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La pratique professionnelle du placement en emploi dans l'assurance-invalidité

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Academic year: 2022

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Thesis

Reference

La pratique professionnelle du placement en emploi dans l'assurance-invalidité

ANTONIN, Véronique

Abstract

Cette thèse s'intéresse à la tâche spécifique qu'est le placement en emploi dans l'assurance-invalidité et à sa mise en œuvre par les professionnels. Ancrée dans une approche de sensibilités pragmatiques, elle saisit la pratique concrète du placement à partir de l'observation de situations de travail ayant cours notamment dans un organisme d'exécution de l'AI. A partir d'un matériau empirique constitué d'observations directes et d'entretiens d'explicitation, complété par l'analyse de sources documentaires variées, les résultats montrent que la pratique du placement se déroule dans des dynamiques d'éléments pluriels s'agençant entre eux et ainsi ne relève pas du seul apanage du professionnel. Pour saisir le placement, il est nécessaire de passer par la rencontre entre le professionnel, l'employeur, le bénéficiaire, voire d'autres acteurs, et la mobilisation d'autres prescriptions légales que celles inhérentes à la seule mesure de placement inscrite dans l'assurance-invalidité et de sus articulées à une vision économique de l'intégration professionnelle. Dans cette rencontre, des solutions [...]

ANTONIN, Véronique. La pratique professionnelle du placement en emploi dans l'assurance-invalidité. Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2017, no. SdS 66

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:94801 URN : urn:nbn:ch:unige-948018

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:94801

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La pratique professionnelle du placement en emploi dans l’assurance-invalidité en Suisse

THÈSE

présentée à la Facutlé des sciences de la société de l’Université de Genève par

Véronique Antonin-Tattini

sous la direction de

prof. Sandro Cattacin

pour l’obtention du grade de

Docteur ès sciences de la société Mention sociologie

Membres du jury thèse :

M. Frédéric Varone, professeur ordinaire, président du jury, Université de Genève Mme. Katia Horber-Papazian, professeure ordinaire, IDHEAP, Université de

Lausanne

Mme. Kim Stroumza Boesch, professeure HES, Haute école de travail social Genève

Thèse no 66 Genève, le 23 mai 2017

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Table des matières

Résumé __________________________________________________________________________________________________ 7 REMERCIEMENTS _______________________________________________________________________________________ 8 Introduction et cadre d’analyse _____________________________________________________________________ 10 Le contexte de l’exclusion du marché du travail ___________________________________________________ 11 Le contexte de l’Etat social actif _____________________________________________________________________ 12 Un paradoxe : manque d’emploi de qualité et précarité professionnelle ________________________ 15 Le placement en emploi : son organisation et ses bases légales __________________________________ 17 Le placement en emploi dans la littérature scientifique __________________________________________ 20 Notre approche théorique ___________________________________________________________________________ 24 Terrain d’enquête ____________________________________________________________________________________ 34 Méthodes retenues ___________________________________________________________________________________ 36 Démarches et récolte de données ___________________________________________________________________ 42 Posture de recherche ________________________________________________________________________________ 44 PARTIE I : Le placement : une mesure de réadaptation de l’AI _________________________________ 49 Introduction __________________________________________________________________________________________ 49 Chapitre 1. Le placement dans la base légale fédérale de l’AI __________________________________ 51 L’AI : pour qui ? _______________________________________________________________________________________ 51 Le placement actuellement __________________________________________________________________________ 52 La première loi sur l’AI _______________________________________________________________________________ 55 La 4e révision de l’AI _________________________________________________________________________________ 57 La 5e révision de l’AI _________________________________________________________________________________ 59 La 6e révision de l’AI _________________________________________________________________________________ 64 Réformes à venir _____________________________________________________________________________________ 67 L’intégration et l’activation au centre de l’AI _______________________________________________________ 68 Chapitre 2. Le placement dans le contexte légal cantonal et de l’OCAI _______________________ 75 Mission de l’OCAI _____________________________________________________________________________________ 75 L’organisation de la mesure de placement _________________________________________________________ 76 Prescriptions de la mesure de placement __________________________________________________________ 77 Marge d’action du coordinateur en emploi _________________________________________________________ 81 Référence à l’intégration et à l’activation ___________________________________________________________ 81 PARTIE II : La pratique du placement du coordinateur en emploi au sein d’un OCAI ______ 84 Introduction __________________________________________________________________________________________ 84 Chapitre 1. Un parcours-type d’aide au placement ______________________________________________ 87 L’éligibilité au placement ____________________________________________________________________________ 87 Les entretiens individuels ___________________________________________________________________________ 94 La vérification et l’incitation aux démarches de recherche d’emploi __________________________ 104 Les preuves de la recherche d’emploi demandées _______________________________________________ 112 La vérification et l’encadrement aux techniques de recherche d’emploi ______________________ 123 Proposition d’un stage à l’assuré sans perspective pour autant ________________________________ 135 A la suite du stage d’autres instruments du placement _________________________________________ 151 L’entrée par les instruments et l’adaptation de l’offre d’emploi ________________________________ 157 Chapitre 2. Des problèmes pris en compte en deçà et en delà de l’employabilité ________ 163 Des troubles d’employabilité pressentis en chemin _____________________________________________ 163 Offrir du social au-delà de l’employabilité _______________________________________________________ 173 Chapitre 3. Une employabilité soumise au déclassement professionnel et à une baisse salariale _______________________________________________________________________________________________ 182

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4 Le bassin local de l’emploi _________________________________________________________________________ 183 Le déclassement professionnel et salarial possible de l’assuré _________________________________ 185 Des cibles professionnelles déclassées en raison de la durée dans les régimes _______________ 187 Des cibles professionnelles déclassées en raison d’un emploi « illusoire » ____________________ 194 Un déclassement salarial en raison d’un rendement réduit de l’assuré _______________________ 199 Chapitre 4. Faire des efforts et un engagement possible en entreprise suspendu ________ 216 Exemple d’une situation suite à un incident de santé ___________________________________________ 216 Une solution finale partagée _______________________________________________________________________ 228 Des discriminations possibles _____________________________________________________________________ 233 Chapitre 5. Limites de notre étude _______________________________________________________________ 237 Conclusion ____________________________________________________________________________________________ 239 Synthèse sur le placement dans le dispositif légal et organisationnel de l’AI _________________ 239 Synthèse sur la pratique du placement du coordinateur en emploi ____________________________ 240 Discussion sur les apports de notre thèse ________________________________________________________ 248 Pistes de réflexion pour le placement et sa pratique ____________________________________________ 254 Bibliographie ________________________________________________________________________________________ 261 Annexe I : Les principaux modèles du handicap _______________________________________________ 280 Annexe II : Rentes AI pour les troubles difficilement objectivables _________________________ 286 Annexe III : La LIPPI ________________________________________________________________________________ 287 Annexe IV : Types et approches de la discrimination _________________________________________ 289 Annexe V : La LHand ________________________________________________________________________________ 292 Annexe VI : L’externalisation des techniques de recherche d’emploi ______________________ 294 Annexe VII : Un parallèle avec les agences de placement privé ______________________________ 297 Table des matières détaillée ______________________________________________________________________ 302

