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Séquence pédagogique. Boris Khazanov L Heure du roi Dossier réalisé par Muriel Chemouny. Le Livre de Poche, n 35981, 144 pages

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Séquence pédagogique

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Boris Khazanov

L’Heure du roi

Dossier réalisé par Muriel Chemouny

Le Livre de Poche, n°  35981, 144  pages

L’Heure du roi, court roman russe méconnu de Boris Khazanov, apparaît comme un jalon très intéressant dans le travail de formation du jugement et de l’esprit critique des lycéens.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, les nazis envahissent le pays du roi Cédric : c’est la fin de la liberté, jusqu’à l’acte final de révolte du couple royal. Lu dans la séquence sur la littérature d’idées du xixe au xxie siècle en Seconde, il est l’occasion de consolider les compétences de lecture des élèves en les invitant à établir des liens avec d’autres disci- plines, comme l’Histoire. En classe de Première, on peut le relier à une séquence consa- crée aux Lettres persanes de Montesquieu, dans un parcours de lecture sur le thème du regard éloigné. En Terminale, dans le cadre de l’enseignement de spécialité Humanités, Littérature et Philosophie, il permet d’engager une réflexion sur la question de la liberté.

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Plan de la séquence

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I. Un conte philosophique

1. Brièveté et complexité 2. L’art du détour

3. La portée universelle grâce au regard éloigné

II. Un texte historique et politique

1. La figure du roi

2. La satire de la dictature 3. La question de la liberté

Pour aller plus loin…

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I. Un conte philosophique

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1. Brièveté et complexité

Longue nouvelle ou court roman, L’Heure du roi se développe sur une centaine de pages.

Le texte s’organise en dix-huit chapitres brefs, numérotés, mais ne portant pas de titres.

Cette structure ainsi que la brièveté de l’ensemble permettent une lecture d’une seule traite.

Le lexique utilisé et le sens global paraissent relativement accessibles.

Le titre est frappant quand on le découvre pour la première fois : groupe nominal défini (« l’heure »), complété par un complément marquant l’appartenance (« du roi »), l’expres- sion paraît simple et évidente, jusqu’à ce que l’on se demande à quoi elle peut bien ren- voyer. Boris Khazanov utilise la forme anglaise dans le texte, « the King’s Hour » (p. 58), dans un passage qui décrit la promenade du roi dans la ville, « coutume ancestrale »,

« image d’anthologie ». Pour Louis XIV en France par exemple, la promenade se faisait à Versailles, soit à pied, soit en calèche, dans les jardins ; c’est un moment codifié, au même titre que le lever du roi ou le conseil des ministres1. Dans notre texte, c’est à cheval que le roi sort du château pour se montrer publiquement. Nous suggérons de prolonger cette réflexion par une recherche d’images illustrant ce moment ritualisé de la promenade du roi, par exemple sur Gallica, bibliothèque numérique foisonnante de la Bibliothèque nationale de France2.

Si tous les éléments précédemment cités vont dans le sens d’un texte plutôt facile à lire, il est possible, selon le niveau concerné, Seconde, Première ou Terminale, et l’aisance plus ou moins grande des élèves, que certaines difficultés de compréhension apparaissent malgré tout. Faire la liste des points délicats dès le départ est une façon de conforter les élèves dans leur approche du texte, et de les sensibiliser aux différents niveaux de lecture d’un texte : ce n’est pas parce que l’on n’a pas tout saisi d’un texte dans son détail que l’on n’a rien compris, loin de là !

Le texte ne se donne pas d’emblée à lire, il est précédé de trois citations : l’une d’Angelus Silesius (p. 7), une autre de Miguel de Unamuno (p. 9) et une troisième d’Albert Camus (p. 11), les deux premiers n’évoquant sans doute rien aux élèves. Nous reviendrons sur la signification de ces extraits, mais ce sont déjà trois seuils à franchir avant d’entrer véritable- ment dans l’œuvre. De plus, les références historiques sont présentes dès les premières lignes.

La première phrase commence ainsi : « Depuis l’époque de Numa Pompilius » (p. 13), ren- voyant à la monarchie romaine. Puis, surtout, le premier paragraphe mentionne : le « Führer de la nation allemande », le « Reich », et le « Blitzkrieg », sans explications supplémentaires.

