Une promotion dans l’« urgence »
7. Le point de vue des entités‐relais
7.1 Trajectoire de vie, décisions et moments clés
7.2.1 Accueillir un « ado »
moment, c’est aussi parce que moi j’ai demandé, … Avant, il venait par défaut dans ma chambre, il venait, il posait sa veste et ses chaussures dans ma chambre et puis c’était la pièce de la transition pour aller dans le reste de la maison, c’était ma chambre. Au niveau de l’espace, moi j’avais besoin de quand même pouvoir être tranquille dans ma chambre même s’il était là, bon parfois, il discute avec les parents, il reste à table un peu plus longtemps, les soirs où il est là, et du coup nous on va dans notre chambre, mais il vient nous dire salut, enfin quand il part. Ou alors on reste tous ensemble à table. Donc, oui il y a eu quelques problèmes, enfin c’est un grand mot, mais après on en a parlé et ça s’est réglé. Et ça va très bien finalement. » (Valentin, 17 ans, membre de la famille Tinguely)
En somme, à la lecture de ces propos, on peut dès lors entrevoir que les personnes rencontrées n’associent pas leur action à une forme de bénévolat, premièrement car celle‐ci se tient dans leurs espaces privées (« maison »), soit dans leur intimité et sur un temps qui n’est de loin pas considéré comme astreignant ; mais surtout elles évoquent la création d’un lien affectif important ; mais alors quelle place les entités‐relais donnent‐elles aux personnes accueilli.e.s ?
7.2 Faire famille ou ne pas faire famille
Ce chapitre s’intéresse à comprendre pourquoi ces personnes ont émis un plus grand intérêt à accueillir un adolescent et non une personne adulte. Découlant de cette dynamique, la notion de « famille » et comment chaque entité‐relais lui donne du sens est explorée, notamment à travers les différents termes de référence et d’adresse employés au sein de ces différentes relations. Les champs de tensions sont ensuite mis en exergue. Enfin, l’avenir certain ou incertain de ces différentes liaisons est mis en lumière.
7.2.1 Accueillir un « ado »
Les jeunes migrant.e.s considéré.e.s sont généralement des adolescent.e.s bénéficiant de la protection qui leur est due, comme mineur.e.s, dans le cadre de la protection des droits de l’enfant. A Genève, un projet tel que « un set de plus à table » imaginé par le SSI concerne donc des adolescent.e.s et jeunes adultes de 15 à 25 ans qui ont été placé.e.s en foyer ou disposent d’un logement de l’Hospice général ou parfois de leur propre appartement ou colocation. Dans d’autres cantons, le même projet chapeauté par le SSI en collaboration avec d’autres associations concerne aussi des adultes. De facto et comme nous l’avons vu dans l’historique du projet, ce sont souvent de jeunes adultes qui sont accueilli.e.s par les entités‐relais. Bien que les accueilli.e.s soient formellement des adultes si ils et elles ont plus que 18 ans, elles et ils sont encore considéré.e.s comme des « ados », c’est‐à‐dire ni des enfants, ni de « vrai.e.s » adultes. En conséquence, elles et ils sont accueilli.e.s comme des mineur.e.s même si ce sont des personnes majeures sur le plan juridique comme on peut le constater dans l’énoncé de Claudine : Oui, je pense parce que je pense qu’à cet âge‐là on a vraiment besoin encore (même si il était déjà un tout jeune adulte), on a encore besoin d’une famille. Enfin, on en a peut‐être besoin à tout âge. Mais quand même, on voit bien avec les jeunes d’ici, à 18 ans, t’as besoin de tes parents, t’as besoin de ta famille, t’es pas ... voilà c’est cette période qui sépare l’adolescence vraiment de l’âge adulte, moi je pense qu’il y a quand même un âge, t’as beau être adulte sur le plan de la loi, t’es encore bien adolescent quoi. Ouais, cela aurait été très différent si il avait eu 25 ou 28 ans mais je pense que cela aurait aussi été très différent si il avait eu 14‐15 ans parce que y aurait eu aussi d’autres besoins en termes éducatif, scolaire, et tout. (Claudine, membre de la famille Cuénod)
Et elle surenchérit en ajoutant la particularité de ces mineurs :
« Moi, en fait, j’étais sensibilisée au sort et au fait que ce soit des mineurs non accompagnés et seuls. C’est ça qui m’a vraiment... Après, c’est vrai qu’il n’était pas mineur, et puis peu importe, mais c’était le fait quand même... et je pense que c’est pour ça que c’est en lien avec mon métier aussi, c’est qu’en tout cas moi, au départ, imaginer tous ces adolescents avec en plus tous ces parcours chaotiques et les traumatismes qu’ils ont vécus. De dire qu’ils n’ont même pas de parents, qu’ils n’ont personne qui s’en occupe. Peut‐être qu’on l’aurait. Mais moi ce qui me touchait dans l’histoire, c’était vraiment le fait qu’il soit mineur ». (Claudine, membre de la famille Cuénod).
