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Article pp.185-187 du Vol.2 n°4 (2008)

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E´DITORIAL / EDITORIAL

Pourquoi ne pas e´couter les suggestions the´rapeutiques de nos patients ?

L. Siproudhis

E´tats de la question

Le syndrome de l’intestin irritable est caracte´rise´ par des manifestations douloureuses abdominales chroniques associe´es a` des troubles du transit et de l’exone´ration sans support organique identifie´. Il s’agit d’une pathologie fre´quente dont les options the´rapeutiques conventionnelles reposent sur des re´gimes d’exclusion alimentaire (lactose), riches ou pauvres en fibres selon des antide´presseurs, des freinateurs du transit ou des laxatifs. On dispose aujourd’hui d’une importante me´ta-analyse ayant tente´ de quantifier le be´ne´fice des the´rapeutiques dites conventionnelles chez les malades souffrant d’un syndrome de l’intestin irritable. Ce travail a retenu les re´sultats de 40 e´tudes controˆle´es (78 comparaisons). Le be´ne´fice the´rapeutique de ces classes semble finalement mince : seuls les antispasmodiques semblent avoir une (faible) efficacite´ sur les douleurs abdominales et les scores symptomatiques, alors que les antide´presseurs et les laxatifs ne font pas la preuve d’un quelconque be´ne´fice cliniquement pertinent ou statistiquement probant [1]. Ces conclusions, issues de l’analyse syste´matique de la litte´rature, confortent (et re´confortent) le clinicien, souvent de´c¸u de l’efficacite´ insuffisante de ses propres prescriptions chez de tels malades : la prudence invite aujourd’hui a` re´duire le niveau du be´ne´fice the´rapeutique au profit d’un soulagement partiel et transitoire de symptoˆmes chroniques. De fait, un tiers de la population ame´ricaine, mais aussi 21 a` 51 % des personnes consultant pour un syndrome de l’intestin irritable, ont e´galement recours a` des traitements non conventionnels d’autre nature qu’ils connaissent souvent mieux que leur me´decin. Des essais controˆle´s et leurs synthe`ses re´centes invitent, aujourd’hui, les praticiens a` regarder avec plus d’inte´reˆt ces approches comme autant d’opportunite´s de prise en charge supple´mentaire.

Herbes et aromates

Les traitements non conventionnels les plus populaires aux E´tats-Unis sont le gingembre, les massages et le Yoga. Le recours au gingembre est justifie´ par ses proprie´te´s the´oriques anti-e´me´tiques, anti-inflammatoires et digestives. Les autres produits couramment encense´s dans le monde des the´rapeutiques alternatives sont le fenouil, les sennosides, l’huile d’onagre, l’aromathe´rapie et l’home´opathie. Un travail s’est attache´ a`

quantifier la pre´valence d’utilisation de consommation et de couˆts de ces the´rapeutiques chez 1 012 malades souffrant d’un syndrome de l’intestin irritable. Le recours a` ces alternatives concernait plus d’un malade sur trois, et le couˆt moyen e´tait estime´ a` 200 $ par an. Ces alternatives e´taient plus souvent observe´es chez les femmes anxieuses, ayant un niveau d’e´ducation accru. Ce recours n’e´tait pas plus fre´quent chez les personnes non satisfaites par les the´rapeutiques conventionnelles propose´es et/ou par leurs re´sultats [2].

L’une des questions cruciales de cette approche the´rapeutique est de comprendre si ces the´rapeutiques agissent par l’intensification de l’effet placebo (effet naturel, the´rapeutique ancestrale, pouvoir magique).

La me´ta-analyse re´cente de la re´ponse placebo dans les essais qui ont e´value´ les the´rapeutiques alternatives est, a` ce titre, tre`s inte´ressante. Les messages sont simples et limpides. Le taux de la re´ponse the´rapeutique sous placebo est particulie`rement e´leve´ (42,6 %) chez les malades souffrant d’un syndrome de l’intestin irritable : cela est de´ja` connu et pose d’importants proble`mes lorsque l’on souhaite de´montrer l’efficacite´

d’une the´rapeutique dans ce domaine. L’effet placebo est d’autant plus prononce´ que la dure´e du traitement est importante et que les visites de suivi sont nombreuses. Finalement et en de´pit de ce niveau me´thodologique exigeant, impose´ par l’histoire naturelle du syndrome de l’intestin irritable, de nombreux

Correspondance :laurent.siproudhis@chu-rennes.fr Colon Rectum (2008) 2: 185–187

©Springer 2008

DOI 10.1007/s11725-008-0109-5

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produits dits naturels ont pu montrer, dans des essais the´rapeutiques controˆle´s randomise´s, une efficacite´

statistiquement recevable : herbes chinoises, herbes tibe´taines, menthe poivre´e, Lacte´ol fort® et autres probiotiques (lactobacillus plantarum, bifidobacterium), herbes ayurve´diques. Ce constat n’autorise cependant pas de conclusion de´finitive, parce que les e´tudes sont souvent d’effectifs re´duits, et he´te´roge`nes en matie`re de me´thodologie et de the´rapeutiques teste´es [3].