Ce sont des références historiques sans doute connues des élèves renvoyant à la période du nazisme. Une étude approfondie en cours d’Histoire peut être la bienvenue ; l’implicite est susceptible de constituer un obstacle à la compréhension, mais le simple fait d’en parler avec les élèves lèvera la difficulté.

Implicite

Est implicite ce qui est virtuellement contenu dans un élément, qui n’est pas directement ou clairement exprimé.

1. Pour en savoir plus, consulter la page du Château de Versailles intitulée « Une journée de Louis XIV » : http://

www.chateauversailles.fr/decouvrir/histoire/grandes-dates/journee-louis-xiv#les-matinees-du-roi 2. https://gallica.bnf.fr/accueil/fr/content/accueil-fr?mode=desktop

Ce travail constitue une occasion d’initier les élèves à la méthode de recherche avancée, avec la collaboration du documentaliste.

Activité

Au cours de votre lecture, tenez un carnet de vos impressions personnelles, en incluant des remarques sur la structure du texte, la signification du titre, et vos difficultés éven- tuelles de compréhension. À quel genre cette œuvre appartient-elle d’après vous ?

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D’autres pages peuvent sembler moins aisées à décrypter, quand une série de noms allemands se présente, mêlant penseurs, artistes et homme politique nazi : Johannes Scheffler (connu également sous le nom d’Angelus Silesius), Alfred Rosenberg, Schiller (p. 34). Ailleurs, sont cités Spinoza (p. 48), Haendel (p. 64), Leibniz (p. 67). Ce qui est difficile, c’est que tous les noms sont mis sur le même plan, sans aucune explication. Si bien que, lorsque le nom d’Ulrich Lohe apparaît à la page 107, le lecteur pense qu’il s’agit réellement du « général SS et directeur adjoint du Département des Recherches Théoriques au Service Principal de Sécurité ». L’ensemble de ce chapitre est d’ailleurs problématique : s’il est évident pour un lecteur expérimenté que c’est un texte antisémite que l’auteur ne prend pas en charge et qu’il dénonce, il n’est pas sûr que les élèves le saisissent aussi aisément. Nous proposons de le mettre en perspective dans la suite de cette étude. Ce phénomène d’intertextualité, fondé sur des noms réels ou inventés, demande donc quelques éclaircissements.

Intertextualité

L’intertextualité est l’idée que tout texte est relié, consciemment ou non, à d’autres textes antérieurs émis par d’autres auteurs, et qu’il est nourri par ce qui l’a précédé1.

Enfin, c’est parfois le rythme de la narration qui est susceptible de dérouter le lecteur. On avance dans le temps sans chronologie précise : c’est le temps de la fable. Les ellipses sont donc nombreuses. La brièveté du texte est une des raisons principales des moments passés sous silence.

Ellipse

Fait de passer sous silence, dans un récit, certains éléments de la narration.

2. L’art du détour

Boris Khazanov, de son vrai nom Guennadi Moïsseievitch Faïboussovitch, est né en 1928 à Leningrad (aujourd’hui Saint-Pétersbourg). Il vit à Moscou, où il étudie les Lettres classiques.

En 1949, il est arrêté pour avoir participé à un mouvement de propagande antisoviétique, et condamné à huit ans de travaux forcés. Libéré en 1955, il suit les cours de médecine à l’université de Moscou et exerce durant quelques années en tant que médecin. Il com- mence à écrire, et à traduire des ouvrages de l’allemand et du français. Il publie des livres sous pseudonyme ainsi que des articles en samizdat : il s’agit d’un système clandestin de circulation d’écrits dissidents en U.R.S.S. et dans les pays du bloc de l’Est, manuscrits ou dactylographiés. Il émigre en 1982 en Allemagne et s’installe à Munich, où il vit visiblement depuis. Il a reçu en 1998 le prix Littérature en exil de la ville d’Heidelberg.

L’Heure du roi, avant sa publication en 1976 dans une revue israélienne de langue russe, a d’abord circulé sous le manteau en samizdat. La traductrice en français de l’œuvre, Elena Balzamo, explique bien dans la postface qu’elle a lu pour la première fois le texte de cette façon, ignorant tout de son auteur. L’existence du samizdat s’explique bien entendu par la censure : toute publication légale devait d’abord avoir été autorisée par l’autorité soviétique.