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ACRONYMES

AI : Assurance-invalidité

CSIAS : Conférence suisse des institutions d’action sociale LAI : Loi fédérale sur l’assurance-invalidité

LACI : Loi fédérale sur l’assurance-chômage

LSE : Loi fédérale sur le service de l’emploi et la location de services

LHand : Loi sur l’élimination des inégalités frappant les personnes handicapées

LIPPI : Loi fédérale sur les institutions destinées à promouvoir l’intégration des personnes invalides OCAI : Office cantonal de l’assurance-invalidité

OFAS : Office fédéral des assurances sociales

Orif : Organisation romande d’intégration et de formation professionnelle ORP : Office régional de placement

RPT : Réforme de la péréquation financière

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RESUME

Cette thèse vise à apporter des connaissances sur la tâche spécifique qu’est le placement en emploi dans l’assurance-invalidité (AI) et sa mise en œuvre par les professionnels. Ancrée dans une approche de sensibilités pragmatiques, elle s’attache à saisir plus particulièrement la pratique concrète du placement à partir de l’observation de situations de travail ayant cours notamment dans un organisme d’exécution de l’AI.

A partir d’un matériau empirique constitué d’observations directes et d’entretiens semi- directifs et d’explicitation, complété par l’analyse de sources documentaires variées, cette étude questionne la constitution de l’activité du placement et ce qu’elle produit comme effets possibles.

Les résultats montrent que la pratique du placement se déroule dans des dynamiques d’éléments pluriels (prescriptions, lieux, personnes, etc.) s’agençant entre eux et ainsi ne relève pas du seul apanage du professionnel et de ses dispositions. Il ressort certes de plusieurs situations que le professionnel utilise sa marge d’action dans la mise en œuvre des prescriptions de l’AI notamment en définissant les critères d’éligibilité d’un assuré à tel ou tel instrument du placement, ainsi que les critères d’employabilité et de vérification de recherche d’emploi de celui- ci ou encore en lui en offrant un accompagnement social non prévu. Toutefois, notre étude établit que les éléments influençant l’activité du placement ne se limitent pas à la compréhension du rapport de structuration entre la prescription légale et organisationnelle de la mesure de placement dans l’AI et ses dynamiques de mise en œuvre par le professionnel. Pour saisir le placement et ce qui s’y construit, il est nécessaire de passer par la rencontre entre le professionnel, l’employeur, le bénéficiaire, voire d’autres acteurs, et la mobilisation d’autres prescriptions légales que celles inhérentes à la seule mesure de placement et de sus mues par une logique économique. Dans cette rencontre, des solutions de nature pratique sont construites dans le cours d’action qui peuvent parfois aller à l’encontre de l’objectif prioritaire d’un retour à l’emploi ou d’un emploi de qualité pour le bénéficiaire.

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REMERCIEMENTS

La présente thèse est le fruit d’un ensemble d’entités nomment humaines sans lequelles elle n’aurait pas pu être réalisée.

Tout d’abord, elle s’est concrétisée grâce au soutien et aux conseils du professeur Sandro Cattacin, directeur de cette thèse, auquel j’ai toujours voué une admiration pour ses connaissances tant théoriques que du terrain, ainsi que ses capacités à faire des liens multi- niveaux. Il m’a toujours aiguillé vers les pistes théoriques nécessaires, ramené vers des perspectives réalisables, encouragé et octroyé confiance dans mes possibilités à mener une telle entreprise. Il l’a fait depuis notre rencontre à l’Université de Genève au département de sciences politiques datant de plusieurs années, puisque j’ai collaboré avec lui comme assistante sur divers projets de recherche touchant aux politiques sociales.

Cette thèse ne serait pas aboutie sans les professeurs Frédéric Varone, Katia Horber-Papazian et Kim Stroumza Boesch que je remercie d’avoir accepté de faire partie du jury. Je suis reconnaissante pour leurs commentaires pertinents et bienveillants qui ont été formulés lors de la pré-défense de cette thèse. Ceux-ci m’ont permis de recentrer et de développer mon questionnement et mon cadre théorique pour mieux guider mon intérêt principal de recherche qui est la pratique professionnelle dans le domaine de l’action publique et, plus spécifiquement, dans celui du placement en emploi pour des personnes en situation de handicap. Je profite d’adresser une gratitude particulière à Kim Stroumza Boesch qui m’a aidée, lors de nos échanges dans le cadre des Hautes écoles spécialisées, dans l’approche théorique retenue et, par ses commentaires, m’a aiguillée dans mon analyse de la pratique professionnelle, chère à ces lieux de formation. Avant d’entamer le présent travail de thèse, je me sentais plutôt démunie à divers niveaux sur la façon d’analyser la pratique professionnelle. Intuitivement et personnellement non entièrement satisfaite de certains travaux sur la pratique professionnelle (à mon goût, parfois trop descriptifs, trop micro et trop focalisés sur le professionnel), je voulais me libérer d’une analyse qui en vienne essentiellement au professionnel et, plus précisément à la conformité de sa pratique face à des prescriptions, et ainsi à sa seule responsabilité à l’œuvre dans la réalisation de la pratique pour me focaliser davantage sur l’action en elle-même.

La présente thèse a débuté fin 2010 et fait suite à mon intérêt et à une sensiblité pour la thématique de l’intégration professionnelle de personnes vulnérables confrontées à l’épreuve du handicap, du chômage ou encore de la pauvreté. Plus spécifiquement, la tâche du placement en emploi m’a motivée pour l’explorer dans sa pratique concrète dans le quotidien des professionnels pour comprendre ce qu’ils font et comment. En faire un travail de thèse a été pour moi une sorte de défi personnel, mais aussi la recherche d’une reconnaissance d’une expertise dans ce domaine.

J’avais pensé pouvoir terminer le présent travail avant 2017, mais l’épreuve des conciliations de divers domaines de vie m’a ralentie dans mon œuvre qui parut plusieurs fois vouée à l’échec. J’ai pu expérimenter au quotidien la difficile tâche qu’est de porter divers rôles dans divers domaines de vie avec chacun ses attentes qui peuvent entrer en tensions, voire en conflits, parfois constructifs, parfois destructeurs. La gestion de ces conciliations m’a souvent placée dans une position à cheval entre-deux, entre-trois domaines et a été vécue plutôt comme incomfortable.

