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DE LA VARIABILITE DE LA PRISE EN CHARGE DES PATIENTS : COMPARAISON ENTRE LES PATIENTS ORDINAIRES ET LES PATIENTS APPARENTES AU MEDECIN. Étude qualitative sur le ressenti de 16 médecins généralistes franciliens selon l’expérience et le genre

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Academic year: 2021

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DE LA VARIABILITE DE LA PRISE EN CHARGE

DES PATIENTS : COMPARAISON ENTRE LES

PATIENTS ORDINAIRES ET LES PATIENTS

APPARENTES AU MEDECIN. Etude qualitative sur le

ressenti de 16 medecins generalistes franciliens selon

l’experience et le genre

Roxana Vartic

To cite this version:

Roxana Vartic. DE LA VARIABILITE DE LA PRISE EN CHARGE DES PATIENTS : COMPARA-ISON ENTRE LES PATIENTS ORDINAIRES ET LES PATIENTS APPARENTES AU MEDECIN. Etude qualitative sur le ressenti de 16 medecins generalistes franciliens selon l’experience et le genre. Médecine humaine et pathologie. FACULTE DE MEDECINE PARIS-SUD, 2017. Français. �tel-02544077�

(2)

UNIVERSITE PARIS XI

FACULTE DE MEDECINE PARIS-SUD

Année : 2017

N° :

_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

Thèse pour le Doctorat en Médecine

Présentée et soutenue publiquement le : 13 octobre 2017

par : Roxana VARTIC

Né(e) le 24 juillet 1987

à Suceava

Président : Professeur Laurent RIGAL

Directeur : Professeur Dominique BERGER

Co-directeur : Docteur Sophie BUCHER

D

E LA VARIABILITE DE LA PRISE EN CHARGE DES PATIENTS

:

COMPARAISON ENTRE LES PATIENTS ORDINAIRES ET LES

PATIENTS APPARENTES AU MEDECIN

Étude qualitative sur le ressenti de 16 médecins généralistes

franciliens selon l’expérience et le genre

(3)

COMPOSITION DU JURY :

Président du jury :

Monsieur le Professeur : Laurent RIGAL

Membres du jury :

Monsieur le Professeur Dominique BERGER

Madame le Docteur Sophie BUCHER

(4)

Le Serment d'Hippocrate (4)

Au moment d’être admis(e) à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité́.

Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux.

Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté́, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité́ ou leur dignité́. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité́.

J’informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences. Je ne tromperai jamais leur confiance et n’exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences.

Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire.

Admis(e) dans l’intimité́ des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçu(e) à l’intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à corrompre les mœurs.

Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément.

Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission. Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés.

J’apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu’à leurs familles dans l’adversité́.

Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonoré́(e) et méprisé́(e) si j’y manque.

(5)

REMECIEMENTS Au Professeur Laurent RIGAL

Vous m’avez fait l'honneur de présider ce jury de thèse

Au Professeur Dominique BERGER

Vous m’avez fait l’honneur de diriger ma thèse, je vous remercie pour votre soutien et votre accompagnement lors de mon travail.

Au Docteur Sophie BUCHER

Vous m’avez fait l’honneur de vous proposer pour assurer la direction de cette thèse. Je vous remercie de votre disponibilité, de votre soutien et de la pertinence de vos conseils.

Au Docteur Guillaume COINDARD,

Pour vos conseils et les orientations si précieuses en début de thèse.

Aux membres du jury

Vous me faites l’honneur de participer à mon jury de thèse. Je vous remercie pour le temps que vous m’accordez.

Au Docteur Sophie BIGAY, ma tutrice qui m'a soutenu durant mon internat.! A tous les médecins et internes qui ont accepté de participer à ma recherche.

Je remercie également mes proches :

Ma mère, cet être si fort, qui a toujours cru en moi.

Tu m’as aidé à être qui je suis aujourd’hui, en croyant à chaque instant en moi, tu m’as donné la force et le courage de toujours rebondir et d’aller plus loin. Tu as toujours été si proche de moi tout en me laissant explorer la vie. Je te serai toujours reconnaissante pour tout ce que tu m’as enseigné et d’être toi. Je t’aime.

A mon frère Andrei

Merci d’avoir été là tout au long de ma vie, de m’avoir soutenu, de m’avoir aidé à me poser les bonnes questions et de m’avoir protégé comme nul autre frère.

A ma meilleure amie, Carole,

Pour ton soutien inconditionnel, ta présence et ton amitié. A mon conjoint Aurélien

Pour ta relecture attentive, tes corrections minutieuses et surtout pour ton amour.

A mes tantes Anca et Aurora

Pour votre présence, pour votre amour qui est comme celui d’une mère et pour avoir su être à la fois mes meilleures amies.

A mes Grands Parents, pour leur soutien et leur bonne humeur. A mes amies Patience, Noémie et Gabriela,

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SOMMAIRE 1" CONTEXTE"DE"LA"RECHERCHE"..."1" 1.1# GENESE#D’UNE#PROBLEMATIQUE#...#1# 1.2# DECLINAISON#DE#LA#PROBLEMATIQUE#DANS#LA#LITTERATURE#SCIENTIFIQUE#...#3# 2" BUT"DU"TRAVAIL"..."6" 2.1# PROBLEMATIQUE#DE#LA#RECHERCHE#...#6# 2.2# HYPOTHESES#INITIALES#...#7# 3" METHODOLOGIE"..."7" 3.1# POPULATION#DE#L’ETUDE#...#8# 3.1.1# Constitution+de+l’échantillon+interviewé+par+saturation+des+données+...+8# 3.2# MODE#DE#RECUEIL#DES#DONNEES#...#11# 3.2.1# Élaboration+du+guide+d’entretien+...+11# 3.2.2# Le+matériel+...+13# 3.3# STRATEGIE#D’ANALYSE#...#14# 3.3.1# La+méthode+de+la+théorisation+ancrée+...+14# 3.3.2# Application+de+la+théorisation+ancrée+à+notre+corpus+...+15# 4" RESULTATS"..."16" 4.1# CARACTERISTIQUES#DES#INTERVIEWES#...#18# 4.2# CATEGORISATION#DES#DONNEES#FACTUELLES#:#PATIENTS#CLASSIQUES#VS#PATIENTS#MEMBRES#DE#LA#FAMILLE#20# 4.2.1# Cadre+de+la+prise+en+charge+...+20# 4.2.2# Durée+de+la+consultation+:+...+21# 4.2.3# Initiative+de+la+prise+en+charge+...+23# 4.2.4# Les+raisons+de+la+PEC+des+PMF+...+24# 4.3# REPRESENTATIONS#SUR#LA#PRISE#EN#CHARGE#DES#DEUX#CATEGORIES#DES#PATIENTS#...#25# 4.3.1# Représentations+sur+les+deux+catégories+des+patients+...+26# 4.3.2# Représentations+sur+sa+pratique+...+29# 4.3.3# Représentation+sur+le+type+de+discours+...+32# 4.3.4# Représentations+sur+la+priorité+donnée+aux+patients+...+32# 4.3.5# Sélectivité+(délégation)+de+certains+actes+...+37# 4.4# RESSENTI#ET#DIFFICULTES#PAR#RAPPORT#AUX#PMF#...#39# 4.4.1# Le+ressenti+sur+la+prise+en+charge+des+membres+de+la+famille+...+39# 4.4.2# Difficultés+liées+à+la+prise+en+charge+des+membres+de+la+famille+...+43# 4.4.3# Type+de+suivi+...+51#

4.5# REPRESENTATIONS#SUR#L'UTILITE#DE#LA#PRESENCE#D’UN#MEDECIN#DANS#LA#FAMILLE#...#53#

4.5.1# Motivation+instrumentale+...+53# 4.5.2# Préférences+pour+ses+propres+besoins+en+soins+en+tant+que+MG+...+55# 4.6# DISCOURS#INCLASSABLE#DANS#LES#CATEGORIES#...#60# 4.7# LES#ANALYSES#COMPARATIVES#SELON#L’AGE#ET#LE#SEXE#DES#MG#...#61# 4.7.1# Analyse+comparative+de+la+prise+en+charge+des+patients+selon+le+sexe+des+médecins+...+61# 4.7.2# Analyse+comparative+de+la+prise+en+charge+des+patients+selon+le+facteur+générationnel+.+62#