Comme le dit Claudine, elle considère le jeune homme qu’elle a accueilli comme un mineur (même s’il avait 18 ans) ayant encore besoin de la protection des enfants et d’une famille (sur place), notamment du fait des traumatismes que ces mineurs migrants ont subis durant leur trajectoire pour arriver en Suisse. On peut associer l’évocation de ces parcours traumatisants au registre de la victimisation (Lems, Oester, Strasser, 2019) et de la compasssion (Fassin, 2016).
Les entités‐relais qui accueillent ces très jeunes adultes tendent donc à les considérer comme des mineur.e.s ou de jeunes adultes qui devraient encore vivre chez leurs parents se rendant bien compte du manque de maturité (Van de Velde, 2008), et parfois d’autonomie et d’indépendance (De Galland, 2010) de la plupart des jeunes ordinaires vivant dans leur propre famille ou dans celles de familles amies. En fait, tous les membres des entités‐relais affirment qu’il serait difficile d’accueillir de « vrais » adultes. L’accueil qu’elles proposent est un accueil familial, même s’il n’est que partiel (les jeunes migrant.e.s ne vivent généralement pas dans la famille comme nous le savons déjà). C’est donc un jeune, un mineur, presque un enfant de plus que l’on accueille en famille, sur un mode familial et parce qu’il a besoin d’une famille.
C’est ce que souligne Pascal en indiquant que s’il s’agissait d’un.e trentenaire, les rapports qu’ils entretiendraient avec elle ou lui s’en trouveraient ne pas être les mêmes:
« Mais ça serait différent, tu vois si c’était quelqu’un de 30 ans, parce que bien sûr qu’il devrait aussi se former, apprendre la langue et tout ça mais enfin, j’imagine qu’on ne pourrait pas avoir les mêmes rapports qu’on a avec quelqu’un comme Tesfay ». (Pascal, 61 ans, membre de la famille Cuénod)
Matis, pour sa part, imagine que l’accueil dont a bénéficié Mewael a été facilité par le fait qu’il a
d’abord été accueilli comme enfant dans la famille et qu’il a ainsi pu se lier avec Valentin, proche de son âge : « Bah moi je pense que cela a été plus facile, car au début, il restait beaucoup avec
Valentin, il allait tout le temps dans sa chambre et tout ». (Matis, 12 ans, membre de la famille
Tinguley) Dans la famille Andra, James imagine que la facilité qu’Asante a avec les enfants réside dans le fait qu’il n’est pas encore un adulte : « Une personne adulte cela aurait peut‐être exclu nos enfants. Et Asante pour ça il est chou, il joue avec nos enfants, il joue aux cartes, il aime jouer aux cartes. Il joue même avec Mina avec des ‘jeux de Mina’… Des jeux avec un imagier. » (James, 40 ans, membre de la famille Andra) Violette imagine aussi que cette proximité se trouve renforcée car Léo a le même âge que le frère d’Asante resté en Érythrée. En revanche, elle témoigne de son expérience en tant qu’enseignante
dans un établissement secondaire genevois et me confie que de manière générale, elle ressent que la jeunesse fait peur à de nombreuses personnes :
