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Chapitre 1 : Revue de littérature

1.1. Le nucléole

1.3.4. Épigénétique de l'ADN ribosomique

1.3.4.1. Spécificité des gènes ribosomiques

Précédemment Nourdine Hamdane a étudié le comportement de certaines modifications des histones le long de l’ADNr et a corrélé ces marques avec la présence d’UBF grâce aux cellules de types MEFs KO conditionnelles pour ce facteur (Hamdane et al. 2014). Lors de ces travaux dont les résultats finaux sont reportés sur la figure 1.18, il a été mis en évidence que la perte d’UBF entrainait une baisse de l’acétylation de l’histone H4 corrélant également avec une perte de la présence de PolI sur les gènes ribosomiques et en conséquent une perte de la transcription ribosomique. Cette étude a suggéré que la transcription ribosomique empêche la formation de nucléosomes sur la région transcrite. Suite à la perte d'UBF, une augmentation de la tri-méthylation de l’histone H3 sur sa lysine 9 a également été observée. Cette marque est connue pour permettre le recrutement de facteur hétérochromatinien tel que HP1. Il existerait dans des

cellules différenciées trois populations de gènes caractérisés par: 1, leur état transcriptionnel, 2, la présence de nucléosomes et 3, la méthylation de l'ADN.

L’utilisation par la suite de MEFs issues de souris présentant un déficit en P53 a permis de se rapprocher des conditions plus « physiologiques » de fibroblastes primaires. En effet, dans ce travail, nous avons pu montrer que la déplétion d’UBF dans des cellules immortalisées en culture cellulaire induisait la mort cellulaire programmée de type apoptose alors que la perte d’UBF dans des fibroblastes primaires ou déficientes en P53 induisait un arrêt de la croissance cellulaire mais sans en entrainer la mort (Hamdane et al. 2015).

D'autres travaux avaient également suggéré que la présence d'UBF était elle- même dépendante de la présence d'une protéine architecturale nommée CTCF et qui était nécessaire pour installer UBF le long de l'ADNr (Van De Nobelen et al. 2010). CTCF est une protéine dite architecturale. Elle permet la création et le maintien de frontières chromosomiques orientées comme les TAD (Topologically Associated -Domain). Elle marche de concert avec les protéines architecturales de type cohésines et sa présence est corrélée systématiquement avec les marques d'histones activatrices de la transcription telles que H2A.Zac ou encore H3K4me3. Différents travaux ont également suggéré la présence de modifications spécifiques des queues d’histone au niveau de l’ADNr (Tessarz et al. 2014; Leonhardt and Hake 2014). Cette modification est une méthylation de la glutamine 104 de l’histone H2A. Cette modification est localisée uniquement au nucléole et est installée par la méthyl-transférase fibrillarine chez les mammifères. Ces travaux suggèrent que la chromatine ribosomique possède des caractéristiques proches permettant ainsi son étude plus spécifique par rapport au reste de l’épigénome.

Figure 1-17 : Modèle de la régulation épigénétique de la transcription ribosomique.

Au moins trois différentes conformations des gènes ribosomiques cohabitent dans les cellules. Une forme active sans méthylation (panel du haut), une forme Inactive sans méthylation et une forme méthylée. (Adapté de : Hamdane et al. 2014)

1.3.4.2. L'ADN ribosomique est accessible lorsqu'il est transcrit

Au niveau de l'ADN ribosomique, qui est un gène répété comme indiqué précédemment, il existe dans une même cellule différents "états transcriptionnels". La différence fondamentale de ces états est due à une régulation épigénétique particulière qui demeure floue. Les observations qui ont été faites suggèrent que seul environ 50% des gènes ribosomiques sont transcrits à un moment donné dans des cellules de mammifères. Ces observations ont été réalisées en partie avec une technique qui permet de regarder l'accessibilité de l'ADN au psoralène. La figure 1.19 résume la technique. Le psoralène est un composé qui s'incorpore dans la double hélice de l'ADN. Une fois incorporé, l'ADN sera analysé par Southern-blot et un retard sur gel sera observé si le psoralène est hautement incorporé (Toussaint et al. 2005; Conconi et al. 1989). Grâce à

cette technique, il a été possible, dans la levure, de corréler la régulation du cycle cellulaire avec l'établissement de ces structures (Wittner et al. 2011). Cette étude a montré que la forme ouverte de l'ADNr était installée par la transcription après que la réplication ai eu lieu. Par la suite, afin de garder ouverte la chromatine, une protéine structurale, Hmo-1, permet de conserver cette ouverture. Chez la souris cette protéine n'existe pas. Cependant les études du laboratoire ainsi que la littérature plus largement suggèrent que c'est UBF qui tiendrait ce rôle pour les mammifères (Hamdane et al. 2014).

Figure 1-18 : Modèle de l’incorporation au psoralène. A. Schéma théorique de

l’incorporation du psoralène sur l’ADN. B. analyse par microscopie électronique de la compaction de l’ADN après séparation sur gel. C. Analyse par Southern-blot de l’incorporation au psoralène sur une séquence spécifique, a. indique la forme active du gène (retardé) et i la forme inactive. (Adapté avec autorisation de : Toussaint et al. 2005)

1.3.4.3. Méthylation de l'ADNr

L'ADNr possède des caractéristiques distinctes des autres gènes en général. Globalement, la quantité de GC à travers le génome est de 54%. Pour l'ADNr chez la souris, plus spécifiquement sur les régions régulatrices et transcrites, ce

pourcentage atteint 63%. En rapport avec ce chiffre, il existe une grande quantité de sites de méthylation CpG à travers l'ADNr et leur méthylation a été reliée directement avec l'extinction des gènes associés (Santoro and Grummt 2001; Christine Mayer et al. 2006; Tom Moss 2011). Le fait de n'utiliser qu'une partie de la population de gènes ribosomiques a été suggéré comme nécessaire pour protéger ces gènes des dommages à l'ADN. Chez la levure, il a été démontré que la quantité de gènes ribosomiques disponibles était directement lié à la protection de ces gènes contre les dommages (Ide et al. 2010). Tout naturellement, des groupes de recherche ont commencé à s’intéresser à la méthylation de l’ADNr dans le cas de l’oncologie pour pouvoir éventuellement impacter sur la production des ARNr. Aucune direction préférentielle ne semble cependant émerger suggérant que ce mécanisme est modulé de manière indépendante de l’oncogenèse en général. Ces résultats semblent suggérer un lien indirect entre la méthylation de l’ADN ribosomique et la régulation de la transcription elle-même. Cet argument semble mettre en avant la nécessité d’étudier plus en détail le couplage de ce mécanisme et de la production des ARNr. Un modèle pouvant être intéressant dans cette perspective de recherche concerne les cellules embryonnaires. Comme pour les gènes en général, l'ADNr des cellules embryonnaires est suspecté peu méthylé. Ce phénomène a été caractérisé chez la souris au niveau des promoteurs des gènes ribosomiques qui sont très peu méthylés dans des cellules embryonnaires comparé à des cellules différenciées suggérant un lien entre la méthylation de l'ADNr est la différentiation cellulaire (Furuta and Nakamura 2017).