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Les produits pharmaceutiques Bionos 1

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Copyright © 2001. HEC Montréal.

Tous droits réservés pour tous pays. Toute traduction ou toute modification sous quelque forme que ce soit est interdite.

9 50 2001 004

Les produits pharmaceutiques Bionos

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Cas produit par la professeure Hélène GIROUX2.

La société Bionos a été fondée au début des années 80 par un petit entrepreneur ontarien intéressé par les médecines naturelles, qui commencent alors à connaître une certaine popularité. Les débuts sont toutefois plus difficiles que prévu et l'entreprise est vendue en 1991 à un consortium américain. Suite à cet achat, la mission de Bionos est radicalement modifiée, les installations étant dorénavant utilisées pour la fabrication de médicaments dits « génériques ». Les médica- ments génériques sont des copies de médicaments d'origine dont l'exclusivité n'est plus protégée par la Loi sur les brevets3. La gamme de produits de Bionos se compose alors d'une trentaine de médicaments populaires offerts en différentes concentrations (ou doses4), pour un total de 70 produits distincts.

Le processus de fabrication

Bionos se limite à la fabrication de produits pharmaceutiques sous forme de comprimés et de capsules. Le processus de fabrication de ces produits comprend quatre étapes principales : la granulation, la compression (ou l'encapsulage, le cas échéant), l'enrobage/marquage et le condi- tionnement. Toutes les étapes doivent être réalisées dans des conditions d'hygiène et de sécurité étroitement contrôlées. La qualité des produits fait également l'objet de nombreux contrôles, tant pendant la fabrication qu'une fois les lots complétés.

La granulation est l'étape pendant laquelle les différents ingrédients qui entrent dans la composi- tion des médicaments sont mélangés et préparés pour la compression ou pour l'encapsulage. Les ingrédients sont soigneusement pesés et mélangés dans des mélangeurs industriels; ils sont

1 Ce cas, assorti de notes pédagogiques complètes (n° 5 50 2001 001), a franchi avec succès toutes les étapes de l'évaluation par les pairs. Il est inspiré de situations réelles.

2 L'auteure tient à remercier de leurs commentaires et suggestions les trois évaluateurs anonymes qui ont procédé à la révision du cas. Toute faute ou omission demeure cependant la seule responsabilité de l'auteure.

3 Entre 1969 à 1987, la loi canadienne forçait les grandes entreprises pharmaceutiques à permettre à tout autre fabricant la production et la vente sous licence de copies de leurs médicaments, tant que les fabricants de produits génériques leur versaient une redevance de 4 % sur les ventes. En 1987 fut promulguée la loi C-22 sur les brevets pharmaceutiques, qui protégeait l'exclu- sivité des produits d'origine pour une période de sept ans. En 1993, pour rejoindre les normes internationales en la matière et sous les pressions tant des multinationales de l'industrie que des milieux universitaires, la loi C-91 fut votée. Cette dernière garantissait l'exclusivité aux produits d'origine pour une période de 20 ans après la demande de brevet. En retour, les grandes entreprises pharmaceutiques s'engageaient à investir 10 % de leurs revenus en recherche-développement.

4 La dose est la quantité d'ingrédient actif contenue dans un comprimé ou une capsule, par exemple Voladox 50 mg.

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ensuite mouillés, homogénéisés, séchés et broyés jusqu'à l'obtention de granules uniformes.

L'ensemble des opérations de granulation prend, en moyenne, environ six heures. Tout l'équipe- ment requis est regroupé dans une pièce isolée et toute la pièce doit être nettoyée de fond en comble après chaque granulation (sauf si on fabrique deux lots de suite du même produit, auquel cas seul l'équipement doit être nettoyé pour respecter l'obligation de traçabilité des lots; selon la taille de la salle et la contenance des équipements, le nettoyage d'une salle de granulation prend de quatre à sept heures). En 1992, Bionos possède six salles de granulation : une salle dotée d'un mélangeur de 50 kg, deux salles dotées de mélangeurs de 100 kg, deux salles dotées de mélan- geurs de 250 kg et une salle dotée d'un mélangeur de 500 kg. Notons qu'on obtient, en moyenne, 100 000 comprimés par 50 kg de granules.