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4.8# REGARDS#CROISES#SUR#LES#DONNEES#SELON#LES#DEUX#VARIABLES,#AGE#ET#SEXE#DU#MEDECIN#...#64# 4.8.1# Variabilité+entre+les+internes+interrogés+:+internes+femmes+vs+internes+hommes+...+64# 4.8.2# Variabilité+entre+les+MG+interrogés+:+séniors+femmes+vs+séniors+hommes+...+64# 4.8.3# Variabilité+entre+les+femmes+interrogées+:+femmes+internes+vs+femmes+séniors+...+65# 4.8.4# Variabilité+entre+les+hommes+interrogés+:+hommes+internes+vs+hommes+séniors+...+65# 4.8.5# Synthèse+des+résultats+selon+le+croisement+des+deux+facteurs+...+66# 4.9# MISE#EN#RELATION#DES#CATEGORIES#ET#INTEGRATION#DES#DONNEES,#SELON#LA#THEORIE#ANCREE#...#67# 5" DISCUSSIONS"..."69" 5.1# CONFRONTATION#DES#PRINCIPAUX#RESULTATS#AUX#DONNEES#DE#LA#LITTERATURE#SCIENTIFIQUE#...#69# 5.1.1# Les+aspects+positifs+rapportés+par+les+médecins+...+70# 5.1.2# Les+difficultés+rapportées+:+le+facteur+cadre+et+le+facteur+affectif+...+71# 5.1.3# Différences+entre+les+deux+catégories+des+patients+selon+le+sexe+et+l’âge+du+médecin+...+75# 5.2# MODELISATION#ET#THEORISATION#...#79# 5.3# FORCES#ET#FAIBLESSES#DE#L’ETUDE#...#81# 5.3.1# Limites+de+cette+étude+...+81# 5.3.2# Pertinence+de+la+méthode+...+82# 5.3.3# Apports+de+l’étude+et+perspectives+...+82# 6" CONCLUSIONS"..."84" 7" BIBLIOGRAPHIE"..."86" 8" TABLE"DES"ILLUSTRATIONS"..."89" 9" ANNEXES"..."90" 9.1# SYNTHESE#DES#TRAVAUX#DE#THESE#SUR#LA#MEME#PROBLEMATIQUE#...#90# 9.1.1# Synthèse+des+études+quantitatives+...+90# 9.1.2# Synthèse+des+études+qualitative+et+des+trames+d’entretien+...+92#

9.2# ANNEXE#1#:#TRAME#D’ENTRETIEN#...#96#

9.2.1# Synthèse+des+questions+ouvertes+...+96# 9.2.2# Trame+détaillée+de+l’entretien+...+97# 9.3# ANNEXE#3#:#SOLUTIONS#PROPOSEES#PAR#LA#LITTERATURE#SCIENTIFIQUE#...#100# 9.3.1# Questions+proposées+par+La+Puma+&+Priest+...+100# 9.3.2# Questions+proposées+par+Dagnicourt+...+101# 9.3.3# Questions+proposées+par+Bouvé+...+102# 9.3.4# Les+degrés+des+risques+selon+Fromme+et+al.+...+103# 9.3.5# Exemples+de+réponses+de+Eastwood+...+104+ RESUME"EN""ANGLAIS" RESUME"EN"FRANCAIS"

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1! CONTEXTE DE LA RECHERCHE

La thématique de la prise en charge médicale des proches, famille ou amis, par le médecin généraliste (MG) a fait l’objet de plusieurs travaux de recherche. Cette thèse se propose d’analyser dans quelle mesure la filiation avec le patient influence la pratique du médecin généraliste.

1.1! Genèse d’une problématique

Selon la littérature scientifique (1-2), l’un des premiers à s’intéresser à la question de la prise en charge par les médecins des membres de leur famille fut Thomas Percival, en 1803, dans son livre l’Éthique médicale (3). Effectivement, dans le serment d'Hippocrate (4) il n'y a pas de mention concernant les soins dispensés par le médecin à sa famille. Dans son code d'éthique médicale, Percival décrivait au préalable le concept de la courtoisie professionnelle ; il estimait que, suivant l’éthique médicale, les médecins ne devraient pas soigner leurs proches. Le Code de Percival, écrit initialement pour la Manchester Royal Infirmary dans le but d'aider "les guildes, les apothicaires et les chirurgiens" à s'entendre amicalement (1), a inspiré ultérieurement, en 1845, le code d’éthique de l’American Medical Association (AMA). Ce dernier a été repris et révisé jusqu’en 1957, quand l’AMA a renoncé à faire réfé-rence aux aspects de courtoisie professionnelle vis à vis des soins dispensés à sa famille et à ses collègues. Depuis 1977, la seule directive restante est que « les médecins ne devraient généralement pas se traiter eux-mêmes ou des membres de leur famille immédiate », en de-hors des situations d’urgence ou d’absence d’un autre médecin, l’AMA faisant référence au risque de manque d’objectivité professionnelle et de soins médicaux de qualité (5-6).

Au Canada, d’abord en 19811, et ensuite en 20022, le collège des médecins du Québec et la

1

R.R.Q., 1981, c. M-9, r. 4, a. 2.03.52, ce règlement est abrogé ou caduc depuis le 2002-11-07. L’article initial était : « Sauf dans les cas d’urgence ou dans les cas qui manifestement ne présentent aucune gravité, le médecin doit s’abstenir de se traiter

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corporation professionnelle des médecins du Québec ont pris une position plus ferme : "Le médecin doit, sauf dans les cas d’urgence ou dans les cas qui manifestement ne présentent aucune gravité, s’abstenir de se traiter lui-même ou de traiter toute personne avec qui il existe une relation susceptible de nuire à la qualité de son exercice, notamment son conjoint et ses enfants" (7).

En France, le code de la déontologie médicale, intégré au code de la santé publique (8) aborde

indirectement la question dans un article traitant de la non-discrimination3. Se rapportant à ce

même article, les commentaires de la section « Éthique et déontologie » du Conseil national de l’Ordre des médecins invoquent la nécessité d’objectivité, liée aux soins dispensés aux proches : « Le médecin doit aussi s'efforcer de ne pas être influencé par les sentiments

inspi-rés par les personnes rencontrées. […]. L'influence peut être [...] excessivement favorable : le médecin va soigner un ami, un proche ou une personnalité avec une attention renforcée, des précautions supplémentaires, qui peuvent être aussi bien bénéfiques que nuisibles. L'objecti-vité nécessaire à l'action du médecin s’accommode mal de sentiments subjectifs. » (9).

La pertinence de la problématique liée à la prise en charge par le médecin de ses proches, a été attestée dans les deux dernières décennies par un nombre important de travaux, les résul-tats indiquant que 90% à 99% (10, 11, 12, 13, 14) de médecins déclaraient être sollicités par leurs proches. Parmi les études menées en France, pour ne citer que quelques-unes, les thèses en médecine de Masson, en 1996 (10), et Vallerend, en 2009 (11), ont rapporté des résultats similaires, notamment 96% de médecins affirmaient être sollicités par leurs proches. Ce pour-centage apparaît en hausse (98% et 99%) dans les rendus des deux autres recherches

2

Code de déontologie des médecins, RLRQ c M-9, r 17 ; Ce règlement remplace RRQ 1981, c M-9, r 4, précédemment cité. Le nouvel article fait référence également aux « proches », notamment aux « relations susceptibles de nuire… »

3

Article R.4127-7 du code de la santé publique : « Le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient leur origine, leurs mœurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur non appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur réputation

(10)

rales menées en 2005, par Cornec-Lassere (12) et respectivement Castera (13). Ces résultats ont été confortés par les études anglophones, dont les travaux de La Puma et al., en 1991 (14) qui annoncent un taux de 99% des médecins sollicités par leur famille et la recherche d’Aboff

et al., en 2002 (15) qui indique que 85% de médecins ont soigné au moins une fois un proche.

