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De l’innovation pour le profit, aux profits sans innovation : une monographie de l’entreprise pharmaceutique Novartis

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Master

Reference

De l'innovation pour le profit, aux profits sans innovation : une monographie de l'entreprise pharmaceutique Novartis

SCHÜLER, Jimmy

Abstract

"Notre travail propose une analyse détaillée des politiques de profit chez Novartis. Nous revenons sur ses différents modèles de production : du modèle des blockbusters à celui des traitements de niche. Nous analysons les mécanismes qui structurent la production de son innovations tels que l'externalisation de phases cliniques ou l'acquisition tardive de traitements issus de sa périphérie. Un processus de monopolisation de l'innovation permise par la position dominante du groupe au sein du secteur pharmaceutique."

SCHÜLER, Jimmy. De l'innovation pour le profit, aux profits sans innovation : une monographie de l'entreprise pharmaceutique Novartis. Master : Univ. Genève, 2021

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:148424

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Université de Genève Jimmy Schüler

Département des Sciences de la Société Master in Political Economy of Capitalism

De l’innovation pour le profit, aux profits sans innovation : une monographie de l’entreprise pharmaceutique Novartis

Mémoire de Master

Sous la direction de : Cédric Durand

2020/2021

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ii Remerciements

Je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont aidé ou aiguillé durant la réalisation de ce mémoire.

Évidemment, mon professeur Cédric Durand pour son suivi précis, ses commentaires encourageants et sa généreuse disponibilité tout au long des étapes de ce travail. Une présence stimulante et exigeante qui a véritablement contribué à parfaire ma formation au sein du master.

A ma sœur, Cosette Schüler, infirmière-clinicienne en oncologie au Centre Hospitalier Universitaire Vaudois pour les longues discussions techniques autour de l’immunothérapie et des traitements oncologiques. Une assistance précieuse et une dose de réel dans le cloisonnement des travaux académiques.

A ma mère pour le travail précis de relecture, du juste choix des mots et du soutien moral inestimable durant ce travail.

Aux autres personnes qui m’ont conseillé initialement ou consacré un entretien, Silvain Laurens à l’EHESS, Paul Lagneau-Ymonet à Paris-Dauphine et Sabine Pitteloud à l’Université de Genève.

Enfin, à l’équipe des archives de Novartis à Bâle pour leur accueil et leur mise à disposition des documents liés aux entreprises Sandoz et Ciba-Geigy.

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iii Table des matières

Introduction ... 4

L’économie politique du capital intangible ... 6

L’entreprise Novartis : une firme type pour le XXIe siècle ... 9

Problématique ... 12

Méthodologie ... 13

1 Le modèle des blockbusters : de l’âge d’or à la recherche d’alternatives ... 15

1.1 L’entreprise Novartis dans le contexte de transformation de la pharmaceutique 17 1.1.1 Des conglomérats de la chimie à la firme pharmaceutique : la naissance de Novartis 18 1.1.2 Les alliances précoces en matière de biotechnologies ... 21

1.2 L’âge d’or des blockbusters, un haut niveau de profits et une innovation empêchée ... 22

1.2.1 Centralisation du capital et concentration des ventes : la recette des profits élevés 23 1.2.2 L’innovation sacrifiée : le cas de l’acquisition de Systemix ... 26

