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2. Reconnaitre les risques

2.4 Hospitalisation du patient dépressif

2.4.3 Études non randomisées

Étude de cohorte de Hollander et al. de 2013 (270)

Dans une étude de cohorte, Hollander et al. en 2013 (270) a voulu savoir si l'expérience du chômage était un facteur de risque d'hospitalisation pour trouble dépressif, et si le sexe et le statut d'immigrant modifiait ce risque.

Méthode : étude de cohorte prospective de 2000 à 2006 (n= 3 284 896) personnes âgées entre 18 et 64 ans avec un fort lien avec le marché du travail suédois afin de comparer les différences de risque d'hospitalisation pour trouble dépressif suivant une période de chômage.

Avant le début de l’étude, tous les participants ont été suivis pendant une période de 3 ans afin de détecter une éventuelle hospitalisation pour troubles dépressifs précédant la période de chômage (période de wash-out).

Critères d’exclusion : personne sans lien puissant avec le marché du travail, migrant avec permis de résidence en Suède en qualité de réfugié ou résident après décembre 1996, personne traitée pour un épisode dépressif entre 1997 et 1999 (période de wash-out).

Les données ont été recueillies à partir des registres officiels recueillis à des fins génériques. Cette étude a été réalisée avec les données statistiques de Suède et le conseil national de la santé et du bienêtre. Les variables étudiées comportaient : le statut d’emploi durant le suivi, la notion d’immigration (suédois de naissance ou non), les groupes d’âge, le sexe (féminin, masculin), le niveau d’éducation, le statut marital. Ajouté à cela : la région de naissance en cas de naissance hors Suède, le lieu de résidence en Suède (petite ou grande ville), la présence ou non d’enfant dans le foyer et les ressources économique durant l’année 2000.

Commentaires : les différences de culture liées au statut d’immigrant peuvent être source de biais notamment dans la compréhension et l’interprétation des symptômes ainsi que l’utilisation des services de santé. La durée du chômage n’a pas été évaluée dans cette étude. La crise économique, ayant augmenté le risque de chômage, peuvent être également source de biais.

Résultats

En combinant le statut d’emploi, le genre et le statut d’immigrant ajusté sur l’âge, le niveau d’éducation et le statut marital, les auteurs ont retrouvé les résultats suivants :

 homme avec un emploi suédois de naissance : HR=1

Tableau 92. Nombre de participants, % et HR(IC 95 %) pour le risque d’hospitalisation pour troubles dépressifs en fonction du statut d’emploi durant le suivi, du statut d’immigrant, du groupe d’âge, du niveau d’éducation et du statut marital d’après Hollander et al., 2013 (270)

Variables Hommes

Variables Hommes marché du travail est un facteur d’hospitalisation pour troubles dépressifs en Suède. Les femmes nées à l'étranger ayant le risque relatif le plus élevé, (HR=3.47 (3.02 à 3.98)

Les différences de culture liées au statut d’immigrant peuvent être source de biais notamment dans la compréhension et l’interprétation des symptômes ainsi que l’utilisation des services de santé. La durée du chômage n’a pas été évaluée dans cette étude. Cette étude de cohorte est de niveau de preuve 4.

Étude de cohorte de Huang et al. de 2000 (271)

Cette étude de cohorte de Huang a été réalisée en 2000. Le but était de déterminer les symptômes dépressifs présentant un risque d’hospitalisation chez le sujet âgé.

Méthode : Cette étude a été réalisée sur 6 mois et a intéressé 5 comtés dans le piedmont nord de la Caroline du Nord à partir du site de l'Université Duke extraite à partir de l’Established populations for epidemiologic studies of the elderly (EPESE). L’EPESE étant une étude de cohorte randomisée d'adultes âgés de 65 ans et plus, non institutionnalisés, vivant dans la communauté entre janvier 1986 et juin 1987 intéressant un total de 4 162 personnes. Sur ces 4 162 personnes, 676 ont été exclus ; 26 en raison de leur race (ni noir, ni blanc) et 650 en raison de perte d’information sur leur dépression ou hospitalisation. En définitive l'échantillon comprenait 3 486 adultes vivant dans la communauté, âgés de 65 ans et plus.

Critère principal : hospitalisation dans les 6 mois suivant l’entrevue de référence. Cette information étant donnée par les dossiers de l’assurance maladie fournis par le ministère américain de la Santé et des Services sociaux et par l'auto-évaluation sur entretien de suivi un an plus tard.