Les travaux ailleurs dans le monde confirment ces résultats, notamment la thèse d’Anah (16), sur la population nigérienne, qui rapporte un pourcentage de 90,9% de médecins sollicités par leurs proches. Le sujet a été abordé à travers des problématiques différentes, avec des ap-proches méthodologiques spécifiques (voir aussi annexe 1). Nous allons présenter quelques-unes de ces études sans prétendre à l’exhaustivité.

1.2! Déclinaison de la problématique dans la littérature

scienti-fique

Ce qui ressort des travaux préalablement cités, majoritairement du type quantitatif (basés sur des questionnaires), mais également d’autres travaux, du type qualitatif (basés sur des entre-tiens) (17-20) c’est que la quasi-totalité des médecins interrogés était concernée par cette pro-blématique (la sollicitation d’un proche).

Si certaines enquêtes s’adressaient à tous les médecins (toutes spécialités confondues) (14, 21), d’autres ne visaient que les médecins généralistes (10, 12, 22) voire uniquement les géné-ralistes maîtres de stage (11), et d’autres concernaient seulement les médecins de certaines spécialités (23, 24) ou seulement les internes (15, 25), ou exclusivement les internes en

méde-cine générale (25). De même, les soignés visés pouvaient être les proches au sens large4 (10,

12), ou seulement la famille (11, 13, 14) ou encore l’une des sous-catégories au sein de la famille, selon la filiation (par exemple uniquement les enfants du médecin (21, 26), ou leurs

4

La notion de proches patients comprend plusieurs sous-catégories : les membres de la famille, les amis, les collègues, les voisins. Selon l’American College of Physicians, le degré de proximité entre le médecin et le patient est plus déterminé par le facteur émotion que par le facteur relationnel ou de proximité géographique ; selon ces considérations un ami pourra être plus proche du médecin qu’un membre de sa famille avec lequel le médecin n’a pas d’affinités.

(11)

conjoints (27-28), ou leurs parents (29) ; ou uniquement la mère (30) du médecin). Les deux variables se rapportant à la population (médecins et proches patients) pouvant également don-ner lieu à des combinaisons (chirurgien opérant sa mère (30), cardiologue opérant son fils (31), ou bien la prévention chez le conjoint et les enfants des MG (27), ou encore généralistes traitant leurs conjoints (28), etc.). De ce fait, la population visée (médecins/proches patients) constitue une variable importante dans la synthèse des résultats de la littérature scientifique et, finalement, il y a peu des résultats qui peuvent être regroupés selon ce critère (cf. tableau 1).

Tableau I Synthèse des travaux selon le critère population

PROCHES SOIGNES Proches

patients Famille Conjoint Enfants Parents Surtout la Mère Surtout le Père

ME D E C IN S Médecins et Internes toutes spécialités Peltz Aim, 2012, étude qualitative La Puma et al, 1991, étude quantitative Dusdieker, 1993, étude quantitative Anah, 2008, étude quantita-tive Nik-Sherina et al, 2006, étude qualitative Médecins Généra-listes Lasserre Cornec 2005, étude quantitative Bonvalot, 2009, étude quantita-tive

Madec, 2010, étude

quan-titative Cotte-reau, 2011, étude quantita-tive Chen, 2001, étude qualita-tive Masson, 1996, étude quantita-tive Castera, 2005, étude quantita-tive Boiko, 1984, étude quantita-tive Joffre Ber-thomme, 2001, étude quantitative Dagnicourt, 2012, étude qualitative Vallerend, 2009, étude quantitative Plusieurs spécialités Reagan, 1994, étude quantita-tive Une spé-cialité particu-lière Giannini, 2012, anesthésiste - étude de cas Oberheu, 2007, étude de cas Kerrigan, 2011, étude de cas Internes toutes spécialités Aboff, 2002, étude quantita-tive Internes MG Marin Marin, 2013, étude quantitative + 10 entretiens

(12)

Au-delà de la variable population, les objectifs visés par ces études sont tout aussi variés. Nous allons citer quelques aspects qui ont été traités dans les recherches précédemment men-tionnées : identification des attitudes des médecins face à une demande de soins venant de leurs proches (acceptation ou refus) (10-13, 15-16, 21-23, 26, 29) ; identification de l’opinion des médecins par rapport à la prise en charge de leurs proches, indépendamment du fait qu’ils acceptent ou pas de les soigner ("faut-il prendre en charge ses proches ?") (10-11, 13, 16, 22, 29) ; identification des facteurs qui semblent influencer la décision de soigner un proche (11, 18, 32, 33) ; identification des motifs de la sollicitation du médecin (10-13, 15-16, 21, 23, 26, 29). Un certain nombre d’études ont fait ressortir les difficultés des médecins face à la prise en charge de leurs proches (18-20, 34) ou encore visaient à identifier les facteurs de risque de survenue d’évènements indésirables lorsqu’un médecin prenait en charge un de ses proches (35). Ces études ont inspiré ultérieurement des problématiques relatives à la compréhension des causes de ces difficultés (11, 33, 35), ou encore des réflexions sur les solutions à proposer aux médecins pour répondre aux demandes de soins venant de leurs proches (17, 32, 14). Par ailleurs, certains auteurs ont travaillé sur la prévention d’évènements indésirables, en suggé-rant des questions préalables qu’un médecin devrait se poser avant d’accepter de soigner un proche (17-18, 36), ou encore des exemples des réponses (37).

En miroir avec ces études et dans la lignée des études qualitatives, Bouvé (38) s’est préoccu-pée non pas des médecins, mais des soignés, notamment de l’impact de la délivrance (ou non) des soins par un médecin proche chez les soignés. Plus récemment encore, cette probléma-tique a été également abordée par Musseau, qui s’est intéressée au vécu des proches patients,

à leurs raisons de se faire soigner par son proche médecin et à leurs attentes en situation de soin

reçu d’un proche médecin (39).

Indépendamment des objectifs spécifiques de chaque recherche, certains items apparaissent comme récurrents dans les analyses : les motivations de la prise en charge, les difficultés

(13)

ex-primées par les médecins, le lieu de consultation, l’objectivité, l’implication affective, l’examen clinique. Ainsi, des discussions et rapprochements entre les résultats sont possibles, selon des approches plus ou moins globales, qui souvent ne considèrent pas la variable "popu-lation" (la spécialité des médecins, leurs caractéristiques personnelles ; ni celles concernant les catégories des proches patients – voisins, amis, famille, etc.).

Les questions initiales de cette thèse, issues des lectures bibliographiques précédemment ci-tées, portent sur une approche comparative du ressenti du médecin, la comparaison se situant premièrement entre les deux catégories des patients : comment les médecins généralistes se représentent la prise en charge d’un membre de la famille vs un patient classique ? Quels sont les éventuels écarts de prise en charge, selon le type de patientèle (membre de la famille vs patientèle classique). Dans quelle mesure le genre (H/F) et l’expérience (âge) du médecin généraliste sont-ils des variables qui influencent la conduite du médecin généraliste avec un patient membre de la famille ?

2!

BUT DU TRAVAIL

L’objectif général de cette thèse est d’examiner les représentations des médecins généralistes sur la prise en charge des deux catégories de patients : patients ordinaires et patients membres de la famille. L’objectif spécifique de ce travail est d’identifier les éventuelles différences de prise en charge, leur nature et les facteurs les favorisant.

2.1! Problématique de la recherche

Dans quelle mesure la filiation modifie-t-elle la prise en charge du patient et quelles en sont les conséquences ?

(14)

2.2! Hypothèses initiales

A partir des résultats présentés dans la littérature scientifique, une hypothèse s’impose à nous a priori : la présence d’un écart de conduite du médecin généraliste dans la prise en charge de membres de sa famille, par rapport à la patientèle classique. Si cette hypothèse est confortée par d’autres études, majoritairement quantitatives (14, 23), ce travail se propose d’affiner ces résultats en explorant les aspects de la prise en charge qui sont le plus modifiés par le facteur filiation. Par ailleurs, les résultats seront discutés à travers les variables âge du médecin (in-terne versus médecin avec plus de 15 ans d’expérience) et genre du médecin (femmes vs hommes).