1.2.3 Le déclin et la crise du modèle : les rendements décroissants de l’innovation ... 28

1.3 Des stratégies de profit alternatives ... 30

1.3.1 Le marché des génériques, un palliatif à l’effritement de la rente sur la propriété intellectuelle ... 31

1.3.2 Traitements de niches et « nichebusters » : le luxe des maladies rares ... 33

1.3.3 Les restructurations contemporaines du capital de Novartis : la croissance des actifs intangibles ... 36

1.4 Conclusion du chapitre ... 40

2 Monopoliser les fruits de l’innovation : une étude des stratégies en matière d’essais cliniques ... 43

2.1 L’appropriation de la connaissance dans la pharmaceutique : littérature et stratégie de recherche ... 45

2.1.1 Une brève introduction aux essais cliniques et aux coûts de production de nouveaux traitements ... 46

2.1.2 Les asymétries de pouvoir au sein du secteur pharmaceutique ... 49

2.1.3 Copublications scientifiques versus essais cliniques, quel proxy choisir ? ... 50

2.2 Diluer les coûts du contrôle sur l’innovation : une analyse descriptive du financement des essais cliniques ... 52

2.2.1 Le visage des partenaires majoritaires de Novartis ... 52

2.2.2 La dilution des coûts et des risques sur les phases de développement ... 54

2.2.3 Les USA un pôle technologique, la Chine un sous-traitant en mutation : les nécessités de l’internationalisation clinique ... 58

2.3 Valoriser l’innovation des autres : les acquisitions de traitements stratégiques en phases cliniques tardives ... 61

2.3.1 Le choix des acquisitions tardives ... 62

2.3.2 Le coût du capital : la privatisation des connaissances scientifiques dans le cas du Zolengensma ... 66

2.4 Conclusion du chapitre ... 71

Conclusion générale ... 73

Bibliographie ... 76

Annexes ... 82

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3 Table des illustrations

Figure 1. Profit net de Novartis en comparaison des autres firmes du SMI et de la division pharmaceutique de l’indice en millier de francs suisses. ... 11 Figure 2. Création de Novartis et centralisation progressive du capital de Sandoz, et de Ciba-

Geigy vers le secteur de la pharmaceutique en pourcentage total des ventes de 1995. 19 Figure 3. Évolution de la marge brute et désinvestissements dans les secteurs de la

construction, de la chimie traditionnelle et de l’agrobusiness à Novartis. ... 20 Figure 4. Dynamiques du pourcentage total de blockbusters et ratio moyen par blockbuster

sur l’ensemble des ventes du groupe Novartis. ... 25 Figure 5. Dépenses en marketing, en R&D en pourcentage du chiffre d’affaires, et marge

opérationnelle à Novartis ... 25 Figure 6. Liste et valeurs des principales fusions et acquisitions d’entreprises

biotechnologiques de Novartis listée par ordre chronologique décroissant. ... 35 Figure 7. Composition du capital de Novartis en pourcentage total des actifs entre 1996 et

2019 ... 37 Figure 8. Niveau des actifs tangibles et intangibles et mesure des actifs tangibles nets à

Novartis entre 2003 et 2019 en millions $. ... 38 Figure 9. Composition du ROA de Novartis de 1993 à 2019 ... 39 Figure 11. Différences de répartition des essais cliniques financés uniquement par Novartis

ou financés en collectif. ... 55 Figure 12. Matrice de contingence selon modalités de financement et destinations cliniques

pour l’ensemble des essais cliniques financés par Novartis ... 57 Figure 12. Degré de participation des institutions périphériques impliquées dans le

développement de 12 traitements acquis par Novartis. ... 65 Figure 14. Historique du circuit d’innovation du Zolgensma et valeurs des transactions entre

AveXis et sa périphérie ... 69 Tableau 1. Croissance de la division générique Sandoz en pourcentage du chiffre d’affaires

de Novartis de 2000 à 2019. ... 32 Tableau 2. Décomposition du ROA de Novartis de 2009 et de 2018 ... 40 Tableau 3. Conditions de réalisation des stratégies de profit à Novartis ... 41 Tableau 4. Probabilité de réussite et coût relatif des trois phases cliniques qui précédent la

commercialisation d’un traitement ... 48 Tableau 5. Fréquence et score de collaboration entre Novartis ses 100 premières institutions réparties par types entre 1999 et 2020. ... 54 Tableau 6. Participation de la Chine relativement au reste du monde et en fonction du

nombre de patients recrutés au sein des essais cliniques de Novartis. ... 59 Tableau 7. 12 traitements stratégiques acquis ou faisant état d’une licence exclusive par

