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Les représentations référant aux deux catégories de patients ont été exprimées en termes de différences. Tous les médecins interviewés ont indiqué des différences entre les deux catégo-ries de patients, les aspects qui apparaissent dans les discours étant liés à la composante sen-timentale, qui prend un rôle majeur dans l’abord du patient et sa prise en charge ; à l’absence d’objectivité dans la prise en charge des patients membres de la famille ; à l’implication sen-timentale ; aussi à l’implication et au devoir envers sa famille ; au vécu familial commun ; à la distance et confusion des rôles ; également aux aspect factuels, en référence au cadre, discours et durée de consultation.

(a)!Différences dues au manque d’objectivité avec les PMF

Les principales différences entre les patients classiques et les patients membres de la famille semblent liées à l’objectivité des médecins lors de la consultation. Selon les médecins interro-gés, la filiation peut avoir un impact sur leur objectivité de différentes façons. D’une part, elle

famille : "(il y a des différences) parce que, comme j'ai dit, c'est le cadre familial, t'es pas

objectif. On a tendance à rassurer, voilà. À prendre des décisions en fonction de ça. […] Après c’est compliqué ... quand ils insistent et rappellent plusieurs fois, ça m’arrive de leur donner les antibio" (M4). D’autre part, selon les interviewés, la filiation peut influencer le

raisonnement du médecin, qui va minimiser ou, au contraire, exagérer les symptômes : "[…]

des fois on peut minimiser les choses vu qu'on connaît la personne depuis longtemps donc voilà" (M7). "Soit on dramatise pour des choses qui ne sont pas très graves […] soit au con-traire, ben je me rends compte par rapport à mon fils quand il a eu sa fracture, on a quand même négligé les choses parce qu'on n'a pas voulu voir qu'il était malade. Il nous a bien fait son cinéma, on a bien marché dedans" (M15).

(b)!Différences dues à l’implication sentimentale avec les PMF

Les témoignages des médecins font référence aussi à l’empathie : "je trouve qu’il y a

forcé-ment plus d’empathie envers une personne que tu aimes, que vers un patient ordinaire"

(M6) ; à l’investissement sentimental "(je trouve) qu’il va y avoir toujours plus d’implication,

comme je le mentionnais tout à l’heure, il y a un investissement sentimental qui fait que le ton de la voix change qui fait que les explications sont plus exhaustives, que les exemples sont plus concrets" (M6) ; c’est un peu plus stressant, on veut qu’ils aillent mieux tout de suite, enfin moi c’est le cas avec mes filles" (M11) ; et au recul affectif : "oui, il y a une différence, je ne peux pas être froid" (M2). D’autres médecins trouvent que l’implication sentimentale

engendre de l’inquiétude et du stress : "je pense qu’on a quand même le stress de ne pas

pas-ser à côté d’un truc grave et de ne pas avoir à faire le diagnostic d’un truc grave" (M13). (a)!Différences dues à l’implication morale et au devoir envers sa famille

Les médecins précisent que les différences entre les deux catégories des patients peuvent être générées également par l’implication morale dans la prise en charge et la crainte de ne pas décevoir la famille : "quand on soigne la famille il y a toujours une implication morale et, du

côté des soins, je suis sûr que ce n’est pas optimal, parce qu’il y a une implication morale […] ce n’est jamais la même chose (par rapport à un patient classique) car le niveau d’implication n’est pas le même" (M2). Cette implication morale peut être générée parfois par

la pression ressentie de la part de la famille : "il y a aussi la pression des autres membres de

la famille pour qu'on ne fasse pas un mauvais pas dans le suivi […] je pense qu'il y a beau-coup plus de pression pour les membres de la famille" (M7).

(b)!Différences dues au vécu commun

Les différences entre les patients sont aussi favorisées par le vécu qu’ils ont avec les membres de la famille : "oui, j’essaye de ne pas faire de différence, mais quand c’est la famille il y a un

vécu derrière donc c’est un peu différent, donc il faut bien cadrer les choses" (M9). "On les connaît donc on sait comment les aborder pour faire passer le message" (M12). "[...] Je trouve qu’on ne les aborde pas de la même manière, il y a tout un vécu, tout un passé derrière qui est souvent commun avec un membre de la famille donc, avec plus de difficulté à aborder certains sujets, on sait que ça ne va pas passer, ou que la personne ne va pas être sensible à certains arguments" (M5).

(c)! Différences liées à la distance et à la confusion des rôles

Certains interviewés citent la difficulté à garder la distance professionnelle et leur rôle de mé-decin : "ben, il (le PMF) est différent parce que je n'ai pas la même distance et je n'ai pas le

même espace que je mets entre moi et mes patients dans le but thérapeutique. Et je dépasse cet espace, je dépasse cette distance […] et la relation n'est plus une relation médecin-malade, mais c'est une relation "Pierre versus grand-mère" ou "Pierre versus belle-mère", "Pierre versus maman, papa" et cetera, qui n'est pas le même abord et qui, à mon avis, n'est pas la même façon de travailler" (M3).

(d)!Différences liées au contexte

Les interviewés font référence également aux données factuelles, présentées précédemment, notamment la durée et le lieu : "c'est toujours à la maison, j'ai toujours le temps, bon ce n'est

pas quinze minutes, car j'ai le prochain patient […]" (M8). Certains justifient la durée par le

ressenti du patient membre de la famille : "ben, oui parce qu'ils sont angoissés, ils posent des

questions, […] donc je prends plus le temps parce que ce n'est pas une consultation en soi

(M8).