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GRŠW Gerasa : Laurent tholbecq Université Libre de Bruxelles

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(1)

une note de toponymie nabatÉenne

1

Laurent t

hOLBEcq

Université Libre de Bruxelles

Des travaux effectués en 1964 à l’entrée orientale du Sīq de Pétra (Bāb as- Sīq) par le Département des antiquités de Jordanie occasionnèrent la décou- verte d’un petit ensemble de douze nephesh rupestres inscrites

2

. Les monuments se répartissaient en deux groupes de sept et cinq stèles funéraires, distantes d’une petite dizaine de mètres l’une de l’autre ; elles étaient accom- pagnées d’épitaphes nabatéennes – neuf furent déchiffrées – et d’un anthropo- nyme nabatéen écrit en grec

3

. La plus longue de ces inscriptions retenait particulièrement l’attention puisqu’elle présentait la première attestation en nabatéen du terme Reqem, désignant en araméen la ville de Pétra

4

.

Le texte se lit comme suit (je reproduis la lecture de L. Nehmé)

5

: dʾ npš pṭrys br ceci est la nephesh de Petraios fils de trpṭs w yqr ʾry threptos et il est honoré parce que hwh brqmw dy myt il a été à Raqmū [lui] qui est mort bgršw w qbyr tmh dy à Garšū et a été enseveli là-bas, que ꜥbd lh tymw rbnh lui a faite taymū son maître

Si l’identification du toponyme Raqmū, « la bigarrée », était confirmée par les occurrences bibliques du terme et par son utilisation chez les auteurs

1Puisse cette petite contribution faire modestement écho aux passionnantes leçons de géo- graphie historique du Proche-Orient que Robert Donceel nous prodiguait à Louvain-la-Neuve et que j’ai eu la chance de suivre ; ses nombreux cours alliaient dans un élan communicatif une érudition aussi discrète que savante et une modestie de tous les instants. En témoignage de ma profonde reconnaissance.

2J. StaRcky, Nouvelles stèles funéraires à Pétra, dans ADAJ, 10 (1965), pp. 43-49 ; L. NEhmé, Atlas archéologique et épigraphique de Pétra. Fascicule 1. De Bāb as-Sīq au Wādī al-Farasah, (épigraphie & archéologie, 1), Paris, académie des Inscriptions et Belles Lettres, 2012, pp.

127-128 (Inv. BS24).

3J. tEIxIDOR, Bulletin d’épigraphie sémitique, dans Syria, 44 (1967), n° 75, pp. 185-186 ; L. NEhmé, op. cit., pp. 165-167 (mP6-15).

4J. StaRcky, art. cit. à la note 1, ADAJ, 10 (1965), n°2, pp. 44-46 ; ID.,Nouvelle épitaphe nabatéenne donnant le nom sémitique de Pétra, dans RBi, 72, (1965), pp. 95-97.

5L. NEhmé, op. cit., p. 165, mP7, avec discussion d’autres lectures avancées par J. t. milik.

(2)

grecs

6

, celle de Garšū ne paraissait relayée par aucune source littéraire. L’évi- dente proximité du terme avec le toponyme moderne « Jérash » incita les inven- teurs à conclure que notre personnage avait été enterré à Gerasa de la Décapole

7

. cette identification fut acceptée par tous et systématiquement inté- grée aux sources relatives à cette cité

8

.

Il revient à Fawzi zayadine d’avoir contesté cette proposition. Dans un arti- cle de grande vulgarisation publié en 1999, le savant jordanien suggérait de rechercher Garšu à « Jurash, en arabie Saoudite »

9

. cette proposition, mal- heureusement peu précise, avait le mérite de rouvrir le débat et de situer le lieu de décès de notre Pétraios au plus près du territoire nabatéen et non dans une cité de la Décapole pour laquelle, rappelons-le, les témoignages de présence nabatéenne sont extrêmement ténus

10

. En réalité, le toponyme Jarash/Djarash

6Nombres, 31, 8 ; I Chron., 2, 43 et 7, 16 ; Fl. Josèphe, Ant. Jud., 4, 7, 9, §161 ; Eusèbe, Ono- mastikon, s.v. Rekem, Arkem et Petra ; J. StaRcky, art. cit. à la note 3, RBi, 72 (1965), pp. 95- 96 ; ID., Pétra et la Nabatène, dans h. cazELLES et a. FEuILLEt (éds.), Supplément au Dictionnaire de la Bible, 7, Paris (1966), col. 897-899 ; F.-m. aBEL, Géographie de la Palestine, II, 1967,, p. 436. z. t. FIEma,Petra, dans G. SchöLLGEN(ed.),Reallexikon für Antike und Chris- tentum: Sachwörterbuch zur Auseinandersetzung des Christentums mit der antiken Welt, Vol.

xxVII, Stuttgart, a. hiersemann, 2015, pp. 349–388.

