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Enseigner la transformation de Fourier : une approche innovante

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Academic year: 2021

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Enseigner la transformation de Fourier : une approche innovante

Eddie Smigiel, Guillaume Chevereau

To cite this version:

Eddie Smigiel, Guillaume Chevereau. Enseigner la transformation de Fourier : une approche inno-

vante. 13ème édition du Colloque de l’Enseignement des Technologies et des Sciences de l’information

et des Systèmes CETSIS 2018, Oct 2018, Fès, Maroc. �hal-02953282�

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Enseigner la transformation de Fourier : une approche innovante

Eddie Smigiel

eddie.smigiel@insa-strasbourg.fr

AHP-PReST UMR 7117 / Université de Strasbourg INSA de Strasbourg

24, Bd de la Victoire 67084 Strasbourg Cedex France

Guillaume Chevereau

Icube UMR 7357 / INSA de Strasbourg 24, Bd de la Victoire

67084 Strasbourg Cedex France

RESUME : Dans le cadre de l’enseignement de la transformée de Fourier dans le supérieur, nous mettons en lumière le concept d’obstacle historique à l’apprentissage. La science et les technologies évoluent. La didactique d’un temps peut s’avérer datée et se révéler aujourd’hui un obstacle qui repose sur la reproduction tacite. Nous montrons que l’évolution de la technologie — les signaux sont passés d’analogiques (continus) à systématiquement numériques (discrets) aujourd’hui — suggère une simplification didactique sensible. Un signal discret est formalisé par un vecteur de tandis qu’un signal analogique est représenté par un vecteur de , mathématiquement bien plus subtil. Quand la transformation de Fourier est introduite comme changement de base, elle prend une signification géométrique que les étudiants s’approprient relativement aisément. En dépit de la simplification que favorise la technologie, le traitement du signal continue à être enseigné majoritairement selon sa nature analogique. La communauté des enseignants gagnerait à revisiter de façon critique ses méthodes pour profiter d’une didactique adaptée à son époque.

Mots clés : transformation de Fourier, changement de base, représentation vectorielle du signal, obstacle didactique.

1 INTRODUCTION

La transformation de Fourier figure au syllabus de très nombreux étudiants de sciences ou de sciences de l’ingénieur. Le concept est néanmoins réputé difficile parce que enraciné dans un formalisme mathématique intrinsèquement délicat. La transformation de Fourier est un outil théorique complet lorsqu’il est associé à la théorie des distributions qui n’a été achevée proprement sur un plan mathématique qu’en 1950 par Laurent Schwartz, ce qui lui a valu la médaille Fields.

Pour de tels concepts, intrinsèquement difficiles, il revient à l’enseignant la responsabilité de réfléchir à la meilleure voie d’accès qui donnera aux étudiants les meilleures chances de s’approprier cet outil. Toutefois, il est tentant pour un enseignant d’opter pour la méthode que ses professeurs lui ont montrée lorsqu’il était lui-même étudiant, ne serait-ce que parce qu’un jeune enseignant a un temps limité à consacrer à ses préparations. Ainsi, un enseignant est souvent conservateur par nécessité. Cependant, les technologies évoluent et la pertinence didactique d’une époque n’est plus nécessairement la même aujourd’hui. Sur un plan historique, la théorie du traitement du signal a explosée dans les années vingt du siècle dernier, a connu une accélération pendant la seconde guerre mondiale, tirée notamment par l’effort de guerre et le développement du radar et a atteint un haut niveau de maturité à la fin des années quarante notamment avec les travaux de Claude Shannon. Pendant cette époque, le support physique du signal était analogique, et donc considéré comme continu et les traitements étaient réalisés par

des circuits électroniques analogiques, essentiellement à tubes. Puis, la période de l’après-guerre a vu apparaître les techniques numériques avec l’apparition des premiers processeurs. La croissance du numérique ne s’est plus interrompue tant et si bien qu’aujourd’hui, les signaux sont souvent numériques natifs. Une date pivot est probablement 1965 où Cooley et Tukey inventent le fameux algorithme de transformée de Fourier rapide bien connu sous l’appellation FFT.

Dans cet article, nous analysons les approches modernes de la transformée de Fourier et constatons qu’elles sont restées très classiques au point qu’on peut les considérer comme datées. Nous argumentons en faveur d’une approche intrinsèquement physique des signaux, plutôt que de commencer par une approche mathématique qui ensuite trouve une application physique.