The´rapies bre`ves

L’expression « the´rapie bre`ve » est utilise´e dans le domaine the´rapeutique, car elle se rapproche des courants de pense´e de Milton Erickson (hypnose), et aussi de l’e´cole de Palo Alto (G. Bateson), se basant sur le postulat que le travail de the´rapeutes actifs peut eˆtre rapide et efficace a` amener un changement durable de l’e´tat de sante´. Le nombre de se´ances est variable mais, en re`gle, infe´rieur a` 20. Base´es parfois sur de nouveaux modes et codes de communication (programmation neurolinguistique par exemple), les the´rapies bre`ves cherchent a` soulager la souffrance psychologique et physique induite par la maladie, en amenant les patients a` faire des expe´riences nouvelles. Nous retiendrons, dans le champ d’e´valuation du traitement du syndrome de l’intestin irritable, deux champs d’applications actuellement les mieux explore´s : l’hypnose, d’une part, et la the´rapie comportementale dite encore cognitivocomportementale, d’autre part.

On dispose de plus de dix essais controˆle´s et me´ta-analyses e´valuant le be´ne´fice the´rapeutique de l’hypnose dans le traitement du syndrome de l’intestin irritable. Cette me´thode a pour objectif de moduler les interactions syste`me nerveux central-visce`res. Les principales e´tapes d’une bonne prise en charge sont e´ducatives, d’induction et de relaxation. Elles font le plus souvent appel a` la suggestivite´ (images personnelles, conditions pre´de´terminantes, proce´dures centre´es sur le tube digestif) et sur l’acquisition d’outils d’autohypnose. La me´ta-analyse re´cente de la Cochrane n’a finalement retenu que quatre e´tudes de bonne qualite´ me´thodologique (147 malades) [4]. Celle-ci montre un be´ne´fice the´rapeutique franc sur les plaintes lie´es au syndrome de l’intestin irritable, qu’il s’agisse des douleurs, des scores globaux ou des troubles digestifs, sans induire d’effet secondaire inde´sirable. L’efficacite´ e´tait observe´e apre`s une prise en charge somme toute rapide et efficiente (cinq se´ances d’une demi-heure) dans le meilleur travail de cette me´ta-analyse [5].

Les troubles psychologiques et de la personnalite´ sont pre´sents chez bon nombre de malades souffrant d’un syndrome de l’intestin irritable au point que plusieurs the´ories physiopathologiques e´tayent cette association (hypervigilance, pre´disposition psychologique a` l’aggravation des symptoˆmes). Les approches cognitivocomportementales reposent sur le concept que les symptoˆmes sont des de´ficits acquis dans le domaine cognitif et comportemental : leur identification, leur prise de conscience et la mise en place de strate´gies cible´es permettent de les corriger. Un travail original issu de la mode´lisation d’un essai controˆle´

randomise´ tente de nous en convaincre la` ou` les donne´es comparatives brutes ne mettent pas en e´vidence de diffe´rence par rapport a` des interventions psychoe´ducatives non spe´cifiques ou a` un groupe en attente de prise en charge [6]. Un travail plus re´cent de la meˆme e´quipe montre un be´ne´fice franc de strate´gies, reposant soit sur un the´rapeute, soit sur un outil autoadministre´ compare´ a` un groupe te´moin sans intervention the´rapeutique [7].

Manipulations et acupuncture

L’approche oste´opathique est une me´decine manuelle base´e sur l’identification des tensions, la mobilisation et les manipulations oste´oarticulaires et musculaires. Elle repose sur trois principes qui font du corpsune entite´ fonctionnelle biologique, ayant une tendance a` s’autode´fendre ou s’autore´guler, et pour lequel la structure gouverne la fonction et vice-versa. Elle a fait l’objet d’une e´valuation dans le traitement du syndrome de l’intestin irritable a` l’occasion d’un essai pilote controˆle´ randomise´ re´cent (n= 39). Cet essai souligne un fort impact de l’oste´opathie a` re´duire le score moyen de se´ve´rite´ symptomatique ainsi qu’a`

ame´liorer les dimensions de qualite´ de vie spe´cifique apre`s un suivi de six mois [8].