Novartis en 2019 ... 63

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4 Introduction

« While compulsory licenses are permissible under the WTO TRIPS Agreement on the condition of compliance with the terms and conditions set out in its Art. 31, they are also considered a policy tool of last resort. A Compulsory license is tantamount to an expropriation of the patent owner and constitutes a deterrent to future research and development of innovative medicines and their placing on the market in Colombia. » (SECO, 2015)1

En 2015, dans sa lettre à la présidence de l’Argentine, le Secrétariat d’État à l’économie suisse (SECO) se fait porte-parole de l’industrie pharmaceutique à l’étranger. En 2015, l’affaire concerne la tentative, par le gouvernement colombien, de déclarer d’utilité publique l’utilisation de l’imatinib, médicament oncologique phare de l’entreprise pharmaceutique Novartis commercialisé sous le nom de Gleevec. La manœuvre permettant de diminuer drastiquement le prix de ce dernier par le recours à une licence obligatoire. Le litige révèle plusieurs points importants : le premier, souligne l’influence politique des institutions officielles suisses sur le terrain des affaires économiques, une réalité qui peut paraître commune au sein des économies capitalistes, qui n’en démontre pas moins la relative dépendance des intérêts du capital à l’intervention publique (Panitch & Gindin, 2013 ). Le second rend compte de l’importance particulière des droits de propriétés intellectuelles (DPI) dans l’affaire ; l’expropriation comme résultat de leur violation. Là encore, l’affaire pointe le rôle prépondérant pour la firme Novartis du respect des brevets dans sa production. Une législation particulièrement dynamique ces trois dernières décennies, cristallisée en 1995 par le traité international sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADEPIC). Un traité qui harmonise les minimas réglementaires pour les pays actifs dans le commerce international utilisé comme d’une base sur laquelle seront développés d’autres accords régionaux ou bilatéraux (Dür et al., 2014) (Morin & Surbeck, 2020) (Durand & Milberg, 2019).

La transformation des impératifs économiques de certaines entreprises industrielles est souvent décrite de « post-fordiste » chez les économistes régulationnistes, de

1 Une copie mise en ligne par l’Etat colombien est disponible (EN LIGNE) : https://www.minsalud.gov.co/sites/rid/Lists/BibliotecaDigital/RIDE/VS/MET/patent-of-Imatinib- glive-closing-arguments.pdf, consulté le 10 avril 2020.

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« nouvelle économie » du côté des analystes de l’innovation sectorielle ou de « capitalisme cognitif » supposé décrire une mutation profonde du capitalisme contemporain. Ces derniers mettent en lumière le capital dit « intangible » dans la production des grandes firmes transnationales. Précisément, il s’agit d’une dynamique de dématérialisation du capital se reposant désormais sur des actifs n’ayant pas de substance physique, mais jouant un rôle essentiel dans la production. La première catégorie d’actifs intangibles sont les brevets, les marques déposées et les designs industriels, ils sont issus respectivement des programmes de recherche et développement (R&D) et de marketing. Ils correspondent aux actifs intangibles identifiables, c’est-à-dire délimités respectivement dans le droit et dans la comptabilité de la firme. La seconde catégorie renvoie aux actifs intangibles non- identifiables : du niveau de formation des travailleurs et des travailleuses, des secrets de production, ou du degré de contrôle d’une firme sur sa chaîne productive ; notamment de ses relations extérieures et périphériques (Dean, 2013) (Baranes, 2016). Tous sont classés dans le goodwill, une catégorie comptable « fourre-tout », calculé à partir de la différence résiduelle entre la valeur marchande d’une entreprise –de sa capitalisation boursière dans notre cas – et de la valeur de ses actifs évalués « raisonnablement » au prix du marché (book-to-market-value gap) (Mouhoud & Plihon, 2007). Cette dernière catégorie renvoie plus directement au pouvoir de la firme sur son environnement direct, de sa capacité à accroître ses revenus dans le temps.

