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CHAPITRE 2 ÉTAT DES CONNAISSANCES

2.3 Propriétés optiques des multicouches de boîtes quantiques de matériaux III-V

2.3.2 Émission en fonction de la température

2.3.2.1 Cas d’une seule couche

La dépendance en température de la largeur de bande interdite Eg des semi-conducteurs massiques provient principalement de la variation de l’interaction électrons-phonons, en plus de la dilatation du paramètre de maille. À haute température (par rapport à la température de Debye),

Eg ∝ T, tandis qu’on a plutôt Eg ∝ T2 à basse température. La variation de la largeur de bande

interdite est habituellement décrite soit par la loi semi-empirique de Varshni [87] (équation (2-1)), soit par une équation (encore semi-empirique) dont la forme, qui est basée sur la statistique de Bose-Einstein, met en évidence la participation des phonons [88] (équation (2-2)) :

2 ( ) ( 0) g g T E T E T T

α

β

= = − + , (2-1)

2 ( ) 1 1 g T E T a b eΘ   = − + −  , (2-2)

α et β sont des paramètres empiriques de la loi de Varshni et a, b et Θ sont les paramètres

correspondants au modèle de type Bose-Einstein.

Dans le cas du système InAs/GaAs, il est généralement observé que l’énergie d’émission des BQ diminue plus rapidement en fonction de la température que la largeur de bande interdite de l’InAs massique, comme illustré à la figure 2-11 a) pour l’échantillon 617 (il faut noter que la dépendance en température de l’InAs a été soustraite de la variation absolue) [89-93]. Cependant, Fafard et al. [89] ont montré que pour un petit nombre de nanostructures, la variation de l’énergie d’émission suit assez bien celle de l’InAs massique et que c’est en fait le comportement de l’ensemble qui s’en écarte. La diminution rapide de l’énergie d’émission avec l’augmentation de la température s’accompagne, dans bien des cas, par un comportement sigmoïde de la largeur de bande d’émission [89,91-93] : la LBÉ diminue jusqu’à une température intermédiaire (entre 50 et 200 K), puis réaugmente, comme illustré à la figure 2-11 b), pour l’échantillon 617. L’intensité intégrée de la photoluminescence diminue en général de plusieurs ordre de grandeur entre les basses température et 300 K [89-94].

Ce comportement dit « anormal » n’est cependant pas universel et dépend en fait de la taille des BQ, et donc de leur niveau d’énergie fondamental [92,93]. Par exemple, on peut voir à la figure 2-11 que l’échantillon 617, émettant à 1,23 eV à 10 K, adopte cette dépendance usuelle en fonction de la température. Par contre, l’énergie du pic d’émission Ep de l’échantillon 592, qui contient de plus grosses BQ et émet à 1,105 eV à 10 K, a un comportement beaucoup plus proche de l’InAs massique (qui correspond à une droite nulle sur le graphe de la figure 2-11 a)), la largeur à mi-hauteur est plus stable, en plus d’être plus faible, et l’intensité intégrée de la PL diminue de manière beaucoup moins abrupte avec l’augmentation de la température. Le comportement en température des propriétés optiques des ensembles inhomogènes de BQ d’InAs/GaAs peut en fait être expliqué par la décroissance plus rapide de l’émission provenant des plus petites nanostructures. En effet, les excitons peuvent s’échapper plus facilement de ces dernières, puisque la barrière énergétique y est plus petite que dans les plus grosses boîtes quantiques, ce qui favorise l’émission provenant des grosses lorsque la température augmente. Ceci se reflète dans la valeur des énergies d’activation (Ea) mesurées dans ces études pour la

diminution de l’intensité intégrée de la PL qui sont de l’ordre de quelques centaines de meV et qui correspondent soit à la différence entre l’énergie du pic d’émission (le niveau fondamental des excitons dans les BQ) et Eg = 1,52 eV de la barrière de GaAs [94] ou encore à l’écart énergétique entre les niveaux fondamentaux des boîtes quantiques et de la couche de mouillage [90,91].

Figure 2-11 : a) Variation additionnelle à celle de la largeur de bande interdite de l’InAs de l’énergie du pic d’émission en fonction de la température (la relation de Varshni avec les paramètres de Fang et

al. [95] (α = 0,276 meV/K et β = 83 K) a été soustraite de la variation mesurée). Dépendances en température de b) la largeur à mi-hauteur et c) l’intensité intégrée relative du pic de photoluminescence pour les échantillons 592 (Ep(10 K) = 1,105 eV) et 617 (Ep(10 K) = 1,23 eV). [93]

Dans le cas des dépôts d’InAs sur substrat d’InP, un comportement similaire à ce qui est observé pour un substrat de GaAs a été obtenu pour des BQ émettant à Ep = 0,875 eV avec des barrières composées de InGaAsP (Eg = 0,95 eV) [96] et pour des puits quantiques de une à trois monocouches (135 meV < Ea = EInP – Ep < 280 meV) [97]. Par contre, pour des puits plus épais (composés d’InAsP) avec EInP – Ep > 465 meV, des valeurs Ea = 30-40 meV ont plutôt été trouvées pour la recombinaison non-radiative. Des valeurs similaires d’énergie d’activation (20- 30 meV) ont également été trouvées pour des BQ [98], ainsi qu’à basse température pour des fils quantiques d’InAs/InP [99]. Leur origine reste floue, mais on suggère qu’elles soient associées à des pièges aux interfaces [100], à des impuretés [99] ou encore à l’émission de phonons [97].

Évidemment, l’élimination de la fuite des excitons vers la barrière ou la couche de mouillage permet de conserver une émission relativement forte, jusqu’à 49% de l’intensité à basse température dans le cas de bâtonnets d’InAs/InP [101].

2.3.2.2 Comportement en température des multicouches

Mazer et al. [80] ont observé que les multicouches d’InAs/GaAs avec de minces couches de séparation contribuaient à obtenir des propriétés optiques plus constantes en fonction de la température que des plans de BQ plus éloignés, tant au niveau de l’intensité du signal que de la longueur d’onde et de la LBÉ (voir figure 2-12). Le résultat inverse a cependant été obtenu pour le même système [102,103] et serait dû à un nombre élevé de défauts dans les barrières, causés par la déformation importante dans les multicouches comportant un alignement vertical des nanostructures. En effet, on a observé qu’une réduction de l’épaisseur de la couche de séparation causait une diminution de l’intensité intégrée de l’émission provenant des BQ pour des multicouches d’InAs/GaAs [102] et d’InAs/InAlGaAs sur substrat d’InP [104] et que l’intensité augmentait de manière sous-linéaire avec le nombre de périodes [102]. En outre, Sanguinetti et

al. [102] ont observé que, pour des couches de séparation d’épaisseur variant entre 6 et 15 nm, l’intensité intégrée de la PL chutait plus rapidement en fonction de la température en augmentant le nombre de couches et en diminuant l’épaisseur de la barrière de GaAs.

Figure 2-12 : Comportement en température de la photoluminescence pour les échantillons présentés à la figure 2-9 : énergie du pic d’émission à gauche, largeur à mi-hauteur au centre et intensité intégrée relative à droite. [80]