D’abord, bien que mon employeur actuel, que je profite de remercier, à savoir la HES en travail

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social du Valais, m’ait encouragée et soutenue dans mon projet de thèse, en particulier par le biais d’un certain temps de travail financé notamment par un fonds de bourse de la HES au niveau romand (je profite d’adresser ma reconnaissance aux membres de la commission scientifique), le quotidien des multiples tâches à réaliser au sein de mon école m’a vite rattraper. Ensuite, mon rôle de mère de famille avec toutes les tâches souvent invisibles et peu valorisées, voire peu valorisantes, a été mis à rude épreuve lors de mes absences pour accomplir ce travail, malgré la patience de tout un chacun et leur soutien indéfectible. Un merci particulier est adressé à ma fille Floriane qui n’a eu cesse de me rappeler que je ne pouvais pas lui demander de faire ses devoirs et ne pas faire le mien concernant ma thèse, ainsi qu’à Alexandre, mon époux, qui, de par mon absorbtion consentie mutuellement, a appris du coup à cuisiner et que cela lui a valu, quant à lui, la reconnaissance de son réseau. Une gratitude particulière va aussi à mes parents qui ont toujours cru en moi et à mes capacités, peut-être trop avec toute la pression que cela peut impliquer alors que j’aurai voulu parfois être considérée comme vulnérable et à protéger. Enfin, mon rôle de doctorante n’a pas été toujours facile. Etant en dehors du lieu même qu’est l’Université, il m’a été difficile de rester au courant des débats théoriques en particulier par le biais de discussions entre pairs et cette tâche m’a demandé un investissement personnel non négligeable. En effet, même si mon engagement professionnel est dans le domaine de l’enseignement, le travail social est multidisciplinaire. Ceci a l’avantage de m’avoir ouverte sur d’autres discplines lors des contacts avec mes collègues de travail, mais en même temps a mis des limites à ma spécialisation dans une discipline et, par conséquent, à un regard spécifique sur les objets de recherche. Cette tension, je l’ai vécue de plein fouet et l’assume dans le présent travail. Enfin, j’ai dû faire face à la conciliation avec moi-même, tantôt énergique, tantôt déprimée, ce qui n’a pas rendu l’affaire facile lorsqu’un souci de santé s’y est mêlé. Un moi-même qui a aussi été persévérant, avec la volonté d’en finir avec la chose, ne serait-ce déjà pour avoir la satisfaction de contempler un travail achevé.

Pour terminer, même si cette thèse n’a pas pu être réalisée plus rapidement pour ces raisons, les résultats qui en ressortent restent acuels selon les présentations et les conversations que j’ai pu menées dans diverses institutions sociales et colloques scientifiques. Il va sans dire que ce travail n’aurait pas pu être mené sans l’ouverture du terrain d’enquête que ce soit par les directions, les professionnels et les bénéficiaires. Tous m’ont accueilli et ont été intéressés par mon étude malgré quelques craintes engendrées par une forme d’exposition de soi à travers l’observation de leur pratique et je profite de les remercier tous infiniment.

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INTRODUCTION ET CADRE DANALYSE

Le présent travail de thèse s’intéresse principalement à la tâche spécifique du placement en emploi qui est inscrite dans l’assurance-invalidité (AI) en Suisse et à sa pratique concrète par des professionnels actifs au sein d’une organisation de mise en œuvre de ce régime, à savoir un office cantonal de l’AI (OCAI).

Notre intérêt pour le placement en emploi se fonde sur un constat d’un manque de travaux consacrés à cette thématique et à sa mise en œuvre. Ce constat s’amplifie lorsqu’il s’agit de porter un regard sur la tâche spécifique du placement telle qu’elle est concrètement réalisée par les professionnels à partir de l’observation de leurs situations de travail et ceci particulièrement dans le domaine de l’AI. S’intéresser à la pratique concrète du placement, à partir de là où elle est exercée au niveau le plus concret, est pourtant essentiel pour saisir sa mise en œuvre et avoir une vision fine et la plus complète possible du travail qui s’effectue dans un contexte.

Pour connaître cette pratique professionnelle du placement, en se basant sur une approche de sensiblités pragmatiques, il s’agit d’entrer par l’activité de travail et son déroulement effectif. Le but vise à la décrire et à la comprendre à partir de son inscription dans l’AI et des situations de travail dans lesquelles elle est mise en œuvre.

Pour ce faire, nous prenons appui plus précisément sur le courant de l’action située attentif à une lecture immanente de l’activité (Ogien et Quéré 2005). A partir du poids donné aux situations de travail et ce qui s’y passe, ce courant vise à saisir la constitution de l’activité par plusieurs éléments d’influence à l’intérieur même de son déroulement. L’existence et les effets de ces éléments d’influence ne sont pas prédéfinis en amont de son effectuation. Ainsi, il s’agit de se questionner sur comment se passe l’activité du placement et de quoi elle est faite, c’est-à-dire ce qui agit dans sa constitution et ce qu’elle produit comme effets possibles. Les questions qui nous guident sont notamment : comment la tâche du placement est-elle inscrite dans le dispositif de l’AI et possiblement réinterprétée, complétée, réinventée dans sa mise en œuvre au quotidien ? Quelle est l’activité du placement et comment se fait par exemple la mise en contact entre le demandeur d’emploi et l’employeur potentiel ? Qu’est-ce qui influence cette activité du placement et vice versa ?

Pour accéder à cette connaissance, nous procédons à étude empirique, à partir d’un cas principal centré sur un OCAI, ceci pour pouvoir appréhender de façon détaillée l’activité du placement dans un contexte de mise en œuvre dans lequel elle prend forme. Ce terrain nous a semblé intéressant pour étudier la pratique du placement notamment en raison de l’identification et du repérage facilités de la tâche du placement puisqu’elle est octroyée spécifiquement à des professionnels dont c’est la fonction de la mettre en oeuvre. Par ailleurs, pour aborder la pratique du placement sur ce terrain organisationnel, nous avons fait la part belle à l’observation directe de situations de travail où l’activité se déploie au quotidien, outre la réalisation d’entretiens avec des professionnels et l’analyse d’un corpus documentaire.

Tout au long de ce travail, quelques mises en perspectives sont effectuées avec l’organisation et la pratique du placement ayant lieu dans un office régional de placement (ORP) et dans un service d’aide sociale aussi enquêtés par nos soins, ainsi qu’avec d’autres organismes dans le domaine du placement à partir de quelque littérature scientifique.

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Pour finir, cette thèse vise à fournir des connaissances scientifiques sur l’objet de recherche qui a trait à la pratique professionnelle du placement en emploi dans le cadre de l’AI. Par ailleurs, elle permettra certainement au terrain d’enquête, à partir de notre retour sur le déploiement de l’activité du placement, d’ouvrir un espace de discussion et de réflexion sur celle-ci. En effet, le placement sera mis davantage en visibilité au sein de l’équipe, voire au-delà pour d’autres intervenants sociaux dans le domaine de l’intégration professionnelle.

Pour procéder à notre étude, nous avons divisé le présent document en trois parties.