Dans la pharmaceutique, les capitaux intangibles sont en ce sens des outils essentiels. La mise sur le marché de nouveaux médicaments est complexe, leur développement est long et risqué financièrement. Il faut compter entre 6 et 12 ans depuis la découverte d’une molécule et son autorisation de mise sur le marché. Les phases de développements qui s’assurent de la sécurité et de l’efficacité d’un médicament sont fortement réglementées et amènent plusieurs projets à être abandonnés faute de résultats satisfaisants. Il faut ajouter à cela que contrairement à d’autres secteurs technologiques, les copies de médicaments (appelés génériques) sont relativement aisées2. Pour le secteur, la monopolisation intellectuelle leur permet de rembourser les coûts de l’innovation et de maximiser leurs profits en maintenant

2Plusieurs études ont noté que dans des secteurs très innovants aux USA (Mansfield, 1986) et en Suisse (Harabi, 1994) (Thumm, 2004) l’utilisation de brevets et autres précédés légaux sont rarement privilégiés. Le coût de la procédure ainsi que le risque de dévoiler des informations sensibles à la concurrence semblent primer.

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6 l’exclusivité des ventes sur des traitements fraîchement développés. Ces éléments ont amené les firmes pharmaceutiques à améliorer sensiblement leur dotation en capital intangible et à étendre progressivement leurs droits à l’échelle globale. Pourtant, l’accumulation de capitaux intangibles de qualité n’est pas automatique. L’innovation et l’accès aux flux de connaissances ont un coût. Le niveau et la qualité de ces derniers sont, en ce sens, le résultat stratégique des firmes en matière d’innovation.

L’économie politique du capital intangible

Si le concept d’intangibilité est connu par la science économique depuis des décennies, c’est au travers des travaux de Carole Corrado, Dan Sichel et de Charles Hulten que la notion d’intangibilité se popularise et s’enracine véritablement, dans le débat académique néoclassique, au début des années 2000 (Haskel & Westlake, 2018). Il s’agit alors de mesurer et de comparer le processus en intangibilité que connaissent les économies occidentales notamment à des fins de politiques économiques et d’analyses comparatives. Dans la littérature proche de Carole Corrado, l’accent est mis sur leur productivité factorielle, c’est-à-dire du degré de participation des intangibles dans la production des firmes (Corrado et al., 2006) (Corrado et al., 2012) (Chen et al., 2016).

Autrement dit, les intangibles sont considérés comme des facteurs de production auxquels l’on attache un niveau de productivité. Leur nature particulière est considérée comme décisive et peut se résumer dans la fameuse formule des quatre « S » :

« scalability, sunkeness, spillovers and synergies ». (Haskel & Westlake, 2018)

Le cœur de la littérature est, en ce sens, marqué par la nécessité de mesurer la contribution des intrants intangibles (input) sur la courbe de croissance de l’économie (output). Un exercice qui n’est pas sans rappeler les tentatives répétées des économistes néoclassiques à faire entrer, dans leur fonction de production multifactorielle, l’ensemble des contributions à la croissance depuis la fin des années 1920 (Cobb & Douglas, 1928) (Hodgson, 2014). Dans le langage de l’économie néoclassique, on parle plus généralement d’élasticité :

« Put differently, they need to know the “elasticities” of different inputs, that is, the percentage change in output that results from the use of one percent more of an input,

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7 everything else being equal. Conceptually, input elasticities are close to returns to scale so we might expect them to vary both across and within industries. » (O’Sullivan, 2019).

L’enjeu de l’école néoclassique est d’expliquer le niveau de compétitivité des firmes par leurs capacités à améliorer leur dotation factorielle en actifs intangibles (Bontempi &

Mairesse, 2015) (Marrocu et al., 2012). À long terme, il s’agit d’expliquer l’inexpliqué (Piekkola, 2010), c’est-à-dire, de résoudre les problèmes des déséquilibres économiques en faisant remonter à la surface des données jusque-là invisibles.