300 sujets ont été hospitalisés durant la période de l’étude. Les symptômes de dépressions ont été mesurés par une version modifiée de l’échelle du CES-D (Center for Epidemiologic Studies Depression Scale). Les variables additionnelles sélectionnées pour l’analyse ont inclus : les caractéristiques démographiques ou de santé documentées ou observées comprenant : l’âge, le sexe, le statut marital, l’origine, le niveau d’éducation, le mode de vie (rural ou urbain) et pour les données de santé.

La présence de comorbidité médicale, le fonctionnement physique, Les fonctions cognitives, l’autoévaluation de leur état de santé et le nombre de prescription médicales. L’invalidité physique a été évaluée par une version modifiée du Nagi score (échelle de performance physique). La cohorte a été stratifiée sur le sexe et l’âge a été stratifié en 4 groupes.

Résultats

La prévalence globale de la symptomatologie dépressive significative dans la cohorte (CES-D score ≥ 9) était de 8.5 % avec une moyenne de 2.9. L’incidence d’hospitalisation durant les 6 mois était de 9.5 %. Les symptômes dépressifs n’étaient significativement à risque d’hospitalisation que chez les hommes âgés de plus de 75 ans (RR=3.43).

D’après les résultats de cette étude, les variables ayant un risque relatif significatif et donc une association positive avec le risque d’hospitalisation sur au moins un groupe sont :

Les troubles cognitifs (groupe des femmes âgées ≥75 ans/RR=2.32)

 le score d’invalidité fonctionnelle Nagi (groupe des hommes âgés/RR=1.57 et des femmes âgées entre 65 et 74 ans /RR=1.32) ;

 une faible autoévaluation de son état de santé (groupe des hommes âgés entre 65 et 74 ans/RR=1.75) ;

 le nombre de prescriptions médicamenteuses (groupe des hommes âgés entre 65 et 74 ans/RR=1.32 et des femmes âgées entre 65 et 74 ans /RR=1.21).

Se reporter aux 3 tableaux ci-après :

Tableau 93. Caractéristiques démographiques et de santé des membres de l’échantillon de l’étude de Huang et al., 2000 (271)

Caractéristiques n % % pondéré

Sexe masculin 1174 33.7 36.0

féminin 2312 66.3 64.0

Age (année) 65-74 2191 62.8 64.4

≥ 75 1295 37.2 25.6

CES-D score 0-8 3174 91.0 91.5

≥ 9 312 9.0 8.5

Hospitalisation Non hospitalisé 3186 91.4 90.5

Hospitalisé 300 8.6 9.5

Lieu de résidence Rural 1536 44.1 43.1

Urbain 1950 55.9 56.9

Statut marital Marié 1347 38.6 52.0

Non marié 2139 61.4 48.0

Education (année) 0-8 1787 51.3 43.0

9-12 1192 34.2 38.8

≥ 13 507 14.5 18.2

Revenus <5000 $ 1381 39.6 29.1

5000-9999 $ 1020 29.3 29.0

10000-14999 $ 421 12.1 14.6

>15000 $ 664 19.0 27.2

Statut cognitif Sans trouble

cognitif 3144 90.2 90.6

Avec trouble cognitif 342 9.8 9.4

Score d’invalidité

fonctionnelle Nagi 0 1816 52.1 55.1

1 703 20.2 19.1

2 402 11.5 10.8

3 317 9.1 8.3

4-5 248 7.1 6.7

Impact des maladies

chroniques léger 1378 39.5 40.4

modéré 959 27.5 27.1

important 1149 33.0 32.5

Autoévaluation de

l’état de santé Excellent 492 14.1 15.5

Bon 1436 41.3 42.3

Correct 1109 31.8 30.3

faible 449 12.9 11.9

Nombre de 0 917 26.3 26.2

Caractéristiques n % % pondéré prescriptions

1 632 18.1 18.1

2 607 17.4 17.9

3 498 14.3 13.9

4 352 10.1 10.1

≥5 480 13.8 13.8

% : Pourcentage

Tableau 94. Moyenne des variables retenues d’après Huang et al., 2000 (271)

Caractéristiques Moyenne (déviation standard).

Age (années) 73 (6.3)

CES-D score 2.9 (3.3)

Education (années) 9.4 (4.0)

Score d’invalidité fonctionnelle Nagi 0.9 (1.3)

Nombre de prescription 2.3 (2.2)

DS : déviation standard.