Dans la partie introductive, nous ancrons tout d’abord notre objet de recherche concernant le placement dans le contexte plus large dans lequel il est encastré qui est celui de l’exclusion du marché du travail et des réponses sociétales et politiques apportées en termes d’intégration et d’activation. Ensuite, nous nous tournons vers le paysage helvétique des organismes public et privé qui ont pour mission d’offrir le placement, ainsi que les bases légales qui le régissent et sa place dans la littérature scientifique. Enfin, nous présentons l’approche théorique et la méthodologie retenues dans cette étude. Pour ce faire, le courant de l’action située retenu est présenté, ainsi que les principales notions que nous utilisons : travail prescrit et travail réel, action située et forces (éléments) d’influence dans l’activité. Ce choix théorique indique comment notre propre questionnement de recherche a émergé plus précisément. Par ailleurs, au niveau méthodologique, nous abordons le terrain d’enquête, les méthodes choisies, le processus de récolte des données et l’examen de notre posture de recherche.

Dans la première partie de ce travail (I), nous laissons la place à notre objet de recherche qui commence par la description du placement telle qu’il ressort du dispositif de l’AI et plus spécifiquement de son évolution législative au niveau fédéral. En effet, rendre compte du contexte légal dans lequel s’insère le placement s’avère nécessaire pour comprendre sa mise en œuvre au sein de l’OCAI puisque qu’il est l’une de ses tâches à effectuer en tant qu’organe d’exécution de l’AI. En même temps, nous regardons comment la tâche du placement est reprise au niveau de son contexte organisationnel qu’est l’OCAI enquêté. Pour ce faire, seront présentées les caractéristiques générales de cette organisation en ce qui concerne sa mission officielle, l’organisation de la mesure du placement avec le personnel à qui est dévolu la tâche de la mettre en oeuvre et les prescriptions relatives qui cadrent son travail en la matière.

La deuxième partie (II) est le cœur de l’analyse empirique. Elle présente la pratique concrète du placement dans l’organisation principale retenue. Cette partie, au centre de notre thèse, nous plonge dans le travail du placement en train de se faire par les professionnels.

La partie conclusive de ce travail revient sur les principaux résultats de l’analyse pour finalement discuter des apports de cette thèse sur la connaissance de notre objet de recherche avec pour terminer l’ouverture sur quelques pistes de réflexion pour la pratique du placement.

LE CONTEXTE DE LEXCLUSION DU MARCHE DU TRAVAIL

Avant d’en venir à notre objet de recherche qui traite du placement en emploi pour les bénéficiaires de l’AI, rappelons le contexte dans lequel il s’inscrit, à savoir l’exclusion du marché du travail ordinaire1.

L’exclusion du marché du travail corrélée à l’augmentation du chômage, comme nouvelle question sociale, a amené la société et les politiques à réfléchir à des réponses permettant l’accès ou le retour au travail des personnes concernées (Castel 1995, Soulet 1998, Paugam 1997).

1 L’utilisation du terme de milieu ordinaire, mis en contraste avec le milieu spécialisé, sous-entend que l’environnement matériel et social a été conçu notamment selon un paradigme valido-centré essentiellement par et pour des valides (Blanc 2012 : 54).

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La notion d’insertion de populations spécifiques a été considérée comme une réponse à l’exclusion du marché du travail. Cette notion reste toutefois floue et polysémique, pouvant être tantôt un but, tantôt un moyen. De plus, elle est souvent confondue avec celle d’intégration2.

La notion d’insertion ou d’intégration a été inscrite dans maints dispositifs de politiques sociales. Par exemple, en Suisse, toute une série de législations sociales ont été adoptées ou révisées en y introduisant notamment des mesures d’insertion en vue de renforcer l’intégration sur le marché du travail, telles que les programmes d’emplois temporaires pour la LACI (Wyss 2000) ou encore les mesures d’insertion pour l’aide sociale. A propos de cette dernière, comme le résument Lindenmeyer et Walker (2010 : 47) :

« Ces quinze dernières années, l’aide sociale a connu un changement de priorités dans la mesure où l’intégration sociale et professionnelle est passée au centre des préoccupations ».

Il ne s’agit plus seulement de garantir le minimum vital et favoriser l’intégration sociale des cas les plus marginalisés comme initialement dans l’aide sociale (Bonoli et al. 2013).

Par ailleurs, l’insertion ou l’intégration est aussi devenue une catégorie d’intervention pour les pratiques institutionnelles et professionnelles du domaine social. Effectivement, toute une série d’organisations et d’institutions visant à favoriser l’intégration de personnes en difficultés se sont développées dans notre pays, que ce soit pour offrir des activités de formation, d’orientation professionnelle ou encore par exemple d’insertion par l’économique. Comme le souligne déjà Schultheis (2001), les structures n’ont cessé de se multiplier et se développer dans divers pays, au point de devenir ce que certains nomment un véritable marché de l’insertion, soit en coopération, soit en concurrence autour de clients et d’enjeux matériels ou symboliques.

Dans cette mouvance, de nouveaux métiers du social sont apparus dont le profil est différent de celui des travailleurs sociaux classiques (Castel 2009 : 237). Ainsi, les intervenants sociaux peuvent être des travailleurs sociaux, mais pas seulement (Pinho et Antonin-Tattini 2013). Bien que d’appartenances institutionnelles et professionnelles différentes, les intervenants de l’insertion ou l’intégration, devenue une sphère au carrefour de l’action sociale et de l’économique, unifient tendanciellement leurs pratiques autour de l’accompagnement de la personne précarisée, du suivi individualisé, d’interventions ciblées, d’outils spécifiques, etc. (Ibid).

Tout ceci en vue de prendre le train en marche, celui de l’intégration prioritairement sur le marché du travail ordinaire (Ibid).

LE CONTEXTE DE L’ETAT SOCIAL ACTIF

Le terme d’insertion ou d’intégration est, au fur et à mesure du développement des dispositifs, de plus en plus en lien avec ce qui est nommé le référentiel ou le paradigme de l’Etat social actif. A ce titre, le livre de Vielle et al. (2005) s’intitulant « L’Etat social actif. Vers un changement de paradigme » est parlant3.

2 Dans le présent travail, nous utilisons préférentiellement le terme d’intégration dans le monde du travail entendu comme étant le but premier de l’insertion inscrite en tant que moyen dans les dispositifs législatifs et organisationnels. Le terme d’intégration dans le monde du travail comprend une double dimension qui ne va pas toujours de pair : sociale et économique (par exemple, Schaufelberger et Mösch Payot 2013 : 16). Toutefois, lorsque nous paraphrasons ou citons un auteur dans le présent travail, nous faisons usage du terme qu’il utilise : insertion ou intégration.

3 L’individualisation, la territorialisation et la contractualisation sont des leviers de l’Etat social actif (Badan, Bonvin et Moachon 2004).

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LE RENFORCEMENT DE LACTIVATION

Au fondement de l’Etat social actif, l’activation, considérée comme une solution au problème du chômage, est portée à l’origine par une rhétorique libérale4. Elle est influencée par des normes internationales (OCDE, Union Européenne, etc.) et des acteurs divers (scientifiques, politiques, etc.) des pays de l’OCDE qui contribuent à la diffuser (Polère 2015).