7telle était également l’opinion des R.P. B. couroyer et R. de Vaux cités par J. StaRcky, art.

cit. à la note 1, ADAJ10, p. 45, note 2.

8D. GRaF, The Nabataeans and the Decapolis, dans Ph. FREEmaN& D. kENNEDy, The Defense of the Roman and Byzantine East(BaRIntSer, 297), II, Londres,1986), p. 79 ; R. WENNING,Die Nabatäer, Denkmäler und Geschichte : Eine Bestandaufnahme des archäologischen Befundes (NtOa, 3), Freiburg – Göttingen, 1987, p. 56 ; ID., The Nabataeans in the Decapolis / Coele Syria, dans Aram, 4 (1992), p. 88 ; P.-L. GatIER, La présence arabe à Gérasa et en Décapole, dans h. LOzachmEuR(ed.), Présence arabe dans le croissant fertile avant l’Islam, Paris, 1995, p. 118 ; u. hackL, h. JENNI& ch. SchNEIDER(edd.), Quellen zur Geschichte der Nabatäer, Textsammlung mit Übersetzung und Kommentar, mit Beiträgen von Daniel Keller(NtOa, 51), Göttingen, 2003, pp. 220-222.

9F. zayaDINE, Le Sîq, une voie processionnelle, dans Dossier d’Archéologie, 244 (Juin 1999), p. 49. J’ignore où se situe la ville à laquelle F. zayadine fait allusion. Peut-être s’agit-il du lieu- dit situé au nord-ouest de taymā, que Sir J. Philby retranscrit al-Jarish : J. PhILBy, The Land of Midian, London, 1957, pp. 89 et 105-106.

10Ils consistent en quelques fragments de chapiteaux « à cornes » et en une bilingue gréco- nabatéenne. Sur les chapiteaux nabatéens de Jérash : R. PaRaPEttI, Capitelli nabatei a Gerasa, dans Mesopotamia, 33 (1998), pp. 309-320. De son côté, la lecture de la bilingue de Jérash, aujourd’hui conservée au musée d’amman paraît désespérée : c.B. WELLES, The Inscriptions, dans c.h. kRaELING, Gerasa, City of the Decapolis, New-haven, 1938, pp. 371-373, avec les remarques de J.t milik reproduites par G.W. BOWERSOck, Syria under Vespasian, dans JRS, 63 (1973), p. 138, note 54. Sur la présence nabatéenne à Gerasa de la Décapole, on se référera à la mise au point désormais classique de P.-L. GatIER, Philadelphie et Gerasa du royaume nabatéen à la Province d’Arabie, dans P.-L. GatIER, B. hELLy& J.-P. REy-cOquaIS, Géographie Histo- rique au Proche-Orient (Syrie, Phénicie, Arabie, grecques, romaines, byzantines), Actes de la Table Ronde de Valbonne, 16-18 septembre 1985, Paris,1988, pp. 159-170.

(3)

ﺵﺯﺠ est attesté en plusieurs régions

11

: à côté des exemples précités de trans- jordanie et d’arabie, on signalera ainsi le village situé au nord-est de Jaffa, dont le nom s’est transmis au tell tout proche de tell Jerishe / tel Gerisa, ou encore, en arabie méridionale (dans l’asir), la ville de Jôresh signalée par les auteurs arabes

12

. Et la liste est probablement loin d’être exhaustive. En tout état de cause, la multiplicité des attestations du toponyme moderne fragilise l’ancienne tentative d’identification de Garšu avec la seule Gerasa de la Déca- pole.