Tableau 95. Estimation du RR ajusté et son IC 95 % à partir d’un modèle de régression logistique d’après Huang et al., 2000 (271)

Variable

prédictive Homme : 65-74 Homme : plus de

75 Femme : 65-74 Femme : plus de

75 Symptômes

dépressifs 2.15 (0.75-6.22) 3.43 (1.33-8.86) 1.12 (0.53-2.36) 0.46 (0.19-1.13) Déficit cognitif 1.18 (0.33-4.26) 0.41 (0.13-1.35) 0.91 (0.37-2.25) 2.32 (1.26-4.25) Nagi score 1.12 (0.88-1.41) 1.57 (1.14-2.16) 1.32 (1.08-1.61) 1.07 (0.86-1.34) Conditions

chroniques 1.00 (0.74-1.35) 0.86 (0.50-1.49) 1.22 (0.90-1.66) 1.10 (0.80-1.51) Autoévaluation de

l’état de santé 1.75 (1.17-2.63) 1.18 (0.70-1.99) 1.30 (0.89-1.91) 1.27 (0.93-1.74) Nombre de

prescriptions médicales

1.32 (1.13-1.54) 1.05 (0.81-1.34) 1.15 (1.00-1.32) 1.21 (0.98-1.50)

Commentaire

L’exclusion des 650 sujets au début de l’étude, la durée très courte de l’étude (6 mois), le type de mesure utilisé pour évaluer la dépression peuvent être également source de biais.

Conclusion

Cette étude de niveau de preuve 4 a trouvé un risque d’hospitalisation associé à des symptômes dépressifs triplé chez l’homme âgé de plus de 75 ans (RR=3,43). D’après les auteurs, les autres facteurs de risque d’hospitalisation chez le sujet âgé comprennent : la présence de troubles cognitifs :

 une invalidité fonctionnelle au Nagi score ;

 une faible autoévaluation de son état de santé ;

 et le nombre de prescriptions médicamenteuses ;

 avec des associations variables en fonction du sexe et des tranches d’âge (65-74 ans et ≥75 ans).

Étude de cohorte de Lerer et al. de 1999 (272)

Lerer et al. en 1999 a étudié les causes possible de l'hospitalisation psychiatriques chez les patients présentant une dépression (résultats du projet Jerusalem Collaboratif Depression) dans une étude de cohorte de 107 patients qui ont été admis dans les 4 hôpitaux et dans 1 hôpital général de la région de Jérusalem au cours d'une période de 14 mois.

Le but de cette étude de cohorte non randomisée, était d’identifier les patients nécessitant une hospitalisation, du point de vue sociodémographique, clinique et du traitement, et ainsi identifier les facteurs déclenchant possibles qui doivent encore être évalués.

Méthode : 252 patients subissent un dépistage initial s’ils ont été signalés déprimés par la personne qui a fait leur admission indépendamment de leur diagnostic d'admission précis. Ce dépistage initial consiste en un bref entretien psychiatrique par un membre de l'équipe de recherche. Dans l’article il n’est pas précisé la formation des membres de l’équipe.

145 patients ont été classés dans l'une des catégories de diagnostic de la CIM-9 (trouble dépressif majeur, épisode isolé, le trouble dépressif majeur, épisode récurrent, trouble atypique dépressif, trouble affectif bipolaire, dépression, type dépressif psychotique dépression névrotique).

Les 145 patients présentant l'un des diagnostics provisoires suivants selon la CIM-9, ont été évalués à l’aide d’un entretien clinique détaillée par l'un des enquêteurs.

107 ont répondus aux critères de la DSM III–R (critères diagnostiques pour l'entrée dans la cohorte) et ont subi le reste de la procédure d'évaluation. Les patients répondaient aux critères du DSM III-R pour la dépression caractérisée, unique ou récurrente bipolaire 1, déprimé ou mixte;

trouble bipolaire 2, déprimé.

Commentaire

Dans cette étude l'absence de contrôle par un groupe témoin de patients déprimés non hospitalisés et le nombre peu élevé de patients évalués constituent un biais dans l’analyse de l’étude.

Résultats

Caractéristiques démographiques et psychosociaux :

 55,2 % des patients étaient ≥ à 60 ans et 20,6 % étaient âgés de plus de 70 ans. 73,8 % étaient des femmes, sans aucune différence dans la répartition hommes / femmes dans tous les groupes d'âge (Chi 2= 3,34, p > 0,1) ;

 64 patients (59,8 %) étaient mariés, 24 (22,4 %) veufs, 12 (11,2 %) divorcés ou séparés et 7 (6,5 %) célibataires (jamais mariés ;

 26 patients (34,7 %) étaient des immigrants récents en Israël (5 ans ou moins avant d'entrer dans l'étude).

