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Apport des revues systématiques et méta-analyses en
réseau en Dermatologie
Laurence Le Cleach
To cite this version:
Laurence Le Cleach. Apport des revues systématiques et méta-analyses en réseau en Dermatologie.
Médecine humaine et pathologie. Université Paris-Est, 2019. Français. �NNT : 2019PESC0045�.
�tel-02499673�
Université Paris Est Créteil (UPEC)
Ecole doctorale Sciences de la Vie et de la Santé
Epidemiology in dermatology and evaluation of therapeutics –EpiDermE
Équipe d’accueil UPEC - Henri Mondor
Apport des revues systématiques et méta-analyses en
réseau en Dermatologie
Présentée par Laurence Le Cleach
Thèse de doctorat de Pathologie et recherche clinique
Dirigée par le Dr Emilie Sbidian
Présentée et soutenue publiquement le 18 juin 2019
Devant un jury composé de
Madame Deschartres Agnès, MCU-PH, Rapporteur
Monsieur Perrot Serge, PU-PH, Rapporteur
Madame Aslangul Elisabeth, PU-PH, Examinatrice
Madame Canoui-Poitrine Florence, PU-PH, Examinateur
Monsieur Le Corvoisier Philippe, PU-PH, Examinateur
Madame Sbidian Emilie, MCU-PH, Directeur de thèse
Remerciements
Je tiens à remercier particulièrement le Dr Emile Sbidian dont les encouragements m’ont
permis d’initier et de mener à bien ce travail. Je remercie le Dr Perrine Créquit pour son aide
et son soutien précieux tout au long de la rédaction de cette thèse.
Je remercie le Pr Hywel Williams, éditeur du Cochrane skin group et pionner de la médecine
basée sur les preuves en Dermatologie pour la confiance qu’il m’a témoignée. Je remercie
également l’ensemble de l’équipe, Laura Prescott, Liz Doney, Helen Scott et Emma Axon
pour leur travail pour ces revues. On ne peut imaginer relecture plus scrupuleuse.
Je tiens à remercier également Ludovic Trinquart qui m’a appris la méthodologie exigeante
des revues Cochrane.
Je remercie le Pr Philippe Ravaud et le Pr Isabelle Boutron pour leur enseignement et de
m’accueillir tous les mercredis dans le centre Cochrane France de l’Hôtel Dieu.
Je remercie Isabelle Pane et Elise Diard pour leur aide toujours rapides et efficaces. Merci à
Amélie Yavchitz pour ses conseils et son soutien.
J’adresse mes sincères remerciements au Dr Agnès Deschartres, au Pr Elisabeth Aslangul, au
Pr Florence Canoui-Poitrine, Pr Serge Perrot et au Pr Philippe Le Corvoisier d’avoir accepté
d’être membre du jury.
Je remercie le Pr Olivier Chosidow de m’avoir permis de découvrir la recherche clinique en
Dermatologie.
Je remercie le Pr Pierre Wolkenstein, les équipes et mes collègues du service de Dermatologie
de l’hôpital Henri Mondor avec qui je partage mon quotidien. Je souhaite tout
particulièrement remercier Mme Patricia Thion pour son aide si précieuse.
A mes parents qui m’ont appris la valeur inégalée du travail.
A Laurent pour son infaillible soutien et ses encouragements qui ont portés leurs fruits.
A Louise et Augustin pour leur vitalité.
Résumé
La décision médicale nécessite d’avoir à disposition une synthèse rigoureuse et actualisée des données de la recherche. Les revues systématiques (RS) et méta-analyses (MA) sont la méthode la plus rigoureuse pour produire ces synthèses. La Cochrane est une organisation internationale indépendante dont la mission est de produire et diffuser des revues systématiques. Nous avons réalisé des RS et MA Cochrane sur trois maladies chroniques en dermatologie. Notre objectif était de produire une synthèse des données, de proposer des pistes d’amélioration pour la recherche à venir et d’ouvrir sur des projets de méta-recherche.
La première revue avait pour objectif d’évaluer l’efficacité et la tolérance des traitements de la pustulose palmoplantaire. Nous avons inclus 36 essais contrôlés randomisés (ECR) comprenant un total de 1504 patients. Le comparateur était le placebo ou aucun traitement dans 31 ECR. Seulement deux essais avaient un faible risque de biais pour l’ensemble des items. Au total, nous avons trouvé un faible degré de certitude que l’analogue topique de la vitamine D (maxacalcitrol) était plus efficace que le placebo à court terme ; que l'alitrétinoïne et trois traitements biologiques (étanercept (anti TNF), ustekinumab (anti IL17-IL23) et guselkumab (anti IL23)) n'étaient pas plus efficaces que le placebo ; enfin un degré de certitude modéré que le secukinumab (anti IL17) était supérieur au placebo (RR 1.55 95% IC 1.02 à 2.35 ;). La proportion de participants ayant présenté des effets indésirables était supérieure avec le secukinumab comparativement au placebo. Dans cette revue, aucune donnée probante n’a été retrouvée pour les principaux traitements utilisés en pratique courante (corticoïdes locaux, photothérapie, acitrétine, méthotrexate, ciclosporine).
La méta-analyse en réseau est une méthode statistique permettant de déterminer l’efficacité relative de l’ensemble des traitements y compris pour les comparaisons qui n’ont pas été évaluées dans un ECR. Cette méthode a été appliquée dans les deux revues suivantes.
La deuxième revue avait pour objectif d’évaluer l’efficacité et la tolérance relative d’un traitement suppressif par aciclovir, valaciclovir ou famciclovir dans l’herpès génital du sujet immunocompétent. Nous avons inclus 26 ECR portant sur un total de 6950 patients. Les résultats montraient que l'aciclovir, le famciclovir et le valaciclovir diminuaient le risque d’avoir au moins une récidive d'herpès génital sous traitement comparativement au placebo (Risque relatif (RR) 0.46, 95% IC0.34 à 0.57 pour l’aciclovir, RR 0.42, 95% IC 0.31 à 0.56 pour le valaciclovir; et RR 0.57, 95% IC 0.37 à 0.84 pour le famciclovir). La méta-analyse en réseau n'a révélé aucune différence statistiquement significative entre les traitements. Aucune conclusion sur les effets indésirables n'a pu être tirée compte tenu de la mauvaise qualité de leur description. Dans cette revue, un nombre d’essais plus important a permis de réaliser une synthèse quantitative. Cependant le manque de comparaisons directes, l’absence des critères de jugement pertinents pour les patients, le risque de biais élevé et non clair pour une majorité d’essais et une hétérogénéité importante limitent la pertinence et le niveau de confiance dans les résultats.
