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Évolution quantitative de la législation russe de 1991 à 2011

Chapitre 3 – La législation archivistique en Russie : genèse et évolution

3.3 L’évolution de la législation archivistique en Russie de 1991 à 2011

3.3.1 Évolution quantitative de la législation russe de 1991 à 2011

Notre analyse quantitative porte sur une liste de 618 lois et textes réglementaires, promulgués durant la période allant du début 1991 à la fin 2011, période constituant les 21 premières années de la législation archivistique russe. Cet « échantillon » a été constitué à partir de listes fournies par plusieurs sources spécialisées dans le domaine de la législation et réglementation liée au monde des archives en Russie :

 deux sites spécialisés en documentation normative dans le domaine des archives et de gestion des documents, à savoir le site « Termika.ru » et « TsKDOU » (Termika 2012; TsKDOU 2012);

 le site de Rosarhiv, dans sa section « documents » (FR. AFA 2012a);

 les annexes de l’ouvrage d’Asfandijarova (2008a), donnant des listes d’actes normatifs que l’auteure considère comme les plus importants dans la législation archivistique.

Le groupe « Termika » est une compagnie s’occupant d’intégration de ressources dans les systèmes informationnels d’organisations diverses, elle offre également des services d’amélioration des ressources existantes et la conception de bases de données. Elle a, entre autres, mis au point la base ISSAO, qui contient les textes normatifs liés de près ou de loin au domaine des archives et de la gestion de documents, aussi bien promulgués par les organes législatifs ou exécutifs que par les instances du monde des archives, Rosarhiv en tête (Termika 2012). Le site du TsKDOU est le portail du Centre de Compétences pour les questions documentaires de gestion. Ce site offre du matériel d’apprentissage et de référence dans le domaine de la gestion de documents, dont notamment une liste de documents normatifs (TsKDOU 2012). Mme I.G. Asfandijarova est archiviste pour la République du Bachkortostan, et a publié plusieurs études sur la législation archivistique russe, autant au niveau fédéral que pour sa république.

Grâce à ces différentes sources, nous avons établi notre propre liste de documents normatifs, répartis selon les catégories d’actes spécifiques à la législation russe. Pour monter cet échantillon, nous sommes partis du postulat que nos sources étant spécialisées

en matière de législation et de réglementation en archivistique, elles ne pouvaient que donner une sélection concernant spécialement le domaine archivistique. Cette hypothèse de départ est discutable, mais c’était la seule manière de pouvoir constituer un échantillon représentatif, en l’absence d’accès autorisé à la base ISSAO. En effet, elle n’est pas disponible dans toutes les institutions et nous n’avons pas pu y avoir accès.

Nous avons pris en considération les types de documents promulgués ainsi que leur niveau dans la législation. Nous avons aussi considéré leur rapport direct ou indirect au monde des archives, par leur titre ou la mention de responsabilité du texte. Par exemple, un texte réglementant l’organisation ou le fonctionnement des archives, ou bien la gestion des documents, a été noté comme « directement lié », tandis que des textes plus indirectement liés au monde des archives, tels que ceux liés au monde de la culture, au secret d’État, aux codes civils ou aux lois sur les sociétés commerciales, ont été notés comme « indirectement liés ».

Il va sans dire que cette analyse quantitative est relative et comporte quelques éléments qui doivent inciter à la prudence. Un d’entre eux est l’absence de statistiques définitives des textes législatifs et réglementaires qui influent sur le monde des archives en Russie. Le domaine est en évolution constante. Bien que Termika soit une référence en la matière, elle ne donne pas tout et nous avons préféré compléter avec d’autres sources. Ensuite, les actes des organes exécutifs (le niveau le plus bas) sont plus nombreux que les actes des niveaux supérieurs et risquent d’induire un risque de surreprésentation. De même, notre sélection ne compte qu’une quantité limitée de ces textes par rapport à leur nombre total. Cela représente une imprécision importante, mais selon nous inévitable dans la mesure où il faudrait un temps considérable pour traiter l’ensemble de ces textes et décider lesquels garder ou écarter. De même, ne pas les considérer aurait laissé de côté une composante importante de la législation archivistique. Nous avons donc préféré faire confiance à nos sources et compléter avec les analyses qualitatives tirées des textes.

Lors de l’analyse de nos données, nous avons observé les éléments suivants :  La répartition par niveau des actes législatifs ou réglementaires;

 La répartition entre les textes directement ou indirectement liés aux archives;  Les cinq plus gros promulgateurs d’actes normatifs;

 La répartition temporelle de promulgation des textes normatifs (au niveau global);  La répartition temporelle de promulgation des différents niveaux;

 La répartition temporelle de promulgation entre les textes directement ou indirectement liés aux archives.

3.3.1.2 Résultats de l’analyse quantitative

L’annexe 8 présente le tableau récapitulatif de notre analyse. Sur 618 actes, nous avons déterminé que :

 556 (90%) sont des actes réglementaires;  62 (10%) sont des textes législatifs;

 380 (61%) sont des actes des organes exécutifs;  118 (19%) sont des actes du gouvernement;

 62 (10%) sont des lois fédérales ou lois fédérales constitutionnelles;  58 (9%) sont des actes présidentiels;

 418 (68%) sont directement liés au monde des archives;  200 (32%) y sont indirectement liés.

