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PARTIE I LE PRODUIT DESTINE A L’ENFANT ET SA REGLEMENTATION

3. PENETRATION CUTANEE

3.2 Actions des topiques en cosmétologie

3.2.1 Une action superficielle ou systémique ?

D’après la définition officielle du règlement cosmétique, un cosmétique se caractérise toujours par une action superficielle. Il ne peut et ne doit pas agir en profondeur, car il doit se limiter à une action sur les couches supérieures de l’épiderme. En aucun cas, il ne doit interférer avec les fonctions physiologiques. Les thérapeutiques cosmétiques sont à visée locale et ont pour but de minimiser le passage systémique, afin d’éviter les effets secondaires indésirables.

Or, une fois le stratum corneum franchi, la diffusion systémique est parfois difficilement évitable. En effet, pour être efficace, la majorité des molécules doit obligatoirement traverser la « barrière cutanée ». Des études ont montré qu’il pouvait y avoir une absorption de certains produits après application sur la peau (Amoric, 2000). C’est le cas notamment de certains filtres solaires minéraux, comme le dioxyde de titane (TiO2) et l’oxyde de zinc (ZnO), mais aussi de certains actifs anti-âge, ayant une action sur

la modulation des gènes ou des cellules de l’immunité. Cependant, peu d’études ont été réalisées et il existe peu de données sur la biodisponibilité des thérapeutiques locales en peau saine et en peau lésée.

De plus, le massage, par stimulation des capillaires dermiques, augmente la pénétration des cosmétiques.

Une des tendances actuelles est l’utilisation des huiles essentielles en cosmétologie. Ces huiles essentielles sont généralement dermocaustiques, elles entrainent des brûlures de la peau et des muqueuses à l’état pur. Il est donc impératif de les utiliser diluées, sur un support huileux. Malgré ces précautions, elles restent interdites dans la formulation de produits dermo-cosmétique destinés à l’enfant et ne doivent pas non plus être utilisées chez la femme enceinte. Cette mesure a été publiée en Août 2008, par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSaPS), dans les recommandations d’utilisations et de restrictions des dérivés terpéniques, provenant notamment d’huiles essentielles. Cette réponse réglementaire fait suite à plusieurs cas de convulsions et autres effets indésirables systémiques sérieux observés chez les jeunes enfants, suite à l’utilisation de topiques contenant des huiles essentielles.

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3.2.2 Cas de l’hydratation cutanée

L’hydratation cutanée est un phénomène par lequel l’eau se fixe à la kératine par l’intermédiaire du Natural Moisturizing Factor (NMF), situé dans les cornéocytes. Le NMF est un ensemble de composés hygroscopiques. Aussi, le glycérol et l’acide hyaluronique, naturellement présents dans l’épiderme captent l’eau et aident à maintenir l’hydratation. Si la peau manque d’eau, la kératine n’est pas bien hydratée et le teint perd son éclat, son aspect est altéré et son confort diminue (Laboratoires Pierre Fabre, Keratin Hydratation cutanée, 2011).

Les cosmétiques hydratants luttent contre la sécheresse de la peau grâce à une action relipidante de surface. Ils ont pour but d’être incorporés dans la couche cornée et d’y retenir l’eau, afin d’augmenter la quantité d’eau présente dans la peau. Ils contiennent majoritairement des fractions du NMF, de l’acide hyaluronique, du glycérol et des céramides.

La cosmétique de l’hydratation cutanée repose sur deux concepts qui peuvent être isolés ou associés, selon le type de peau, ou l’effet recherché. D’une part, apporter à la couche cornée des substances hydrophiles, aux capacités hygroscopiques. Ces dernières sont capables de capter l’eau et de la retenir, ce sont les substances humectantes. Leur structure est proche du facteur naturel d’hydratation, le NMF. D’autre part, reconstruire la structure de la barrière cutanée ou la protéger contre les agressions. Ceci grâce aux propriétés occlusives des corps gras, permettant de diminuer l’évaporation de l’eau et de restaurer une perte en eau normale.

Ces deux types de molécules seront mis en émulsion pour obtenir un produit complet, à l’effet hydratant. Selon le procédé utilisé, on obtient des émulsions « Huile dans Eau » (H/E) ou « Eau dans Huile » (E/H) (cf. Partie III 3.).

Le produit hydratant s’adresse aux peaux non lésées, sèches et desséchées, ou à l’entretien des peaux normales. Les peaux sèches perdent leur souplesse et leur douceur, elles deviennent ternes, rêches, craquelées. La peau sèche peut être gênante et inconfortable, voir tirailler. Cela concerne surtout les jambes, le visage et les mains. La peau sèche est souvent due aux agressions extérieures : soleil, froid, vent, certains produits chimiques, ménagers ou encore, certaines forces mécaniques d’abrasion ou de torsion.

L’action d’un produit hydratant est rapide. Pour obtenir un effet durable, il suffit d’augmenter la fréquence d’application. L’application d’un hydratant est préférable après la douche ou le bain, car la peau, légèrement humide et ramollie, est plus propice à absorber les molécules.