La troisième revue avait pour objectif d’évaluer l’efficacité et la tolérance relative des traitements systémiques du psoriasis modéré à sévère chez l’adulte. Nous avons identifié 109 essais pertinents pour un total de 39,882 patients. Soixante-quatorze essais ont été inclus dans la méta-analyse en réseau. Cette étude a montré que l’ixekizumab était le meilleur traitement versus placebo (RR 32.45, 95% IC 23.61 à 44.60; (haut degré de certitude)), suivi par le secukinumab (haut degré de certitude), puis le brodalumab (degré de certitude modéré), puis guselkumab (degré de certitude modéré), le certolizumab (degré de certitude modéré), et l’ustekinumab (haut degré de certitude). Les traitements biologiques de la classe des IL17, IL12/23, IL23 et anti-TNF alpha étaient significativement plus efficaces que les petites molécules et les agents systémiques conventionnels. Dans cette revue, malgré un nombre conséquent d’essais, un certain nombre de points limites diminuaient le degré de confiance dans les résultats : peu d’essais face-face, peu d’essais évaluant et rapportant la qualité de vie, l’absence d’évaluation au long court et l’inclusion d’une population sélectionnée (patients jeunes sans comorbidités et avec un niveau élevé de sévérité).
Ces trois revues ont permis de mettre en évidence des biais récurrents pouvant s’appliquer au traitement de maladies chroniques en dermatologie notamment le manque d’essai face-face, l’évaluation le plus souvent à court terme et le peu d’essais rapportant un critère de qualité de vie. Ce travail permet également de guider les essais à venir dans ces trois domaines afin d’améliorer l’agenda de la recherche, la diffusion des résultats et la rédaction de recommandations.
Mots clefs : revue systématique, méta-analyse en réseau, dermatologie, psoriasis, pustulose palmoplantaire, herpes génital
Abstract
Medical decision-making requires a rigorous and up-to-date synthesis of research data. Systematic reviews (SR) and meta-analyses (MA) are the most rigorous method for producing these syntheses. Cochrane is an independent international organization whose mission is to produce and disseminate systematic reviews. We have performed RS and MA Cochrane on three chronic diseases in dermatology. Our objective was threefold: to produce a rigorous synthesis of the data, to propose ways of improving future research in these fields and finally to open up to meta-research projects.
The first review aimed to evaluate the efficacy and tolerance of treatments for palmoplantar pustulosis, a chronic inflammatory disease characterized by the presence of pustules on palms and plants. We included 36 randomized controlled trials (RCTs) that encompassed a total of 1,504 patients. The comparator was placebo or no treatment in 31 RCTs. Risk of bias was low for all items in only two trials. The data could not be synthesized in a meta-analysis. Overall, we found that the topical analogue of vitamin D (maxacalcitrol) was more effective than placebo in the short term; alitretinoin and three biological treatments (etanercept (anti TNF), ustekinumab (anti IL17-IL23) and guselkumab (anti IL23)) were no more effective than placebo (low degree of certainty); and secukinumab (anti IL17) was superior to placebo (RR 1.55 95% CI 1.02 to 2.35; moderate degree of certainty). The proportion of participants with adverse events was higher with secukinumab compared to placebo. In this first review, we observed a situation where no evidence was found for the main treatments (local corticosteroids, phototherapy, acitretin, methotrexate, and cyclosporine) used.
Network meta-analysis is a statistical method for determining the relative effectiveness of all treatments, including comparisons that have not been evaluated in an RCT. This method was applied in the following two reviews.
The objective of the second review was to evaluate the efficacy and relative safety of suppressive treatment with acyclovir, valaciclovir or famciclovir in genital herpes in the immunocompetent subject. We included 26 RCTs with a total of 6,950 patients. The results showed that acyclovir, famciclovir and valaciclovir reduced the risk of having at least one recurrence of genital herpes under treatment compared to placebo (Relative risk (RR) 0.46, 95% IC0.34 to 0.57 for acyclovir, RR 0.42, 95% CI 0.31 to 0.56 for valaciclovir; and RR 0.57, 95% CI 0.37 to 0.84 for famciclovir). The network meta-analysis revealed no statistically significant differences between treatments. No conclusions on adverse reactions could be drawn due to the poor quality of their description. In this second review, the number of trials was larger, allowing us to perform a meta-analysis in a network. However, the lack of direct comparison, the absence of the most relevant judgment criteria for patients, the risk of high and unclear bias in a majority of trials and a heterogeneity whose causes could not be explored alter the relevance and level of confidence in the results.
The objective of the third review was to evaluate the efficacy and relative tolerance of systemic treatments for moderate to severe psoriasis in adults. We included 109 trials for a total of 39,882 patients. Seventy-four of these trials were included in the network meta-analysis. This study showed that ixekizumab was the best treatment. (versus placebo: RR 32.45, 95% CI 23.61 to 44.60; (high certainty), followed by secukinumab (high certainty), then brodalumab (moderate certainty), then guselkumab (moderate certainty), certolizumab (moderate certainty), and ustekinumab (high certainty). Biological treatments of the anti-IL17, anti-IL12/23, anti-IL23 and anti-TNF alpha classes were significantly more effective than conventional small molecules and systemic agents. In this third review, the number of trials allowed us to conduct a network meta-analysis and classify the treatments. However, a number of points decreased the degree of confidence in the results: the few face-to-face trials, few trials evaluating and reporting on quality of life, the absence of long-term short evaluation and the inclusion of a selected population (young patients without co-morbidities and with a high level of severity).
These three reviews highlighted recurrent biases that could be applied to other chronic dermatological diseases, including the lack of face-to-face testing, primarily short term evaluations, and the lack of reports including a quality of life criterion. This work also provides guidance for future trials in these three areas in terms of comparisons to be made and bias to be avoided.
Key words: systematic review, network meta-analysis, dermatology, psoriasis, palmoplantar pustulosis, genital herpes
Laboratoire d’accueil
Epidemiology in dermatology and evaluation of therapeutics –EpiDermE
Équipe d’accueil UPEC - Henri Mondor
Faculté de Médecine de Créteil,
8 rue du Général Sarrail
94000 Cachan
Financement obtenu
PHRC National 11-151_AOM - 11048 pour la revue Cochrane et méta-analyse en réseau du
traitement suppressif antiviral de l’herpès génital du sujet immunocompétent
PHRC National 14-0322_AOM-14322 pour la revue Cochrane et méta-analyse en réseau des
traitements systémiques du psoriasis en plaques modéré à sévère de l’adulte
Publications et présentations liées à la thèse
Articles publiés
- Obeid G, Do G, Katsahian S, Kirby L, Hughes C, Le Cleach L. Interventions for
chronic palmoplantar pustulosis. Cochrane Database of Systematic Reviews 2015,
Issue 4. Art. No.: CD011628. DOI: 10.1002/14651858.CD011628. (Protocol)
- Le Cleach L, Trinquart L, Do G, Maruani A, Lebrun-Vignes B, Ravaud P, Chosidow
O. Oral antiviral therapy for prevention of genital herpes outbreaks in
immunocompetent and nonpregnant patients. Cochrane Database Syst Rev. 2014 Aug
3; (8):CD009036.