Notre petit problème me paraît pouvoir être résolu avec plus de vraisem- blance. claude Ptolémée signale en effet, à côté de Gerasa de la Décapole (Géogr. V, 14, 18), une seconde Gerasa, en arabie Pétrée cette fois (Géogr. V, 16, 4)

13

. Le toponyme apparaît parmi les premiers sites d’une liste de vingt- sept répertoriés dans cette région, juste avant Pétra :

« 4. Les villes qui sont dans cette province sont les suivantes : EBODa 65° 15’ - 30° 30’, maLIattha 65° 45’ - 30° 30’, caLGuIa 66° 20’ - 30° 30’, LySa 65°

20’ - 30° 15’, GOuBBa 65° 45’ - 30°, GyPSaRIa 65° 40’ - 29° 45’, GeRaSa 65° 30’ - 29° 30’, petRa66° 45’ - 30° 20’, chaRacmOBa 66° 10’ - 30°, auaRa 66° 10’ - 29° 40’, zaDaGatha 66° 45’ - 29° 50’, aDROu 67° 29° - 55’, zOaRa 67° 20’ - 30° 30’, thOaNa 67° 30’ – 30° 30’, NEcLa 67° 30° - 30° 15’, cLEthaRRhO 67° 50° - 30° 20°, mOca 67° 50° - 30° 10’, ESBOuta 68° 30’ – 31°, zIza 68° 45’ – 31°, maGuza 68° - 30° 45’, mEDaBa 68° 30’ – 30° 45’, LyDIa 69° - 30° 40’, RaBathmOBa 68° 30’ – 30° 30’, aDItha 68° 40’ - 30°

15’, SuRattha 69° 15’ – 31° 10’, BOStRa LEGIO III cyRENaIca 69° 20’ – 30° 30’, aDRa 69° 40’ – 30° 40’. ».

tous les sites listés par cl. Ptolémée avant Pétra sont situés dans le Négeb ; au-delà, la liste ne concerne que des sites de transjordanie. Les premiers com- mentateurs ont été tentés de rechercher dans cette liste les vestiges d’itinéraires, ce qui est douteux sur le fond. Deux thèses les ont ainsi guidés : celle de deux itinéraires indépendants, suggérée dès 1906 par P. thomsen et reprise par z. meshel et y. tsafrir, et celle d’un itinéraire unique, défendue par a. alt

11Le toponyme nabatéen partage sans doute une origine commune avec le cananéen migrāš, qui désigne « une zone de pâturages autour d’une ville » ; on lui rapprochera l’arabe ğarīsat,

« tête de bétail », et mağras, « pâturage » : D. cOhEN, Fr. BRON& a. LONNEt, Dictionnaire des racines sémitiques ou attestées dans les langues sémitiques comprenant un fichier comparatif de Jean Cantineau, Fascicule 3 : GLD-DHML/R, Louvain, 1993, p. 193, s.v. « GRŠ ».

12z. hERzOG, Gerisa, Tel, dans NEAEHLII, Jérusalem, 1993, pp. 480-484. « Djoresh » : m. REINauD, Géographie d’Aboulfèda traduite de l’arabe en français, (Paris), 1848, II, 1, p. 110 et p. 130.

13Le site est répertorié comme « Gerasa (2) » dans la carte illustrant l’article de h.I. mac

aDam, Ptolemy’s Geography and the Wadi Sirhan, dans P.-L. GatIERet al., op. cit.à la note 9, p. 66-67, fig. 6 ; il n’est pas repris dans R.J.a. taLBERt, Barrington Atlas of the Greek and Roman World, Oxford –Princeton, 2000.

(4)

(1935)

14

. Sans aborder ici le problème des sources de Ptolémée

15

et indépen- damment de la question de son utilisation très improbable d’itinéraires, il faut reconnaître que le report des sites sur une carte respectant les coordonnées de Ptolémée place Eboda, Malliattha et Kalguia sur une même latitude, tandis que les quatre sites restants – parmi lesquels la Gerasa qui nous occupe – se distribuent sur une ligne oblique, de direction nord-est / sud-ouest, cette dis- position s’observant nettement dans les cartes accompagnant les manuscrits qui nous sont parvenus

16

.

Existe-t-il une source qui indiquerait que certains de ces sites désertiques étaient effectivement reliés entre eux ? En réalité, la Table de Peutinger – ce jeu de cartes dont l’original, indépendant du traité de Ptolémée, remonterait selon G.W. Bowersock aux années 120-160 – reproduit l’itinéraire suivant :

« hierusalem – LxxI – Elusa – xxIIII – Oboda – xLVII – Lysa – xxVIII – Gyp- saria – xVI – Rasa– xVI – addianam – xVI – haila »17.