Les cinq organes ayant promulgué le plus de textes sont :  Rosarhiv, pour 310 actes (soit 50,16%);

 le gouvernement, pour 180 actes (soit 29,13%);  la présidence, pour 58 actes (soit 9,39%);

 le ministère de la Culture, pour 24 actes (soit 3,88%);  le ministère du Travail, pour 8 actes (soit 1,29%).

La répartition temporelle globale des promulgations (annexe 9) est la suivante : une augmentation progressive des actes promulgués par année, avec un nombre record obtenu dans les années 2003-2005, suivi d’une décroissance et d’une stabilisation dans les années suivantes.

Si l’on analyse l’évolution temporelle de chaque type de textes (annexes 10-11), on note des schémas d’évolution différents :

 Pour les textes législatifs : une forte croissance initiale au début des années 1990, suivie d’une décroissance progressive et stable jusqu’en 2011.

 Pour les actes réglementaires de niveau 1 (actes présidentiels) : une forte croissance initiale, suivie d’un déclin prononcé au tournant du siècle, puis un chiffre record pour les années 2003-2005, suivi d’un nouveau déclin.

 Pour les actes règlementaires de niveau 2 (actes gouvernementaux) : les années 1990 et le début du XXIe siècle sont marqués par une décroissance stable, puis un regain inattendu dans les années 2003-2005, pour revenir à une décroissance dans les années suivantes.

 Pour les actes réglementaires de niveau 3 : une activité modeste dans les années 1990, puis une activité beaucoup plus forte dans les années 200040.

 La répartition temporelle des textes directement liés par rapport aux textes indirectement liés (annexe 12) suit une distribution sensiblement identique, à des échelles différentes. Pour les deux catégories, nous avons une croissance initiale au début des années 1990, suivie d’un très relatif déclin dans la deuxième moitié. Puis, nous voyons une brusque augmentation au tournant du siècle, suivie à nouveau d’un déclin dans la deuxième moitié des années 2000. Quelques différences subsistent cependant : la courbe des textes indirectement liés est souvent légèrement en retard sur celles des textes directement liés. Ensuite, vers la fin des années 2000, on voit une recrudescence des textes directement liés alors que la courbe des textes indirectement liés continue son déclin.

Nos conclusions sont les suivantes :

 La répartition très inégale des textes législatifs par rapport aux textes réglementaires est selon nous tout à fait normale puisqu’une loi donne toujours lieu à de multiples textes d’application.

 La proportion presque 2/3 - 1/3 de textes « directement liés » au domaine des archives par rapport à ceux « indirectement liés » est selon nous aussi logique. L’inverse nous aurait davantage étonné, puisque nos sources sont spécialisées en archivistique.

 Les cinq plus gros organes promulgateurs montrent l’activité importante de Rosarhiv (surtout au niveau réglementaire), du gouvernement, de l’administration présidentielle, du ministère de la Culture (surtout depuis que Rosarhiv en dépend) et du ministère du Travail, probablement en raison de l’importance des documents d’archives pour le monde professionnel.

 La répartition temporelle (toutes catégories confondues) des promulgations illustre une croissance globale initiale de l’activité législative et réglementaire au niveau des archives, avec un nombre maximum obtenu dans les années 2003-2005. Cela n’est probablement pas un hasard, si l’on considère que c’est à ce moment-là (2004) qu’ont eu lieu deux événements cruciaux : la réforme administrative du gouvernement et l’adoption de la nouvelle loi sur les archives.

40 À ce niveau, il est possible que cela soit dû à l’absence de données pour ce type d’actes dans les années

 Plus précisément, l’évolution temporelle des textes législatifs présente un nombre maximum obtenu déjà dans les années 1994-1996, soit juste après l’adoption de la Constitution en décembre 1993. Il nous semble normal que cet événement soit suivi de l’adoption d’un plus grand nombre de lois. Ces maxima se retrouvent aussi pour les actes présidentiels et pour les actes réglementaires gouvernementaux, survenant en 1994-1996 (après l’adoption de la Constitution et l’adoption de la première loi sur les archives) et en 2003-2005 (soit pendant la « réforme administrative » et lors de l’adoption de la loi de 2004 sur les archives). Enfin, les actes réglementaires des organes exécutifs présentent leur nombre record juste avant cette période (en 2000- 2002), mais leur second maximum survient effectivement pendant 2003-2005. On peut donc en conclure que les périodes de plus grande activité sont celles suivant l’adoption de la première loi sur les archives et la Constitution (fin 1993 à 1995- 1996) et le milieu des années 2000, suite à la réforme administrative et à l’adoption de la loi sur les archives de 2004.

Dans tous les cas, il ressort de cette analyse quantitative plusieurs faits importants. D’abord, l’activité législative liée aux archives a été très intense depuis 1991 et n’a jamais perdu de sa vigueur. Ensuite, la variation du nombre de promulgations souligne l’importance des périodes entourant les années 1993-1994 et 2003-2005, soit les périodes d’adoption des deux lois sur les archives. Enfin, si l’on fait abstraction des actes de types 3 (actes des organes exécutifs), on se rend compte qu’après 2005, l’activité législative et réglementaire des niveaux présidentiels et gouvernementaux est en perte de vitesse. Nous ignorons s’il faut associer cette donnée au désintérêt du gouvernement pour le monde archivistique ou bien à l’atteinte d’un stade où l’archivistique est suffisamment régulée. À ce niveau, notre analyse qualitative nous aidera probablement à y voir plus clair.