- Le Cleach L, Doney E, Katz KA et al. Research Techniques Made Simple: Workflow
for Searching Databases to Reduce Evidence Selection Bias in Systematic Reviews. J
Invest Dermatol 2016; 136: e125-e9.
- Sbidian E, Chaimani A, Garcia-Doval I, Do G, Hua C, Mazaud C, Droitcourt C,
Hughes C, Ingram JR, Naldi L, Chosidow O, Le Cleach L. Systemic pharmacological
treatments for chronic plaque psoriasis: a network meta-analysis. Cochrane Database
Syst Rev. 2017 Dec 22; 12:CD011535.
Présentations orales à des congrès
- L. Le Cleach.
Living network méta-analysis
American Academy of Dermatology Annual Meeting, Washington 2019, 1-5 Mars
2019
- L. Le Cleach, L.Trinquart, A. Maruani, G.Do-Pham, B. Lebrun-Vignes, Ph. Ravaud,
O. Chosidow.
Oral antiviral therapy for prevention of genital herpes outbreaks in
immunocompetent and nonpregnant patients.
21
thEuropean Academy of Dermatology and Venerology, Prague, 26-30 Septembre
2012
Table des matières
Liste des Figures ... 10
Liste des Tables
... 11
1 Introduction et Objectifs
... 12
1.1Les essais contrôlés randomisés en Dermatologie ... 12
1.2 Un besoin de synthèse des ECR en dermatologie: les revues systématiques
... 13
1.2.1 Définition et principes généraux des revues systématiques et méta-analyses
... 13
1.2.2La Cochrane
... 14
1.2.3 Méthodologie et étapes de réalisation des revues systématiques Cochrane
... 15
1.3 La synthèse quantitative : de la méta-analyse conventionnelle à la méta-analyse en réseau
... 23
1.3.1 Méta-analyse conventionnelle
... 23
1.3.2 Méta-analyse en réseau
... 26
1.4 Apports des revues systématiques et méta-analyses ... 33
1.5 Objectifs de la thèse
... 33
2 Méthodologie générale utilisée dans les 3 revues systématiques et méta- analyses ... 34
2.1 Méthode de recherche des études ... 34
2.2 Collecte et analyse des données... 35
2.2.1
Sélection des études et extraction des données ... 35
2.2.2
Evaluation du risque de biais ... 35
2.2.3
Mesure de l’effet traitement ... 35
2.2.4
Evaluation de l’hétérogénéité et de la cohérence ... 36
2.2.5
Evaluation des biais de publication ... 36
2.2.6
Synthèse des données méta-analyse conventionnelles et méta-analyse en réseau
36
2.2.7
Analyse en sous-groupes ... 36
2.2.8
Table résumée des résultats ... 36
3 Interventions dans la pustulose palmoplantaire : revue systématique Cochrane
... 37
3.1 Introduction
... 37
3.2 Objectifs
... 38
3.3 Critères d’inclusion des études
... 38
3.4 Critères de jugement
... 38
3.5 Particularités méthodologiques ... 39
3.6 Résultats
... 39
3.6.1 Synthèse ... 39
3.6.2 Résultat de la recherche
... 39
3.6.3 Risque de biais
... 40
3.6.4 Résultats des analyses
... 41
7
3.6.5 Evaluation du degré de confiance dans les preuves ... 41
3.7 Discussion /Conclusion ... 42
3.7.1 Principaux résultats ... 42
3.7.2 Implication pour la recherche ... 43
3.7.3Implication pour la pratique ... 44
4 Traitement suppressif de l’herpès génital chez les patients immunocompétents : Revue systématique
Cochrane et méta-analyse en réseau
... 44
4.1 Introduction
... 44
4.2 Objectif
... 46
4.3 Critères d’inclusion
... 46
4.4 Critères de jugement
... 46
4.5 Particularités méthodologiques
... 46
4.6 Résultats
... 47
4.6.1 Synthèse
... 47
4.6.2 Résultats de la recherche
... 48
4.6.3 Risque de biais
... 48
4.6.4 Résultats des analyses
... 49
4.6.5 Evaluation du degré de confiance dans les preuves ... 52
4.7 Discussion/ conclusion
... 53
4.7.1 Principaux résultats
... 53
4.7.2 Implication pour la recherche
... 53
4.7.3 Implication pour la pratique ... 54
5 Traitements pharmacologiques systémiques du psoriasis en plaques modéré à sévère : Revue
systématique Cochrane et méta-analyse en réseau
... 54
5.1 Introduction
... 54
5.2 Objectifs
... 56
5.3 Critères d’inclusion
... 56
5.4 Critères de jugement
... 56
5.5 Particularités méthodologiques
... 56
5.6 Résultats
... 56
5.6.1 Synthèse ... 57
5.6.2 Résultat de la recherche
... 57
5.6.3 Risque de biais
... 58
5.6.4 Résultats des analyses
... 59
5.6.5 Evaluation du degré de confiance dans les preuves ... 64
5.7 Discussion ... 65
5.7.1 Principaux résultats ... 65
5.7.2 Implication pour la recherche ... 65
5.7.3 Implication pour la clinique ... 66
6 Discussion et perspectives
... 67
6.1 Discussion
... 67
6.1.1 Principaux résultats
... 67
6.1.2 Les limites identifiées ... 68
6.2 Perspectives
... 71
6.2.1 Harmoniser les critères de jugement ... 71
6.2.2 Réduire le risque de biais ... 72
6.2.3 Améliorer la description des effets indésirables ... 72
6.2.4Facilité un accès complet aux données ... 73
6.2.5 Résoudre les problèmes de mise à jour des revues systématiques : les méta-analyses
en réseau dynamiques ... 73
6.2.6 Améliorer l’agenda de la recherche ... 74
Références
... 76
Annexes ... 81
Annexe 1: Interventions for chronic palmoplantar pustulosis. Cochrane Database of
Systematic Reviews 2019, Issue 4. ... 81
Annexe 2: Oral antiviral therapy for prevention of genital herpes outbreaks in
immunocompetent and nonpregnant patients. Cochrane Database of Systematic Reviews
2014, Issue 8. ... 178
Annexe 3: Systemic pharmacological treatments for chronic plaque psoriasis: a network
meta-analysis. Cochrane Database of Systematic Reviews 2017, Issue 12. ... 220
.
Liste des Figures
Figure 1: Nombre d’ECR publiés par an (MEDLINE: mots clefs: randomized controlled trial
AND (skin diseases NOT breast cancer)
Figure 2: Résumé de la recherche des études au cours d’une revue systématique : exemple
d’une revue systématique Cochrane sur le traitement antiviral oral pour la prévention des
poussées d'herpès génital chez les patients immunocompétents.
Figure 3 : Graphique en forêt de la comparaison acyclovir vs placebo pour le critère de
jugement : participants ayant eu au moins une récurrence herpétique clinique
Figure 4 : Graphique en entonnoir symétrique en l’absence de biais de publication
Figure 5 : Représentation graphique du principe mathématique de l‘analyse en réseau
Figure 6 : Réseau des traitements systémiques du psoriasis en plaques modéré à sévère pour le
critère de jugement PASI 90 (pourcentage de patients obtenant 90% d’amélioration du score
de sévérité PASI).