Nous présentons par conséquent une approche innovante où la transformée de Fourier est présentée directement dans sa forme discrète en tant que changement de base, ce qui permet aux étudiants d’évoluer dans le contexte familier de la géométrie euclidienne.

Puis, nous présentons des arguments qui plaident pour

une véritable valeur ajoutée à cette approche et enfin,

nous présentons deux ressources numériques

pédagogiques qui exploitent l’approche géométrique.

(3)

2 DIDACTIQUE CLASSIQUE DE LA TRANSFORMEE DE FOURIER

Au vu du corpus gigantesque, il est difficile de faire l’étude exhaustive de toute la littérature francophone et anglophone qui traite de la transformée de Fourier à l’usage des étudiants. Les auteurs ont privilégié quelques sources qui sont soit des ouvrages qui figurent en référence unique ou principale des syllabus, soit des polycopiés disponibles librement sur Internet ou des ouvrages classiques, unanimement reconnus.

Les auteurs ont privilégié les sources citées dans des établissements dont la réputation ne souffre pas ou peu de contestation. On pourra objecter que le choix des établissements est arbitraire. C’est vrai.

De façon générale, on constate que l’analyse de Fourier est systématiquement abordée par les signaux continus, soit par la décomposition en séries de Fourier puis l’intégrale de Fourier ou l’inverse.

La transformée de Fourier discrète est généralement présentée ensuite, un peu comme un mal nécessaire, en tant qu’approximation numérique de l’intégrale de Fourier.

La table qui suit montre en première colonne, les établissements dans lesquels on a trouvé les références, en dernière colonne l’ordre de présentation des concepts (DSF pour décomposition en série de Fourier, IF pour intégrale de Fourier et TFD pour transformée de Fourier discrète), en deuxième colonne le numéro de référence (ouvrage ou polycopié) qu’on trouvera dans la partie « Bibliographie ». On trouve ces textes en version PDF sur Internet.

Etablissemen t

Référence du texte

Référe nce du cours

Ordre de présentation Stanford

University

James [2] EE261 DSF, IF et TFD Berkeley

University

Lee, Varaiya [3]

EECS2 0N

DSF, TFD et IF

MIT Oppenheim

[4]

6.003 DSF, IF et TFD Princeton

University

Oppenheim [4]

ELE 301

DSF, IF et TFD Caltech Oppenheim

[4]

EE111 DSF, IF et TFD Ecole

Polytechniqu e/ENS Ulm

Mallat [5] MAP 555

IF, DSF et TFD Ecole des

Mines de Paris

Di Meglio, Chaplais [6]

S1314 IF, DSF, TFD Table 1 : synthèse des approches didactiques de l’analyse de Fourier pour quelques établissements réputés.

Dans les lignes qui suivent, nous nous intéressons à une référence particulière et étudions comment la notion de transformée de Fourier y est amenée. Cette référence est représentative de ce que l’on trouve généralement dans la littérature.

Dans [7], bien que l’ouvrage, relativement récent (la 9

ème

édition est datée de 2012), porte sur le traitement numérique du signal, le premier chapitre s’intitule « La numérisation du signal. Echantillonnage et codage » montrant par là le lien supposé indéfectible avec le signal analogique. On peut comprendre dans la mesure où notre lien au monde passe par les cinq sens dont le traitement est analogique et semble continu. Le terme de « discrétisation » d’un signal physique est en lui- même un non-sens. N’importe quel signal est issu d’un capteur et relève d’une mesure physique. Les mesures de ce capteur sont nécessairement entachées d’une incertitude, et cela n’a donc pas de sens de parler de signal continu, qui requerrait une précision infinie.

Par exemple, pour un signal temporel , pour que soit continu, il faudrait que quelque soit , on soit capable de distinguer de (pour pouvoir assigner les valeurs et ). Cela nécessite d’avoir un chronomètre sans incertitude de mesure, ce qui n’existe pas. Si est très inférieur au temps caractéristique du phénomène considéré, le concept de signal analogique prend du sens, mais il ne faut pas perdre de vue, qu'il s'agit d'une approximation.