« C’est dommage, parce que la jeunesse fait peur, quand même. Parce que quand moi je dis que je travaille avec des adolescents, déjà on me dit « ooohhh » (d’un air étonné, ou apeuré). Mais c’est vrai qu’un jeune étranger, ça fait très peur, qui a peut‐être vécu en plus des épisodes violents ou des situations difficiles. Ça fait peut‐être encore plus peur. Mais c’est vrai qu’à priori on avait l’impression que ces jeunes, qu’il y avait une demande de.. et que du coup, là c’était l’occasion pour nous de faire quelque chose pour eux. (Violette, 40 ans, membre de la famille Andra, 17 juin 2019)
Ici, elle rappelle les idées associées aux figures de l’adolescence « hors de contrôle » (Lems, Oester, et Strasser, 2019) et de l’étranger.e.s associées à une idée de répulsion (Simmel, 2019) et dont la superposition renvoie à la figure suspicieuse des jeunes migrant.e.s (Lems, Oester et Strasser, 2019).
Elsa, elle‐même jeune adulte apprécie que la personne qu’elle accueille avec ses amies soit une adolescente et non pas un adulte confirmé auprès de qui on imagine qu’elle ne pourrait pas jouer le même rôle d’amie mais de cadre aussi :
« Oui, parce que je sais que j’ai un lien facile avec les ados. Donc je pense que cela aurait plus compliqué quelqu’un de plus âgé, peut‐être en fait. » (Elsa, 28 ans, membre de l’entité‐relais des copines)
A l’inverse, Alexandre semble trouver plus difficile de partager cette proximité avec un adolescent tout en constatant que l’adolescent accueilli peut se lier avec les autres « enfants » plus âgés de la famille : « Un ado c’est plus compliqué d’entrer en complicité, si c’est un adulte, il y a certains aspects qui sont plus faciles. Comme on a encore aussi des enfants plus âgés mais pas tellement plus, c’est plus simple et c’est vrai que pour le jeune c’est plus sympa d’avoir des gens de son âge. » (Alexandre, 64 ans, membre de la famille Torre). A la lecture de ces différents énoncés, on se rend compte que les entités‐relais accueillent les jeunes en famille comme leur « suggère » la section genevoise du SSI, y compris dans le cas de l’entité des copines‐relais. Elles ne les accueillent pas comme si c’était leurs propres enfants, mais un peu quand même. En fait, comme on va le voir, elles font famille et ne font pas famille à la fois quand elles s’engagent dans le projet. Et en aucune façon elles se verraient accueillir des adultes confirmé.e.s.
L’idée qu’on accueille plutôt des enfants ou des ados dans une famille que des adultes a d’ailleurs perturbé Mélina qui ne comprenait pas comment certaines demandes au SSI mentionnaient que la famille voulait accueillir un enfant :
« J’avais aussi beaucoup de demandes de familles qui voulaient absolument une fille entre 10 et 14 ans. Alors j’étais là, ‘bon déjà une fille c’est compliqué et puis soyez heureux de savoir qu’il n’y a pas des RMNA entre 10 et 14 ans ici, quoi. Parce que cela implique qu’à 6 ou 8 ans, ils sont partis de chez eux, enfin en fonction de l’âge. Enfin, il y avait toujours un peu cette préconception comme quoi un petit ou une petite, cela allait être plus facile, en plus parce que l’on a des enfants petits. Enfin, il y avait un peu tout un imaginaire autour de ça. » (Mélina, professionnelle du SSI) En fait, il semble que l’enfant plus que l’adulte suscite le devoir de protection et l’affection (Fassin, 2016) qui lui est corrélée (Lems, Oester et Strasser, 2019). Il s’agit aussi d’offrir un cadre familial et ce type de cadre est plus souvent pensé pour des enfants que pour des adultes.