Ainsi, une seconde hypothèse de cette étude présume un écart de prise en charge selon les facteurs âge et sexe du médecin. Si quelques recherches abordent ces facteurs individuelle-ment (24, 29) et le plus souvent de manière compléindividuelle-mentaire à leur problématique (12, 18), à notre connaissance peu d’études fournissent des données concernant le croisement de ces deux facteurs par rapport aux différences de prise en charge selon la catégorie de la patientèle et plus particulièrement la patientèle liée par la filiation.

3! METHODOLOGIE

Cette étude utilise une méthode qualitative descriptive, basée sur des entretiens individuels semi-directifs. La méthode qualitative descriptive a pour objectif le plus souvent le recueil de données verbales et/ou non verbales, permettant une démarche interprétative, très utile dans le domaine de la recherche en médecine, car elle facilite la compréhension des comportements, des représentations, des émotions et d’autres manifestations subjectives. Si les données re-cueillies par cette approche ne favorisent généralement pas la présentation de résultats statis-tiques, les méthodes qualitatives ont toute leur reconnaissance scientifique par les critères de validité auxquelles elles doivent répondre : l’identification d’une problématique, l’annonce

(15)

des hypothèses de recherche, l’indication des variables, la définition rigoureuse des critères de sélection de la population, le recueil des données, l’interprétation et les discussions des résul-tats.

3.1! Population de l’étude

Le corpus final de cette étude est formé d’un échantillon de 16 médecins de spécialité méde-cine générale, population nommée dans cette étude "MG" (Médecins Généralistes). L’échantillon est composé de deux sous-populations : (1) huit internes et (2) huit seniors, avec une expérience supérieure à 15 ans d’exercice, avec un équilibre recherché entre les MG hommes et MG femmes. Les médecins interviewés exerçaient tous en Ile-de-France. Le choix de l’homogénéité de la population concernant le lieu d’exercice conforte l’étude comparative des données, entre les internes en début de carrière et les seniors MG expérimentés, ainsi qu’entre les femmes et les hommes.

Les critères d’exclusion de cette recherche étaient : les situations d’urgences (vitales et rela-tives) ; la prise en charge des proches autres que la famille (les amis, voisins, confrères, les familles des collègues médecins, etc.).

3.1.1! Constitution de l’échantillon interviewé par saturation des données

Les médecins ont été contactés directement par l’intervieweur, dans un premier temps pour leur présenter le projet, leur demander l’accord pour l’entretien et également s’assurer que le MG correspondait aux critères de choix de la population (plus de 15 ans d’expérience vs in-terne, lieu d’exercice, confirmation de la prise en charge des membres de la famille de ma-nière générale, pas seulement en cas d’urgence). Ce premier contact a eu lieu par sollicitation directe (en se présentant au cabinet ou bien en abordant les internes sur le lieu de la demande) ou encore par téléphone. La majorité des participants à l’étude étaient connus par l’enquêteur, d’autres nous ont été recommandés par les médecins interviewés.

(16)

Concernant la taille adéquate d’un échantillon, la littérature scientifique présente deux mé-thodes, l'une qui établit le nombre d’entretiens de manière antérieure à l'étude et l’autre qui décide le nombre de manière postérieure, par le principe saturation. A ce sujet, la recherche de Guest, Bunce et Johnson (40), propose une opérationnalisation de la saturation à partir d’un corpus de soixante entrevues approfondies (corpus réalisé avec des femmes dans deux pays d'Afrique de l'Ouest). Les auteurs documentent systématiquement le degré de saturation et de variabilité des données à travers une analyse thématique et formulent des recommandations concernant les tailles d'échantillon : ils ont constaté que la saturation se produisait au cours des douze premières entrevues, bien que les éléments de base pour les méta-thèmes étaient présents dès les premiers six.

Pires distingue la saturation théorique5, qui s’applique à un concept (les catégories), de la

sa-turation empirique, qui s’applique aux données elles-mêmes, et dont le recueil est interrompu quand les derniers entretiens ne produisent plus de nouvelles informations (41). Par consé-quent, il est difficile de connaître a priori quel sera le nombre d’entretiens nécessaire. Il re-vient donc à l’enquêteur d’apprécier empiriquement s’il est parvenu au stade de saturation et si une augmentation du matériel empirique n’apporterait pas de nouveaux renseignements. Dans cette recherche, la démarche de constitution du corpus a connu deux grandes étapes. La première a eu lieu entre septembre et octobre 2016 : après un accord préalable de la part des médecins sollicités, 12 rendez-vous ont été fixés (le choix du nombre d’entretiens se basant sur les indications issues des recherches précédemment citées concernant la saturation des données). La seconde étape a eu lieu entre novembre et décembre 2016 : pour des raisons de

saturation empirique des données (diversification intragroupe)quatre autres médecins ont été

interviewés, dont deux par téléphone. Effectivement, la saturation ne dépend pas seulement de

5

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la variabilité du thème, mais aussi de la distance entre les interviewés : plus la distance entre les interviewés est variable, plus leurs avis peuvent diverger, plus le nombre à atteindre pour la saturation est important (40, 42). Afin que les analyses comparatives plus fines soient perti-nentes, selon le croisement des facteurs annoncés, le corpus a été augmenté à 16 entretiens. Le tableau suivant présente les caractéristiques générales de la population et le temps d’entretien. Pour des raisons d’anonymat, les noms des médecins ont été remplacés par un numéro d’ordre, M1, M2… M16. Le numéro d’ordre indique le nombre total d’entretiens et non pas l’ordre de la réalisation des interviews. L’ordonnancement dans le tableau est fait en fonction des facteurs annoncés : premièrement les internes, du M1 au M8, hommes suivis des femmes et ensuite les seniors, du M9 au M16, hommes suivis des femmes.

Tableau II Caractéristiques générales de la population interviewée et durée de l’entretien

Nommé dans cette étude

Age Genre Statut Année d’internat/ Temps d’exercice

Lieu d’exercice Zone Durée de l’entretien M1 33 Masculin Interne 1 Hôpital/Cabinet Mixte 00 :33 :49 M2 28 Masculin Interne 3 Hôpital/Cabinet Mixte 00 :32 :10 M3 29 Masculin Interne 3 Hôpital/Cabinet Mixte 00 :34 :31 M4 29 Masculin Interne 3 Hôpital/Cabinet Mixte 00 :31 :46 M5 28 Féminin Interne 2 Hôpital/Cabinet Mixte 00 :33 :08 M6 28 Féminin Interne 2 Hôpital/Cabinet Mixte 00 :31 :42 M7 29 Féminin Interne 3 Hôpital/Cabinet Mixte 00 :39 :50 M8 28 Féminin Interne 3 Hôpital/Cabinet Mixte 00 :46 :43 M9 72 Masculin Médecin 47 Cabinet libéral Ville 00 :33 :07 M10 59 Masculin Médecin 34 Cabinet libéral Ville 00 :36 :26 M11 55 Masculin Médecin 22 Cabinet de groupe Ville 00 :32 :56 M12 58 Masculin Médecin 30 Cabinet de groupe Rural 00 :40 :31 M13 62 Féminin Médecin 27 Cabinet libéral Rural 00 :33 :23 M14 44 Féminin Médecin 12 Cabinet de groupe Ville 00 :31 :48 M15 56 Féminin Médecin 23 Cabinet de groupe Ville 00 :31 :47 M16 56 Féminin Médecin 34 Cabinet libéral Ville 01 :04 :08

La saturation des données concernant la constitution de l’échantillon de l’étude (passage de 12 entretiens à 16 entretiens) a tenu également compte des variables supplémentaires, qui pourraient servir à affiner les analyses comparatives : la situation familiale (médecin marié ou pas ; avec ou sans enfant), la situation d’exercice (urbain ou rural), le mode d’exercice (seul

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ou en groupe), la présence ou pas d’autres médecins dans la famille de l’interviewé. Le cha-pitre : "caractéristiques de la population" présentera ces aspects. Il est toutefois à noter que dans ce type d’étude la taille de l’échantillon peut ne pas être nécessairement très importante pour apporter des données contributives, la validation de l’information se faisant par le con-texte et non par le nombre d’occurrences : ainsi, une seule nouvelle donnée issue d’un entre-tien peut avoir un poids équivalent à une donnée répétée de nombreuses fois dans des ques-tionnaires. (43).