Un signal physique est donc par nature discret, et c’est par un acte de foi que l’on s’autorise à penser que l’on peut étendre des signaux discrets à des signaux continus. Le cheminement pertinent au sens physique du terme est donc de discret vers continu et pas l’inverse. Par ailleurs, les images, par exemple, sont numériques natives. Il ne tombe plus sous le sens comme autrefois que le tout premier contact avec le signal doive mentionner son caractère analogique. Quoi qu’il en soit, le chapitre 1 est structuré comme suit : le paragraphe 1.1 intitulé « Analyse de Fourier » présente en premier lieu la décomposition de série de Fourier d’une fonction périodique (§ 1.1.1) puis la transformation de Fourier d’une fonction (§1.1.2) définie par l’intégrale de Fourier. Les liens entre décomposition en série et intégrale de Fourier sont explicités. Selon les propres termes de l’ouvrage,

« Après un certain nombre de rappels sur l’analyse de Fourier, les distributions et la représentation des signaux, le chapitre premier rassemble les résultats les plus importants et les plus utiles sur l’échantillonnage et le codage d’un signal. »

Le chapitre 2 intitulé « La transformation de Fourier discrète » est entièrement consacrée à la transformée discrète.

Juste avant le paragraphe 2.1, figure une introduction au chapitre d’environ une page et demi. Nous en citons quelques extraits pour comprendre la dynamique didactique qui consiste ici en l’articulation entre intégrale de Fourier et transformée discrète, plutôt présentée comme mal nécessaire.

« La transformation de Fourier Discrète s’introduit

quand il s’agit de calculer la transformée de Fourier

d’une fonction à l’aide d’un calculateur numérique. En

effet un tel opérateur ne peut traiter que des nombres

et de plus en quantité limitée par la taille de sa

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mémoire. Il s’en suit que la transformée de Fourier :

doit être adaptée, d’une part en remplaçant le signal par des nombres qui représentent un échantillonnage de ce signal et d’autre part en limitant l’ensemble des nombres sur lesquels portent les calculs à une valeur finie N. Le calcul fournit alors des nombres définis par :

Comme le calculateur est limité dans sa puissance de calcul, il ne peut fournir ces résultats que pour un nombre limité de valeurs de la fréquence f , qu’il est naturel de choisir multiples d’un certain pas de fréquence Δf . Alors :

Les conditions dans lesquelles les valeurs calculées constituent une bonne approximation des valeurs recherchées sont étudiées par la suite. »

On remarquera quelques expressions comme notamment « doit être adaptée » ou « constituent une bonne approximation » qui explicitent le statut inférieur de la TFD par rapport à la « pureté » ou la

« vérité » de la transformée intégrale de Fourier. Cette approche est assez générale et elle vaut aussi pour la plupart des références de la table 1. Cet exemple reflète le fait que beaucoup de manuels conçoivent d’abord l’outil mathématique avant de l’appliquer au traitement du signal, et doivent ce faisant adapter cet outil. Nous argumentons que l’outil mathématique doit être conçu comme allant de pair avec le traitement du signal, sans relation de hiérarchie.

3 APPROCHE INNOVANTE

Aujourd’hui, le premier contact d’un étudiant avec la transformée de Fourier au sens large, sera probablement une TFD et plus précisément une FFT par l’intermédiaire de Matlab ou ses équivalents ou encore par l’intermédiaire du module FFT d’un oscilloscope moderne. Par ailleurs, l’approche pose aussi un problème en terme de didactique. La théorie de l’intégrale de Fourier est difficile dans la mesure où elle est en prise avec les fonctions de , en général, qui est un espace vectoriel de dimension infinie au sens de l’infini dense des réels, ce qui est assez subtil sur un plan mathématique. Lorsqu’on veut traiter de l’intégrale de Fourier proprement, il convient de distinguer la transformée de Fourier des fonctions ordinaires de la transformée des distributions dont on rappelle que la théorie mathématique rigoureuse est relativement récente. Par ailleurs, on est amené à définir et utiliser l’impulsion de Dirac qui décontenance les étudiants pour ses propriétés si particulières.

3.1 La Transformée de Fourier comme changement de repère

Un signal réel échantillonné sur une durée finie est mathématiquement un vecteur de noté :

(sous forme de vecteur ligne transposé par souci de mise en page),

et qu’on peut écrire comme combinaison linéaire de N vecteurs de la base dite canonique :

(1)

avec , … et

. Notons qu’en toute rigueur, il faudrait d’ailleurs préciser la base dans laquelle on exprime un vecteur lorsque l’on utilise la notation entre parenthèse :

De façon générale, a toutes ses composantes nulles sauf la n-ème qui vaut 1. Les vecteurs de cette base canonique, extension à la dimension N des classiques , et , peuvent être rendus continus pour donner les impulsions de Dirac , impulsion centrée en , qu’on peut voir comme étant les vecteurs de la base canonique de .