La deuxième étape consiste, selon le cas, en l'insertion des granules dans une capsule (encapsu- lage) ou en la compression des granules pour former un comprimé. En 1992, Bionos achète deux appareils de compression ultra-modernes (540 000 $ chacun) et une encapsuleuse (400 000 $).

Ces appareils sont beaucoup plus rapides que les anciens modèles que possédait Bionos et le contrôle de la qualité de la compression y est entièrement automatisé. Après une période de transition, les anciens appareils sont donnés à un organisme de coopération internationale qui recycle les vieux équipements de production. Avec le nouvel équipement, une fois la mise en route et les ajustements effectués (ce qui prend environ quatre heures, incluant le nettoyage des appareils), il faut moins de 30 minutes pour effectuer la compression de 50 kg de granules (l'appareil fabrique 8 000 à 12 000 comprimés par minutes, selon la taille et le type de compri- més).

La troisième étape de fabrication est l'enrobage/marquage. Tous les comprimés et capsules doivent être marqués, c'est-à-dire qu'on imprime ou qu'on poinçonne sur le comprimé le nom du produit et la dose d'ingrédient actif. Dans 70 % des cas, les comprimés sont également enrobés avant d'être marqués. Cette étape consiste à recouvrir les comprimés d'un enrobage transparent ou coloré qui facilite l'identification du produit, le rend plus facile à avaler et, dans certains cas, vise à en réduire la vitesse d'absorption par le système digestif. En 1992, Bionos possède trois enro- beuses et trois sécheurs de grand format (les comprimés enrobés doivent être séchés avant d'être marqués), de même que deux appareils de marquage. Tant l'enrobage que le séchage requièrent plusieurs heures. Pour l'enrobage, la présence d'un technicien qui ajoute graduellement le sirop d'enrobage est nécessaire, mais on laisse souvent les comprimés dans le sécheur toute la nuit. Le temps de nettoyage des deux types d'appareil est d'au moins une heure. Quant au marquage, il s'agit d'une étape assez rapide et dont le temps de mise en route est négligeable.

La dernière étape du processus de fabrication est le conditionnement (ou emballage). Étant donné que tous les produits fabriqués par Bionos sont vendus sur ordonnance seulement, ils sont offerts aux pharmaciens en grands formats de 250, 500 ou 1 000 comprimés ou capsules. En 1992, Bionos procède à l'installation d'une chaîne de conditionnement semi-automatisée dont le temps de nettoyage et d'ajustement est d'environ deux heures.

Les produits finis sont mis en quarantaine jusqu'à ce que tous les tests de qualité soient réalisés et approuvés par le responsable de la qualité. Ils sont alors acheminés à l'entrepôt (qui sert égale- ment de centre de distribution), où les conditions de conservation et le taux de rotation des stocks sont suivis de près pour s'assurer que tous les médicaments soient livrés aux pharmacies bien avant leur date de péremption. Bionos assure une livraison rapide partout à travers le Canada

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grâce à des ententes prises avec plusieurs entreprises de courrier reconnues pour leur fiabilité. La production des lots des différents médicaments est planifiée à partir de l'état des stocks et des prévisions de ventes, plusieurs des médicaments fabriqués par Bionos étant soumis à une demande saisonnière (par exemple, les antihistaminiques et les antigrippaux).

La situation en 1995

Lors de l'acquisition de Bionos par le consortium en 1991, les nouveaux propriétaires avaient investi beaucoup d'efforts pour établir des prévisions de demande qui soient les plus réalistes possible. C'est à partir de ces évaluations qu'on avait décidé du nombre et de l'utilisation des salles de granulation, de la capacité des mélangeurs et des technologies les plus appropriées pour la compression et l'encapsulage. Quatre ans plus tard, les résultats sont pourtant décevants. Les profits sont supérieurs à la moyenne de l'industrie, mais les ventes n'atteignent pas les niveaux prévus et l'usine ne fonctionne qu'à 70 % de sa capacité. Une analyse plus approfondie montre qu'on a sous-estimé la réaction des grands joueurs de l'industrie pharmaceutique, qui ont réduit le prix des médicaments d'origine pour les rapprocher du prix de leurs équivalents génériques et ont même commencé à proposer des versions génériques de leurs propres médicaments une fois terminée la protection accordée par le brevet. On a également sous-estimé l'importance que les consommateurs canadiens accordent à la marque de commerce, particulièrement quand il s'agit de leur santé, de même que l'importance des différentes politiques adoptées par les gestionnaires des programmes d'assurances médicaments1.