3.2! Mode de recueil des données

L’enquête s’est déroulée par entretiens, combinant des questions ouvertes, avec des questions semi-dirigées, sur la base d’un guide d’entretien commun. Les entretiens ont été réalisés dans le cabinet du MG (pour les MG seniors) ou à l’extérieur (pour les internes).

3.2.1! Élaboration du guide d’entretien

A la différence de l’entretien non directif, qui n’a pas de thème prédéfini, dans l’entretien semi-dirigé les questions sont définies au préalable, à partir des items à aborder, prévus dans les questions initiales de la recherche. L’élaboration de la trame d’entretien s’est faite en pro-cédant, d’une part, à une triangulation avec la littérature scientifique (notamment les entre-tiens pratiqués dans d’autres recherches similaires (18-19, 25) et, d’autre part, par triangula-tion des chercheurs, en recourant au point de vue de plusieurs professeurs (surtout le Docteur Coindard, le Docteur Bucher et le Professeur Berger). Concrètement, la trame d’entretien ini-tiale, qui comprenait des questions sur la prise en charge des patients ordinaires et, de manière contrastée, des patients membres de la famille, a été testée sur une personne de l’entourage proche de l’enquêtrice. Suite à l’analyse de ce premier matériel, des ajustements ont été faits et la nouvelle trame a été testée à nouveau, auprès d’un second proche. Une seconde triangu-lation, entre le point de vue de l’enquêteur, le terrain et les universitaires, a permis le

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réajus-tement final des questions ; par ailleurs, les deux tests de la trame d’entretien ont permis à l’enquêtrice novice, que j’étais, de s’entraîner à la réalisation des interviews.

Dans le guide d’entretien final, l’ouverture a été faite par la présentation de deux locuteurs (intervieweur/interviewé) et le recueil du consentement de l’enregistrement audio des don-nées. Les données relatives aux renseignements généraux ont été abordées selon la situation de chaque entretien (au début, pendant ou à la fin de l’entretien), pour éviter de rigidifier le cadre de l’entretien et pour créer un climat d’échange qui présente les traits d’une discussion informelle. Ainsi, la première question, ouverte, avait comme objectif de lancer l’interviewé dans le thème de l’étude : "Quand avez-vous soigné la dernière fois un membre de votre fa-mille ?" En fonction de la réponse, des relances ou des demandes de précisions étaient formu-lées (notamment en référence aux membres de la famille, au lieu de consultation, à la durée, etc.).

La deuxième question référait à la problématique de cette étude, notamment la description de la prise en charge des deux types des patients : "en termes de priorité, que pouvez-vous dire de la prise en charge des deux catégories des patients – ordinaires et les membres de la fa-mille ?" Les demandes de précisions liées à cette partie ont été suggérées plutôt par des mots clés pour encourager le développement de la réponse (ex : "lieu de consultation ?" "durée ?" "quel type d’explication ?" ; "quelles difficultés ?", etc.).

La seconde partie de l’entretien faisait référence aux représentations concernant la prise en charge des membres de sa famille : le ressenti, l’utilité, etc. La question générique de cette partie étant : "que pensez-vous de votre propre pratique, concernant la prise en charge des patients membres de la famille ?". D’autres questions ont été prévues, notamment par rapport à la dimension sentimentale et à l’utilité (motivation instrumentale) : "est-ce que vous aimez soigner les membres de la famille ?" ; "selon vous, le métier de médecin est un métier qu’il

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votre famille ? si, oui qu’en avez-vous pensé ?". La trame d’entretien prévoyait également des relances, utilisables éventuellement au cours de la discussion, en fonction du discours de l’interviewé (voir la trame entretien complète dans l’annexe 2).

Les questions ouvertes ont permis d’obtenir des informations multiples, à partir du point de vue de l’interviewé, non orienté par les préoccupations de l’enquêteur. La technique a consis-té à laisser l’interviewé parler sur le sujet, selon une logique qui lui était propre et qui lui con-venait. Ainsi, les questions visées par la recherche pouvaient être abordées par l’interviewé de manière spontanée. L'intervieweuse a posé les questions que l'interviewé n'a pas abordées par lui-même ; cette technique permet de s’appuyer sur le guide d’entretien, procurant ainsi plus d’assurance au cours de l’interview pour recueillir des données relatives à la problématique.

3.2.2! Le matériel

Les entretiens ont été enregistrés avec un dictaphone et un Smartphone, pour assurer une sé-curité maximale de l’enregistrement et pour pallier les éventuels problèmes techniques qui auraient pu intervenir sur un des appareils.

Les enregistrements ont été transcrits in extenso et interprétés par itération à la lumière des questions auxquelles l’enquête visait à répondre. Les transcriptions ont été réalisées les jours qui ont suivis la réalisation des entretiens, afin de pouvoir décrire les manifestations non-verbales qui sont des indicateurs importants dans les études qualitatives. Ils ont été transcrits le plus fidèlement possible, dans leur intégralité, sous forme de fichier texte Word, le non verbal (quand il existe), étant noté entre parenthèses. La durée des entretiens se situe entre 31

minutes et 64 minutes (la valeur médiane du temps d’entretien étant 33 minutes). Une

"trian-gulation écologique" a été réalisée à la fin des transcriptions, les premières analyses et inter-prétations étant soumises à la vérification, auprès des sujets participants à la recherche (44, 45).

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3.3! Stratégie d’analyse

L’enquête s’inscrit dans une perspective médico-interactionnelle de terrain. Un travail préa-lable sur chaque entretien, au fur et à mesure de sa réalisation et transcription, a permis d’organiser les témoignages selon des items prédéfinis, suite à une triangulation avec la litté-rature scientifique. D’autres items se sont ajoutés progressivement, que nous avons organisés en catégories et sous-catégories ; la catégorisation a été arrêtée tardivement, vers la fin du recueil, suite à plusieurs allers-retours entre le corpus empirique et l’analyse en cours. Cette démarche a été réalisée dans une perspective analytique, se basant sur la méthode de la théorie ancrée, proposée par Paillé (46, 47).

3.3.1! La méthode de la théorisation ancrée

Inspirée par la grounded theory, développée par Glaser et Strauss (48), la méthode de la théo-risation ancrée est complémentaire avec la démarche de la saturation des données, utilisée dans cette étude pour la construction de l’échantillon représentatif. Il s’agit d’une "démarche itérative de théorisation progressive d’un phénomène" (46, p.151), l’évolution de ce phéno-mène n’étant pas liée à sa répétition ou au nombre de fois de son apparition dans le corpus. Ainsi la théorisation ancrée demeure une méthode qualitative, qui permet la conceptualisation des phénomènes sociaux, culturels ou psychologiques, par des mises en relations progres-sives, à partir des données empiriques. Paillé la décrit comme ayant une envergure plus mo-deste que la grounded theory, dans le sens où le but de cette méthode n’est pas la production d’un modèle théorique ou d’une théorie, mais la compréhension des événements, des propos ou des discours, le terme « théorisation » désignant en même temps le procédé et son résultat. Toutefois, cette méthode présente plus de souplesse, le chercheur pouvant réaliser seulement une partie des étapes de cette méthode et en arriver à une conceptualisation des données empi-riques par des va-et-vient constants entre les données recueillies et la théorisation. Ainsi, les

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sation, théorisation) permettent chacune une conceptualisation progressive, la catégorie étant considérée comme le principal outil qui relie les données empiriques à la conceptualisation.