Du côté de Carole, le fait que Semere soit arrivé juste encore mineur a facilité ses rapports avec lui en lui donnant encore un rôle de protection sans pour autant être un jeune enfant qui lui aurait demandé davantage de temps et d’encadrement :
« Alors ça va très bien avec ma vie et mon besoin d’être libre et indépendante. Mais je trouve que… Nous, on l’a rencontré et une petite année après, il était majeur. Isaias [qui est en lien avec la famille Sandoz] il est beaucoup plus jeune et cela amène un autre lien, une autre sensibilité. Moi je suis assez contente qu’il soit arrivé mineur. Je pense que cela m’a donné un rôle pour m’engager dans la relation, tu vois.
Un rôle où il faut le protéger encore un petit peu, tandis que si j’avais rencontré un mec de 25‐30 ans, là t’es dans toute autre chose. Comme Hakim, avec Irène et Nicolas, ils sont dans un autre lien aussi. Hakim, il a son petit frère, il s’occupe de son petit frère aussi. (Carole, 48 ans, membre de la famille
Moretti)
Isabelle partage le même avis que Carole, même dans le rapport physique qu’auraient deux adultes. Avec Mewael, elle sent qu’elle est l’adulte et lui l’adolescent. Raison pour laquelle, elle établit la même comparaison que Carole concernant la posture d’Hakim dont la maturité et les responsabilités font de lui un adulte qui s’intègre mieux autour des personnes adultes que des enfants :
« Et si lui, il avait été beaucoup plus grand que nos enfants, un adulte. Il y aurait eu ce truc dans le rapport physique, il y aurait eu une distance. Il y aurait eu une ambiguïté sur le rôle. Je suis la vieille, il n’y a plus de doute. Ça facilite mais j’imagine que c’est tout aussi faisable avec un adulte aussi. Mais c’est clair que le fait qu’il soit enfant. Dans un univers avec des enfants, où tu les reçois tu le mets avec les enfants, pas avec les adultes. Akim, par exemple, je pense que tu le mets plus avec les adultes, il s’assied à table, il discute avec les adultes, jamais il va jouer à quatre pattes, il ne va pas faire le fou autour des autres en tournant avec un coussin pour les taper sur la tête, tandis que pourtant ils ont quasiment le même âge. Il y a une histoire de posture. Mewael, c’est un gamin, avec tout ce que cela implique (rire). » (Isabelle, 47 ans, membre de la famille Tinguely)
Elle ajoute, comme Matis plus haut, que la très faible différence d’âge entretenue entre Valentin (l’un de ses fils) et Mewael a grandement facilité leur rapport :
« En tout cas, c’est sûr que quand Mewael a débarqué, pour le cas de notre rencontre à nous, le fait qu’il y ait des enfants du même âge, Mewael et Valentin, ils ont 6 mois d’écart, ça été ultra facilitant. »
(Isabelle, 47 ans, membre de la famille Tinguely)
Les entités‐relais proposent un accueil familial ou amical (voir de sororité) aux personnes qu’elles reçoivent et tombent toutes d’accord pour dire que cet accueil est d’abord fait pour des non‐adultes encore destiné.e.s à être protégé.e.s, bien qu’une majorité de ces jeunes soient déjà majeur.e.s (voir
portraits). Ainsi, comme le souligne O. De Galand (2011), l’accession à l’âge adulte ne semble plus
correspondre à la majorité mais semble dès lors pouvoir durer dans le temps à travers une forme de transition moins linéaire et standardisée qu’auparavant où certains seuils considérés plutôt comme des passages (mariage, fin des études, …) étaient presque obligatoirement franchis. Ici, le fait que le parcours migratoire des jeunes soit parfois évoqué illustre plus généralement un certain degré de maturité d’une part mais d’autre part celui‐ci est également associé à la figure de victimisation (Lems, Oester, et Strasser, 2019), notamment car les propos ci‐dessus tendent à laisser penser que ces jeunes devraient encore avoir le droit de poursuivre leur adolescence, étant donné qu’ils et elles ne sont pas encore considéré.e.s comme des « adultes ». Il convient alors de se demander comment la personne est intégrée dans la famille (sauf exception pour l’entité‐relais formée par les amies) et comment sa place est pensée y compris dans le système de parenté symbolique.
