Chapitre 19
Intégration sur un segment
Dans tout ce chapitre, sauf mention contraire, a, b désignent deux réels tels que a < b etI un intervalle deRcontenant au moins deux points.
I - Construction de l'intégrale I.1 - Continuité uniforme
Définition 1 (Continuité uniforme).
La fonction f est uniformément continue sur I si
∀ ε >0,∃ η >0 ; ∀x, y ∈I, (|x−y|6η ⇒ |f(x)−f(y)|6ε).
Exercice 1.Les fonctionsf : [0,1]→R, x7→√
x,g : R+→R, x7→x2eth : R+→R, x7→ex sont-elles uniformément continues ?
Propriété 1 (Uniforme continuité & Continuité).
Toute fonction uniformément continue sur un intervalle I est continue surI. Exercice 2.Montrer que la réciproque est fausse.
Propriété 2 (Lipschitzien & u.c.)
Toute fonction lipschitzienne sur I est uniformément continue surI. Exercice 3.Montrer que la réciproque est fausse.
Théorème 1 (Théorème de Heine).
Toute fonction continue sur un segment est uniformément continue sur ce segment.
I.2 - Fonctions continues par morceaux Définition 2 (Subdivision).
Une subdivision du segment [a, b] est une suite nie (x0, . . . , xn), où n ∈ N?, telle que a=x0 < x1 <· · ·< xn=b. Le pas de la subdivision est le réel max
i∈J1,nK
(xi−xi−1).
Exercice 4.La subdivision est régulière si la quantitéxi−xi−1est constante. Déterminer la valeur de xi en fonction de i, a, betn.
Définition 3 (Fonction en escalier).
Soit ϕ ∈ F([a, b],R). La fonction ϕ est une fonction en escalier s'il existe une subdivision π = (xi)i∈
J0,nK de l'intervalle [a, b]telle que pour tout i∈J0, n−1K,ϕ|]xi,xi+1[ soit constante.
La subdivisionπ est compatible avec (ou adaptée à)ϕ. L'ensemble des fonctions en escalier de [a, b]dansRest notéEsc([a, b],R).
Exercice 5.Montrer qu'une fonction en escalier sur[a, b]est bornée sur son intervalle de dénition.
Théorème 2 (Structure).
L'ensemble des fonctions en escalier est une sous-algèbre de l'ensemble des fonctions de [a, b]
Définition 4 (Continuité par morceaux).
Soit f ∈F([a, b],R). La fonction f est continue par morceaux sur[a, b]si
(i). il existe une subdivision π = (xi)i∈J0,nK de [a, b] telle que pour tout i ∈ J0, n−1K, f|]xi,xi+1[ soit continue,
(ii). f admet des limites à droite et à gauche en tout point de [a, b].
C−([a, b],R)est l'ensemble des fonctions continues par morceaux sur l'intervalle[a, b]à valeurs réelles.
Exercice 6.Montrer que toute fonction continue par morceaux est bornée. Ses bornes sont-elles nécessairement atteintes ?
Théorème 3 (Structure).
L'ensemble des fonctions continues par morceaux sur [a, b]est une sous-algèbre de l'ensemble des fonctions de[a, b]dansR.
Théorème 4 (Approximation).
Soientf ∈C−([a, b],R)etε >0. Il existe deux fonctions en escalierϕ, ψ telles queϕ6f 6ψ et06ψ−ϕ6ε.
II - Intégrale d'une fonction continue par morceaux II.1 - Intégrale d'une fonction en escalier
Définition 5 (Intégrale des fonctions en escalier).
Soitϕune fonction en escalier sur l'intervalle[a, b]et(xi)i∈J0,nKune subdivision adaptée. Pour tout i ∈ J1, nK, on note ϕ|]xi−1,xi[ = ϕi. La quantité Pn
i=1
(xi −xi−1)ϕi ne dépend pas de la subdivision choisie. C'est l'intégrale deϕ, notée
Z
[a,b]
ϕ.
