L’ensemble triadique de Cantor
L’ensemble triadique de Cantor K ⊂ [0, 1] est d´ efini comme une intersec- tion K = \
n∈N
K
no` u les ensembles K
nsont d´ efinis par r´ ecurrence. On part de K
0= [0, 1]. Pour passer ` a K
1on retire ` a K
0un intervalle ouvert cen- tral (central signifie ici sym´ etrique par rapport au milieu du segment initial) de longueur 1/3, pr´ ecis´ ement l’intervalle ]1/3, 2/3[. L’ensemble K
1est donc r´ eunion de deux segments de longueur 1/3 : [0, 1/3] et [2/3, 1]. Pour passer ` a K
2on retire ` a chacun de ces segments un intervalle ouvert central de largeur 1/9. On obtient une r´ eunion de 4 segments disjoints, chacun de longueur 1/9, pr´ ecis´ ement : [0, 1/9], [2/9, 1/3 = 3/9], [2/3 = 6/9, 7/9] et [8/9, 1 = 9/9]. On construit ainsi par r´ ecurrence K
nqui est r´ eunion de 2
nsegments disjoints, chacun de longueur 1
3
n, et on passe `a K
n+1en retirant ` a chacun des segments constitutifs de K
nun intervalle ouvert central de largeur 1/3
n+1.
0.1 D´ efinition. L’ensemble K = \
n∈N
K
nest appel´ e ensemble triadique de Cantor.
Le lemme suivant explicite les segments qui composent K
n:
0.2 Lemme. Soit n un entier ≥ 1. L’ensemble K
nest r´ eunion des 2
nseg- ments I
qn=
q
n3
n, q
n+ 1 3
no` u q
nest un entier de la forme : q
n=
n
X
i=1
a
i3
n−i(autrement dit, q
n= a
1. . . a
n−1a
nen base 3), avec a
i= 0 ou a
i= 2.
Pr´ ecis´ ement, si I
qn+1est un segment de K
n+1, contenu dans I
qn, q
n+1est obtenu ` a partir de q
nen ajoutant ` a droite de son ´ ecriture en base 3 un chiffre des unit´ es ´ egal ` a 0 ou 2.
D´ emonstration du lemme. On raisonne par r´ ecurrence sur n. Pour n = 1, on a K
1= [0, 1/3]∪[2/3, 1] et la propri´ et´ e est v´ erifi´ ee. Supposons qu’elle le soit au cran n et passons ` a n+1. On enl` eve donc le tiers central de chaque segment q
n3
n, q
n+ 1 3
n. Pour cela on ´ ecrit ce segment sous la forme 3q
n3
n+1, 3q
n+ 3 3
n+1et il reste les deux segments 3q
n3
n+1, 3q
n+ 1 3
n+1et
3q
n+ 2
3
n+1, 3q
n+ 3 3
n+1. Si on
´
ecrit q
n= a
1. . . a
n−1a
nen base 3, on a 3q
n= a
1. . . a
n−1a
n0 et 3q
n+ 2 = a
1. . . a
n−1a
n2, c’est-` a-dire la forme annonc´ ee pour q
n+1.
On peut maintenant d´ ecrire K
net K :
1
0.3 Proposition.
1) La somme des longueurs des segments constitutifs de K
nest 2
3
n. Cette quantit´ e est positive (de sorte que K
nest non vide) et a pour limite 0 quand n tend vers l’infini.
2) L’ensemble K est compact, non vide, contenu dans [0, 1], d’int´ erieur vide (ce qui, dans le cas d’une partie de R, ´ equivaut ` a totalement discontinu).
D´ emonstration. Le point 1) est clair. Il est clair aussi que K
nest compact (ferm´ e born´ e). Il est non vide car il contient 0 et 1. Montrons qu’il ne contient pas d’intervalle non r´ eduit ` a un point. Si K contenait un intervalle de largeur > 0, cet intervalle serait contenu dans K
n, donc dans l’un des segments qui le constituent et sont ses composantes connexes. Or, la longueur des intervalles constitutifs de K
ntend vers 0 avec n et elle est < pour n assez grand.
0.4 Th´ eor` eme. Tout ´ el´ ement x de K s’´ ecrit de mani` ere unique sous la forme (dite triadique) :
(∗) x =
∞
X
i=1
a
i3
io` u les a
isont ´ egaux ` a 0 ou 2. R´ eciproquement, tout nombre de cette forme est dans K. On note (par analogie avec les ´ ecritures d´ ecimales illimit´ ees) :
x = 0, a
1a
2. . . a
n. . .
D´ emonstration. Montrons d’abord l’unicit´ e de l’´ ecriture. Supposons que x admette deux ´ ecritures x =
∞
X
i=1
a
i3
iet x =
∞
X
i=1
b
i3
iavec les a
iet les b
i´ egaux ` a 0 ou 2. Soit n le plus petit entier tel que a
n6= b
net supposons, par exemple, a
n= 0 et b
n= 2. On a alors d’une part, avec l’´ ecriture en a
i:
x ≤
n−1
X
i=1
a
i3
i+ 0
3
n+
∞
X
k=n+1
2 3
k=
n−1
X
i=1
a
i3
i+ 1
3
net d’autre part, avec l’´ ecriture en b
i:
x ≥
n−1
X
i=1
a
i3
i+ 2 3
net c’est absurde.
2
Montrons ensuite que les nombres x de la forme (∗) sont dans K. En effet, si on a x =
∞
X
i=1
a
i3
iavec des a
i´ egaux ` a 0 ou 2, et si on pose q
n=
n
X
i=1
a
i3
n−i, on a l’encadrement : q
n3
n≤ x ≤ q
n+ 1
3
n(car on a
∞
X
i=n+1
2 3
i= 1
3
n) ce qui montre que x est dans K
nen vertu du lemme 0.2. Comme cela vaut pour tout n, x est bien dans K.
Montrons enfin que, si x est dans K, il s’´ ecrit sous la forme (∗). Pour n ∈ N
∗, on consid` ere le segment I
qnde K
nqui contient x, et sa borne inf´ erieure x
n= q
n3
n. On a |x − x
n| ≤ 1
3
n, ce qui montre que la suite x
nconverge vers x. Appelons a
nle chiffre des unit´ es de q
nen base 3. On sait que ce chiffre est ´ egal ` a 0 ou 2 en vertu de 0.2 et on montre par r´ ecurrence sur n qu’on a q
n= a
1. . . a
n. En effet, le passage de q
n` a q
n+1r´ esulte du lemme 0.2. Le nombre x est donc limite de la suite x
n=
n
X
i=1
a
i3
i, c’est-`a-dire la somme de la s´ erie
∞
X
i=1