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Le mod` ele MACMA : MAnteau Convectif Multi-Agents

5.5 Lois empiriques et semi-empiriques

5.5.2 Accr´ etion au niveau des dorsales

Nous avons vu au chapitre 2 que l’accr´etion de plancher oc´eanique au niveau des dorsales ´etait suppos´ee sym´etrique (M¨uller et al., 2008), car l’influence des panaches li´es aux points chauds du manteau est n´eglig´ee dans ce mod`ele. Si l’on consid`ere la dorsale oc´eanique s´eparant les plaques A et B de vitesses respectives UA et UB dans un r´ef´erentiel absolu, alors le taux de production de plancher oc´eanique total s’´ecrit simplement pour cette dorsale UB − UA, en comptant positivement les mouvements dans le sens de d´eplacement de B. L’hypoth`ese d’accr´etion asym´etrique implique que le taux de production pour chaque plaque s’´ecrit en fonction de la vitesse Vr de l’axe de la dorsale :

UB− UA

2 = Vr− UA= UB− Vr (5.33)

ce qui conduit `a une expression simple de la vitesse de migration de la ride oc´eanique :

Vr= UA+ UB

2 (5.34)

5.5.3 Continents

insubmersibles

Du fait de leur faible densit´e, les continents sont astreints `a se d´eplacer en surface `a la vitesse de la plaque dont ils font partie, mais sans jamais plonger dans le manteau. Par cons´equent, leur migration les m`ene toujours `a l’extr´emit´e de la plaque sur laquelle ils sont fix´es : le slab correspondant plonge dans le manteau, et quand le continent arrive en but´ee de plaque, le slab se d´etache et le bord du continent co¨ıncide alors avec la fronti`ere de la plaque, comme l’illustre la figure 5.7. Si le plancher de la plaque adjacente est plus vieux que l’ˆage de

plongeon spontan´e τsubd , cette section oc´eanique entre en subduction. Dans le cas contraire, les deux plaques sont sutur´ees sans modifier la distribution des ˆages du plancher.

Figure 5.7 – Arriv´ee d’un continent en but´ee de plaque. (a) Quand la totalit´e de la section oc´eanique pr´ec´edant un continent a ´et´e subduite, le slab se d´etache sous l’action de son propre poids, et la traction gravitaire associ´ee disparaˆıt. (b) Ensuite, soit la plaque adjacente est suffisamment ´epaisse pour plonger (non repr´esent´e), soit les plaques sont sutur´ees (cas illustr´e).

5.5.4 Suture de plaques

Il existe plusieurs contextes tectoniques qui d´ebouchent sur une impossibilit´e de cr´eer une zone de convergence entre deux plaques. Dans ce cas, le mouvement relatif des deux plaques est nul, ce que nous nommerons unesuturede plaques. Le premier cas est celui de l’arriv´ee d’un continent en but´ee de plaque, avec un plancher de la plaque oppos´ee trop jeune pour entrer en subduction spontan´ement (figure 5.7). Un autre cas relativement courant est celui de la subduction d’une dorsale (`a l’image de la disparition du plancher jeune de la plaque Farallon sous l’Am´erique du Nord) : les fronti`eres de plaques ´etant mobiles, il arrive que l’axe d’une dorsale migre vers une zone de subduction, et quand la plaque plongeante est totalement pass´ee dans le manteau, le slab pull et le ridge push disparaissent. Dans ce cas, la plaque sup´erieure se retrouve accol´ee au plancher tr`es jeune qui bordait la ride oc´eanique, et si aucune des deux sections n’est assez ´epaisse pour entrer en subduction, elle restent en surface sans qu’aucune force ne puisse les faire converger ou diverger : elle ont donc mˆeme vitesse. C’est ce que nous illustrons par une agrafe entre deux plaques qui deviennent solidaires (cf pastille noire sur les figures 5.7 et 5.8), mais pr´esentent une discontinuit´e d’ˆage du plancher oc´eanique qui pourra donner lieu `a un plongeon spontan´e quand l’une des sections oc´eaniques aura atteint l’ˆage critique τsubd. Il y a aussi suture entre deux plaques lors d’une collision continentale : la plaque plongeante s´eparant les deux plaques se d´etache imm´ediatement apr`es la collision, et puisqu’une lithosph`ere continentale est trop l´eg`ere pour entrer dans le manteau, et que nous n´egligeons dans le mod`ele actuel la formation

des chaˆınes de montagnes, les deux continents restent en surface sans s’interp´en´etrer. Le supercontinent ainsi form´e est donc bord´e de deux dorsales oc´eaniques, et le nouveau bilan des forces comptera deux actions de ridge push, et aucune traction gravitaire. Un dernier cas d’agrafage entre plaques est possible : il intervient lors de la cr´eation d’un bassin d’arri`ere-arc, qui s’inscrit dans le processus de migration des fosses de subduction. Notons ici que dans un mod`ele tridimensionnel, une suture devient une ligne, au mˆeme titre que les fronti`eres de plaques, et que cette ligne peut ˆetre d´efinie `a certains endroits comme la juxtaposition d’une suture avec une zone convergente ou divergente. C’est un des aspects complexes du passage `

a un mod`ele 3D : ce travail n´ecessite une ´etude sp´ecifique, qui pourra largement s’appuyer sur la gestion des agents de notre mod`ele.