Pour prolonger la réflexion, on fera remarquer aux élèves le jeu sur le statut du narrateur dans le texte. Une forme de mise à distance est prise d’emblée avec le texte en train de

1. Michèle Aquien, Dictionnaire de poétique, Le Livre de Poche, n° 8073, 1993.

Activité

Faites une recherche sur l’auteur, Boris Khazanov, ainsi que sur les conditions de publi- cation de ce texte.

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s’écrire : « […] dont il sera question dans ce récit » (p. 13). Le narrateur se désigne plus loin comme « l’auteur de la présente chronique » (p. 84).

3. La portée universelle grâce au regard éloigné

La lecture cursive de L’Heure du roi peut tout à fait trouver sa place en classe de Pre- mière générale, et être préparée ou prolongée par la lecture du groupement de textes suivant. Au sein de la séquence consacrée à la littérature d’idées, et si l’on a choisi d’étudier, parmi les œuvres au programme, les Lettres persanes de Montesquieu, le texte de Boris Khazanov apparaît comme un exemple intéressant de « regard éloigné » sur son pays et son époque, puisque l’évocation de l’Allemagne nazie est aussi une façon détournée de parler de son propre pays, l’U.R.S.S.

Lettres persanes (1721) de Montesquieu, lettre 371 : un portrait critique du roi

Usbek s’implique dans la description du roi et toute son argumentation se construit sur des comparaisons avec les régimes orientaux. L’ironie sert largement à dépeindre l’absolutisme de Louis XIV, en le qualifiant par exemple de « grand magicien ».

La Ferme des animaux (1945) de George Orwell, fin du chapitre 3 : les nouveaux maîtres.

Pour éclairer cette fiction animalière et politique, les propos de George Orwell, dans une lettre à Dwight Macdonald du 5 décembre 19462, sont particulièrement utiles :

Bien sûr, j’ai conçu ce livre en premier lieu comme une satire de la révolution russe. Mais, dans mon esprit, il y avait une application plus large dans la mesure où je voulais mon- trer que cette sorte de révolution (une révolution violente menée comme une conspiration par des gens qui n’ont pas conscience d’être affamés de pouvoir) ne peut conduire qu’à un changement de maîtres. La morale, selon moi, est que les révolutions n’engendrent une amélioration radicale que si les masses sont vigilantes et savent comment virer leurs chefs dès que ceux-ci ont fait leur boulot. Le tournant du récit, c’est le moment où les cochons gardent pour eux le lait et les pommes (Kronstadt). Si les autres animaux avaient eu alors la bonne idée d’y mettre le holà, tout se serait bien passé. Si les gens croient que je défends le statu quo, c’est, je pense, parce qu’ils sont devenus pessimistes et qu’ils admettent à l’avance que la seule alternative est entre la dictature et le capitalisme laisser-faire. Dans le cas des trotskistes s’ajoute une complication particulière : ils se sentent coupables de ce qui s’est passé en U.R.S.S. depuis 1926 environ, et ils doivent faire l’hypothèse qu’une dégénéres- cence soudaine a eu lieu à partir de cette date. Je pense au contraire que le processus tout entier pouvait être prédit – et il a été prédit par un petit nombre de gens, Bertrand Russel par exemple – à partir de la nature même du parti bolchevique. J’ai simplement essayé de dire : « Vous ne pouvez pas avoir une révolution si vous ne la faites pas pour votre propre compte ; une dictature bienveillante, ça n’existe pas. »

Les nouveaux maîtres, ce sont donc les cochons, qui, dans une argumentation particuliè- rement pernicieuse, justifient leur privilège (garder lait et pommes pour leur alimentation personnelle) par leur souci du bien de tous.

L’Heure du roi (1976, 2005 pour la traduction française), chapitre 4 (p 27-28) : l’occu- pation d’un pays, absurde réalité.

1. Le Livre de Poche, n° 21019, p. 119-121.

2. Dans Écrits politiques (1928-1949). Sur le socialisme, les intellectuels & la démocratie, traduction de Bernard Hœpffner, Agone, 2009, p. 346-347.

Activité

Lisez les textes proposés et expliquez de quelle façon ils utilisent le dispositif du regard éloigné.

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Cet extrait est un bon exemple de la façon dont il est à la fois situé dans le temps et l’espace, et à valeur universelle, ce qui laisse le lecteur averti comprendre que la critique ne se limite pas au nazisme mais concerne tout régime autoritaire.