Plusieurs angles morts peuvent déjà être formulés. Premièrement, leur approche n’apporte que très peu d’éclaircissement sur le processus de production lui-même ; ce dernier étant vu comme une boîte noire dans laquelle seule la composition du capital varie. Les processus de création et d’extraction de la valeur sont très rapidement absents ou sont relégués aux questions des avantages comparatifs. Leur grille de lecture peine à dessiner les canaux par lesquels le profit se réalise et s’extrait, leur analyse se réduisant à souligner la contribution en bout-de-chaîne des facteurs de production. Aussi, la notion de capital, réduite à une fonction productive, perd de son pouvoir explicatif puisqu’évacuant toutes les relations sociales qui lui sont attachées.

Plusieurs littératures nous semblent, en ce sens, plus à même de garantir un arrière-plan théorique. La première issue de l’école l’institutionnaliste américaine se rapporte principalement aux travaux de Thorstein Veblen (1965 [1904], 1908a 1908b) sur la nature du capital et des investissements dans les multinationales du début du XXe siècle. Chose intéressante, Veblen discute très tôt du capital intangible dans ses articles de 1908. Le point qu’il soulève révèle d’une analyse fine de son époque, spectateur du développement singulier de la firme capitaliste monopolistique. Pour lui, la question du pouvoir est essentielle puisqu’il s’agit d’analyser les moyens que détiennent les propriétaires des firmes pour extraire et maintenir un haut niveau de rendement de leurs activités économiques. La pratique du pouvoir monopolistique, qui imprègne ses écrits, structure son analyse des intangibles. Ceux-ci sont vus comme la capitalisation des avantages comparatifs d’une firme sur l’ensemble de sa production. Cette capitalisation a pour but d’alimenter et d’élargir son flux de revenus. Les actifs intangibles sont le moyen, et le pouvoir de monopole le but. Pour lui, ces actifs peuvent être clairement identifiables (brevet, franchise), ou non (concession commerciale d’un gouvernement, accès privilégié

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8 au commerce extérieur, protection juridique, et autre forme de privilège institutionnel).

« In the broad and loose sense in which it is now currently employed it is extended to cover such special advantages as inure to a monopoly or a combination of business concerns through its power to limit or engross the supply of a given line of goods or services. » (Veblen, 1908b)

Ces deux catégories représentent la somme des positions de pouvoir d’une firme dans l’économie. L’intérêt de l’approche Veblenienne est alors de considérer la stratégie des firmes comme d’une politique d’accession au pouvoir de monopole, celle-ci passe nécessairement par la création de systèmes institutionnels favorables à la firme et restrictifs à d’autres acteurs. Les facteurs de production ne sont pas donnés, mais sont le résultat d’une lutte pour leur accès. Ainsi, la nature des actifs intangibles chez Veblen rompt avec l’idée selon laquelle ceux-ci sont définis par leur rôle productif, au profit de leur capacité à maintenir un pouvoir de monopole dans la société ; ce pouvoir débouchant sur la création de rentes (income-yielding capacity). Du côté des institutionnalistes contemporains, cette perspective est reprise par Marc-André Gagnon dans ses multiples travaux sur les firmes pharmaceutiques. Sa thèse doctorale de 2009 revient sur le paradoxe de la diminution générale de la productivité du secteur qui ne se reflète pas dans une diminution proportionnelle des profits.