La situation déplaît aux nouveaux propriétaires de Bionos, mais elle inquiète surtout le directeur de l'usine, M. Richard Taylor, ainsi que les responsables des différentes opérations, qui craignent que la situation ne se traduise par des pertes d'emplois. On discute beaucoup des problèmes de surcapacité lors des réunions hebdomadaires de gestion et plusieurs options sont envisagées.

L'une des plus prometteuses est proposée par le responsable des laboratoires de contrôle de la qualité, M. Nigel Ashby. Détenteur d'un doctorat en pharmacologie, M. Ashby entretient de nombreux contacts avec les milieux universitaires et plusieurs de ses anciens camarades d'uni- versité travaillent à la recherche-développement pour des entreprises pharmaceutiques concur- rentes. C'est ainsi qu'il a appris que tant les chercheurs universitaires que bon nombre de ceux des laboratoires de R-D des multinationales cherchent désespérément un sous-traitant capable de fabriquer dans de courts délais des lots d'essai de petites quantités de comprimés et de capsules.

Comme ces lots d'essai sont utilisés pour les tests cliniques des médicaments sur des humains, les comprimés doivent être d'aussi bonne qualité et d'aussi belle apparence que ceux qui seraient éventuellement mis en marché. Il y a donc une occasion intéressante pour un sous-traitant capable de répondre aux besoins de ces clients, d'autant plus que les lots d'essai peuvent être vendus à un prix par kilogramme 15 à 20 fois supérieur aux produits réguliers.

1 D'une part, bien que les médicaments soient prescrits par les médecins, il arrive souvent que les pharmaciens proposent à leurs clients de remplacer un médicament d'origine par son équivalent générique, tout en leur laissant le choix final. D'autre part, une bonne partie des médicaments vendus étant remboursés par divers programmes provinciaux d'assurances médicaments, les politiques de remboursement établies par les gestionnaires de ces programmes ont une influence considérable sur les parts de marché respectives des médicaments génériques et d'origine. Par exemple, certaines provinces ne remboursent que le prix du médicament le moins cher disponible sur le marché, ce qui donne un avantage aux produits génériques. Ce n'est pas le cas dans d'autres provinces, qui remboursent soit le prix médian des produits équivalents disponibles sur le marché, soit le prix réel du produit acheté. Au début des années 90, divers enjeux politiques ont également teinté les politiques des provinces en matière d'encouragement à la vente des produits d'origine par opposition aux produits génériques. En 1993, les médicaments génériques représentaient le tiers des produits prescrits au Canada.

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Après quelques discussions, il semble évident que l'on a tout à gagner à percer ce nouveau marché. Les étapes de fabrication des lots d'essais sont les mêmes que pour la production régu- lière1 et la fabrication pourrait se faire pendant les temps morts. On charge donc M. Ashby d'établir des contacts plus officiels avec des clients éventuels et de les informer de la disponibilité de Bionos comme sous-traitant pour la fabrication de leurs lots d'essai.

Les commandes ne tardent pas à affluer. Dès le premier lot, on constate que le mélangeur de 50 kg ne peut pas être utilisé pour le mélange des lots d'essai, dont les quantités varient de 3 à 10 kg. Toutefois, devant le succès manifeste du projet, on n’hésite pas à investir 80 000 $ dans l'aménagement d'une nouvelle salle de granulation équipée d'un mélangeur de 10 kg. On trouvera à l’annexe 1 un plan sommaire de l'usine telle qu'elle était après l'ajout de la nouvelle salle de granulation en 1995. M. Ashby s'occupe lui-même du suivi de la fabrication des lots pour être certain que les exigences des clients et les délais de production sont respectés. Les premières livraisons sont faites quelques semaines plus tard, à la plus grande satisfaction des clients.

La situation en 1996

Lors du premier trimestre de 1996, les résultats de la période indiquent une augmentation des coûts de main-d'œuvre. Compte tenu du contexte, on attribue cette augmentation à des problèmes de rodage et de replanification, et le Conseil accepte cette explication. Toutefois, la situation ne s'améliore pas et les rapports de gestion du premier semestre de 1996 étonnent tout le monde. Les résultats financiers montrent une augmentation inquiétante des coûts de main-d'œuvre et des frais de livraison. Par ailleurs, plusieurs des produits réguliers de Bionos, dont certains des produits saisonniers les plus populaires, ont vu leurs ventes baisser à la suite de ruptures de stock. Enfin, les indices de productivité (qui mesurent le nombre de comprimés fabriqués par heure-personne) sont à la baisse.