On le constate, ni Malliattha ni Kalguia n’y apparaissent. ces deux sites, signalés par cl. Ptolémée, correspondent en réalité à deux étapes d’un itinéraire reliant Pétra à Oboda (et donc à Gaza)

18

. Il faut définitivement renoncer à situer

14P. thOmSEN, Untersuchungen zur älteren Palaestina Literatur, dans ZDPV29 (1906), pp. 111-112; a. aLt, Aus der Araba II, Römische Kastelle und Strassen, dans ZDPV58 (1935), pp. 1-59 ; y. ahaRONI, The Roman Road to Elat, dans IEJ4, (1954), pp. 9-16 ; z. mEShEL& y.

tSaFRIR, The Nabataean Road from ‘Avdat to Sha‘ar-Ramon. Part III. The Nabataean Road from Petra to Gaza in Ptolemy’s Geography, dans PEQ, 107 (1975), pp. 16-21.

15G. auJac, Claude Ptolémée, astronome, astrologue, géographe. Connaissance et représen- tation du monde habité, Paris, 1993, pp. 112-127.

16ceci étant, il n’y a pas lieu de rechercher sur le terrain un itinéraire qui respecterait cette orientation : on observe bien sur les cartes anciennes que cette oblique nord-est / sud-ouest en coordonnées de Ptolémée s’intègre dans une trame qui ne respecte pas la grille géographique moderne, mais a pivoté vers l’est. On comprend que, rapportée à notre planisphère, l’orientation de cette oblique tend vers une direction absolue nord-ouest / sud-est. On consultera avec profit les planches 3 et 4 de G.W. BOWERSOck, Roman Arabia, cambridge – Londres, 1983, qui repro- duisent respectivement un extrait du Codex Urbinas Graecus 82, et du Codex Vaticanus Latinus 5698. Pour une représentation schématique : z. mEShEL& y. tSaFRIR, art. cit. à la note 13, PEQ 107, p. 17, fig. 6.

17Table de Peutinger, extrait du Segment 8 : Tabula Peutingeriana, Codex Vindobonensis 324, Vollständige Faksimile – Ausgabe in Originalformat, Graz, 1976. Pour sa datation haute : G.W. BOWERSOck, Appendix IV : Ancient Maps of Roman Arabia, dans Roman Arabia, cam- bridge – London, 1983, pp. 164-186, en particulier pp. 177-179 ; R.J.a. talbert va dans le même sens, et suggère une rédaction de peu postérieure à l’intégration de la Dacie au début du 2es. et des compléments au début du 4es. : R.J.a. taLBERt, Rome’s World, The Peutinger Map Recon- sidered, cambridge, 2010, pp. 135-136.

18a. NEGEV, The Date of the Petra-Gaza Road, dans PEQ, 98 (1966), pp. 90-91; R. cOhEN, New Light on the Date of the Petra-Gaza Road, dans BiblArch, 45 (1982), pp. 242-243.

(5)

Malliatha à tell el-milḥ (tel malḥata)

19

. cette forteresse iduméenne se trouve à 21 km au nord de mampsis, que Ptolémée place bien en Idumée, et n’est donc pas concernée

20

. Malliattha est un petit caravansérail situé à qasr el maḥalle, dont la construction remonterait au début du premier siècle de notre ère

21

. quant à la seconde étape, Kalguia, elle est identifiée aux ruines de khir- bet moa, situées trente kilomètres plus à l’est

22

. Le site constituait une halte caravanière dotée d’un khan et d’un petit fortin nabatéens, à mi-chemin entre Pétra et Oboda

23

. après la traversée du Wadi ꜥarabah, les voyageurs faisaient ainsi étape à Bīr madkhur avant de remonter les vallées du plateau transjorda- nien vers Pétra

24

.

Peut-on avancer et tenter de préciser où se trouve notre Gerasa du Négeb ? comparons nos sources :

ptolémée table de peutinger

Lysa Lysa

(Goubba) —-

Gypsaria Gypsaria

Gerasa Rasa

—- Addianam

—- Haila

Sont signalés par les deux sources les sites de Lysa, Gypsaria et celui qui nous occupe, Gerasa, s’il s’agit bien de la Rasa de la Tabula. cette concomi- tance des sources incitait P. thomsen à conclure que la liste de Ptolémée réper-

19Contram. SaRtRE, Trois études sur l’Arabie romaine et byzantine, (Latomus Suppl., 178), Bruxelles, 1982, p. 41, qui rapprochait les deux sites par erreur.

20y. tSaFRIR, L. DISEGNIet J. GREEN, s.v. Malatha, dansTabula Imperii Romani, Iudaea.

Palaestina, Eretz Israel in the Hellenistic, Roman and Byzantine Periods, Maps and Gazetteer, Jerusalem, 1994, p. 176. I. BEIt-aRIEh& L. FREuND(edd.), Tel Malḥata, A Central City in the biblical Negev, Vol. I., Winona Lake, Eisenbrauns, 2015, pp. 17-23.