A ce stade de progression du cours, il est important de rappeler quelques éléments très classiques de la géométrie dans parce qu’il importe de montrer aux étudiants en quoi le concept nouveau est ancré dans des éléments de culture classique que l’étudiant est censé maîtriser. On lui donne ainsi toutes les chances de prévenir un décrochage précoce qui serait lié à la peur de la nouveauté. Nous faisons ces quelques rappels pour convaincre le lecteur à quel point la TFD devient intelligible si on fait l’effort de faire le lien avec la géométrie classique.

Un vecteur de muni d’un repère , , ) s’écrit :

A ce stade de leurs études, les étudiants ont compris le concept de vecteur intrinsèque, c’est-à-dire qui a une existence propre indépendamment de ses coordonnées dans un repère qui n’est jamais qu’une représentation possible parmi une infinité. On peut donc aisément leur montrer que ce même vecteur intrinsèque peut s’écrire dans une autre base , , ) :

avec :

On en vient à présent à la TFD présentée comme

changement de repère. L’équation (1) représente le

vecteur intrinsèque x comme combinaison linéaire de la

base canonique. Cette base canonique est généralement

appelé espace direct ou espace temporel. Il n’y a pas de

(5)

raison que ce soit la seule représentation possible du vecteur intrinsèque.

L’idée de la TFD consiste à écrire le vecteur intrinsèque dans une autre base, dite réciproque ou fréquentielle celle-là, et les nouvelles composantes au nombre de N sont calculées par autant de produits scalaires ou projections entre le vecteur intrinsèque

et les vecteurs de la nouvelle base exprimés moyennant leurs composantes dans l’ancienne base.

Dans la définition de la TFD, les vecteurs de la nouvelle base sont obtenus par échantillonnage régulier à N composantes des exponentielles complexes. Il vient que les composantes de ces vecteurs de base s’écrivent, dans la base canonique :

Il importe de bien comprendre que l’indice n est relatif aux N nouveaux vecteurs de la nouvelle base. En tant que tel, n varie de 0 à N-1, puisque pour construire une base, il nous faut au moins autant de vecteur que la taille de l’espace. Notons que si la base des exponentielles complexes est bien orthogonale, elle n’est pas normée, ce qui pose pas mal de soucis par la suite.

Pour déterminer les N nouvelles composantes du vecteur intrinsèque dans la nouvelle base, il convient donc de calculer autant de produits scalaires ou de façon équivalente, de projeter le vecteur intrinsèque sur les vecteurs de la nouvelle base. Il faut préciser ici que les vecteurs de cette nouvelle base sont à composantes complexes. Le vecteur correspondant au signal est généralement réel, au moins à ce niveau d’un cours d’introduction au signal. En revanche, le caractère complexe des seconds opérandes des produits scalaires conduit à modifier la définition même du produit scalaire que les étudiants ont rencontré dans le cadre plus strict de la géométrie dans . On accepte aisément que dans , le produit scalaire s’écrit :

de manière à ce que la norme d’un vecteur soit égal à la

racine carrée du produit scalaire de ce vecteur avec lui- même. On a ainsi défini, soit dit en passant, le concept d’espace de Hilbert.

Nous sommes maintenant prêts à écrire la formule générique la TFD. Si on note , la n-ième composante du vecteur intrinsèque exprimé dans la nouvelle base fréquentielle, alors :

qu’il faut bien comprendre comme produit scalaire du

vecteur intrinsèque exprimé dans la base canonique et les exponentielles complexes elles aussi exprimées dans la base canonique. On note que le signe négatif dans l’exponentielle est lié à la nouvelle définition du produit scalaire dans .

Un changement de base est réversible. Ainsi la TFD admet une transformée inverse, qui n’est rien d’autre que le produit scalaire entre le vecteur intrinsèque exprimé dans la base de Fourier et le n-ième vecteur de base canonique, lui aussi exprimé dans la base de Fourier. On se contente ici de donner la formule :

Nous concluons cette partie déjà bien longue par quelques remarques, dont la liste est loin d’être exhaustive tant le sujet est riche et subtil.