Lorsque M. Taylor tente de discuter de la situation avec les responsables des différentes sections de l'usine, il a l'impression de mettre le pied dans un nid de vipères tellement tout le monde rejette le blâme sur les autres. Le responsable de l'entrepôt soutient que les pénuries ne sont pas toutes occasionnées par des problèmes de fabrication. Parfois, dit-il, les livraisons doivent être retardées parce que le laboratoire de contrôle de la qualité n'a pas encore donné le feu vert aux produits finis mis en quarantaine. Les techniciens du laboratoire rétorquent que les tests sont faits dans les délais habituels mais que les résultats s'empilent sur le bureau de M. Ashby afin de recevoir son approbation. Dans un cas où le retard est particulièrement important, on a même livré un lot dont les tests de qualité, quoique satisfaisants, n'ont pas pu être contresignés par M. Ashby.

Du côté de la chaîne de conditionnement, où les temps morts ont augmenté plutôt que diminué, on dit que les lots arrivent de l'enrobage/marquage de façon irrégulière. Pourtant, cette dernière section a souvent travaillé en surtemps, tout comme à l'étape de la compression, d'ailleurs. Les responsables de ces deux sections se plaignent de subir des pressions de la part de M. Ashby pour donner la priorité aux lots d'essai, ce qui leur occasionne, selon eux, toutes sortes de problèmes.

1 Sauf pour le conditionnement, qui n’est pas nécessaire puisque les lots d'essai sont livrés en vrac.

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Seule l'opération de granulation ne semble pas poser de difficulté, quoique la nouvelle salle dotée d'un mélangeur de 10 kg connaisse un taux d'utilisation très variable et erratique1.

Enfin, lorsque M. Taylor aborde la question avec M. Ashby, ce dernier reproche aux responsables des sections leur manque d'ouverture au changement : « Ils sont trop attachés à leurs petites habitudes, dit-il. Ils ne comprennent pas quelle occasion extraordinaire représente la fabrication des lots d'essai pour Bionos, ni l'importance du facteur temps pour mes clients ».

Jusqu'à maintenant, M. Taylor a pleinement soutenu M. Ashby, car il sait que celui-ci est débordé et, surtout, que la réussite du nouveau projet repose sur lui. Il croit que les conflits et les retards sont surtout dus à un manque de communication et de coordination entre les responsables des différentes étapes de production, puisqu'il y a des temps morts et des changements fréquents dans les plans de production. M. Taylor convient qu'il reste encore du travail à faire pour mieux plani- fier la production, mais il a aussi l'impression que les responsables des différentes opérations ne mettent aucune bonne volonté à collaborer. Des conversations de corridor lui laissent croire que plusieurs sont jaloux du fait que M. Ashby est devenu une « star » dans l'entreprise et qu'il a souvent l'occasion de voyager pour négocier des ententes avec les nouveaux clients.

M. Taylor se demande s'il a bien cerné les problèmes que rencontre Bionos et ce qu'il devrait faire pour redresser la situation. Il sait que les piètres résultats financiers obtenus susciteront de sérieuses et nombreuses questions lors de la prochaine réunion trimestrielle du Conseil prévue pour la semaine prochaine.

2002-12-11

1 Comme la fabrication des lots d'essai est soumise aux aléas de la recherche, il est impossible de prévoir l'arrivée des commandes et il n'est pas rare qu'on en reçoive plusieurs dans la même semaine, et qu'on reste quelques semaines à n’en recevoir aucune.

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Annexe 1

Plan sommaire de l'usine Bionos (1995)

compresseuse

Vers l’entrepôt

sécheur

10 kg100 kg100 kg

250 kg250 kg

mélangeur 500 kg encapsuleuse

Compresseuse Compresseuse

broyeur séchage

Chaîne de conditionnement

Enrobeuse Entrée de l'usine

50 kg

Section d'enrobage/

marquage

Section de compression/encapsulage

S ecti o n de g ra nul a ti o n

Légende : pour alléger le schéma, le nom des différents équipements n'est pas répété. Des formes géométriques semblables indiquent des équipements de mêmesorte.

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