21R. cOhEN, art. Negev, s.v.mezad Sha’ar Ramon, dans NEAEHL, III (1993), 1145; y. tSa-

FRIR, L. DISEGNIet J. GREEN, op. cit. à la note 19, s.v. Maliatha, p. 176.

22y. tSaFRIR, L. DISEGNIet J. GREEN, op. cit. à la note 19, s.v. Calgouia, p. 96.

23R. cOhEN, art. « Negev », s.v. mo’a (khirbet moyat ’awad), dans NEAEHL, III, 1993, pp. 1137-1140. En l’absence de céramique byzantine sur le site, également signalé par des sources d’époque byzantine, t. Erickson-Gini considère que cette proposition ne peut être rete- nue : t. ERIckSON-GINI, Nabataean Settlement and Self-Organized Economy in the Central Negev. Crisis and renewal, (BaR Int. Ser., 2054), Oxford, 2010, pp. 12-13.

24m. PERRyet a. SmIth, d, AJA102 (1998), pp. 592-595.

(6)

cutait effectivement un itinéraire qui reliait Eboda à aila. c’est la voie qu’a également suivi y. aharoni, au prix de deux corrections vraisemblables d’in- dications de distance renseignées par la Tabula

25

. Il s’agirait dans ce cas du prolongement méridional du « Darb el-Ghazza », route qui reliait Gaza à la mer Rouge

26

.

évacuons tout d’abord la question de la localisation de Addianam : l’étape qui, selon la Table de Peutinger, relie Rasa à Haila (i.e. à ayla / aqaba), est traditionnellement située à ꜥayn Ghadyam / ꜥEn yotvatah, à une quarantaine de kilomètres au nord du golfe d’aqaba, sur la rive occidentale du Wadi ꜥara- bah

27

. De là, les voyageurs ralliaient soit aila, sur le golfe, soit Oboda vers le nord-ouest. Si cette identification est correcte, ce qui n’est pas absolument assuré, elle implique une correction de la distance renseignée par la Table de Peutinger

28

. De son côté, l’identification de l’ancienne Lysa aux ruines du Wadi Lussan, à 40 km au sud-ouest d’Oboda, est communément admise

29

. Elle implique elle aussi une correction de la distance mentionnée par la Tabula

30

.

S’agissant de Gypsaria et de Gerasa, plusieurs identifications ont été avan- cées, qui suivent toutes un itinéraire situé aux confins du Sinaï. Selon E.h. Pal- mer, la piste se poursuivait vers aila, par kuntillet el-Jerayah (Gypsaria) et

25y. ahaRONI, art. cit. à la note 13, dans IEJ4 (1954), pp. 15-16.

26z. mEShEL, The History of “Darb el-Ghazza” – the ancient Road to Eilat and Southern Sinai, dans ErIsr15 (1981), pp. 358-371 (en hébreu, résumé en anglais p. 87).

27z. mEShEL, Yotvata, dans NEAEHL, IV, pp. 1517-1520. y. tSaFRIR, L. DISEGNIet J. GREEN, op. cit. à la note 19, s.v. Ad Dianam, pp. 57-58. Dans la Table de Peutinger, une vignette repré- sentant une maison – c.-à-d., selon les conventions en usage par ailleurs dans le document, un temple et non un fortin – accompagne le site. Dans la mesure où aucun temple n’a été découvert à ꜥayn Ghadyam, il y a sans doute lieu de suivre la suggestion de y. aharoni qui y voyait une interpolation tardive sur base d’une interprétation erronée du toponyme Addianam/ Ad Dianam.

y. ahaRONI, art. cit. à la note 13, dans IEJ4 (1954), p. 12. Sur l’identification du site à ad Dia- nam : G. DaVIES& J. maGNESS(edd.), The 2003-2007 Excavations in the Late roman Fort at Yotvata, Winona Lake, 2015, p. 1 et note 3. contra : Benjamin ISaac, Roman organisation in the Arabah in the fourth century AD, dans P. BIENkOWSkI& k. GaLOR(edd.), Crossing the Rift, resources, routes, settlement patterns and interaction in the Wadi Arabah, (Levant Supplemen- tary Series, 3), Oxford, 2006, pp. 218-219.

28« xVI » à corriger par « xxVI » : y. ahaRONI, art. cit. à la note 13, dans IEJ4 (1954), p. 16.