Niveau d’éducation :

 25 patients (24,3 %) n'ont pas eu plus d'un enseignement primaire (8 ans de scolarité ou moins) ;

 21 (20,4 %) étaient entrés mais pas terminé leurs études secondaires (<12 années de scolarité)

 27 (26,2 %) avaient terminé leurs études secondaires ;

 30 (29,1 %) avaient au moins de l'éducation post-secondaire partielle (universitaire ou équivalente).

Travail :

 21 (19,6 %) des patients étaient des employés salariés, 7 (6,5 %) étaient Indépendants, 35 (32,7 %) étaient au foyer, 30 (28,0 %) étaient à la retraite, 9 (8,4 %) étaient au chômage, 3 (2,8 %) étaient en emploi protégé, et 2 (1,9 %) étaient des étudiants.

Niveau social, condition de vie :

 61 patients (57,5 %) ont défini leur revenu « moyen », 39 (36,8 %) comme «inférieur à la moyenne," et 6 (5,7 %) comme « supérieur à la moyenne moyen ».

Conditions de vie :

 69 patients (68,3 %) sur la cohorte ont rapporté une personne ou moins par pièce dans leur maison et seulement 1 plus de 2 personnes par chambre.

Caractéristiques cliniques :

 65 (60,7 %) des patients présentaient un épisode récurrent majeur de la dépression; 21 (19,6 %), premier épisode de dépression majeure, 13 (12,1 %) bipolaire de type 1 déprimé, 6 (5,6 %) bipolaire de type 2 déprimé, et 2 (1,9 %) bipolaire mixte. Y compris les bipolaires, ce fut le premier épisode dépressif majeur de 26 des patients (24,3 %).

 le nombre d'épisodes dépressifs par an pour les patients souffrant d'épisodes dépressifs antérieurs était de 0,4 + 0,48 (intervalle de 0,02 à 0,33).

Sévérité :

 dans 5 cas (4,8 %) la gravité de l'épisode actuel a été classée comme légère, 32 (30,5 %) comme modérée, 48 (45,7 %) sévère sans psychose 20 (19,0 %) sévère avec la psychose ;

 18 patients (16,8 %), avaient une dépression chronique 47 (44,8 %) avaient une dépression mélancolique, et 10 (9,6 %) des patients ont décrit une tendance saisonnière ;

 16 patients (15,7 %) avaient des scores inférieurs à 18 et 24 patients (23,5 %) des scores HAM-D de plus de 30 ;

 la moyenne de la durée de l’épisode actuel de la dépression était de 17,0 ± 22,4 semaines (extrêmes 1-106 semaines) ;

 18 patients (16,8 %) avaient fait une tentative de suicide au cours de l'épisode dépressif actuel, tandis que 43 (40,2 %) avaient tenté de se suicider à un moment dans leur vie ;

 27 patients (26,2 %) avaient subi au moins une séance d’électro-convulsivothérapie ;

 dans 30 % des cas la gravité de l'épisode dépressif a été classée comme modérée selon les critères du DSM III-R , seulement 19 % étaient psychotiques, 15 % des patients avaient des scores HAM-D inférieur à 18, 44 % étaient mélancoliques

Hospitalisation antérieure :

 58 % de la cohorte avait un antécédent d'hospitalisation antérieure pour la dépression avec des admissions fréquentes (moyenne de 0,3 par an) depuis leur première hospitalisation.

 63 patients (58,8 %) avaient déjà été admis dans une unité psychiatrique. leur nombre moyen d'admissions par an depuis le début de la maladie était de 0,30 ± 0,25 (intervalle 0,02-1).

Un autre facteur qui peut être important dans le déclenchement de l'hospitalisation est la présence de traitement antérieur.

Traitements antérieurs :

La qualité du traitement antidépresseur administré avant l'hospitalisation, ne suffisait pas, en termes de posologie et de durée du traitement. 24,3 % des patients avaient reçu un traitement antidépresseur adéquat tel que préconisé par l’Antidepressant Treatment History Form (ATHF).

Remarque :

L’ATHF s’intéresse à la qualité du traitement antidépresseur, décrit précédemment par Prudic et al.

en 1990 (289) et modifié par Shapira et al. en 1996 (290), a été appliqué de façon rétrospective aux détails recueillies au moyen de la Hudd-Q (Hebrew University Depression Database Questionnaire). La force du traitement antidépresseur est évaluée sur une échelle 1-5 sur la base du médicament administré, la posologie, la surveillance du niveau sanguin et la durée du traitement.