Exercice 7.Déterminer l'intégrale des fonctions constantes.
Propriétés 3 (Propriétés élémentaires). Soientϕ, ψ ∈Esc([a, b]).
(i). Linéarité.L'application I : Esc([a, b])→R, ϕ7→
Z
[a,b]
ϕest linéaire.
(ii). Croissance. Si pour toutx∈[a, b],ϕ(x)6ψ(x), alors I(ϕ)6I(ψ). (iii). Inégalité triangulaire. |I(ϕ)|6I(|ϕ|).
(iv). Relation de Chasles. Soitc∈]a, b[.Z
[a,b]
ϕ= Z
[a,c]
ϕ+ Z
[c,b]
ϕ.
II.2 - Intégrale des fonctions continues par morceaux Définition 6 (Intégrale des fonctions continues par morceaux).
Soit f ∈C−([a, b]). Notons
I+(f) = (Z
[a,b]
ψ ; ψ∈Esc([a, b]), f 6ψ )
I−(f) = (Z
[a,b]
ϕ ; ϕ∈Esc([a, b]), ϕ6f )
I+(f)(resp.I−(f)) admet une borne inférieure (resp. supérieure) notéeI+(f)(resp.I−(f)).
De plus,I+(f) =I−(f). Cette valeur commune est appelée intégrale def sur[a, b]et est notée Z
[a,b]
f.
Propriétés 4 (Propriétés élémentaires). Soientf, g∈C−([a, b]).
(i). Linéarité.L'application I : C−([a, b])→R, f 7→
Z
[a,b]
f est linéaire.
(ii). Croissance. Sif 6g, alorsZ
[a,b]
f 6 Z
[a,b]
g.
(iii). Inégalité triangulaire.
Z
[a,b]
f
6 Z
[a,b]
|f|. (iv). Relation de Chasles. Pour tout c∈]a, b[,Z
[a,b]
f = Z
[a,c]
f + Z
[c,b]
f.
Propriété 5 (Changement de variable : translation).
Soitf ∈C−([a, b])etα∈R. On noteg : [a−α, b−α]→R, x7→f(x+α). La fonction gest continue par morceaux sur [a−α, b−β]etZ
[a−α,b−α]
g= Z
[a,b]
f.
Exercice 8.Soit f une fonction continue par morceaux etT-périodique. Montrer que pour tout réel a,Z
[a,a+T]
f = Z
[0,T]
f.
II.3 - Inégalité de la moyenne Définition 7 (Valeur moyenne).
Soit f ∈C−([a, b]). La valeur moyenne de f sur[a, b]est le réel b−a1 Z
[a,b]
f.
Exercice 9.Soitf ∈C−([a, b]). Montrer qu'il existe deux constantesm etM telles que m(b−a)6
Z
[a,b]
f 6M(b−a).
Théorème 5 (Inégalité de la moyenne).
Corollaire 6.
Soit f ∈C−([a, b]). Alors, Z
[a,b]
f
6(b−a) sup
[a,b]
|f|.
II.4 - Extensions Notations.
SoitI un intervalle de Retf ∈C−(I). Soient a, b∈I. On note
∗ Sia < b, Z b
a
f(x)dx= Z
[a,b]
f.
∗ Sia > b, Z b
a
f(x)dx=− Z
[b,a]
f.
∗ Sia=b,Z b a
f(x)dx= 0. Propriétés 6.
Soientf ∈C−(I), oùI = [a, b]ou [b, a]. (i). Croissance. Sia6betf 6g, alors Z b
a
f(x)dx6 Z b
a
g(x)dx. (ii). Inégalité triangulaire.
Z b a
f(x)dx 6
Z
I
|f|6sup
I
|f| · |b−a|.
(iii). Relation de Chasles. Pour tous c, d, e∈I, Z d
c
f(x)dx= Z e
c
f(x)dx+ Z d
e
f(x)dx.