3.3.2! Application de la théorisation ancrée à notre corpus

Concrètement, une première lecture des transcriptions a permis le codage manuel des don-nées, qui consistait à reformuler ou à dégager une idée ("de quoi parle ici l’interviewé ?"/ "à quoi fait-il référence ?"). A partir du codage, les catégories initiales ont été identifiées, enri-chies et stabilisées entretien après entretien. C’est à partir de cette étape que la théorisation a

commencée, cette démarche nécessitant une première abstractionpour l’élaboration des

caté-gories. Les frontières entre la catégorisation, la mise en relation et l’intégration étant très perméables, une systématisation du travail d’analyse a été nécessaire afin de regrouper et de hiérarchiser les différentes catégories identifiées dans le discours ; l’ensemble de cette dé-marche, de mise en relation et de systématisation, est nommée aussi codage axial. In fine, à partir du codage axial - l’organisation des relations qui structurent et caractérisent les faits issus de la problématique -, et de l’interprétation que nous en avons faite, nous avons tenté une modélisation, toujours ancrée dans les données empiriques. Comme nous l’avons souli-gné dans les précédents paragraphes, il ne s’agira pas d’une modélisation généralisante, qui pourrait expliquer d’autres phénomènes, mais plutôt d’une représentation schématique des différentes mises en relation et conceptualisations. Nous avons également abordé la dernière étape constitutive de la méthode de la théorisation ancrée, non obligatoire, qui consiste dans la théorisation des résultats de la recherche : il s’agit de sélectionner des éléments représenta-tifs et de dégager une formulation provisoire, afin de rendre intelligible une situation com-plexe, tant sur le plan conceptuel qu’au niveau des situations empiriques. Cette théorisation indique un état de faits à un moment donné et peut être évolutive, car elle se base sur des ré-sultats établis empiriquement.

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4! RESULTATS

Nous commençons par présenter synthétiquement la typologie d’analyses menées, selon la catégorisation des données et les facteurs de l’étude.

I.! Analyse des discours selon les catégories et sous catégories identifiées

Les quatre premières étapes de la théorisation ancrée ont permis une analyse globale des dis-cours des médecins selon les macro-catégories identifiées.

Figure 1 Schéma illustrant la première analyse du corpus, une analyse globale des données

II.! Analyses comparatives selon les facteurs âge et sexe de MG

Dans un second temps, les catégories et sous-catégories identifiées seront discutées à travers des analyses comparatives, en fonction des variables préalablement annoncées, l’âge et le sexe des médecins, prenant en compte un seul facteur à la fois :

1.! Dans quelle mesure l’expérience influe-t-elle la conduite du médecin dans la prise en charge des deux catégories des patients (seront comparés les huit internes avec les huit MG expérimentés) ?

Figure 2 Schéma illustrant l’analyse comparative selon le facteur âge des médecins

2.! Peut-on parler d’un écart de conduite selon le genre des MG (seront comparés les pra-tiques des huit femmes avec les prapra-tiques des huit hommes) ?

Internes (femmes et hommes) Séniors (femmes et hommes) Femmes (internes et expérimentées) Hommes (internes et expérimentés) Médecins généralistes (internes et expérimentés, femmes et hommes)

! Données factuelles sur les pratiques des MG selon la catégo-rie de la patientèle

! Représentations sur la prise en charge des PMF (patients membres de la famille) et PC (patients classiques)

! Représentations sur le ressenti (dimension affective et diffi-cultés déclarées par le MG)

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III.! Analyse comparative selon le croisement des deux facteurs

Des analyses comparatives plus fines seront effectuées, notamment par croisement entre les deux variables, âge et sexe des médecins. Dans un premier temps nous allons considérer la variable âge et la constante sexe : au sein du groupe des femmes y a-t-il un écart entre les In-ternes et les Séniors ? La même analyse sera faite au sein du groupe des hommes : seront comparés les discours des Internes avec les discours des Séniors (cf. Figure 4.1).

Figure 4 Schéma illustrant les analyses comparatives croisées, selon le facteur âge (4.1) et sexe des médecins (4.2).

Une seconde analyse, du même type, va croiser la variable sexe avec la constante âge : à l’intérieur du groupe des internes seront comparés les femmes avec les hommes. Également, la même analyse sera faite au sein du groupe des séniors (cf. figure 4.2). Cette analyse quali-tative comparative, la première à notre connaissance combinant plusieurs facteurs, a un carac-tère exploratoire. De ce fait, les résultats ne pourront pas être généralisables, mais permettront (comme la plus grande partie d’études exploratoires) d’ouvrir ce travail vers des nouvelles hypothèses de recherche.

Outre les questions déjà évoquées, nous allons nous intéresser aux motivations des intervie-wés à traiter les membres de leur famille, aux éventuelles raisons du refus de leur prise en charge, à leur propre expérience concernant cette question (si le médecin interviewé a des témoignages de la part des membres de sa famille, ou de ses confrères, etc.) et in fine, à leurs projections concernant cette problématique (comptent-ils continuer à prendre en charge la famille ou, au contraire, aimeraient-ils ne plus s’en occuper, et pourquoi ?).

Internes femmes Séniors femmes Internes hommes Séniors hommes 4.1 : Variable âge et constante sexe

Femmes Seniors Femmes Internes Hommes Seniors Hommes Internes

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Les résultats seront présentés à travers les catégories et sous-catégories issues des analyses, procédure qui a permis le classement des données recueillies autour des questions auxquelles la recherche se propose de répondre : "données factuelles sur les pratiques des MG selon la catégorie de la patientèle" ; "représentations sur la prise en charge des PMF et PC" et "repré-sentations sur le ressenti (dimension affective et difficultés)". Selon le principe de la satura-tion des données, chaque nouvelle informasatura-tion pouvait ou bien compléter les thèmes déjà identifiés, ou encore, selon le cas, être intégrée à un thème existant, sous la forme d’une sous-catégorie (cf. tableaux III-VIII, présentés dans les chapitres suivants).

4.1! Caractéristiques des interviewés

La première organisation du corpus, concernait les renseignements d’ordre général (cf. bleau III), qui ont été regroupés par la suite selon les facteurs sexe et âge du médecin (cf. ta-bleau IV).

Tableau III Catégorie et sous-catégories d’analyse concernant le thème : renseignements d’ordre général

Renseignements d’ordre général Le MG

interviewé

interne/

senior Age Sexe Expérience

Lieu d’exercice Situation familiale Nb enfants Qui sont les PMF Autre médecin dans la famille

Concernant les caractéristiques d’ordre général, au moment de l’entretien, les internes étaient tous âgés de 28 ou 29 ans, sauf un interne qui était âgé de 33 ans. Les MG expérimentés étaient âgés de 55 à 72 ans, sauf une MG âgée de 44 ans. Tous les médecins interviewés (in-ternes et seniors) professaient dans la région parisienne. Douze d’entre eux vivaient en couple (dont six femmes et six hommes) et quatre étaient célibataires (tous des internes, dont deux hommes et deux femmes) (cf. tableau II, précédemment présenté).

Le tableau suivant, tableau IV, croise les informations relatives aux interviewés (lecture hori-zontale) avec les informations relatives aux patients membres de la famille (lecture verticale) :

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D’une part, les PMF sont organisés par type de filiation - famille nucléaire (lien biologique et

habitant sous le même toit que le MG6) et famille élargie (lien biologique ou d'alliance et

n’habitant pas sous le même toit que le MG) ; cette distinction pourrait nous être utile par la suite, lors de l’interprétation des données, notamment référant au cadre de prise en charge des PMF et au respect des rôles. D’autre part, les médecins sont regroupés par les variables âge (les blocs verticaux) et sexe des médecins (les blocs horizontaux).