5.5.5 Migration de la fosse de subduction

Le d´eplacement des zones de subduction est un probl`eme qui r´esiste depuis longtemps aux tentatives de mod´elisation de la tectonique des plaques, et il reste difficile de rendre compte de la diversit´e des comportements observ´es sur Terre (e.g., Heuret, 2005). La dynamique des fosses de subduction a ´et´e notamment ´etudi´ee par des exp´eriences analogiques (e.g., Griffiths et al., 1995; Guillou-Frottier et al., 1995; Funiciello et al., 2003; Heuret et al., 2007; Funiciello et al., 2008), des ´etudes statistiques bas´ees sur des observations de terrain (e.g., Heuret et Lallemand, 2005; Heuret, 2005), ou encore des ´etudes de mod´elisation analytique (e.g., Lallemand et al., 2008; Goes et al., 2011). La relation entre le mouvement de la fosse et le r´egime compressif ou extensif de la plaque sup´erieure n’est pas explicite `a l’heure actuelle, et nous proposons donc dans ce mod`ele d’utiliser un m´ecanisme simple qui rend compte de la plupart des ph´enom`enes observ´es, en se basant sur un crit`ere structurel pour d´eterminer le mouvement de la fosse de subduction.

Dans notre mod`ele, `a l’initiation d’une subduction, la fosse se d´eplace `a une vitesse Vt ´egale `a la vitesse de la plaque sup´erieure Vup , et cela reste vrai de mani`ere g´en´erale pour

Figure 5.8 – Suture de plaques due `a la subduction d’une dorsale. (a) L’axe de la dorsale migre vers la fosse de subduction `a la vitesse Vr ´egale `a la demi-somme des vitesses des plaques verte et bleue. (b) Si aucune ne peut plonger, les deux plaques deviennent solidaires, et une agrafe vient marquer la discontinuit´e d’ˆage du plancher oc´eanique.

la suite, comme cela est sugg´er´e par Heuret et al. (2007). Un tel r´egime est dit compressif ou neutre (Lallemand et al., 2008) car la plaque plongeante reste au contact de la plaque sup´erieure. Ce comportement n’est modifi´e qu’en cas d’apparition d’un r´egime clairement extensif, c’est-`a-dire quand la plaque sup´erieure pr´esente une vitesse qui l’´eloigne rapidement de la zone de subduction concern´ee. Nous avons choisi pour cela de nous appuyer sur un crit`ere structurel pr´esent´e sur la figure 5.9. Ce crit`ere conduit `a l’apparition d’une dorsale oc´eanique devant la fosse de subduction, et par cons´equent `a la cr´eation d’un bassin d’arri`ere-arc, quand l’entr´ee en subduction d’une plaque implique que deux fosses se succ`edent (figure 5.9b et 5.9c). La dorsale qui est alors cr´e´ee se comporte selon les lois de comportement pr´ec´edemment d´efinies, et si la section oc´eanique nouvellement accol´ee `a la fosse joue dor´enavant le rˆole de la plaque sup´erieure, l’autre section oc´eanique est sutur´ee `a l’ancienne plaque sup´erieure (en g´en´eral, un continent), jusqu’`a ce qu’elle atteigne l’ˆage critique de d´estabilisation τsubd. Notons que dans le cas de la figure 5.9b, la formation de l’arri`ere-arc commence d`es l’initiation de la subduction.

Il est clair que ce processus ne d´ecrit ni la r´ealit´e physique du m´ecanisme `a l’œuvre sur Terre, ni la diversit´e des ph´enom`enes observ´es : par exemple, ce mod`ele ne peut rendre compte d’une avanc´ee de la fosse, qui est pourtant observ´ee dans NNR pour la fosse des Mariannes et celle de Java (Heuret, 2005). N´eanmoins ce crit`ere rend compte du retrait de la fosse -roll back - observ´e `a la fois en r´egime compressif pour la fosse d’Atacama et celle des Kouriles, et en r´egime extensif pour la fosse des Tonga et celle de la plaque Scotia (Heuret, 2005; Lallemand et al., 2008). Il a de plus le m´erite d’ˆetre simple, coh´erent avec le reste du mod`ele, et robuste dans le temps. En effet, la simulation de la tectonique `a partir de ce crit`ere structurel donne des r´esultats cr´edibles sur le long terme, car il tient notamment compte de la cr´eation des bassins d’arri`ere-arc, qui compensent partiellement la perte de zones d’accr´etion entraˆın´ee par la subduction des rides oc´eaniques. Par ailleurs, l’importance donn´ee aux bassins d’arri`ere-arc dans ce mod`ele refl`ete le cas de la Terre actuelle, car ces zones de plancher jeune jouent un rˆole majeur sur la fa¸cade ouest de l’oc´ean Pacifique.

Par d´efinition, ce crit`ere structurel ne d´epend pas du r´ef´erentiel d’´etude, contrairement aux mod´elisations bas´ees sur des crit`eres dynamiques (e.g., Lallemand et al., 2008; Goes et al., 2011). C’est `a la fois un avantage et un inconv´enient : il permet d’´evaluer la pertinence du m´ecanisme en s’affranchissant du probl`eme du r´ef´erentiel abord´e au chapitre 2, mais ne tient pas compte de l’´equilibre m´ecanique de marge active : un m´ecanisme complet exigerait que l’on tienne compte de la formation de chaˆınes de montagnes en r´egime compressif, et des forces pressantes qui en d´ecoulent. Pour ces raisons, nous reviendrons sur le crit`ere propos´e ici dans le chapitre suivant, en ´etudiant un m´ecanisme concurrent, bas´e sur un crit`ere cin´ematique.