Figure 7 : Probabilités de rang cumulées pour chaque traitement dans le réseau. La valeur de
la surface sous la courbe de probabilités de rang cumulées (SUCRA) value est la probabilité
pour chaque traitement d’être parmi les meilleurs du réseau. Plus la valeur est grande plus la
probabilité est forte. Dans cette figure, les 3 meilleurs traitements sont pour le traitement du
glaucome à angle ouvert le bimatoprost, le latanoprost, et le travoprost, avec des valeurs de
SUCRA values of respectivement de 99.6%, 86.56%, et 85.76%.
Figure 8 : OR médian pour chaque traitement versus placebo. Les lignes horizontales
représentent les intervalles de crédibilité à 95% (CrI) et les lignes rouges les intervalles de
prédiction à 95% correspondants (PrI).
Figure 9 : Distribution du risque de biais des études pour chaque critère de jugement
principal.
Figure 10 : Evaluation de risque de biais pour chaque item et pour chaque étude évaluant une
intervention dans la pustulose palmoplantaire.
Figure 11 : Diagramme de flux de la sélection des études évaluant un traitement suppressif
par acyclovir, le valaciclovir ou le famciclovir dans l’herpès génital.
Figure 12 : Résumé du risque de biais: jugement des auteurs pour chaque item pour chaque
étude des études évaluant un traitement suppressif par acyclovir, le valaciclovir ou le
famciclovir dans l’herpès génital.
Figure 13 : Graphique du réseau des traitements suppressifs de l’herpès génital pour le critère
de jugement : risque d’avoir au moins une récurrence.
Figure 14 : Classement pour l’efficacité (au moins 1 récurrence): probabilité d’être le
meilleur, le second, le troisième ou le quatrième traitement parmi aciclovir, valaciclovir,
famciclovir, placebo/aucun traitement. Effets pour les analyses non ajustées en rouge, ajustées
sur l’effet étude de petite taille en noir
.
Figure 15 : Diagramme de flux de la sélection des études évaluant un traitement systémique
dans le psoriasis modéré à sévère.
Figure 16 : Risque de biais des études évaluant un traitement systémique dans le psoriasis
modéré à sévère. Le risque pour l’ensemble des études pour chaque item est présenté sous
forme de pourcentage.
Figure 17 : Graphique en forêt des comparaisons secukinumab ou ixekinumab ou
brodalimumab versus placebo pour le critère de jugement PASI 90.
Figure 18 : Réseau des classes de traitements systémiques du psoriasis en plaques modéré à
sévère pour le critère de jugement PASI 90 et proportion de patients avec effets indésirables
graves.
Figure 19 : Graphique représentant simultanément l’efficacité et la tolérance pour toutes les
interventions par traitement et par classe de traitement tel que classés par le modèle de la
méta-analyse en réseau.
Liste des Tables
Table 1 : Table résumé des preuves selon la méthode GRADE pour la comparaison Vitamine
D locale vs placebo dans la pustulose palmoplantaire.
Table 2 : Méta-analyse en réseau de l’efficacité et l’acceptabilité des classes
pharmacologiques et des interventions psychosociales.
Table 3 : League table représentant les risques relatifs des interventions tels qu’estimés par le
modèle de méta-analyse en réseau pour PASI 90 et effets indésirables graves (SAE).
1 Introduction et Objectifs
1.1Les essais contrôlés randomisés en Dermatologie
Les essais contrôlés randomisés (ECR) ont permis, depuis les années 50, d’évaluer l’efficacité
de multiples interventions dans tous les champs de la médecine.
1Le schéma idéal des progrès
thérapeutiques est la démonstration de l’efficacité d’un premier traitement versus placebo puis
la comparaison successive du nouveau traitement à son prédécesseur, partant de l’hypothèse
que le nouveau traitement est espéré plus efficace. Lorsque plusieurs traitements existent,
l’étape suivante est de définir quel est le traitement le plus approprié dans telle forme clinique
ou pour une population particulière. La fiabilité des résultats d’un essai dépend de sa qualité
méthodologique. Les essais sont donc l’élément de base, la pierre angulaire de la recherche
thérapeutique. L’accumulation d’essais produisant des résultats non fiables d’une part,
l’absence d’évaluation de certaines interventions et/ou certaines comparaisons d’autre part au
cours de ce processus entrainent un gâchis de la recherche et impactent la qualité de prise en
charge d’une maladie.
2,3Le domaine de la dermatologie présente un certain nombre de caractéristiques devant
être prises en compte dans la réalisation des essais afin de produire des résultats fiables.
La plupart de ces particularités découle du fait que la dermatologie est une spécialité du
visible. Les maladies les plus fréquentes sont bénignes n’impliquant pas de mortalité et peu
morbidité. En revanche, le caractère stigmatisant de ces lésions visibles et l’inconfort
(sensation de prurit, brulures, …) qu’elles provoquent, impactent lourdement la qualité de vie
et ont un impact psychosocial important.
4La visibilité implique en dehors de la situation d’une guérison totale que les critères de
jugement pour évaluer l’amélioration de la dermatose soient subjectifs. Cette subjectivité rend
nécessaire la mise en place de mesures strictes pour assurer la mise en aveugle des patients
inclus dans les essais, des soignants et des évaluateurs. En effet, il a été démontré que
l’absence d’aveugle dans un essai était responsable d’une surestimation de l’ordre de 10% de
la taille de l’effet traitement.
5,6Cette surestimation est particulièrement importante lorsque le
critère de jugement est subjectif.
6De plus, l’aveugle est parfois rendu difficile à mettre en
place en raison du caractère visible des maladies dermatologiques. Par exemple les rétinoïdes
utilisés dans le traitement de l’acné induisent une sécheresse cutanéomuqueuse. Il est par
ailleurs nécessaire compte tenu du retentissement psychosocial des maladies dermatologiques,
d’utiliser au moins un critère de jugement évaluant la qualité de vie. D’autant plus qu’il existe
souvent une différence entre l’évaluation de la sévérité par le médecin et le malade.
7De nombreuses maladies dermatologiques ont également la particularité d’être chroniques.
Cette caractéristique implique la nécessité d’essai à long terme évaluant l’efficacité d’un
traitement sur la durée et d’essais de stratégie évaluant les séquences de traitements.
Une étude
comparant les essais menés dans le psoriasis sur la période
1977–2000 et 2001–2006 ne retrouvait
qu’une augmentation de 7 à 12 semaines de la durée moyenne des essais.
81.2 Un besoin de synthèse des ECR en dermatologie: les revues
systématiques
1.2.1 Définition et principes généraux des revues systématiques et méta-analyses
Le nombre d’ECR en Dermatologie a considérablement augmenté passant de quelques
dizaines par an jusqu’aux années 80, pour atteindre 1000 par an aujourd’hui(Fig.1). Il devenu
impossible pour un dermatologue de lire l’ensemble des nouvelles données publiées chaque
jour. Cette situation a rendu nécessaire la réalisation de synthèses de la littérature réalisées
selon une méthode scientifique rigoureuse appelée : « revue systématique ».