Les formules de TFD et TFD inverse admettent des variantes selon les auteurs. En particulier le rapport de la TFD inverse peut être déplacé dans la TFD directe voire même figurer dans les deux transformées, directe et inverse sous forme de rapport

. Ces variantes sont liées au fait que les exponentielles complexes, les vecteurs de la nouvelle base fréquentielle ou réciproque, sont orthogonaux deux à deux mais pas normés. La normalisation des formules peut être faite dans l’opération directe ou inverse voire les deux, d’où les variantes. Notons que les deux formules données ici correspondent à la définition de la fonction Matlab fft.

Sur un plan linguistique, le terme « transformation » peut laisser à penser que l’opération conduit à un changement de nature profond du vecteur traité tout comme quand une molécule se transforme (un glucide, en alcool, par exemple), il y a modification profonde de la nature chimique de la molécule. Dans la transformation de Fourier, il n’y a rien de tel. La transformation porte uniquement sur la représentation mais pas sur la nature intrinsèque du vecteur traité. Le terme « transformation » peut-être mal interprété s’il n’est pas suffisamment expliqué.

Toujours sur le plan de la terminologie, on lit assez couramment que la transformation de Fourier est un endomorphisme ou automorphisme de l’espace vectoriel envisagé, ici . Les auteurs sont convaincus que sur un plan pédagogique parler de changement de repère ou de changement de base simplifierait l’approche du sujet.

On peut synthétiser le calcul des N produits scalaires par une équation matricielle :

W est la matrice de Fourier Vandermonde qui est

une matrice carrée d’ordre N dont le terme générique

est

. L’indice n correspond alors à l’indice de

ligne, le rang du vecteur de la nouvelle base tandis que

k est l’indice de colonne qui correspond à la k-ième

composante d’un vecteur particulier de la nouvelle base

exprimé dans l’ancienne. La première ligne correspond

à n=0 et est par conséquent composée uniquement de 1

tout comme la première colonne qui correspond à k=0.

(6)

3.2 Valeur ajoutée didactique de l’approche Enseigner par l’intermédiaire d’analogies a été un sujet de recherche très actif dans les sciences de l’éducation.

Les recherches montrent que les analogies peuvent être très efficaces à condition que quelques conditions soient remplies sans quoi elles peuvent mener à des confusions voire des contresens. Harrison et Treagust [1] ont montré que l’analogie doit être basée sur une proximité avec un concept familier aux étudiants, que les attributs partagés soient bien identifiés et discutés tout comme les attributs non partagés pour bien identifier les limites de l’analogie.

Dans notre cas de figure, l’articulation entre géométrie et transformation de Fourier va au-delà de l’analogie dans la mesure où il y a une authentique réalité géométrique à la transformée de Fourier. On peut néanmoins se livrer à l’exercice qui consiste à montrer en quoi le nouveau concept — la transformée de Fourier — prolonge les connaissances des étudiants en matière de géométrie qu’ils sont censés maîtriser.

L’extension de la dimension 3 à N ne devrait pas poser de problème particulier. Concrètement, cela revient à étendre les sommes discrètes. La modification de la définition du produit scalaire à ne devrait pas poser de difficulté à des étudiants qui maîtrisent raisonnablement les nombres complexes. Le concept de produit scalaire comme projection est aussi à ce stade de leurs études bien assimilé.

Nous en venons aux deux attributs non partagés sur lesquels il faut insister pour réussir l’opération. En premier lieu, la nature physique du signal versus la géométrie classique dans demande une certaine capacité d’abstraction. L’espace des signaux réels correspond à des vecteurs dont les composantes ne sont pas des positions ou longueurs en mètres. Les auteurs ont souvent constaté au cours de leurs années d’enseignement que lorsqu’on parle de distance dans ce type d’espace, les étudiants ont tendance à comprendre le terme « distance » comme nécessairement une longueur en mètre ce qui résulte d’un phénomène quasiment de sur-apprentissage. Dans une certaine mesure, il faut combiner désapprentissage et abstraction pour que les étudiants traversent le plafond de leurs connaissances installées et entrent dans une perception supérieure et généralisée des concepts qu’ils maîtrisent. C’est à ce prix qu’ils peuvent ensuite replacer leurs connaissances antérieures dans un univers devenu plus vaste.

