3 Op´ erateurs auto-adjoints ` a spectre discret
3.1 Op´ erateurs auto-adjoint compacts
SoitH un espace de Hilbert complexe etA∈ L(H). On note
r(A) = sup{|λ|, λ∈σ(A)} (3.1) le rayon spectral deA.
Lemme 3.1. Pour tout op´erateur A∈ L(H), on a r(A) = lim sup
n→∞ �An�1/n. (3.2)
D´emonstration. Supposons que |λ| >lim sup�An�1/n. Alors il existe ε >0 et n0≥1 tels que
�An� ≤�
|λ| −ε�n
pour n≥n0
Il s’ensuit que la s´erie
�∞ n=0
λ−1−nAn
converge. Il est facile `a v´erifier que la somme est l’inverse deλI−A. Donc, r(A)≤sup{|λ|, λ∈σ(A)}.
Montrons l’in´egalit´e r´eciproque. Pour tout ε > 0, on note Γε le cercle de rayonr(A) +εet de centre z´ero. Alors
An= (2πi)−1
�
Γε
λnRλ(A)dλ, d’o`u on voit que
�An� ≤Cε
�r(A) +ε�n
pour toutn≥0.
Ceci entraˆıne que lim sup
n→∞ �An�1/n≤lim sup
n→∞ Cε1/n�
r(A) +ε�
=r(A) +ε.
Commeε >0 ´etait quelconque, on obtient (3.2).
Lemme 3.2. SoitA∈ L(H)etA=A∗. Alors
�A2n�=�A�2n pour toutn≥1.
En particulier,r(A) =�A�.
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D´emonstration. On a
�Au�2= (Au, Au) = (A2u, u)≤ �A2� �u�2,
d’o`u on conclut que�A�2≤ �A2�. D’autre part, il est ´evident que�A�2≥ �A2�, et donc�A�2=�A2�. En r´eit´erant cette relation, on obtient
�A2n�=��(A2n−1)2��=��A2n−1��2=· · ·=�A�2n. Comme
lim sup
n→∞ �An�1/n≥lim sup
n→∞
��A2n��2−n=�A�,
on voit quer(A)≥ �A�. D’autre part, on sait quer(A)≤ �A�, d’o`u le r´esultat.
Corollaire 3.3. SoitA∈ L(H),A=A∗ et r(A) = 0. AlorsA= 0.
On dit queAest un op´erateur compact si pour toute suite born´ee{un} ⊂H la suite {Aun} a un point d’accumulation. Le th´eor`eme suivant donne une description compl`ete des op´erateurs auto-adjoints compacts.
Th´eor`eme 3.4. SoitA un op´erateur auto-adjoint compact. Alors il existe une base orthonorm´ee {ϕn} ⊂H et une suite λn→0 telles que
Au=
�∞ n=1
λn(u, ϕn)ϕn pour toutu∈H. (3.3) D´emonstration. Etape 1. Montrons d’abord que soit r(A) soit −r(A) est une valeur propre de A. En effet, comme σ(A) ⊂ R est ferm´e, au moins un des deux points r(A) et −r(A) appartient au spectre. On note ce point λ1. Si Ker(λ1I−A) ={0}, alors Im(λ1I−A) =H, et on voit que l’inverse deλ1I−A n’est pas born´e. Soit{un} ⊂H une suite telle que
�un�= 1 pour toutn≥1, fn= (λ1I−A)un→0 quandn→ ∞.
Comme A est compact et λ1 �= 0 (sinon A = 0, et le r´esultat est trivial), on peut supposer que la suiteun =λ−11(fn+Aun) converge vers un pointϕ1∈H avec�ϕ1�= 1. En passant `a la limite quandn→ ∞, on obtientAϕ1=λ1ϕ1.
Etape 2. On raisonne maintenant par r´ecurrence. SoitH1le compl´ementaire orthogonal de Vect(ϕ1) etA1 la restriction deA`a l’espaceH1 qui est invariant par A. Alors, soit r(A1) = 0, et dans ce casA1 = 0 et λn = 0 pour n ≥ 2, soit r(A1)>0. Dans le deuxi`eme cas, en utilisant l’argument de l’´etape 1, on montre queλ2 =±r(A1) est une valeur propre deA1 et on noteϕ2 le vecteur propre correspondant avec �ϕ2�= 1. En r´eit´erant cette proc´edure, on obtient une suite orthonorm´ee{ϕn}Nn=1 avec 1≤N ≤ ∞telle que
Aϕn =λnϕn, r� A|Hn
�=|λn+1| pour toutn≥1, (3.4)
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o`u Hn d´esigne le compl´ementaire orthogonal de Vect(ϕ1, . . . , ϕn),λn sont des r´eels, etλN+1= 0 siN <∞. Dans ce dernier cas, on a
Au=
�N
n=1
λn(u, ϕn)ϕn, (3.5)
et si on poseλn = 0 pourn≥N+ 1, on obtient la relation (3.3), o`u {ϕn} est une base orthonorm´ee dansHN.