Figure 1: Nombre d’ECR publiés par an (MEDLINE: mots clefs: randomized controlled trial
AND (skin diseases NOT breast cancer))
Une revue systématique est une revue critique de l’ensemble des études réalisées pour
répondre à une question clinique précise reposant sur des méthodes explicites, rigoureuses et
reproductibles
.
9Ce type de synthèse est tout à fait différent des revues générales ou narratives
qui ne sont basées sur aucun principe méthodologique et qui risquent ainsi de donner un
compte rendu biaisé. Ceci en raison d’une sélection partiale des données visant à argumenter
les idées préconçues du ou des auteurs.
Les quatre grands principes de la méthodologie des revues systématiques, assurant une
transparence du processus de réalisation sont :
- Une définition claire et précise des objectifs conditionnant les critères d’éligibilité.
- Une recherche systématique afin d’identifier toutes les études répondant aux critères
d’éligibilité.
- Une évaluation de la validité des résultats des études incluses.
- La présentation d’une synthèse des caractéristiques et des résultats des études incluses.
Les résultats peuvent être présentés de façon qualitative par une synthèse des caractéristiques
et des résultats des études incluses. Lorsqu’au moins deux des études incluses comparent les
mêmes interventions, dans des populations comparables et avec des critères de jugement
similaires, une synthèse quantitative peut être réalisée. Cette synthèse, dont le résultat est une
moyenne pondérée de l’effet traitement est appelée : « méta-analyse ».
10En dermatologie, il
n’est pas rare que les résultats des essais inclus dans une revue systématique ne puissent pas
être synthétisés par méta-analyse. Soit parce qu’un seul essai évalue une comparaison, soit
parce que plusieurs essais évaluant la même comparaison utilisent des critères de jugement
différents.
111.2.2La Cochrane
La Cochrane est une organisation internationale, indépendante créée en 1988, ayant pour
l’objectif préparer, mettre à jour et disséminer des revues synthétisant les effets des
interventions en santé.
2(
https://www.cochrane.org/)
Le nom de cette organisation est celui de l’épidémiologiste anglais, Archibald Cochrane
(1909-1988), premier à avoir théorisée la nécessité de produire des synthèses dans le domaine
thérapeutique :
“It is surely a great criticism of our profession that we have not organised a critical summary,
by specialty or subspecialty, adapted periodically, of all relevant randomised controlled
trials”.
12La Cochrane compte plus de 13000 membres et a, à ce jour, publiée plus de 8000 revues
systématiques. Elle est organisée en différentes unités réparties à travers le monde. Le
Cochrane skin group en charge de la réalisation des revues systématiques en Dermatologie a
été créé en 1997. Il est situé à Nottingham au Royaume uni. Un satellite Français de ce groupe
a été créé en 2014.
13Les revues produites sont publiées dans la Cochrane Library.
(
https://www.cochranelibrary.com/)
1.2.3 Méthodologie et étapes de réalisation des revues systématiques Cochrane
Définir la question de recherche
La première étape consiste à poser, de manière précise, la question à laquelle doit répondre la
revue systématique. Pour les revues évaluant une intervention, cette question suit le format de
l’acronyme PICO. De cette question découleront les critères d’inclusion et d’exclusion des
études.
- P comme patients :
Seront préciser les formes cliniques, niveaux de sévérité, tranches d’âges des patients.
- I et C comme intervention et comparateur :
Certaines revues évaluent un traitement, d’autres ont un spectre plus large et évaluent
l’ensemble des interventions dans une maladie donnée. Toutes les interventions considérées
doivent être listées ainsi que tous les comparateurs possibles
- O comme« outcome » (critères de jugement)
Comme pour un essai, il y a dans une revue systématique des critères de jugement principaux
et secondaires. Selon les recommandations Cochrane, les deux critères principaux doivent
comprendre un critère d’efficacité et un critère de tolérance. Contrairement aux éléments
présentés ci-dessus, la sélection des études ne doit pas se faire en fonction de la présence ou
non des critères de jugement choisis.
Le type d’études qui seront incluses doit également être prédéterminé. Classiquement, les
revues systématiques d’interventions incluent des ECR. Toutefois, les études
observationnelles sont aussi de plus en plus fréquemment également prises en compte.
Recherche des études
La recherche et l’identification de l’ensemble des études répondant à la question est un
processus primordial et complexe de toute revue systématique. Dans le cadre de ce travail de
thèse, nous avons publié une synthèse des étapes de recherche des études et des sources à
utiliser dans une revue systématique.
14Afin d’obtenir une estimation juste de l’effet d’un
traitement, toutes les études correspondant aux critères d’inclusion doivent être identifiées
(Fig. 2). Cette recherche est réalisée premièrement dans les bases de données
bibliographiques : Cochrane Central Register of Controlled Trials (CENTRAL), MEDLINE,
et EMBASE. D’autres bases de données peuvent également être consultées selon les sujets
(PsycINFO, CINAHL (Cumulative Index to Nursing and Allied Health Literature) ou
LILACS (Literatura Latino Americana e do Caribe)). Les équations de recherche doivent être
construites de façon à ne pas manquer une étude pertinente mais également à avoir le moins
possible de références non pertinentes qui ajouteraient une charge de travail inutile de
sélection. A cette fin, des filtres utilisables dans MEDLINE et EMBASE ont été créés par la
Cochrane.
9L’aide d’un documentaliste en santé pour la construction des équations de
recherche est nécessaire.
Cette recherche est ensuite complétée par l’analyse des listes de références des études
incluses.
Les essais ayant des résultats négatifs sont moins souvent publiés que ceux ayant des résultats
positifs.
15L’absence d’inclusion des essais non publiés dans une revue systématique est donc
associée à un risque important de production de résultats erronés surestimant l’effet
traitement.
16Il est donc indispensable de rechercher activement les essais non publiés.
Environs50% des ECR rapportés durant les congrès ne sont jamais publiés.
17Ainsi, la
consultation des résumés de congrès, en complément de la recherche dans les bases de
données bibliographiques, permet d’identifier des essais non publiés. Les registres d’essais
sont désormais également une source extrêmement utile d’identification d’essais non publiés.
Depuis 2005,pour pouvoir publier un essai, l’International Committee of Medical Journal
Editors (ICMJE) exige son enregistrement avant l’inclusion du premier patient.