En second lieu, se pose la question de la signification physique des exponentielles complexes qui définissent la nouvelle base de représentation. Il faut ici demander aux étudiants une certaine patience. Dans la suite du cours, lorsqu’on aura introduit le produit de convolution des systèmes causaux, linéaires et invariants, on pourra leur montrer que ces exponentielles complexes sont les vecteurs propres du système. Au stade plus précoce où on introduit la transformée de Fourier comme changement de repère,

on pourra se contenter de dire que derrière les exponentielles complexes, il y a les fonctions trigonométriques dont ils ont déjà perçu l’importance notamment en analyse harmonique, par exemple en électrocinétique et plus particulièrement les régimes sinusoïdaux.

Si on a réussi à dépasser ces attributs non partagés, on peut alors récolter les fruits de cette approche didactique à plusieurs niveaux.

En terme purement intellectuel, les étudiants travaillent dans un contexte qu’ils maîtrisent relativement bien, la géométrie quand bien même elle est généralisée à la dimension N. La transformée de Fourier a acquis une signification qui prolonge un concept dont ils sont familiers, le changement de repère. Le nouveau concept est ancré dans une signification qu’ils comprennent. Les formules ne tombent plus du ciel, ils peuvent les reconstruire. Le signe négatif dans les exponentielles de la transformée directe correspond à la conjugaison du second opérande dans la définition du produit scalaire et cette définition est argumentée par la nécessité de définir la norme d’un vecteur par l’intermédiaire du produit scalaire de ce vecteur avec lui-même. Il n’y a plus besoin d’apprendre « par cœur » si le signe négatif est dans la transformée directe ou inverse. Le théorème de Parseval est trivial puisqu’il revient à dire que la valeur d’un produit scalaire est invariante par changement de base.

Sur un plan pratique, la transformée de Fourier peut être calculée « à la main » pour de petites dimensions (N=4, par exemple). On peut également leur faire calculer une transformée de Fourier pour une dimension un peu supérieure (N=16, par exemple) par l’intermédiaire de la matrice de Fourier Vandermonde qu’on leur demandera de construire avec Matlab ou équivalent. Puis, on leur fera constater que le résultat est identique à l’application de la fonction Matlab fft qu’on aura ainsi démystifiée. Cette capacité à expérimenter par Matlab au plus près de la définition abstraite permet de combiner avec efficacité des temps purement intellectuels à des temps de pratique personnelle active.

On peut considérer qu’en quelques heures de cours et

quelques heures de Travaux Pratiques, les étudiants

auront eu une introduction à la transformée de Fourier

qui devrait déminer quelque peu le concept plus ardu

d’intégrale de Fourier des signaux de . Il sort du

cadre de cet article de discuter de la didactique de

l’intégrale de Fourier. On se contentera de dire que

dans le cadre de la géométrie hilbertienne, l’intégrale

de Fourier est aussi la projection du signal cette fois

continu sur les exponentielles complexes, également

nouvelle base de dimension infinie. Le passage de la

TFD à l’intégrale de Fourier permet d’assurer une

certaine continuité depuis le classique (géométrie dans

) vers le concept nouveau (géométrie dans ) tandis

que le déroulé chronologique (d’abord l’intégrale de

Fourier puis a TFD) semble moins naturel.

(7)

Les auteurs pensent que l’ordre historique est, en l’occurrence, un obstacle didactique qu’il est temps de lever. Les auteurs pensent que la justification de la pertinence de l’approche géométrique est intrinsèque, basée sur des considérations épistémologiques. Dans la mesure où la TFD est intimement associé à l’infini des entiers et l’intégrale de Fourier, à l’infini dense des réels, commencer par l’intégrale de Fourier reviendrait en quelque sorte à enseigner les nombres réels avant même d’avoir enseigné les nombres entiers.

Sur l’ensemble du corpus immédiatement accessible sur Internet, les auteurs n’ont trouvé qu’une seule référence qui présente la TFD comme changement de base ou de repère [8].