Comme le souligne Bonoli (2013), la politique sociale active remplace le démantèlement et la dérégulation, ceci de façon consensuelle sur la scène des pays de l’OCDE et sur toile de fond de contraintes économiques et sociales. C’est en particulier le cas des pays anglo-saxons qui se sont tournés vers de tells solutions (Ibid).

Selon Barbier (2008, 2009), l’essentiel de la nouvelle activation réside dans le fait que les réformes touchant plusieurs politiques sociales (chômage, assistance, maladie, familiale, etc.) ont réactivé ou renforcé, voire introduit des liens explicites (réglementaires ou légaux) entre le droit à la protection sociale et la contrepartie d’une activité professionnelle sous divers aspects. C’est par exemple le cas avec le renforcement des obligations imposées aux bénéficiaires, la fiscalisation des dépenses sociales, les crédits d’impôts (Ibid). Ainsi, avec l’accent mis sur l’activation plutôt que sur les prestations qualifiées de passives, le lien entre la protection sociale et les politiques de l’emploi et du marché du travail sont devenus plus explicites (Probst et al. 2015 : 101).

Toutefois, la logique d’activation n’est pas nouvelle. Pensons aux workhouses du 19e siècle où il s’agit d’éduquer les pauvres à la valeur du travail (Cattacin et al. 2002, Tattini et al. 2003) ou encore aux systèmes de protection sociale déjà en rapport avec l’activité professionnelle, que ce soit par l’évaluation de la capacité de travail des sans-emploi, la recherche d’un travail et les cotisations des salariés (Barbier 2009).

En outre, cette nouvelle strate étatique (terme repris de Cantelli et Genard 2007) met au centre de ses objectifs et de ses préoccupations dans un cadre de déclin du quasi plein emploi : activer en vue d’intégrer prioritairement sur le marché du travail ordinaire.

Comme le résume bien Polère (2015), l’approche de l’activation se met en place autour de trois piliers : la centralité du travail pour (re)trouver une autonomie financière en vue de la subsistance de l’individu, un rôle actif pour l’individu et l’idée d’une nouvelle relation entre droits et devoirs.

Toutefois, malgré un consensus autour de l’activation, selon les contextes, les termes (activation, politique active, activation de la protection sociale, etc.) et les dispositifs varient pour la qualifier, la définir et l’opérationnaliser (Bonoli 2013)5.

Pour Barbier (2009), la notion de politique active et celle d’activation sont limitées pour caractériser l’ensemble des réformes d’activation. Il préfère utiliser le terme d’activation de la protection sociale, prenant en considération l’activation des personnes, des prestations et des systèmes. En effet, ce terme est susceptible de rassembler toute une variété de politiques menées en Europe, sans se focaliser uniquement sur les obligations imposées aux chômeurs (qui peuvent par ailleurs obéir à une logique davantage punitive ou d’investissement), ni rester prisonnier du champ étroit anglo-saxon de l’assistance avec l’utilisation du mot workfare souvent connoté péjorativement qui, pour cet auteur, devrait être réservé aux seules réformes américaines (Ibid).

4 Ce changement de politique (l’activation) correspond à un renouvellement des représentations des causes de la montée du chômage et de sa persistance (Da Cunha et al. 2009 : 11). Alors qu’auparavant l’analyse dominante était celle d’un niveau d’emploi contraint uniquement par une insuffisance de la demande globale (problème macro-économique), on est passé à la théorie des prix qui s’applique au marché du travail et ainsi à la conception selon laquelle les comportements de l’offre et de la demande de travail sont sensibles au niveau des salaires et du coût du travail (Ibid).

5 Le caractère spongieux, ambigu, voire contradictoire de la notion d’activation même à l’intérieur d’un champ politique rend difficile son opérationnalisation (Bonoli 2013).

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L’ACTIVATION DU BENEFICIAIRE

Bien que les conceptions et dispositifs d’activation divergent, l’activation des bénéficiaires de prestations sociales est mise en avant dans plusieurs pays dont la Suisse.

Comme le spécifient Bonvin et Moachon (2010), dans les politiques de l’emploi et plus généralement du social, il ne s’agit plus de garantir des conditions macroéconomiques soutenant l’intégration sur le marché du travail (fonction keynésienne de soutien à la demande globale de travail), mais d’avoir une action sur l’offre de travail et de procurer ainsi aux demandeurs d’emploi les mesures d’insertion appropriées à leur intégration sur le marché du travail6. En d’autres mots, les politiques mises en place dans le cadre de l’Etat social actif agissent en priorité sur l’offre de travail et peu sur la demande ; la capacité à trouver un emploi étant en conséquence tributaire de la responsabilisation de l’individu (Bonvin 2013)7.

A travers l’activation de l’individu, les mécanismes de contreprestation prennent une place centrale en articulant le droit aux prestations sociales à une exigence de contrepartie8.

Plutôt que d’encourager la passivité, l’individu est incité, voire sommé, à l'image du workfare, d’agir, d’être actif pour regagner le marché du travail, d’une part, pour assurer son autonomie (notamment financière) et, d’autre part, pour garantir la pérennité du système socio-économique (Zwick Monney 2016). Ainsi, le demandeur d’emploi doit par exemple chercher intensivement un emploi ou participer aux mesures d’insertion octroyées, à défaut avec des sanctions financières possibles allant jusqu'à des diminutions financières comme, par exemple, dans le cas de l'aide sociale publique ou encore à la radiation comme dans l'assurance-chômage de notre pays avec la prononciation de l’inaptitude au placement (Nadai 2007 : 12)9.

Par ailleurs, l’impératif d’activation qui traverse les politiques sociales vise à impliquer les capacités réflexives des individus : un nouveau mode de gouvernement des personnes par elles- mêmes et sur elles-mêmes est requis, un travail sur soi qui demande de poser un regard réflexif sur sa situation (Lacourt 2007 : 226, Vrancken 2007 : 82).

Dans ce contexte, le travail des professionnels, typique d’une profession consultante, consiste à mettre l’individu au travail sur lui-même, à partir du diagnostic de ses troubles d’employabilité, dont l’individu est coresponsable de leur traitement (Orianne 2008). Le travail des professionnels repose en conséquence moins directement sur la mise en emploi de l’individu, c’est-à-dire sur le placement (Orianne 2006), comme nous y reviendrons10.

6 Il s’agit de ne pas confondre l’offre et la demande de travail dans l’analyse théorique du marché du travail : ce sont les individus qui offrent leur travail, c’est-à-dire leur force de travail aux employeurs. Ce sont par contre les employeurs qui demandent le travail des individus, c’est-à-dire leur force de travail. Si l’on parle de l’offre et de la demande d’emploi, c’est l’inverse : les entreprises offrent des emplois et les individus demandent des emplois.