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3.2.2.1 L’hydratation par agent kératolytique

Certaines peaux sèches, dues à un trouble de la kératinisation, se traduisent par une hyperkératose. Dans ce cas, la peau est anormalement épaisse, rugueuse, elle perd de sa souplesse et, dans les cas extrêmes, se « casse », à l’origine de fissures douloureuses. La desquamation, normalement invisible, devient alors apparente. La couche cornée anormale s’élimine sous forme de squames visibles, plus ou moins nombreuses, épaisses et abondantes. Des rougeurs et démangeaisons apparaissent, traduisant l’inflammation de la peau, mal protégée par une barrière déficiente (MAGEC, Ichtyose et Hyperkératose).

Il faut alors conseiller des émulsions contenant un agent kératolytique, ayant pour but une exfoliation chimique de la surface de la peau. Parmi les agents kératolytiques, on emploie l’acide salicylique et l’acide lactique, utilisés à des concentrations inférieures à 5%, l’urée, à une concentration inférieure à 10% ou le propylène glycol à une concentration inférieure à 60%. L’association, au sein d’une même émulsion, de différents agents kératolytiques, permet de diminuer leur concentration propre et donc de diminuer leur pouvoir irritant, tout en gardant une bonne synergie d’action. Ces produits sont réservés à un usage corporel et ne doivent pas être appliqués sur le visage, car ils présentent un risque de brûlure sur cette zone. De même, ils sont contre-indiqués chez le nourrisson. Certains de ces produits, dont les dosages en agents kératolytiques sont relativement faibles (par exemple, l’acide salicylique dosé à moins de 2 %), sont autorisés chez l’enfant de plus de trois ans.

Cependant, certaines formes graves de sécheresse hyperkératosique pathologique, ou ichtyose, nécessitent des traitements médicaux internes, comme les rétinoïdes aromatiques : SORIATANE® (Acitrétine) 10 mg ou 25 mg. Ce médicament est efficace, mais ses nombreux effets indésirables imposent de n’utiliser ce produit qu’en ultime recours thérapeutique.

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3.2.2.2 L’hydratation par agent émollient

C’est une catégorie de produits qui vise à améliorer le toucher de la peau, en la rendant plus souple et plus douce. Ils s’appliquent sur une peau normale ou sur une peau présentant de légers troubles de la kératinisation. Cependant, les émollients sont surtout indiqués pour les peaux sèches, à caractère finement squameux, avec exagération des ridules et une consistance rêche ou rugueuse au toucher. Cela concerne notamment les dartres, petites plaques de peau sèche, souvent situées sur les joues des enfants ou sur la face externe des bras. Parmi les émollients, on trouve les antis déshydratants, à l’effet occlusif (comme la vaseline, les alcools gras, les cires, les huiles végétales) et les agents humectants, apportant et fixant l’eau (tels que les constituants du NMF, l’acide hyaluronique et la glycérine) (Moncrieff et al., 2013).

L’effet émollient est obtenu par une émulsion E/H en formant un film lipidique continu de surface, qui persiste un temps donné sur l’épiderme. Cette émulsion permet aussi le maintien d’une quantité d’eau suffisante dans le stratum corneum. Ces hydratants sont plus fluides et légers et les formes galéniques utilisées sont principalement des émulsions légères ou des laits. L’application d’un émollient sur l’épiderme est représentée sur la figure ci-dessous.

D’après les illustrations précédentes, la perte insensible en eau est bien plus présente sur une peau non recouverte d’un agent émollient que sur une peau hydratée par celui-ci.

Figure 34 : Représentation d'une peau normale (à gauche) et d'une peau hydratée par un agent émollient (à droite) (d’après Telofski et al. 2012)

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Les émollients sont utilisés en cas d’atopie principalement, afin de : lutter contre la déshydratation, reconstruire le film hydrolipidique de surface et limiter l’extension de l’inflammation et du prurit. Les signes cliniques d’atopie se caractérisent dès le plus jeune âge, par des lésions cutanées d’eczéma, localisées sur les joues, au niveau des plis (cou, coudes, genoux), ou comportent des «zones bastion» (mains et poignets, chevilles) qui subsistent de façon chronique. Des poussées saisonnières sont notées le plus souvent en automne et en hiver. Certains enfants restent handicapés par des poussées plus généralisées, qui peuvent revêtir un aspect de prurigo (prurit intense de la peau avec des papules érythémateuses et vésiculeuses) aux membres.

Les émollients sont très utiles aussi pour le sevrage de la corticothérapie locale.

3.2.2.3 L’hydratation par corps gras

Une peau très sèche et délipidée nécessite une crème grasse, riche et nutritive. Une fois la phase aqueuse évaporée, la phase grasse reste à la surface de la peau pour former un film protecteur. Ainsi, les formes galéniques utilisées pour ces hydratants très gras sont les cérats, les cold cream, les huiles, les baumes ou les crèmes épaisses.