3.3 Ressources numériques

Les auteurs ont produit deux ressources numériques, [9] et [10], utilisées en présentiel avec leurs étudiants respectifs. La ressource Unisciel [1], ne compte pas sa fréquentation, tandis que la ressource hébergée sur Openclassrooms [10], affiche quelques centaines d’utilisateurs. La ressource Unisciel intitulée

« Traitement du signal » commence par cinq chapitres orientés électronique (amplificateur opérationnel, filtres passifs et actifs, codage binaire et convertisseurs numérique analogique et analogique numérique) qui sortent du cadre de cet article. Dans la partie « Signal » au sens où nous l’entendons dans cet article, l’étudiant rencontre tous les concepts classiques, y compris la distribution de Dirac. L’originalité ou approche innovante réside dans l’ordre de présentation qui renonce à l’ordre historique. Les auteurs ne prétendent pas qu’il faille renoncer à l’intégrale de Fourier mais plutôt qu’il convient de revisiter la didactique de cette discipline. La ressource combine éléments théoriques et screencasts d’exemples réalisés sous Scilab. Du chapitre 6 au chapitre 9, tous les travaux pratiques sont réalisés en version discrète avec Scilab. Ainsi, l’étudiant découvre des concepts, leur formalisation mathématique et les manipule de manière active, sous environnement Scilab ou équivalent.

La ressource disponible sur OpenClassrooms propose en une trentaine heure de travail étudiant une première approche des concepts d’analyse fréquentielle, de convolution et d’intercorrelation.

Lors des trois premières parties qui portent sur la transformée de Fourier, une attention toute particulière a été donnée à la cohérence des notations employée. En particulier, un symbole différent est utilisé pour représenter le vecteur intrinsèque de de sa représentation dans la base canonique ou bien fréquentielle.

L’essentiel du travail proposé aux apprenants se fait sous la forme de tutoriels Matlab. Ces tutoriels illustrent d’abord l’intérêt de la représentation vectorielle d’un signal pour en tirer des quantités pertinentes (valeur moyenne, valeur efficace, distance).

Ensuite ils permettent une découverte progressive de la notion de projection et de changement de base pour terminer au final sur la représentation fréquentielle complète d’un signal. La suite du cours porte sur la notion de convolution et d’intercorrélation, mais sans aller très loin dans la description de ces outils.

En plus des tutoriels, le cours propose des screencasts, des contenus textuels et quelques vidéos d’introduction à chaque chapitre.

4 CONCLUSION

Cet article met en évidence qu’une approche historique d’un sujet délicat peut se révéler contre-productive sur le plan didactique. C’est sans doute le cas d’autres concepts scientifiques enseignés selon des voies classiques. Il n’est pas outrancier de parler d’obstacle historique. Il n’est pas question de mépriser l’histoire de la science et de la recherche. Au contraire, c’est par la réflexion critique sur la filiation historique des concepts que chaque époque doit réinventer sa didactique.

Bibliographie

[1] Harrison, A. G., & Treagust, D. F. (1993). Teaching with analogies: A case study in grade-10 optics. Journal of Research in Science Teaching, 30(10), 1291-1307.

[2] James, J. F. (2011). A Student's Guide to Fourier Transforms: With Applications in Physics and Engineering. 3rd edition, Cambridge University Press, 2011.

[3] Lee, E. A., & Varaiya, P. (2002). Structure and Interpretation of Signals & Systems, Addison Wesley, 2002.

[4] Oppenheim, A. V. & Willsky, A. S. (1996). Signals and Systems. Prentice Hall, 1996.

[5] Mallat, S. (non daté). Traitement du Signal. Polycopié de l’Ecole Polytechnique.

www.di.ens.fr/~mallat/papiers/Spoly.pdf

[6] Di Meglio, F. & Chaplais, F. (non daté). Introduction au Traitement du Signal. Polycopié de Mines, ParisTech.

https://sgs.minesparistech.fr/prod/file/sgs/ensmp/201720 18/tmp/Poly_TraitS.pdf

[7] Bellanger, M. (2012). Traitement Numérique du Signal ; Théorie et Pratique. 9

ème

édition, Dunod, 2012.

[8] Croquette, V. (2017). La Transformée de Fourier Discrète. Polycopié de l’ESCPI.

http://pimprenelle.lps.ens.fr/biolps/sites/default/files/teac hing/4/C2.pdf

[9] Smigiel, E. (2014). Traitement du Signal. MOOC, Unisciel, 2014.

http://ressources.unisciel.fr/TraitementDuSignal/

[10] Chevereau, G. (2018). Analysez les signaux 1D.

MOOC, Openclassrooms, 2018.

https://openclassrooms.com/courses/analysez-les-

signaux-1d

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