18Les auteurs
de revues systématiques peuvent donc faire une recherche sur le World Health Organization
International Clinical Trials Registry Platform Search Portal, qui regroupent 16 registres dont
Clinicaltrials.gov et l’European Union Clinical Trials Register. Enfin, les agences
règlementaires telles que la Food and Drug Administration (FDA) et l’European Medicine
Agency (EMA) permettent d’avoir accès à des données via les dossiers d’enregistrement des
médicaments. Quarante et une méta-analyses basées uniquement sur des données publiées ont
été ré-analysées en y ajoutant les données issues de la FDA. La taille de l’effet traitement
ainsi ré-estimée était plus petite dans 46% des MA, plus grande dans 46% et inchangée pour
7%.
19Figure 2: Workflow résumé de la recherche des études au cours d’une revue systématique :
exemple d’une revue systématique Cochrane sur le traitement antiviral oral pour la prévention
des poussées d'herpès génital chez les patients immunocompétents. (Adapté de la source 13)
La sélection des études et l’extraction des données
Cette étape est réalisée par deux auteurs indépendamment. Les divergences devant être
traitées par un troisième auteur. Des logiciels (Covidence pour les revues Cochrane
(
https://www.covidence.org/home
) sont utilisés pour réaliser la sélection. Dans un premier
temps, les titres et résumés ne correspondant pas aux critères d’inclusion sont éliminés. Puis,
le texte complet des références restantes est confronté aux critères d’inclusion.
Une grille d’extraction est construite puis testée sur quelques essais. L’extraction des données
est ensuite réalisée comme la sélection par deux auteurs indépendamment. Les données à
extraire comportent toutes les caractéristiques de l’essai : date, type d’essais, nombre de
centre, traitement, doses, mode d’administration, durée, critères d’inclusion et d’exclusion,
caractéristiques des patients à l’inclusion, nombre de patients randomisés, analysés et les
résultats pour les critères de jugement de la revue.
Evaluation du risque de biais des essais inclus
Plutôt que de parler de qualité méthodologique recouvrant un jugement de valeur un peu
vague, il est préférable de parler de risque de biais. Un biais est une erreur systématique
conduisant à une déviation des résultats par rapport au véritable effet traitement. Il peut
conduire à une surestimation ou une sous-estimation de l’effet traitement. La Cochrane a
construit un outil appelé Risk of Bias tool sur la base d’études méta-épidémiologiques. Ces
études comparent la taille de l’effet traitement obtenue par des méta-analyses d’essais ayant
appliqué ou non certains principes méthodologiques. Il a été démontré par exemple que
l’absence d’aveugle dans les ECR était associée à une augmentation de la taille de l’effet
d’environ 10%.
5Chaque item de la ROB tool correspond donc à un principe méthodologique
dont le non-respect abouti à une évaluation erronée de l’effet traitement. Ces items sont :
- La génération adéquate de la séquence de randomisation
- Le secret de l’allocation
- L’aveugle pour les patients et les soignants
- L’aveugle pour l’évaluation des critères de jugement
- Les données des critères de jugement incomplètes
- Sélection des critères de jugement rapportés
Une génération inadéquate de la séquence de randomisation et /ou un non-respect du secret de
l’allocation conduisent à un biais de sélection des patients au moment de la randomisation.
Les différents groupes risquent ainsi de ne pas être comparables à l’inclusion. L’absence
d’aveugle chez les patients et les soignants peut les conduire à un biais de performance. Il se
produit lorsque les interventions en dehors du traitement administré sont différentes entre les
groupes. Cela conduit à la perte de la comparabilité obtenue lors de la randomisation.
L’absence d’aveugle chez les évaluateurs conduit à un biais de détection ou d’évaluation.
Lorsque le nombre de patients et les raisons du retrait des patients en cours d’étude sont
différents de façon notable entre les groupes, on parle de biais d’attrition. Il correspond à
l’item « données des critères de jugement incomplètes ». L’évaluation du dernier
item « sélection des critères de jugement rapportés » nécessite de vérifier si les critères de
jugement pour lesquels les résultats sont rapportés sont bien ceux annoncés dans les registres
d’essais et/ou les protocoles. Il existe une tendance à moins rapporter les résultats non
significatifs et à rapporter les résultats d’un critère de jugement secondaire plus favorable en
tant que critère de jugement principal.
20,21Pour chaque item, le risque de biais est évalué pour l’essai considéré comme élevé, faible ou
non clair. Ce principe permet de différencier les erreurs méthodologiques (items classés à
risque haut ou bas) d’une mauvaise description des méthodes et des résultats « reporting »
(item classé à risque non clair) lorsque l’information permettant d’évaluer le risque n’est pas
disponible. Afin d’assurer la transparence du jugement, possiblement subjectif pour chaque
item, il est noté les éléments du texte ayant permis le jugement ainsi qu’une justification.
Contacts aux auteurs
Il est souvent nécessaire de contacter les auteurs des essais pour obtenir des informations
complémentaires au stade de la sélection afin de savoir si un essai est éligible ou pas, au stade
de l’évaluation du risque de biais, ou de l’analyse pour obtenir des données complémentaires.
Dans un souci de transparence un tableau indiquant les personnes contactées, la date, la
question et la réponse ou l’absence de réponse est inclus dans la revue.
Enregistrement du protocole
L’ensemble des méthodes présentées ci-dessus de même que celles des synthèses
quantitatives décrites doivent être rédigées sous la forme d’un protocole préalablement
enregistré. Comme pour les ECR, cette pratique évite que les critères d’inclusions ou les
critères de jugement de la revue systématique ne soient modifiés à postériori en fonction des
résultats. Les protocoles des revues Cochrane sont publiés dans la Cochrane Library après
avoir été soumis au comité éditorial du groupe Cochrane correspondant. Le registre Prospero
est accessible à tous les auteurs de revues
systématiques
(
https://www.crd.york.ac.uk/PROSPERO/
). Les revues Cochrane contiennent une section «
changements entre le protocole et la revue ». Les auteurs décrivent dans cette section les
éventuelles modifications effectuées et leur justification.
Présentation des résultats
PRINCIPES ET REFERENTIELS
Par essence, les informations et résultats d’une revue systématique sont divers et nombreux.
La présentation des résultats doit donc permettre d’avoir accès à une information organisée.
De plus, comme pour la partie méthodes, elle doit être en accord avec les principes de
transparence de la Cochrane.
Les éléments devant être rapportés lors de la publication d’une revue systématique sont
présentés dans le « Preferred Reporting Items for Systematic Reviews and Meta-Analyses
(PRISMA) statement » et check-list
.
22Pour les revues Cochrane, le « Methodological
Expectations of Cochrane Intervention Reviews » (MECIR) décrit avec précision les éléments
devant être rapportés (
https://community.cochrane.org/mecir-manual/introduction-key-points).
Les revues Cochrane sont réalisées via le logiciel Revman (Review Manager 5.3).Une fois la
revue enregistrée apparait un patron dans lequel les différentes informations doivent être
saisies.
LES SPECIFICITES COCHRANE
TEXTE DE LA REVUE
Un certain nombre de sections du texte sont spécifiques aux revues Cochrane :
- Plain language summary: un résumé reprenant les éléments du résumé en terme
accessible à tous.