7 Pour le cas suisse, comme le résume Cattacin (2006 : 68), les transformations du welfare pluralism durant ces dernières années dans le contexte helvétique en font aujourd'hui non plus un cas exceptionnel, retardé, particulièrement complexe ou encore en récupération, mais une référence internationale en ce qui concerne l'individualisation des responsabilités, l'activation des citoyens ou encore l'incitation et la modération des acteurs producteurs de bien-être.

8 Par ce biais, on quitte l’inconditionnalité caractérisant les systèmes de protection sociale de l’après-guerre, puisque l’assuré est soumis à la démonstration de sa volonté de collaborer. Le diagnostic d’une généralisation des mécanismes de contrepartie est toutefois à relativiser selon les politiques sociales (Polère 2015).

9 Selon Dubois (2009b : 10), le critère de recherche active d’emploi des chômeurs, dits désormais demandeurs d’emploi, marque le passage d’une reconnaissance officielle du statut de chômeur à partir d’une situation objective (la privation d’emploi) à l’adoption de l’attitude individuelle comme critère de la « vérité » du chômage : la personne sans-emploi cherche-t-elle véritablement du travail, telle est la question.

10 Plusieurs discussions scientifiques ont eu lieu autour du lien entre le travail de l’individu sur lui-même (renvoyant au concept de subjectivation) et les risques de psychologisation de l’intervention sociale (par exemple, Cantelli et Genard 2007 : 20, Warin 2007 : 72).

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UN PARADOXE : MANQUE DEMPLOI DE QUALITE ET PRECARITE PROFESSIONNELLE

L’activation des demandeurs d’emploi en vue de trouver un emploi en milieu de travail ordinaire ancrée dans les dispositifs demeure pourtant questionnable. D’une part, un manque d’emploi tout court, ou de qualité, peut exister pour certaines populations. D’autre part, tous les individus n’ont pas nécessairement les capacités d’action requises pour s’activer en ce sens.

MANQUE DEMPLOI

L’emploi peut manquer pour une partie de la population. Nous exemplifions ce constat avec le cas des personnes en situation de handicap qui sont d’intérêt pour notre objet d’étude11.

Les données de l’Office fédéral de la statistique (OFS) indiquent qu’en Suisse le nombre de personnes en situation de handicap s’élève à 1,6 million, soit à environ 21% de la population (OFS 2016)12.

De nombreuses personnes en situation de handicap désirent avoir une place sur le marché du travail ordinaire comme tout un chacun. Avoir un emploi est, du moins théoriquement, synonyme d’accomplissement personnel, de reconnaissance sociale et d’insertion dans des réseaux sociaux.

Pourtant, des études ont montré que leur taux d’emploi est plus faible que pour les personnes valides et leur taux de chômage plus élevé (OCDE 2006 : 34). Pour l’ensemble de l’Union Européenne, en 2011, leur taux d’emploi est de 47, 3% et celui des personnes valides de 66,9%

(Service de presse d’Eurostat 2014)13.

En Suisse, en 2013, le taux d’emploi des personnes en situation de handicap est d’environ 72%

et celui des personnes valides de 85% (OFS 2016). Elles occupent en outre moins souvent des postes à plein temps (Ibid).

A leurs problèmes de santé, s’ajoutent souvent d’autres obstacles à l’emploi individuels (âge, manque de confiance, manque de formation, etc.) et liés à l’environnement socio- économique (discriminations, méconnaissances des mesures d’insertion, conditions de travail, etc.) (OFS 2012).

Par exemple, quelques (assez rares) enquêtes auprès d’entreprises en Suisse montrent que certaines nourrissent notamment des préjugés à l’égard des personnes ayant des atteintes à la santé, particulièrement celles ayant des atteintes psychiques : compétences sociales défaillantes, fort absentéisme ou performance limitée (Kurmann 2008).

Par ailleurs, des études sur le maintien en emploi, par exemple au Québec, témoignent que l'environnement de travail influence le succès d’une intégration professionnelle durable, non

11 Dans le présent travail, nous utilisons préférentiellement le terme de personnes en situation de handicap : les personnes ne sont pas seulement handicapées, ayant des déficiences, mais en situation de handicap. Cette définition renvoie au modèle interactif du handicap (Annexe I). Toutefois, lorsque nous paraphrasons ou citons un auteur, nous faisons usage du terme qu’il utilise.

12 Pour identifier les personnes handicapées parmi la population, l’OFS utilise une définition médico-sociale du handicap : sont considérées comme handicapées les personnes qui déclarent avoir un problème de santé qui dure depuis longtemps (dimension médicale) et qui se disent limitées (faiblement ou fortement) dans les activités habituelles (dimension sociale) (Gazareth 2009 : 8).

13 Une discussion sur ces statistiques est difficile en raison des multiples définitions du handicap utilisées dans les pays (Gazareth 2009 : 9). En plus, une moyenne statistique ne montre pas les différences qui peuvent être élevées entre pays et s’expliquer par divers facteurs.

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seulement dans ses dimensions techniques, mais aussi humaines comme les rapports sociaux de travail (Saint-Arnaud et al. 2011 : 63).

En définitive, beaucoup de personnes en situation de handicap se voient refuser leur accès et le maintien au monde du travail et aussi à d’autres domaines de vie. Cette exclusion peut les plonger dans une situation de pauvreté et d’exclusion, pouvant elle-même être une cause de handicap (Hamonet 2010 : 10). Nous reviendrons sur certains obstacles à l’emploi de cette population dans notre partie II.

PRECARITE PROFESSIONNELLE

A côté du non-accès à l’emploi, même si la personne a une possibilité sur le marché du travail ordinaire, elle peut être poussée à accepter un emploi précaire, une précarité pouvant devenir permanente d’où l’hypothèse du développement d’un précariat (Castel 2009, 2010)14.

D’après Castel (2009 : 112), il est demandé que tout le monde travaille pour ne pas être un

« mauvais » pauvre, sans pour autant que tous puissent jouir de toutes les prérogatives de l’emploi classique. C’est ainsi que l’on s’engage sur la voie d’une société de pleine activité qui n’est pas une société de plein emploi comportant une assurance de la durée, un encadrement par le droit du travail et une ouverture aux droits étendus de la protection sociale (Castel 2009 : 116).

Ainsi, l’intégration sur le marché du travail est visée sans que l’emploi et le travail ne soient nécessairement de qualité pouvant ainsi mener à une précarité (Paugam 2007)15.

En conséquence de cette évolution, le monde du travail se trouve en quelque sorte divisé entre, d’un côté, les « insiders », titulaires d’un emploi plus ou moins stable ouvrant l’accès à la protection sociale et à divers avantages liés, et, d’un autre côté, des « outsiders » de plus en plus nombreux, victimes de la flexibilisation du travail, dont l’emploi manque ou est mal rémunéré et mal protégé (Pamukci 2009 : 10).