7.2.2 Autour de la notion de famille
Comme on a pu le constater dans le graphique présenté précédemment (voir supra.) la configuration la plus fréquente au sein du projet « un set de plus à table » est représentée par des familles avec des enfants, au point d’ailleurs, qu’à Genève, le nom d’origine éponyme reste dans l’ombre et a laissé place à l’expression « famille‐relais » ; tant chez les jeunes accueilli.e.s que dans les familles elles‐mêmes. De surcroît, même la chargée de projet du SSI emploie ce terme qu’elle préfère à celui de parrainage :
« C’est pour ça que à Genève, le projet on ne l’appelle pas le parrainage, c’est le projet de ‘famille‐relais’. Je préfère le terme de « famille‐relais » même si des fois c’est des personnes seules mais ce n’est pas grave. Cela reste un ‘relais’ justement auprès de ces jeunes, et je trouve que c’est plus parlant. » (Mélina,
professionnelle du SSI)
Enfin, les documents officiels genevois utilisent aussi ce terme de famille. En fait tous et toutes utilisent ce terme pour se définir en tant qu’accueillant.e.s autant en auto‐identification à l’exception des couples sans enfant et des membres d’une colocation. J’ai néanmoins choisi d’utiliser le terme d’entité‐relais pour ne pas réifier le terme de famille et pour ne pas laisser penser au lectorat que seules des familles servent de relais. Par ailleurs, il faut être âgé au minimum de 25 ans pour être entité‐relais, car comme me l’a expliqué Mélina (SSI), il est préférable que les personnes accueillantes soient dotées d’une certaine maturité pour « être un relais » auprès des jeunes migrant.e.s. Par ailleurs, bien que l’âge ne garantisse pas toujours un certain degré de maturité, cette exigence permet également de ne pas rentrer en concurrence avec un autre projet mis en place auprès des RMNA dans ce canton, il s’agit du projet « binôme d’intégration jeunesse »29 de la Croix‐ Rouge.
La notion de famille est donc très présente dans tous les énoncés qui décrivent le projet « un set de plus à table ». Mais qu’est‐ce qu’une famille pour mes interlocuteurs et interlocutrices ? Terence s’interroge à ce propos : « Mais déjà c’est quoi une famille ? Suivant chez qui tu vas, c’est un papa et une maman, il paraît. Et il y en a d’autres qui s’en foutent complètement et qui disent que c’est un endroit un peu rassurant, qui te permet de grandir. » (Térence, 55 ans, membre de la famille Sandoz) L’insistance sur la famille comme « un endroit un peu rassurant » dont la bienveillance est absolue et qui permette de grandir s’oppose probablement aux différents pays d’origine que ces jeunes ont quittés ou au lieu de vie de remplacement temporaire qui leur a été octroyé (le foyer de l’Etoile, souvent vivement critiqué) peut être différemment interprété, mais fait probablement référence à un registre compassionnel (Fassin 2016) qui associe les jeunes migrant.e.s à l’enfance, à la vulnérabilité et à une figure victimaire (Lems, Oester et Strasser, 2019).
Au sein du couple Cuénod, le sens donné à leur engagement familial transmet une version assez idéalisée où Tesfay est presque considéré comme un de leurs enfants :