Cette première partie de l’analyse aura donc montré en quoi L’Heure du roi est un conte philosophique moderne : l’auteur critique des aspects de la société dans laquelle il vit en utilisant l’artifice d’une fiction.

II. Un texte historique et politique

1. La figure du roi

Remarquons d’abord que le roi porte un prénom intéressant : si l’on en croit certaines explications sur son étymologie, il serait composé des noms « combat » et « roi ». Peu décrite dans le détail1, sa silhouette nous est présentée ainsi : « grand comme Gulliver et maigre comme Don Quichotte » (p. 37). Il s’inscrit ainsi dans une lignée célèbre, entre le héros de Jonathan Swift et celui de Cervantès. La ressemblance avec Don Quichotte est récurrente : son cheval est surnommé Rossinante (p. 57), comme celui du héros picaresque espagnol, et lui est également qualifié de « Don Quichotte moderne » (p. 121). Mais cette dimension mythique est comme désamorcée d’emblée, car Cédric est comparé à un « dieu désolé » (p. 64), on le voit en larmes (p. 42), il n’est bientôt plus qu’« une pièce de musée inutile » (ibid.). Il appartient clairement à un monde déchu, vieux dans un monde jeune.

Des représentations de Don Quichotte peuvent compléter ce travail d’écriture, voire aider les élèves à démarrer leur texte. Elles sont très nombreuses, on peut utiliser celles de Gustave Doré, d’Honoré Daumier ou encore de Salvador Dalí.

2. La satire de la dictature

Ces caractéristiques sont :

– la passivité de la population face aux changements insidieux (p. 22) ; – faire la queue devant les magasins (p. 22) ;

– la soumission générale à une « abstraction creuse » (p. 38) ; – le culte d’un individu (p. 38) ;

– l’antisémitisme (chapitre 15) ; sur le délire de la contamination du Juif pour toute société, nous proposons la lecture d’un extrait de l’essai de Delphine Horvilleur, Réflexions sur la question antisémite2.

Le ton général du texte tend à parodier le nouveau régime. On attirera en particulier l’atten- tion des élèves sur l’épisode de la consultation d’Hitler, jamais nommé, auprès de Cédric, pour des problèmes médicaux intimes, relevant de l’urologie… (chapitre 14).

1. On trouve une brève description physique à la page 39.

2. Le Livre de Poche, n° 35631, 2020, p. 67-70.

Activité

En vous appuyant sur le texte, rédigez le portrait du roi Cédric. Proposez des illustrations.

Activité

Quelles sont les caractéristiques du nouveau régime ? Avec l’aide du professeur d’Histoire, mettez en relation ces éléments avec des dictatures étudiées en classe.

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3. La question de la liberté

Ce travail prend place dans le programme de Terminale de l’enseignement de spécialité Humanités, Littérature et Philosophie, au sein de la thématique « L’interrogation sur l’Huma- nité et son histoire, sur ses expériences caractéristiques et sur son devenir », plus précisément sur l’humain et ses limites.

Les trois citations placées en exergue du roman ont pour point commun de présenter une vision du monde habité ou non par un Dieu, par une présence spirituelle. La deuxième citation, de Miguel de Unamuno, insiste sur l’importance de « crier dans le désert » (p. 9), la troisième de Camus, sur la nécessité d’« entrer en lutte contre le destin révoltant » (p. 11).

Ces éléments sont à relier avec la fin du roman, et avec l’acte du roi, qui sort du palais avec une étoile cousue sur son vêtement, marquant sa solidarité avec les Juifs, contraints de subir cette humiliation. L’Heure du roi, ce n’est plus alors la simple promenade, c’est ce moment préparé et désiré par Cédric (« Il fallait se dépêcher : l’heure du roi approchait et Cédric ne se permettait pas une minute de retard », p. 123) : le titre prend une nouvelle signifi- cation, et symbolise une forme d’acte libre. Comment comprendre ce final ? Est-ce un acte libre ? Ou simplement un beau geste ? À noter que l’acte entraîne d’autres personnes dans le même mouvement de révolte. Que signifie se comporter de façon responsable et juste ? Nous proposons de mettre en relation la conclusion du roman de Boris Khazanov avec un texte d’Emmanuel Levinas, afin d’interroger les notions de liberté et de responsabilité. Il s’agit d’un extrait de son ouvrage Éthique et infini1 sur le sens de la relation avec autrui, par la rencontre avec son visage.