Tableau IV Croisement des facteurs médecin (horizontale) avec les patients membres de la famille (verticale)

INTERNES MEDECINS EXPERIMENTES

Famille nucléaire Fam élargie Famille nucléaire Fam élargie Conjoint Enfants Parents Autres PMF Conjoint Enfants Parents Autres PMF

HOM

M

E

S M1 oui / oui (GP), (T/O), (A) M9 oui 2 / (N), (A)

M2 / / oui (F) M10 oui 1 médecin non car (A)

M3 oui / oui (A) M11 oui 2 /

M4 / / oui (T/O) M12 oui 2 /

FEM

M

ES

M5 oui / médecin non car (F) M13 oui 2 oui (PE), (T/O), (C), (A)

M6 / / oui (F), (GP) M14 oui 2 médecin oui et (C), (T/O), (A) M7 / / oui (F), (N) M15 oui 2 oui (PE), (C)

M8 oui / oui (F), (P) (GP), (A) M16 oui 2 oui (F), (N), (T/O), (C),

LEGENDE : Petits-enfants (PE) ; Grands-Parents (GP) ; Fratrie (F) ; Tantes/Oncles (T/O) ; Neveux (N) ; Cousins (C) ; Autres (la belle-famille, etc.) (A).

Parmi les internes aucun n’avait d’enfant au moment de l’entretien ; à l’inverse, tous les MG seniors étaient parents de deux enfants, sauf un, qui en avait un seul. Tous les internes, sauf un dont le père est médecin, ont déclaré soigner leurs parents. Concernant les seniors, les femmes disent explicitement soigner leurs parents, alors que les hommes, ou bien ne se sont pas exprimés sur la question, ou bien ont laissé comprendre que leurs parents ne sont plus en vie.

Par ailleurs 11/16 interviewés avaient au moins un autre médecin dans la famille (dont cinq internes et six seniors).

6 Les parents peuvent ou pas faire partie de la famille nucléaire : certains internes peuvent habiter encore chez leurs parents ;

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Dans les chapitres suivants nous allons présenter les représentations et le ressenti des méde-cins selon les catégories et sous-catégories identifiées, en illustrant la logique de la répartition du discours avec des exemples d’extraits du corpus.

Dans un premier temps, nous avons procédé à des analyses qui regroupent tous les intervie-wés, internes et seniors. Dans un second temps nous avons effectué des analyses comparatives en fonction des facteurs âge et sexe des médecins.

4.2! Catégorisation des données factuelles : patients classiques

vs patients membres de la famille

Ce méta-thème regroupe les aspects pratiques de la prise en charge. La majorité des médecins a déclaré qu’il y avait des différences entre les deux catégories de patients. Ces différences concernaient autant le cadre de la prise en charge (lieu, durée) que le type du discours lié au problème médical qui fait l’objet de la consultation. Le tableau V présente les catégories et sous-catégories référant aux données factuelles.

Tableau V Catégorie et sous-catégories d’analyse concernant le thème : données factuelles

Données factuelles sur les pratiques des MG

Lieu Durée consultation entre PMF et PC Initiative Raisons de la PEC7 des PMF

Cabinet cabinet Hors identique différente PEC à l'initia-tive du MG PEC à l'initia-tive du PMF obligation morale té/aisance Facili- Autres (bienveil-lance, confiance, plaisir, etc.)

Légende : PEC = patients membres de la famille / PC = patients classiques

4.2.1! Cadre de la prise en charge

Lorsque le lieu de consultation fut abordé au cours des entretiens, la majorité des interviewés ont évoqué une consultation au cabinet pour les patients classiques, et au domicile ou sur le lieu de la demande pour les patients membres de la famille. Ci-dessous quelques exemples :"à

la maison. Avec la famille c'est là où on est" (M1) ; "Le lieu où ils sont, du coup avec mon

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matériel que je ramène de mes lieux de stage au domicile" (M5) ; "à vrai dire j’évite de de-mander à ma famille de venir en consultation et la plus part du temps c’est moi qui me dé-place" (M6). "À la maison. J'ai le matériel sur moi donc stéthoscope, donc je ne vois pas ce qu'il y a besoin de plus" (M8) ; "[…] c’est souvent ou chez moi ou chez eux, […] c’est souvent à la maison" (M13). "Là où je me trouve, à domicile" (M14) ; "bah, en général avec ma fa-mille c’est là où ils se trouvent. Parce que voilà, j’ai le stéthoscope, j’ai tout ce qu’il faut à la maison » (M16). Certains laissent clairement comprendre que la raison de la consultation à

domicile est la facilité la commodité : "Ah non non non, c'est à domicile. Ah, si… au début

quand j'habitais au-dessus, c'était plus facile. Si on avait besoin, on allait au cabinet mais bon, là c'est à la maison quoi" (M10). D’autres justifient le choix de la consultation à

domi-cile par des privilèges ou faveurs : "[…] je le fais sur place parce que c’est là que ça se

pré-sente sur le moment, et je ne vais pas faire louper un jour d’école à mes filles pour qu’elles viennent au cabinet" (M11). On remarquera qu’une partie des médecins interrogés font venir

les patients membres de la famille au cabinet, en justifiant leur demande par la nécessité de donner un cadre à la consultation. "Plutôt au cabinet parce qu’il y a des limites, c’est mieux

cadré, il y a une limite de temps" (M2). "Dans le cabinet quand c'est possible. Sauf en cas de force majeure, à domicile […] au cabinet parce que c'est là que j'ai tout ce que j'ai besoin, et il y a le cadre ça… voilà, ça me détache un peu des situations familiales" (M4). "C’est-à-dire ils viennent ici et je les vois dans mon cabinet et je les soigne comme je soignerais d’autres patients" (M9). "Alors ça a toujours été ici (au cabinet) et, dès qu’ils m’appellent, même si c’est pour … je les fais venir ici" (M12).

4.2.2! Durée de la consultation :

De manière générale, les médecins notent une différence de durée de consultation entre les deux catégories de patients, aussi bien dans un sens que dans l’autre (plus de temps / moins de temps) ; deux médecins déclarent passer un temps identique avec les deux catégories de

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pa-tients. Nous présentons quelques exemples pour les situations où la durée de consultation d’un PMF est supérieure à celle d’un patient classique.

Certains médecins justifient cet écart par un discours plus étoffé envers les patients membres de la famille : "je leur consacrerai plus de temps (aux membres de la famille)… s’ils ont des

questions je prendrai plus de temps pour bien expliquer" (M1). "Non (je ne passe pas le même temps), deux voire trois fois plus de temps qu’en consultation. Puis à tout re-justifier tous les jours quand ça traîne un peu." (M8). D’autres médecins justifient la différence de la

durée de consultation par l’ambiance du contexte familial : "oui sûrement, comme c’est

sou-vent à la maison ou au moment d’un thé ou café en même temps, (rire), oui je pense qu’elles sont un peu plus longues, on prend plus notre temps" (M13).

Exemples de durée de consultation d’un PMF inférieure à celle avec un patient classique, avec des arguments liés à la connaissance des patients et au rituel du discours : "J’essaye

d'al-ler entre guillemets au plus vite, et donc si je vois que le problème en lui-même va prendre du temps, je vais vite. Alors, tout ça pour dire que, évidemment avec la famille il n'y a pas besoin de demander des nouvelles du petit quoi, parce que je le vois déjà" (M10). "Non, c’est plus court avec la famille, car on les connait on n’a pas besoin de poser les questions de politesse, au va plus vite au sujet" (M12).

Exemples de durée de consultation identique entre les deux catégories des patients : "il faut

être sérieux et prendre les choses au sérieux que ce soit la famille ou que ce soit un patient au cabinet si tu as le temps de faire une petite recherche pour répondre aux questions oui il faut le faire, mais pour les deux de la même manière" (M2). "Oui, il n’y a pas deux poids deux mesure ! Je prends mon temps avec tout le monde. Je prends le temps de tout vérifier, je m’assure de ne rien oublier, je note tout, et moi je suis resté au papier comparé à certains de mes confrères, donc ça prend plus de temps (M9).