Certes, toutes les formes atypiques de l’emploi (contrats à durée déterminée, travail sur appel, etc.), qui se sont multipliées ces trente dernières années, ne mènent pas nécessairement à la précarité comme le montre une étude concernant la Suisse dans le cadre du programme de recherche LIVES sur les vulnérabilités (Bülhmann 2012). De même, la signification sociale donnée à un emploi atypique peut varier selon les contextes et les individus (Bonvin 2011).

PAS LES CAPACITES ATTENDUES

Avec l’Etat social actif, le postulat est que chacun est censé détenir des capacités socialement signifiantes et socialement convertibles (Soulet 2007 : 14). En effet, l’anthropologie capacitaire est à la base des valeurs et des normes d'activation qu’implique l'Etat social actif (Genard 2011). Au sein des dispositifs d’activation, s’impose une anthropologie selon laquelle, en tout état de cause,

14 Standing (2009) reprend l’idée de précariat, qui devrait s’après lui être précisée et faire l’objet d’analyses empiriques plus conséquentes en vue de fournir ensuite des pistes pour lutter contre ces inégalités comme le revenu de base inconditionnel.

15 Selon Paugam (2007), quand on parle de précarité professionnelle, deux dimensions peuvent être identifiées : la précarité de l’emploi et la précarité du rapport au travail.

La précarité de l’emploi fait référence à plusieurs dimensions dont l’insécurité salariale, les emplois atypiques sous diverses formes (contrats à durée déterminée, travail sur appel, etc.) et l’insécurité de l’emploi (stress dû à des licenciements possibles, sentiment d’insécurité).

La précarité dans le travail touche aux conditions d’une activité professionnelle : intensification des rythmes de travail, adaptabilité, flexibilité, individualisation des efforts.

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ceux qui en sont l’objet disposent toujours de capacité, de pouvoir d’agir qu’il s’agit de mobiliser, de réveiller, d’entretenir, bref d’activer (Ibid)16.

Pourtant, malgré cet accent mis sur les capacités d’agir des bénéficiaires, certains ne peuvent pas s’inscrire dans un processus d’activation en vue d’un retour (ou maintien) au travail, ceci non seulement par manque de places de travail ou encore de volonté, mais parce qu’ils n’ont pas les ressources nécessaires (Zwick Monney 2016)17. Cela ne signifie pas que les personnes n’ont pas de ressources, qu’elles ne sont pas activables, mais plutôt qu’elles ne répondent pas à ce qui est demandé en matière d’insertion sociale et professionnelle (Ibid). En même temps, les bénéficiaires ne se réduisent pas à des destinataires passifs lors des relations avec eux, mais détiennent des marges d’action face aux effets produits par l’action de dispositifs, comme l’ont montré des travaux sociologiques sur les relations de populations vulnérables aux institutions (pour une revue de la littérature, voir par exemple Duvoux 2012 : 110).

Pour terminer, selon Soulet (2007a), le travail social palliatif est une conséquence paradoxale des politiques sociales individualisées reconfigurées autour de l’Etat social actif. En effet, nombre d'individus, en raison de leur trajectoire biographique comme de la nature des exigences du système socio-économique, ne peuvent, momentanément ou durablement, ressortir d'une logique de l'activation (Soulet 2007a : 15). Pour cette population, ce n'est pas sa perfectibilité qui est au centre de l'intervention mais sa vulnérabilité (Ibid). Ainsi, adressé aux soldes des ingérables par les mesures actives et le travail social promotionnel, la réponse par le travail social palliatif se donne à voir sur le mode de la personnalisation (Ibid). Ce type de travail amorce une évolution vers une logique inspirée de la réduction des risques et n’a plus de visée transformatrice. Il s’agit d’éviter l’empirement, que l’individu ne se désaffilie sans la finalité qu’est l’intégration (Ibid).

LE PLACEMENTEN EMPLOI : SON ORGANISATION ET SES BASES LEGALES

A partir du constat précédent de l’exclusion du marché du travail et des réponses données que sont l’intégration et l’activation, le placement en est en quelque sorte le corollaire et s’est organisé différemment au fil du temps et des contextes.

LE PAYSAGE ORGANISATIONNEL

Le placement d’individus en emploi est une activité économique aussi ancienne que le commerce des marchandises (De Larquier 2000). Il est une catégorie sociale construite, marquée par l’histoire, où le marché du travail s’organise peu à peu comme un lieu de placement des personnes sans emploi. Il est en quelque sorte le corollaire de l’invention du chômage contre lequel il s’agit de lutter (Ibid).

Au cours de son développement, le placement en emploi a été considéré comme du ressort d’agents privés dans un premier temps pour devenir ensuite une mission relevant de l’ordre public, suivie de façon plus ou moins monopolistique selon les pays (De Larquier 2000, De Troyer et al. 1989). Ainsi, le placement n’a pas toujours été considéré comme un problème demandant l’intervention de l’Etat, puisqu’il a été régulé au début par des organismes privés. De plus, les types d’intervention de l’Etat sur le marché du travail varient selon les pays, ainsi que l’importance de la fonction du placement au fil du temps et des contextes (Da Cunha et al. 2009).

16 La littérature utilise aussi le terme de capacitisme signifiant une hyper-valorisation des capacités qui sous-tend l’organisation sociale actuelle (Goodley 2014 cité par Tabin 2015).

17 La capacité d’agir in situ est indissociable de l’univers social en même temps que celui-ci est situé (alliage d’une perspective de structure et d’agency) (par exemple, Martucelli 2010a).

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Dans ce développement, le contexte helvétique représente un cas particulier parmi les pays de l’OCDE (Battaglini 2005 : 137). Le principe du monopole de l’action publique en matière de placement des personnes sans emploi sur le marché du travail n’a jamais été adopté. C’est la raison pour laquelle la Suisse n’a pas signé la convention n°96 de 1949 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) qui demandait la suppression des bureaux de placement à but lucratif en faveur de l’intervention des services publics de l’emploi. Les agences privées commerciales ont pu s’activer sur le marché du travail helvétique, bien que de manière réglementée, depuis 1951, par les dispositions sur le service public de l’emploi et la location de services (LSE du 6 octobre 1989, état le 1er janvier 2013)18.

Par la suite, dans un contexte de montée du chômage dans les années 90, le service public de l’emploi a été réformé suite à la révision de l’assurance-chômage de 199519. Les ORP ont vu le jour à ce moment-là, nouvelle structure de mise en œuvre censée augmenter l’efficacité du placement public des chômeurs (Engler 2006). Auparavant, la structure était très décentralisée avec un réseau d’environ 3’000 offices communaux du travail n’étant pas en position de fournir des services de placement adéquats pour les chômeurs, en particulier pour ceux avec des difficultés particulières d’emploi (Duell et al. 2010 : 39). En règle générale, le personnel dans les offices communaux du travail ne travaillait que partiellement à la tâche du placement, largement laissée aux agences privées20.