Etape 3. Supposons maintenant queN =∞et montrons que la restriction de A `a l’espace H∞ = (Vect{ϕn, n ≥ 1})⊥ est un op´erateur nul. En effet, montrons d’abord que λn → 0 quand n → ∞. Si ce n’est pas le cas, alors
|λn| ≥ε >0, car|λn| est une suite d´ecroissante. On a
�Aϕk−Aϕn�=�λkϕk−λnϕn� ≥√ 2ε,
et on voit que{Aϕn} ne contient pas de sous-suite convergente. Ceci contredit
`a la compacit´e deA.
Supposons maintenant que l’op´erateur A∞ = A|H∞ n’est pas nul. Alors, d’apr`es l’´etape 1, il a un vecteur propreψ `a valeur propreµ �= 0. Donc, on a r(A∞)≥ |µ|>0. D’autre part,
r(A∞)≤r(An) =λn+1→0 quandn→ ∞.
La contradiction obtenue montre queA∞= 0, et on obtient la relation (3.3).
Exercice 3.5. SoitI = [a, b] un intervalle fini, K∈C(I×I) une fonction telle queK(x, y) =K(y, x) etA:L2(I)→L2(I) l’op´erateur int´egrale
(Au)(x) =
�
I
K(x, y)u(y)dy, u∈L2(I).
Montrer queAest op´erateur auto-adjoint compact.
3.2 Op´ erateurs auto-adjoints ` a r´ esolvante compacte
Th´eor`eme 3.6. Soit A :D(A) →H un op´erateur auto-adjoint tel que la r´e- solvanteRλ(A)est compacte pour un r´eel λ. Alors il existe une base orthonor- m´ee{ϕn}et une suite r´eelle µn telles que |µn| → ∞ et
Aϕn=µnϕn pour toutn≥1. (3.6) De plus,
D(A) =� u∈H:
�∞ n=1
|(u, ϕn)|2<∞�
, (3.7)
Au=
�∞ n=1
µn(u, ϕn)ϕn. (3.8)
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D´emonstration. L’op´erateurRλ(A) = (λI−A)−1 est auto-adjoint et compact.
D’apr`es le th´eor`eme 3.4, il existe une base orthonorm´ee {ϕn} ⊂ H et et une suiteλn →0 tel queλn �= 0 et
Rλ(A)ϕn=λnϕn pour toutn≥1.
On voit queϕn∈ D(A). En appliquant l’op´erateurλI−A, on obtient ϕn =λn(λI−A)ϕn,
d’o`u on voit que (3.6) a lieu avecµn=λ−λ−1. Les relations (3.7) et (3.8) sont des cons´equences directes de (3.6).
Exemple 3.7. Consid´erons l’op´erateur diff´erentielleA0=−dxd22+q(x), d´efini sur l’espace C0∞(J), o`u J = ]0,1[. Il est facile `a v´erifier que si q ∈ L∞(J), alors A0 ⊂A∗0 et (A0u, u)≥ −M�u�2 pour tout u∈ D(A0). On noteA l’extension de Friedrichs pourA:
D(A) =H2(J)∩H01(J), Au=−d2u
dx2 +q(x)u.
Montrons queAest un op´erateur `a r´esolvante compacte. En effet, si�q�L∞ =M etλ=−1−M, alors
�(λI−A)u, u�
≤ −�
�u�2+�u��2�
, u∈ D(A), d’o`u on voit que
�(λI−A)u�2≥ �u�2+�u��2, u∈ D(A).
Ceci entraˆıne queλ∈ρ(A) et queRλ(A) est compact. On peut donc appliquer le th´eor`eme 3.6 et conclure qu’il existe une base orthonorm´ee{ϕn}deL2(J) et une suiteλn→+∞telles queϕn ∈ D(A) etAϕn=λnϕn pour toutn≥1.
Exercice 3.8. SoitAun op´erateur auto-adjoint `a r´esolvante compacte.
(a) Montrer que σ(A) ={µn, n≥1}, o`uµn sont des r´eelles construites dans le th´eor`eme 3.6.
(b) Montrer que l’´equation (A−µnI)u=f poss`ede une solution si et seulement si f ∈ Hµ⊥n, o`u Hµ d´esigne le sous-espace des vecteurs ϕ ∈ H v´erifiant Aϕ=µϕ.
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