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4.2.3! Initiative de la prise en charge

Selon les MG interviewés, la prise en charge des patients membres de la famille se fait le plus souvent à l’initiative de ces derniers. Les médecins pratiquent une consultation à leur initia-tive généralement quand il s’agit de leurs enfants en bas âge ou bien quand il existe un besoin visible. Exemple de PEC à l'initiative du patient : "elle avait des plaques d’eczéma, ça la

dé-mangeait, et elle m’a réclamé un traitement et voilà" (M1). "Il suffit qu’un membre de la fa-mille m’appelle et me demande, est-ce que tu peux voir ça ou cela pour moi, ou des amis et je m’occupe d’eux" (M2). "Non, c'est eux qui viennent et qui me posent des questions et le plus souvent c'est des pathologies aiguës" (M4). "Ça fait même pas un mois que ma grand-mère m’a sollicité par téléphone pour des douleurs récurrentes au niveau des deux genoux prédo-minant à la mobilisation" (M6). "Je vais jamais moi vers eux du point de vue médical ; je préfère qu'ils viennent vers moi. Peut-être qu'ils sont déjà suivis, je n'en sais rien. Donc s'ils me demandent, avec plaisir. Si non, je ne vais pas directement" (M7).

Exemple de PEC à l'initiative du médecin : "pour mes enfants, s'ils se réveillent à trois heures

du matin avec une otite, ça m'est plus simple de regarder un tympan que d'appeler SOS mé-decins" (M15). "Mes enfants, je les soigne moi parce que je vois qu'ils sont malades et c'est plus simple pour moi de les soigner dans un premier temps, avant d'aller voir le pédiatre"

(M14). Un autre médecin laisse entendre que c’est plutôt la prévention qui est faite à son ini-tiative : "bah, par exemple j’ai un cas très précis. Il y a, … c’est mercredi, j’ai une nièce qui a

eu un diabète gestationnel, qui vit en Angleterre, son père est médecin, c’est mon frère, qui est donc venu et je l’ai mise en garde, parce que c’est important, elle a des problèmes de poids. Je lui en ai parlé à titre d’information. Pour lui faire prendre conscience du problème. Et que c’est un problème de diabète, je lui ai fait prendre conscience du problème, qu’elle ne le néglige pas, qu’elle demande certains examens à son médecin" (M9). Une autre raison de

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pas une demande de sa part, c’était plutôt une demande de ma part, car je l’ai vu se gratter, se gratter, se gratter… et lui, il m’a pas demandé plus que ça, mais en voyant en gros qu’il souffrait, moi je suis allée vers lui et je lui ai demandé bah, qu’est-ce qu’il se passe" (M16).

4.2.4! Les raisons de la PEC des PMF

Quand on demande aux médecins généralistes pourquoi ils acceptent de prendre en charge les membres de leurs familles il ressort essentiellement deux raisons : l’obligation morale et l’aisance. Concernant l’obligation morale, voici quelques extraits des discours des Médecins 2, 8 et 13 : "je n’ai pas trop le choix, c’est une obligation morale, […] mais comme je vous ai

dit c’est une obligation de répondre aux demandes de la famille, c’est plus facile de dire : va à la pharmacie et prends ça, que de dire va voir un médecin…" (M2) ; "parce que quand ils viennent me demander un soin, quand c’est dans mes capacités, je ne le leur refuse pas, parce que justement, c’est des membres de ma famille" (M8). Un médecin fait référence clairement

au devoir : "avec ses enfants ou avec ses parents ou avec son mari on est bien obligé d’être

là" (M13). Les médecins 11 et 12 font référence à l’aisance : "[…] il n’y a pas un critère par-ticulier, c’est essentiellement la simplicité" (M11) ; "c’est plus par simplicité, commodité ; je suis là, pas besoin de prendre rendez-vous" (M12) ; "ben parce que c'était le plus simple pour tout le monde je crois" (M10).

Une autre raison, qui se retrouve dans le discours de trois autres médecins est la bienveillance envers sa famille : "ça représente d’être là pour eux, quand ils ont besoin je suis là pour eux

voilà" (M1) ; "si je le fais pas, ils laissent trainer jusqu’au jour où ils ne peuvent plus at-tendre et que ça s’est aggravé" (M8) ; "[…] l’inviter à ne pas négliger le problème, pas sous-estimer le problème" (M9).

Par ailleurs, deux médecins citent la confiance en eux-mêmes : "mes compétences ! Si je me

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à un spécialiste, si je suis sûr de moi ça s’arrête la ! Je donne une réponse, une ordonnance et c’est fini ; […] parce que je me sentais capable de le faire, j’avais les compétences pour le faire, j’avais fait le diagnostic, je ne voyais pas de raison de l’envoyer ailleurs" (M1) ; "[…] je pense que j’ai une assez bonne prise en charge des membres de ma famille… je pense qu’elle est bien parce que je suis dans le détail" (M16).

La satisfaction de rendre service à sa famille est également citée : "oui ! oui, oui. Ca me

per-met de leur rendre service, oui ça me fait plaisir" (M1) ; "[...] que j’aime bien avoir leur con-fiance, qu’ils me confient tous leurs problèmes et me donner la crédibilité d’avoir la solution pour presque tout. Il y a toujours une partie de reconnaissance aussi de leur faire partager les produits de mon travail de 9 ans de médecine" (M6).

De manière isolée, un médecin déclare prendre en charge sa famille le plus souvent dans les situations d’urgence, mais pas seulement : "[…] plus la nécessite d’urgences, pour une crise

d’asthme où il y avait besoin de ventoline et il fallait renouveler l’ordonnance de ventoline, ou la pilule pour un risque de grossesse si elle était interrompue. Globalement je n’ai pas soigné d’autres membres de ma famille en dehors de mon compagnon et ma sœur parce que je trouve que c’est difficile de soigner de façon objective " (M5). Un autre médecin fait

réfé-rence à la pénurie des médecins dans l’environnement de vie de ses parents : "[...] le manque

de médecins, car ils ont du mal à trouver un médecin" (M4).

4.3! Représentations sur la prise en charge des deux catégories

des patients

L’analyse des représentations des interviewés concernant les deux types des patients s’est organisée autour des sous-catégories suivantes : arguments par rapport aux diffé-rences/similitudes concernant la prise en charge des PMF et des patients classiques ; représen-tations des médecins concernant leur propre pratique ; le type de discours envers les deux catégories des patients ; la priorité des soins en cas de sollicitation reçue de la part d’un

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membre de la famille pendant la consultation d’un patient classique et, in fine, l’impact de la dimension affective sur la sélectivité des actes médicaux pratiqués.

Le tableau VI synthétise les catégories et sous-catégories concernant les représentations des médecins sur la prise en charge des deux catégories des patients.

Tableau VI Catégories et sous-catégories d’analyse concernant les représentations sur la prise en charge des deux catégories de patients

Représentations sur la prise en charge des PMF et PC

Représenta-tions sur les deux catégo-ries des

pa-tients Repré- senta-tions sur sa pra-tique Représentation sur le type de discours

Représentations sur la hiérar-chie de la PEC des deux

caté-gories des patients

Sélectivité (Délégation) de certains actes Le PMF = PC Le PMF ≠ PC Discours

identique Discours différent

priorité dans l'ordre de PEC des PMF et PC disponibilités pour le PMF durant la PEC d'un PC

pudeur compétences besoin des spécifiques

annonces des pathologies

graves

4.3.1! Représentations sur les deux catégories des patients

Les représentations référant aux deux catégories de patients ont été exprimées en termes de différences. Tous les médecins interviewés ont indiqué des différences entre les deux catégo-ries de patients, les aspects qui apparaissent dans les discours étant liés à la composante sen-timentale, qui prend un rôle majeur dans l’abord du patient et sa prise en charge ; à l’absence d’objectivité dans la prise en charge des patients membres de la famille ; à l’implication sen-timentale ; aussi à l’implication et au devoir envers sa famille ; au vécu familial commun ; à la distance et confusion des rôles ; également aux aspect factuels, en référence au cadre, discours et durée de consultation.

(a)!Différences dues au manque d’objectivité avec les PMF

Les principales différences entre les patients classiques et les patients membres de la famille semblent liées à l’objectivité des médecins lors de la consultation. Selon les médecins interro-gés, la filiation peut avoir un impact sur leur objectivité de différentes façons. D’une part, elle

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