Néanmoins, la réforme du service public avec la mise sur pied des ORP n’a pas remis en cause la prégnance des agences privées de placement, établies de longue date (Battaglini 2005 : 139). Au contraire, les bases légales de l’assurance-chômage encouragent la collaboration entre les organes du service public de l’emploi et les organismes privés de placement, qu’ils soient à but lucratif ou sans but lucratif21. Dans le marché du travail suisse, le service public détient un rôle subsidiaire après l’initiative personnelle et les acteurs privés favorisés par le principe de subsidiarité (Cattacin 2006). Ainsi, à l’heure actuelle, diverses tâches du service public de l’emploi, comme le conseil et le placement des chômeurs ou l’octroi de mesures relatives au marché du travail peuvent être effectuées en coopération avec des organismes privés22.

A côté des ORP, les OCAI ont également mis en place leurs propres services de placement public qui s’occupent de personnes relevant du régime de l’AI. Ils peuvent aussi confier à des tiers certaines prestations relevant de la réadaptation comme le placement23.

Au total, les organismes de placement sont de nature diverse en Suisse, comme dans d’autres pays (Gendron 2009). Il en est qui sont accessibles à tout demandeur d’emploi, comme les ORP de notre pays et les agences commerciales. D’autres sont destinés exclusivement à des travailleurs relevant de l’AI, comme les services de placement public des OCAI et ceux d’institutions privées destinés à ce public. L’ensemble de ces organismes de placement ou, autrement dit, intermédiaires institutionnels de l’emploi, ont pour fonction de faire du placement, souvent entremêlé à d’autres tâches comme l’octroi de mesures d’insertion (cours, programmes d’emploi

18 Voir notre Annexe VII.

19 Font partie du service public de l’emploi notamment le Secrétariat d’Etat à l’économie, les autorités cantonales du travail, les services cantonaux des mesures relatives du marché du travail et les ORP.

20 Les performances du service public de l’emploi durant les années 70 demeurent si limitées qu’on le qualifie de

« rudimentaire » (Battaglini 2005 : 137). Certes, l’assurance-chômage n’existait pas encore (puisqu’elle date de 1982) et ce sont les offices communaux du travail qui exécutaient donc cette tâche.

21 Art. 59, art. 85 b, LACI du 25 juin 1982, état le 1er janvier 2014 ; art. 81, OACI du 31 août 1983, état le 1er janvier 2013.

22 Malgré le contexte de la nouvelle gestion publique l’encourageant, l’externalisation de la prestation du placement à des acteurs privés à but lucratif est toutefois peu développée dans notre pays, ceci comparativement à d’autres pays de l’OCDE (Düll et Tergist 2010 : 50, Georges 2007). Nous renvoyons le lecteur à Flückiger et Kempeneers (2008) au sujet d’une rare étude sur l’externalisation du placement public à une société de placement privé genevoise.

23 Un article légal mentionne, à propos de l’attribution des tâches aux OCAI, la possibilité de conclure des conventions pour les mesures de réadaptation professionnelle et de réinsertion (lettre l, al. 1, art. 41 règlement sur l’assurance-invalidité du 7 janvier 1961, état le 1er janvier 2015).

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temporaires, etc.) afin d’augmenter les chances d’emploi de leurs bénéficiaires24. Ainsi, à côté de l’action de chaque personne pour tenter d’accéder au marché du travail par elle-même (candidatures spontanées, réseaux informels de relations), elle peut rechercher un emploi en passant par divers organismes de placement publics ou privés auxquels elle sera affiliée souvent à travers son statut administratif.

Sans aller plus loin dans la présentation du panorama des organismes de placement, auquel peuvent être ajoutés les services de placement des organisations professionnelles ou encore ceux mis en place par certains services d’aide sociale dans les cantons helvétiques, nous relevons que la coexistence d’organismes de placement de nature diverse rend le système suisse particulièrement complexe (OCDE 2006)25.

Bien que des coordinations transversales soient instaurées, la complexité du paysage institutionnel engendre une certaine concurrence entre les divers intermédiaires du placement, mêmes s’ils ne s’adressent pas nécessairement aux mêmes publics et segments d’emploi (OCDE 2006). De plus, la collaboration interinstitutionnelle entre les services de placement public de divers régimes sociaux ne parvient pas à résoudre certains problèmes comme le risque de sélection des publics et la question de l’imputabilité (Bonoli et al. 2013 : 7)26.

LES BASES LEGALES SUISSES

Les bases légales helvétiques qui régissent le placement public et privé sont principalement les suivantes : la loi fédérale sur le service de l’emploi et la location de services (LSE) du 6 octobre 1989, la loi fédérale sur l’assurance-chômage et l’indemnité en cas d’insolvabilité (LACI) du 25 juin 1982 et la loi fédérale de l’assurance-invalidité (LAI) du 19 juin 195927.

Une seule base légale parmi celles-ci, à savoir les dispositions de la LSE, s’attache à définir le placement (en l’espèce privé) comme étant l’ensemble des activités consistant à mettre en contact employeurs et demandeurs d’emploi afin de conclure un contrat de travail (al. 1, art. 2, LSE du 6 octobre 1989, état le 1er novembre 2015).

La notion de mise en contact se comprend dans un sens large selon l’aide-mémoire relatif aux dispositions de la LSE (SECO 2003) :

« Il faut entendre par là tout acte final par lequel une partie fait savoir à une deuxième partie qu’une ou plusieurs tierces parties sont intéressées à conclure un contrat avec elle. L'acte de mettre en contact ne se borne pas à faire se rencontrer les parties dans le bureau du placeur ; des placements peuvent également être opérés par le canal des médias imprimés, du téléphone, de la télévision, de la radio, du Télétexte, d'Internet et d'autres médias appropriés. En particulier par exemple, le fait d’offrir à un demandeur d'emploi et/ou à un employeur la possibilité de diffuser une offre de services ou une offre d’emploi au moyen d'un moteur de recherche Internet et de permettre ainsi à l'un d'apprendre l'existence de l'autre constitue un acte de mise en contact » (Ibid).

En d’autres mots, la mise en contact effectuée lors du placement privé peut s’étendre à l'organisation de la rencontre interpersonnelle entre l’offre et la demande d’emploi, mais peut se

24 Pour un résumé de la compréhension des raisons d’être des intermédiaires de l’emploi dans un contexte d’imperfection de l’information du marché du travail, voir Bessy et De Larquier (2009).

25 Notons que le principal assureur suisse pour les accidents, la SUVA, a aussi mis en place des mesures précoces de réinsertion et d’activation (OCDE 2006 : 67). Elle propose par exemple des mesures comme le job coaching chez des employeurs et d’autres instruments proches de ceux de l’AI (www.suva.ch).

26 Par imputabilité, il est entendu qu’il est impossible d’attribuer la responsabilité d’un succès ou d’un échec à l’un ou l’autre service (Bonoli et al. 2013 : 9).

27 Avec la première LSE, en 1951, ont été instaurées des dispositions réglementant les activités des agences privées de placement, sans encore la partie sur la location de services. Cette loi réglemente aussi le placement public au niveau national.

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