 24h). De plus, plus l’énergie des particules piégées est grande, moins elles sont sensibles à ces interactions. Vue d’une façon globale, ces processus peuvent induire :

— Une diffusion sur l’angle d’attaque [69]. Ce processus reflète un changement de trajectoire et peut contribuer à la précipitation des particules piégées par la modification de leur point miroir. — Une friction en énergie [70]. C’est une dissipation continue et un échange permanent d’énergie

avec des électrons libres ou liés de la plasmasphère et de la haute atmosphère.

Interaction onde-particule résonnante : Ce processus physique se produit quand une particule piégée rencontre une onde électromagnétique ayant une fréquence proche de sa fréquence de giration (ou de ses harmoniques) [59]. C’est pour cela que l’on parle d’interaction résonnante. Ce type d’inter-action est très efficace sur les ceintures de radiation électrons avec les ondes de type VLF présentées précédemment. Les protons y sont insensibles du fait de leurs masses, induisant une période de giration bien plus grande (sauf pour les protons de faible énergie pouvant interagir avec les ondes EMIC). L’in-teraction onde-particule a un rôle primordial dans la dynamique des ceintures de radiation électrons, sur une large bande en énergies et peut induire une diffusion en énergie (gain ou perte) ainsi qu’une diffusion en angle d’attaque. Si l’interaction est suffisamment efficace, alors cette interaction peut faire précipiter une quantité importante d’électrons dans l’atmosphère en période d’orage géomagnétique [71].

Les ondes de type Hiss localisées dans la plasmasphère, génèrent une diffusion en angle d’attaque. Elles favorisent un vidage lent des ceintures électrons par précipitation, après leur remplissage survenu lors de la phase principale d’un orage magnétique. Elles sont ainsi à l’origine de l’apparition de la région du slot en période d’activité calme [72][73][74]. Pour visualiser cet effet, on représente dans la figure I.18 l’évolution de l’intensité de la diffusion en angle d’attaque induite en fonction de l’énergie, pour L =3.5 et L =4. On observe un accroissement local de la diffusion pour les électrons ∼ MeV qui vont subir fortement cette diffusion et auront tendance à plus précipiter dans le cône de perte, vidant les ceintures de radiation à cette gamme d’énergie.

Les ondes EMIC en revanche, résonnent avec les électrons piégés de haute énergie (supérieure à 500 keV) et favorisent leur précipitation. Les mesures du satellite CRRES ont confirmé leur rôle dans la réduction significative des flux d’électrons de plus de 2 MeV à des angles d’attaques supérieurs à 60 [75]. Elles peuvent interagir aussi avec les protons piégés de faibles énergies et ceux du courant

an-Figure I.18 – Intensité de la diffusion générée par les ondes Hiss en fonction de l’énergie, pour deux distances adimensionnées en rayons terrestres. Figure extraite de [2].

nulaire en provoquant leurs précipitations rapides pendant la phase principale d’un orage magnétique [76][56].

L’extérieur de la plasmasphère est l’endroit ou l’interaction avec les ondes de type Chorus de-vient prépondérante. Elles agissent sur les électrons de la ceinture externe avec une diffusion en angle d’attaque favorisant les pertes par précipitation [36], une diffusion en énergie pouvant accélérer les électrons, ainsi qu’une diffusion croisée [77]. Un changement de paradigme s’est opéré à partir de la décennie précédente vis-à-vis du rôle des ondes Chorus dans la dynamique des ceintures électron. La diffusion radiale était considérée comme le mécanisme majoritairement responsable de l’accélération des électrons. Pourtant, à elle seule elle ne pouvait prédire qu’une distribution particulaire plate à grand L et décroissante à bas L. En réalité, on pouvait observer, un pic local dans la distribution des électrons entre L = 4 et L = 6 (comme le schématise la figure I.19) [78][79][66]. Ce phénomène attesté entre autres par les mesures du satellite POLAR entre Janvier et Mai 1998 et ceux du satellite CRRES lors de l’orage du 9 octobre 1991, indique clairement qu’un autre processus d’accélération est impliqué et que celui-ci agit localement. On sait maintenant, suite à une succession d’études que les interactions résonnantes avec les ondes Chorus sont responsable de cette accélération [80][81][82]. Ces dernières sont notamment à l’origine du renforcement des flux d’électrons de la ceinture externe, en particulier après des pertes induites par une forte activité géomagnétique durant la phase principale d’un orage géomagnétique [83].

Les dropouts : Les dropouts rassemblent les différents phénomènes de pertes brusques et intenses pouvant affecter sans distinction les électrons et les protons des ceintures de radiation, sur une large bande d’énergie et à différentes distances radiales. Elles peuvent être engendrées par une forte préci-pitation atmosphérique ou par une traversée de la magnétopause à cause d’une forte compression du vent solaire, provoquant la fuite des particules piégées dans le milieu interplanétaire [84][60].

Figure I.19 – Représentation schématique des distributions radiales des électrons piégés pendant un orage magnétique : en bleu celle prédite par la diffusion radiale seulement, en rouge celle observée sous l’effet d’accélérations locales supplémentaires.