L’acupuncture est issue de la me´decine chinoise ancestrale et son de´veloppement actuel repose sur un concept de re´duction de l’hyperalgie visce´rale par la stimulation du syste`me nerveux somatique au moyen d’aiguilles transdermiques inse´re´es au niveau des me´ridiens traditionnels (acupuncture chinoise), de points pre´de´termine´s (acupuncture occidentale) ou de la zone douloureuse (acupuncture japonaise).

On dispose aujourd’hui de plusieurs essais controˆle´s randomise´s et d’une me´ta-analyse [9]. Les essais me´thodologiquement les mieux mene´s (sham acupunctureou acupuncture factice) ainsi que la me´ta-analyse

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ne mettent pas en e´vidence de be´ne´fice franc de l’acupuncture : ni les douleurs abdominales, ni les sensations de ballonnement ou de gaz, ni les troubles du transit ne sont ame´liore´s par ces approches [10,11].

Conclusion

Peut-on finalement rester insensible au regard interrogateur des personnes qui nous consultent et qui n’osent, le plus souvent, avancer que du bout des le`vres l’ide´e de recourir a` ces alternatives... que la me´decine n’a ni inte´gre´es ni consacre´es ? De fait, combien « d’images » de cliniciens ont pu eˆtre ternies par un mouvement e´vasif ou` pre´cipitation, irritation et me´connaissance s’expriment toutes a` la fois ? Qui, d’entre nous, ne s’est pourtant pas un jour penche´ avec curiosite´ sur des traite´s de me´decine alternative vendus en teˆte de gondole dans les bio-coops ? Franchissons le pas, testons, e´valuons et ouvrons aux malades des champs d’inte´reˆts the´rapeutiques sans doute « curieux »... et probablement, ni moins efficaces ni moins bien tole´re´s que les sempiternels antispasmodiques, auxquels ni vous ni vos malades ne croyez plus vraiment !

Re´fe´rences

1. Quartero AO, Meineche-Schmidt V, Muris J, et al. (2005) Bulking agents, antispasmodic and antidepressant medication for the treatment of irritable bowel syndrome. Cochrane Database Syst Rev (2): CD003460

2. van Tilburg MA, Palsson OS, Levy RL, et al. (2008) Complementary and alternative medicine use and cost in functional bowel disorders: a six month prospective study in a large HMO. BMC Complement Altern Med 8: 46 3. Dorn SD, Kaptchuk TJ, Park JB, et al. (2007) A meta-analysis of the placebo response in complementary and

alternative medicine trials of irritable bowel syndrome. Neurogastroenterol Motil 19: 630-7

4. Webb AN, Kukuruzovic R, Catto-Smith AG, Sawyer SM (2007) Hypnotherapy for treatment of irritable bowel syndrome. Cochrane Database Syst Rev (4): CD005110

5. Roberts L, Wilson S, Singh S, et al. (2006) Gut directed hypnotherapy for irritable bowel syndrome: piloting a primary care based randomised controlled trial. Br J Gen Pract 56(523): 115-21

6. Lackner JM, Jaccard J, Krasner SS, et al. (2007) How does cognitive behavior therapy for irritable bowel syndrome work? A mediational analysis of a randomized clinical trial. Gastroenterology 133: 433-44

7. Lackner JM, Jaccard J, Krasner SS, et al. (2008) Self-administered cognitive behavior therapy for moderate to severe irritable bowel syndrome: clinical efficacy, tolerability, feasibility. Clin Gastroenterol Hepatol 6: 899-906 8. Hundscheid HW, Pepels MJ, Engels LG, Loffeld RJ (2007) Treatment of irritable bowel syndrome with osteopathy:

results of a randomized controlled pilot study. J Gastroenterol Hepatol 22: 1394-8

9. Lim B, Manheimer E, Lao L, et al. (2006) Acupuncture for treatment of irritable bowel syndrome. Cochrane Database Syst Rev (4): CD005111

10. Fireman Z, Segal A, Kopelman Y, et al. (2001) Acupuncture treatment for irritable bowel syndrome. A double-blind controlled study. Digestion 64: 100-3

11. Forbes A, Jackson S, Walter C, et al. (2005) Acupuncture for irritable bowel syndrome: a blinded placebo-controlled trial. World J Gastroenterol 11: 4040-4

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