29E.h. PaLmER, The Desert of the Exodus, New york, 1872, p. 281; R. cOhEN, Negev Emer- gency Project, dans IEJ,36 (1986), p. 115 ; y. tSaFRIR, L. DISEGNIet J. GREEN, op. cit. à la note 19, s.v. Lysa, p. 172 ; ze’ev mEShEL, Kuntillet ‘Ajrud (Ḥorvat Teman), an Iron Age II reli- gious site on the Judah-Sinai Border, Jérusalem, 2012, p. xviii.

30« xLVII » à corriger en « xxVII » : y. ahaRONI, art. cit. à la note 13, dans IEJ4, 1954, p.

15-16.

(7)

kuntillet el-Jirafi (Gerasa)

31

. y. aharoni préférait placer Gypsaria dans le Wadi el-Jirafi, et Rasa plus au sud, au Wadi Ghabyah

32

. À ce stade, aucun élément ne permet de trancher mais l’identification de Rasa avec kuntillat Jarafi paraît raisonnable : une route directe relie en effet ce site à Aila, via le Ras en Naqeb, tandis qu’une seconde route permet de rallier Addianam au nord, via le Naqeb ed-Dill

33

; que l’on associe Gerasa à l’une ou l’autre station de cet itinéraire, la suggestion de z. meshel d’y voir les étapes d’une piste ralliant Rhinocolure (el-ꜥarīsh) garde toute sa valeur

34

. On peut donc raisonnablement considérer que la halte caravanière de Gerasa se situait à l’intersection de pistes reliant d’une part Oboda à aila et, d’autre part, Pétra à Rhinocolure (al-ꜥarīsh)

35

. En définitive, quelle que soit sa localisation précise, l’attestation d’une Gerasa en arabie Pétrée incite à écarter l’identification de gršw, le lieu de décès de notre Petraios, à Gerasa de la Décapole, au profit de l’étape caravanière homonyme située aux confins du Sinaï et du Négeb.

abstract

the toponym gršwreported in a Nabataean epitaph from Petra has traditionally been regarded as Gerasaof the Decapolis, in Northern Jordan. We suggest that it may rather refer to a site from Southern Negev called Gerasain Ptolemy’s Geography and Rasaby the Peutinger map.

31E.h. PaLmER, op. cit. à la note 27, p. 356. P. thomsen situait Gubba dans le Wadi el-Jerafi, les deux étapes suivantes étant placées plus au sud-ouest : P. thOmSEN, art. cit. à la note 13, dans ZDPV29 (1906), p. 111. Il semble bien qu’il faille rejeter l’hypothèse d’a. alt qui situait Gerasadans le Wadi at-tlah, sur le versant ouest du Wadi ꜥarabah, à hauteur de Gharandal.

cette déduction se basait sur de fausses prémisses, en particulier l’existence d’une route romaine dans le Wadi ꜥarabah ponctuée d’autant d’étapes : a. aLt, art. cit. à la note 13, dans ZDPV58 (1935), p. 55.

32y. ahaRONI, art. cit. à la note 13, dans IEJ4, 1954, pp. 14-16 et fig. 2. c’est également à kuntillet el-Jirafi que les auteurs de la section Judée – Palestine de la Tabula Imperii Romani situent Gypsaria: y. tSaFRIR, L. DISEGNIet J. GREEN, op. cit. à la note 19, s.v. Gypsaria, p.

137. L’identification de Gubbaest tout aussi problématique : Ibidem, s.v. Gubba.

33I. ROLL, A Latin imperial inscription from the time of Diocletian found at Yotvata, dans IEJ, 39 (1989), p. 259, ill. p. 254, fig. 2. F.-m. abel ne renonce pas à une localisation plus septen- trionale, qui permettrait de rallier Addianamet propose également « tamila Sueilma qui est reliée à Gadyan par un chemin » : F.-m. aBEL, op. cit.à la note 5, p. 332.

34z. mEShEL, The roads of the Negev according to the Geography of Ptolemy and thetabula Peutingeriana, dans y. ahaRONI, Excavations and Studies in Honour of S. Yeivin, (Publications of the Institute of archaeology, 1), tel aviv, 1973, pp. 205-209 (en hébreu) n.v. ; z. mEShELet y. tSaFRIR, art. cit. à la note 13, dans PEQ107 (1975), p. 21.

35un axe Leukè Kômè – Pétra – Rhinocolureest également évoqué par Strabon, Géogr., 16, 4, 25.

(8)

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