- Une discussion structurée comprenant un résumé des principaux résultats, une section
exhaustivité et applicabilité globale des résultats puis une sur biais potentiels dans la
réalisation de la revue, et accords et désaccords avec les autres études ou revues.
- Une conclusion structurée avec implication pour la pratique et implication pour la
recherche.
REFERENCES
Elles sont classées en études incluses, études exclues, études en attente de classification et
études en cours et autres références. Toutes les références correspondant à des documents
publiés et non publiés en lien avec une étude sont regroupées sous un même identifiant. Cette
pratique permet d’identifier et de prendre en compte les éventuelles publications multiples
d’un même essai.
23, 24Cette pratique peut en effet conduire à inclure plusieurs fois le même
essai dans une méta-analyse. Il a été démontré sur la base d’essais évaluant l’efficacité d’un
traitement antiémétique que l’inclusion de données redondantes dans une méta-analyse
conduisait à une surestimation de l’effet traitement
.25TABLE DES CARACTERISTIQUES DES ETUDES INCLUSES ET RISK OF BIAIS TOOL
Pour chaque étude dont la référence a été classée dans études incluses apparait un tableau
dans lequel doivent être indiquées les caractéristiques de l’essai et l’évaluation du risque de
biais pour chaque item. Le logiciel génère automatiquement une figure résumant les risques
de biais par étude et pour l’ensemble des études.
SYNTHESE DES RESULTATS ET DEGRE DE CERTITUDE
Un tableau résumé des résultats (summary of finding table ; SOF table) est réalisé pour la ou
les comparaisons les plus importantes de la revue en utilisant la méthode GRADE (Table
1).
26,27, 28Il s’agit d’une approche systématique d’évaluation du degré de certitude que l’on peut
attribuer aux résultats d’une revue systématique et méta-analyse. Il s’agit d’un tableau
synthétisant toutes les informations pour une comparaison donnée et rapportant pour chaque
critère de jugement de la revue :
•
Le risque présumé ou risque du groupe contrôle
•
Le risque correspondant ou risque mesuré après l’intervention
•L’effet relatif
•
Le nombre de patients inclus dans les études, le nombre d’études et leur type : ECR
par exemple
•
Evaluation du niveau de preuve
Ce dernier point requière l’intégration de plusieurs données : le risque de biais, l’imprécision,
le caractère indirect (applicabilité des données) et la discordance (hétérogénéité non
expliquée).
Le degré de confiance dans les résultats peut être abaissé d’un à deux niveaux pour chacun de
points. En fonction du nombre de niveau abaissés pour chaque point, le degré de certitude
pour chaque critère de jugement pourra être considéré comme très bas, bas, modéré ou haut.
Table 1 : Table résumé des preuves selon la méthode GRADE (Summary of finding table,
SOF table) pour la comparaison Vitamine D locale vs placebo dans la pustulose
palmoplantaire (Logiciel GRADEpro). (Adapté de la source
29)
Topical vit D derivative compared to placebo for chronic palmoplantar pustulosis
Patient or population: chronic palmoplantar pustulosis Setting: outpatients
Intervention: topical vit D derivative Comparison: placebo
Outcomes Anticipated absolute effects* (95% CI) Relative effect (95% CI) № of participants (studies) Certainty of the evidence (GRADE) Comments Risk with placebo Risk with Topical vit D derivative Proportion of participants cleared or almost cleared in the short term (8 weeks) Study population RR 7.83 (1.85 to 33.12) 188 (1 RCT) ⊕⊕⊝⊝ Low a
Another study (
Muro 2016
) compared topical vitamin D derivative to placebo (within study design; side randomised). Co-intervention (topical betamethasone butyrate propionate) was applied on both sides. Combined therapy was reported as significantly superior to monotherapy for each assessed symptoms (erythema, pustules/vesicles, hyperkeratosis). 22 per 1000 168 per 1000 (40 to 712)*The risk in the intervention group (and its 95% confidence interval) is based on the assumed risk in the comparison group and the relative effect of the intervention (and its 95% CI).
CI: Confidence interval; RR: Risk ratio; OR: Odds ratio;
GRADE Working Group grades of evidence
High certainty: We are very confident that the true effect lies close to that of the estimate of the effect
Moderate certainty: We are moderately confident in the effect estimate: The true effect is likely to be close to the estimate of the effect, but there is a possibility that it is substantially different
Low certainty: Our confidence in the effect estimate is limited: The true effect may be substantially different from the estimate of the effect
Very low certainty: We have very little confidence in the effect estimate: The true effect is likely to be substantially different from the estimate of effect
Footnotes
a Downgraded by two levels to low quality evidence. One level due to study limitations because of incomplete reporting and other items were rated as unclear risk of bias. One further level due to imprecision as there is a large confidence interval for this result.
b Downgraded by one level to moderate quality evidence for study limitations because of incomplete reporting and other items were rated as unclear risk of bias.
1.3 La synthèse quantitative : de la méta-analyse conventionnelle à la
méta-analyse en réseau
1.3.1 Méta-analyse conventionnelle
Principes
Les résultats d’une revue systématique peuvent être présentés de manière qualitative ou
quantitative (méta-analyse). Dans les deux cas, la synthèse doit résumer la direction de l’effet
traitement, la taille de l’effet, la cohérence des résultats entre les études et le niveau de rigueur
des preuves.
La méta-analyse conventionnelle est la combinaison statistique des résultats d’au moins deux
études distinctes comparant deux traitements donnés (traitement actif versus placebo ou
traitement actif versus un autre traitement actif). Cette méthode permet :
-d’augmenter la puissance c’est-à-dire la possibilité de détecter une différence statistiquement
significative si elle existe. Dans une situation ou plusieurs essais de trop petite taille ne
parviennent pas à mettre en évidence un effet, leur combinaison augmente la possibilité de le
mettre en évidence.
- d’améliorer la précision de l’estimation de l’effet traitement,
- de réaliser des analyses en sous-groupes,
- d’explorer les raisons de résultats divergents entre études.
Une méta-analyse se déroule en deux étapes. Dans un premier temps est calculée pour chaque
étude, une synthèse statistique de l’effet traitement exprimé sous la forme d’un risque relatif
ou d’une différence de moyenne par exemple selon le type de critère de jugement choisi. Puis,
la moyenne pondérée est calculée à partir de ces données pour obtenir l’effet traitement
combiné de l’intervention.
9,30Différents modèles statistiques permettent de calculer cet effet
traitement combiné. L’utilisation du modèle statistique à effet fixe se base sur une hypothèse
selon laquelle il existe un effet traitement commun à toutes les études et que les différences de
résultats observés entre les études ne sont dues qu’aux fluctuations d’échantillonnage. A
l’inverse l’hypothèse sous-tendant l’utilisation du modèle statistique à effets aléatoires est que
chaque étude à un effet traitement propre et non plus un effet commun. L’utilisation du
modèle à effets aléatoires sera préférée lorsque qu’il existe une hétérogénéité entre les
études.