Enfin, une série de travaux notamment ceux de Pagano et Rossi (2009) et Pagano (2014) renouvellent la théorie marxiste du capitalisme monopoliste de Henry Braverman (Braverman, 1974) en s’attardant sur le processus de privatisation intellectuelle au sein du système capitaliste. Le capital intangible est, en ce sens, assez proche de l’école institutionnaliste puisqu’affirmant que les dynamiques de privatisation renforcent le pouvoir de monopole du capital sur l’ensemble de la production :

« (…) Marx and Braverman could not see the most extreme and most meaningful step in this monopolization process: the privatization of knowledge and its direct transformation into the most valuable proprietary asset of the firm. » (Pagano, 2014)

Là où la nature des monopoles intellectuels diffère des monopoles physiques réside dans leur capacité à exclure indistinctement toute concurrence à l’échelle globale. Le monopole n’est pas uniquement issu de la concentration des moyens de production physiques, mais issu de l’exclusion juridique de futurs concurrents, sans distinction de leur

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9 situation géographique et de leur situation dans la production (Pagano, 2014). Une vision défendue par Teixeira et Rotta (2012) est que le profit issu des actifs intangibles peut s’observer comme d’une simple rente à l’image d’un propriétaire terrien (modern rent- bearing capital), et non comme d’un revenu issu de leur contribution à la production. Leur raisonnement pose les intangibles comme des actifs sans valeurs productives (valueless knowledge-commodities) dès lors qu’ils sont facilement reproductibles, ou demandent peu de valeur travail à leur reproduction. Leur valeur marchande est ainsi conditionnée exclusivement par le matériel légal qui les contient.

La vision d’un nouvel impérialisme guidé par les intérêts du capital intangible est cohérente avec une partie de la littérature sur les chaînes de valeurs globales (Durand &

Milberg, 2018). Dans les travaux de Rikap (2018), les actifs intangibles sont plus généralement associés à la notion de monopole d’innovation. Le processus cumulatif de ces monopoles permet à certaines firmes d’étendre durablement leur pouvoir sur la production et d’accumuler les rentes qui lui sont associées. Ce processus permet aux firmes dominantes de transformer et de planifier la production dans le sens de leurs intérêts. L’intangibilité du capital des firmes n’est pas uniquement donnée par les nouveaux droits sur la propriété intellectuelle, mais résulte des effets cumulés de monopolisation de l’innovation. En ce sens, la production d’une firme dirigeante est socialement liée à la production d’une firme périphérique.

L’entreprise Novartis : une firme type pour le XXIe siècle

Dans ce travail nous avons choisi de nous concentrer uniquement sur l’entreprise Novartis, plus précisément, sur ses stratégies en matière de production et d’innovation depuis sa naissance en 1996 jusqu’à aujourd’hui. Le choix de Novartis a été motivé par la nature historique de ses transformations productives. En effet, le groupe est le résultat d’une fusion entre deux conglomérats de l’industrie chimique. Sa mutation en une firme pharmaceutique, gouvernée par des enjeux d’innovation, constitue une formidable illustration des transformations de l’industrie suisse durant les années 1990.

Dès sa naissance, Novartis s’impose comme une firme dominante et met l’innovation au centre de ses objectifs productifs :

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« Relentless innovation is the driving strategy behind everything we do. Our success depends on generating new products and services, doing things better than others and remaining on the cutting edge of technology (Novartis, 1997).

Cette formule de Daniel Vasella, premier CEO de Novartis, est conséquente puisqu’elle tranche avec une partie de l’ADN du groupe et affirme publiquement ses ambitions « big pharma », c’est-à-dire, d’intégrer rapidement le cœur industriel qui dirige, influence, et planifie la production (Chandler, 2005) (Gagnon, 2009) (Baranes, 2016).

Une position hégémonique visible à l’échelle de la Suisse où la firme se classe troisième dans le classement des plus grandes multinationales du pays derrière le géant de l’agroalimentaire Nestlé et de son concurrent direct Roche. En 2017, Novartis pesait à lui seul 17.1% de l’indice boursier du Swiss Market Indice (SMI) –l’indice suisse des 20 plus grandes entreprises en termes de capitalisations boursières et correspondant à presque 80%

du marché boursier suisse. Un poids qui devance largement celui des six compagnies de l’industrie traditionnelle du SMI et leurs 13.63% (SIX, 2017). Outre sa taille, la stabilité de son profit net est particulièrement impressionnante notamment lors de conjonctures économiques défavorables. Une stabilité visible en comparaison des autres firmes du SMI pour la période qui suit la crise financière de 2008 et 2009 (Figures 1.). Une stabilité qui semble s’appliquer y compris lors de la crise de la COVID-19, avec une croissance du revenu des opérations attendue en 2020 de 11% à 16% par rapport à 2019 (Novartis Q3 média release, 2020).