Définition 8 (Intégrale des fonctions à valeurs complexes). Soit f ∈C(I,C). L'intégrale de f surI est la quantité Z
I
f = Z
I
Re(f) +i Z
I
Im(f).
Propriétés 7.
L'intégrale des fonctions à valeurs complexes. . . (i). . . . est linéaire.
(ii). . . . satisfait la relation de Chasles.
(iii). . . . satisfait l'inégalité triangulaire.
III - Intégrale d'une fonction continue III.1 - Propriétés
Théorème 7 (Positivité de l’intégrale).
Soit f ∈C([a, b])telle que pour toutx∈[a, b],f(x)>0. SiZ
[a,b]
f = 0, alors f ≡0.
Exercice 10.Soit P une fonction polynomiale sur R telle que Z
[0,1]
P2 = 0. Montrer que P est identiquement nulle.
Théorème 8 (Inégalité de Cauchy-Schwarz). Soientf, g∈C([a, b]). Alors,
Z
[a,b]
f g
!2
6 Z
[a,b]
f2· Z
[a,b]
g2,
avec égalité si et seulement s'il existeµ∈R tel quef =µg oug=µf. III.2 - Sommes de Riemann
Définition 9 (Sommes de Riemann). Soient f ∈C([a, b]),π = (xi)i∈
J0,nK une subdivision de[a, b]et ξ = (ξi)i∈
J0,n−1K des réels tels que pour tout i∈J0, n−1K, ξi ∈[xi, xi+1]. La somme de Riemann de f associée à π et ξ le réel Rπ,ξ(f) =
n−1
P
i=0
f(ξi)(xi+1−xi).
Propriété 8 (Convergence pour des fonctions lipschitziennes).
Soit f ∈Lipk([a, b],R) etπ une subdivision de [a, b]de pas δπ. Alors,
Z
[a,b]
f−Rπ,ξ(f)
6k(b−a)δπ.
Théorème 9 (Convergence des sommes de Riemann).
Soit f ∈ C−([a, b]). Pour tout ε > 0, il existe un réel η > 0 tel que pour toute subdivision π = (xi)i∈J0,nK etξ= (ξi)i∈J0,nK avec ξi ∈[xi, xi+1],
δπ 6η ⇒ Z
[a,b]
f−Rπ,ξ(f)
6ε.
Exercice 11.Soit f ∈C1([a, b],R). Montrer que Z
[a,b]
f0=f(b)−f(a). III.3 - Théorème fondamental du calcul diérentiel
Définition 10 (Primitive).
Soientf, F ∈F(I,K). La fonctionF est une primitive def sur I siF est dérivable surI et F0 =f.
Exercice 12.
1. De quelle fonction la fonctionx7→xlnx−x+ 4est-elle une primitive ? 2. Soit(a0, . . . , an)∈Kn+1. Déterminer une primitive de la fonction x7→
n
P
k=0
akxk. Propriété 9.
Si F et G sont deux primitives d'une fonction f, alors il existe une constante λ telle que F =G+λ.
Théorème 10 (Primitive & Fonctions continues).
Corollaire 11.
Soientf ∈C(I,K),a, b∈I etH une primitive def. Alors,H(b)−H(a) = Z b
a
f(t)dt.
Exercice 13.Soient0< a < bdeux réels. Déterminer 1.
Z b
a
sint dt. 2.
Z b
a
1 t dt. Corollaire 12 (Théorème fondamental du calcul différentiel).
Soit f ∈C1(I,K). Pour tous a, x∈I, f(x)−f(a) = Z x
a
f0(t)dt.
Exercice 14. (Théorème de relèvement) Soit f ∈ Ck(I,C), k > 1 telle que pour tout t ∈ I,
|f(t)|= 1. Il existe une fonctionα∈Ck(I,R) telle que pour toutt∈I,f(t) =eiα(t).