31,32L’effet traitement combiné est calculé après avoir renseigné le type de données, le type de
mesure (risque relatif, odds ratio, différence de risque pour les données dichotomiques) et
l’utilisation de la méthode à effet fixe ou aléatoire. Le graphique de présentation des résultats
d’une méta-analyse est appelé forest plot (graphique en forêt)(Fig.3). L’effet traitement dans
chaque étude est représenté par un carré dont la taille est proportionnelle au poids de l’étude
dans la méta-analyse ; son intervalle de confiance à 95% (IC 95 %) est représenté par une
barre horizontale. Le losange représente l’estimation combinée de l’effet traitement avec son
IC 95%.
Figure 3: Graphique en forêt de la comparaison acyclovir vs placebo pour le critère de
jugement « participants ayant eu au moins une récurrence herpétique clinique » (adaptée de
33)
Evaluation de l’hétérogénéité et exploration des causes
Inévitablement les essais inclus dans une méta-analyse présentent des différences. Cette
variabilité est appelée hétérogénéité. La variabilité de la taille de l’effet traitement d’une étude
à l’autre au-delà de ce qui est attendu du fait de la fluctuation d’échantillonnage est appelée
hétérogénéité statistique. Elle est la conséquence de la variabilité clinique (âge, sexe ou
comorbidités des populations incluses ou dose administrée dans les différents essais par
exemple) ou de la variabilité méthodologique (essais réalisés en aveugle ou pas). L’évaluation
de l’hétérogénéité dans une méta-analyse peut se faire dans un premier temps par l’analyse
visuelle du graphique en forêt. Il s’agit alors de regarder si la direction de l’effet traitement
varie d’un essai à l’autre et le chevauchement des intervalles de confiance. Un test statistique
permet de déterminer l’I
2qui exprime le pourcentage de variabilité de l’effet traitement due à
l’hétérogénéité plutôt qu’à la fluctuation d’échantillonnage.
34Les éléments susceptibles de modifier l’effet traitement doivent être décrits a priori, au stade
de la rédaction du protocole. S’il existe une hétérogénéité majeure la réalisation de la
méta-analyse peut être remise en question. L’exploration des causes d’hétérogénéité peut être
réalisée par des analyses en sous-groupe ou de sensibilité.
35Détection d’un biais de publication
Malgré les efforts réalisés par les auteurs de revues systématiques Cochrane pour retrouver
l’ensemble des études publiées ou non, il persiste un risque de ne pas avoir identifié la totalité
des études. Le funnel plot (diagramme en entonnoir) est un diagramme présentant en
abscisses la taille de l’effet traitement et en ordonnées la taille de l’essai ou la
précision(Fig.4)
.36En l’absence de biais de publication la répartition des points sera
globalement en entonnoir symétrique. S’il existe un biais, comme par exemple la non
publication des petites études ayant un résultat non significatif, le funnel plot aura un aspect
asymétrique.
Figure 4 : Graphique en entonnoir symétrique en l’absence de biais de publication. (Adapté de
la source
9)
1.3.2 Méta-analyse en réseau
Apports et principes
Au cours du temps le nombre de traitements disponibles pour traiter une maladie donnée
augmente. La prise de décision médicale implique de savoir quel est le traitement ayant la
plus grande efficacité et la meilleure tolérance pour un patient donné. Les méta-analyses
conventionnelles donnent une estimation de l’effet traitement par la synthèse des résultats
d’essai face-face (un traitement versus un autre). Ce type d’analyse ne permet donc pas de
répondre à l’efficacité relative dès lors qu’il existe plus de deux traitements. De plus, les
méta-analyses conventionnelles ne peuvent comparer que des interventions ayant été
effectivement comparés dans des ECR.
La méta-analyse en réseau est une méthode développée relativement récemment qui permet
d’évaluer plusieurs traitements en une seule analyse. Le principe est la combinaison des
preuves directes et indirectes. La preuve directe est un ECR comparant un traitement A à un
traitement B. La preuve indirecte est la comparaison A vs B déduite mathématiquement
lorsque A et B ont chacun été évalué contre un comparateur commun C (A vs C et B vs C).
37Le principe mathématique de base est résumé dans le schéma suivant
Figure 5 : Représentation graphique du principe mathématique de l‘analyse en réseau
La méta-analyse en réseau permet donc d’évaluer une comparaison (A vs B) qui n’a jamais
été évaluée dans un ECR. Il s’agit d’une avancée majeure sachant que le manque d’essais
comparant deux comparateurs actifs est important. L’évaluation d’un nouveau traitement est
toujours faite versus placebo pour des raisons réglementaires. Les essais comparant ce
nouveau traitement aux traitements déjà existants sont rarement réalisés, le plus souvent pour
des raisons commerciales par crainte de ne pas réussir à démontrer la supériorité du nouveau
traitement par rapport aux plus anciens déjà sur le marché.
38En outre, cette méthode permet de classer les traitements inclus dans le réseau en déterminant
la probabilité pour chacun des traitements d’être à un rang donné, d’être par exemple le
premier.
37La première étape est de construire le réseau de traitements. A l’idéal, tous les traitements
disponibles pour le traitement d’une maladie donnée sont inclus dans le réseau à condition de
respecter le principe de transitivité. Le respect du principe de transitivité implique que le
réseau représente un essai virtuel à multiples bras. Les patients doivent pouvoir être inclus
dans n’importe lequel de ces bras. Tous les traitements du réseau doivent avoir la même
indication par exemple les traitements donnés en première et deuxième ligne ne peuvent pas
être inclus dans le même réseau. Si dans une boucle A,B,C, l’effet traitement obtenu lors de
l’essai A vs C est y, la transitivité est respectée si le résultat qui aurait été obtenu en
remplaçant A par B est identique. Ainsi les populations incluses dans les différents essais
doivent être similaires en termes d’effet modificateur du traitement. Si par exemple la
moyenne d’âge est différente entre les essais mais que l’âge n’influe pas sur l’effet traitement
la transitivité est respectée.
La figure 6 représente le réseau des traitements systémiques du psoriasis en plaques modéré à
sévère pour le critère de jugement PASI 90 (pourcentage de patients obtenant 90%
d’amélioration du score de sévérité PASI). Chaque rond appelé nœud correspond à un
traitement, sa taille est proportionnelle au nombre de patients inclus dans ce bras pour
l’ensemble des essais. Une ligne existe entre deux traitements si au moins un ECR a été
réalisé pour les comparer. L’épaisseur du trait est proportionnelle au nombre d’essais ayant
évalué cette comparaison.
La géométrie des réseaux d’essais donne à lui seul des informations sur les comparateurs
utilisés.
39Dans l’exemple de la figure 6 on peut observer que le comparateur le plus
fréquemment utilisé est le placebo et que peu d’essais face-face ont été réalisés. Cette
préférence pour le comparateur placebo par rapport au comparateur actif a été identifiée par
cette méthode dans d’autres pathologies en dermatologie et d’autres domaines médicaux.
40-42