Je pense […] que l’accès au visage est d’emblée éthique. C’est lorsque vous voyez un nez, des yeux, un front, un menton, et que vous pouvez les décrire, que vous vous tournez vers autrui comme vers un objet. La meilleure manière de rencontrer autrui, c’est de ne pas même remarquer la couleur de ses yeux ! Quand on observe la couleur des yeux, on n’est pas en relation sociale avec autrui. La relation avec le visage peut certes être dominée par la perception, mais ce qui est spécifiquement visage, c’est ce qui ne s’y réduit pas.

Il y a d’abord la droiture même du visage, son exposition droite, sans défense. La peau du visage est celle qui reste la plus nue, la plus dénuée. La plus nue, bien que d’une nudité décente. La plus dénuée aussi : il y a dans le visage une pauvreté essentielle ; la preuve en est qu’on essaie de masquer cette pauvreté en se donnant des poses, une contenance. Le visage est exposé, menacé, comme nous invitant à un acte de violence. En même temps, le visage est ce qui nous interdit de tuer.

Le visage est signification, et signification sans contexte. Je veux dire qu’autrui, dans la rectitude de son visage, n’est pas un personnage dans un contexte. D’ordinaire, on est un « personnage » : on est professeur à la Sorbonne, vice-président du Conseil d’État, fils d’Untel, tout ce qui est dans le passeport, la manière de se vêtir, de se présenter. Et toute signification, au sens habituel du terme, est relative à un tel contexte : le sens de quelque chose tient dans sa relation à autre chose. Ici, au contraire, le visage est sens à lui seul.

Toi, c’est toi. En ce sens, on peut dire que le visage n’est pas « vu ». […] C’est en cela que la signification du visage le fait sortir de l’être en tant que corrélatif d’un savoir. Au contraire, la vision est recherche d’une adéquation ; elle est ce qui par excellence absorbe l’être. Mais la relation au visage est d’emblée éthique. Le visage est ce qu’on ne peut tuer, ou du moins dont le sens consiste à dire : « Tu ne tueras point. »

1. Le Livre de Poche, n° 4018, coll. « Biblio essais », 1984, p. 79-81.

Activité

Afin de préparer le grand oral du bac, réfléchissez à la question suivante  : que signifie agir en être humain libre ? Appuyez-vous sur votre lecture intégrale de L’Heure du roi, et en particulier sur la fin du livre, ainsi que sur le texte proposé en complément.

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Selon Levinas, l’éthique est une prise en compte d’autrui, qui nous rend infiniment respon- sables, et fait de nous des êtres humains à part entière1. Le geste final du roi nous dirait donc qu’être libres, ce n’est pas simplement une idée abstraite, c’est concrètement agir librement, en se montrant responsables vis-à-vis de la souffrance des autres. En agissant publiquement, Cédric montre à tous ce qu’il pense : la liberté est aussi une solidarité. Pour reprendre le vocabulaire de Levinas, les visages, en se rendant publics, sont une forme d’éthique.

Elena Balzamo, la traductrice de L’Heure du roi, compare ce dernier à une miniature pour son caractère clos, sa netteté et l’élégance de son style : ces qualités en font en effet un sujet d’analyse privilégié avec les élèves, en prenant soin de moduler les activités en fonction du niveau concerné. La portée de ce conte philosophique va au-delà d’une satire de toute dictature : elle pousse à interroger sur la signification de la liberté, et sur les limites d’une vie juste et responsable.

Pour aller plus loin…

Réflexions sur la question antisémite, Delphine Horvilleur, Le Livre de Poche, 2020.

Dictionnaire amoureux de la Russie, Dominique Fernandez, Plon, 2004 : en particulier les articles « Antisémitisme », « Goulag », « Soljenitsyne », « Littérature soviétique ».

Le Roman russe, Jean Bonamour, PUF, 1978, épuisé, mais disponible en format numérique ou en bibliothèque.

1. Une analyse détaillée de cet extrait est à retrouver dans une émission de radio de France Culture, Les Che- mins de la philosophie du 26 mai 2015 : https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la- connaissance/bac-philo-2015-2e-session-24-explication

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