En matière d’innovation, la transformation des biotechnologies et l’expiration de multiples brevets dès la fin des années 2000 amènent le groupe à progressivement restructurer ses activités de recherches, et à se tourner vers de nouveaux domaines thérapeutiques tels que les traitements génétiques. La firme renforce sa dotation en capitaux intangibles et augmente progressivement ses budgets de développement de nouveaux traitements. Les alliances et les fusions-acquisitions de firmes innovantes deviennent primordiales. Une formule résumée par le groupe en :

« At Novartis, we believe that biomedical innovation will have an unparalleled impact on all humankind. We are excited at being leaders in this, and we are constantly looking for partners who want to share the journey with us. » (Novartis, 2020)

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11 Figure 1. Profit net de Novartis en comparaison des autres firmes du SMI et de la division pharmaceutique de l’indice en millier de francs suisses.

Sources : Rapports annuels des firmes composant le SMI, complétées pour les années récentes par la base de données Orbis. Les taux de change sont calculés au 31 décembre de chaque année.

En 2020, Novartis se place en troisième position de l’indice IDEA pharma des firmes pharmaceutiques mondiales les plus innovantes. À l’échelle de la Suisse, ce positionnement stratégique coïncide avec l’accroissement soutenu des produits de la propriété intellectuelle : la Suisse comptant le nombre le plus élevé de brevets déposés par nombre d’habitants dans le système de l’office européen des brevets (OEB), avec 988.1 brevets par habitant devançant largement les États-Unis avec 139.9 brevets par habitant. En 2019, Novartis se plaçait à la sixième place du total des compagnies suisses dépositaires de brevets (Rapport annuel OEB, 2019).

En résumé, l’évolution des politiques industrielle de Novartis nous renseigne sur les stratégies de profit qui sont mises en place afin de contourner ou de faire évoluer les contraintes qui pèsent sur sa production. Ces transformations contemporaines de la pharmaceutique sont illustrées au travers d’une firme emblématique du secteur.

0 2000000 4000000 6000000 8000000 10000000 12000000 14000000 16000000 18000000 20000000

2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 Moyennes SMI Moyennes pharmas Novartis

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12 Problématique

L’objectif de notre travail et de proposer une analyse détaillée des politiques de profit chez Novartis. Nous revenons sur ses différents modèles de production, de sa naissance à aujourd’hui. Une attention est donnée au modèle des blockbusters -un modèle basé sur quelques médicaments pouvant atteindre un revenu de ventes proche du milliard de dollars- et qui s’est longtemps imposé comme le modèle dominant de l’industrie. Son déclin, dès le début des années 2010, amène Novartis à déplacer progressivement son attention vers d’autres activités notamment les traitements de niche (des pathologies peu répandues dans la population). Un modèle connu sous l’appellation « nichebuster » (Collier, 2011) (Gagnon, 2015), une fusion entre traitement de niche et revenus d’un blockbuster. Là où celui des blockbusters parie sur la découverte de traitements au sein des laboratoires internes de Novartis, celui des nichebusters s’appuie sur le travail de firmes et d’institutions externes.

À cet égard, nous nous intéressons à deux dynamiques : les transformations historiques du capital du groupe, ainsi que les enjeux de pouvoir sur la production de son innovation. Nous utilisons deux perspectives sur le capital intangible et sur le type de rentes qui lui est associé.

Celle d’Ugo Pagano (2014), qui se réfère majoritairement au développement du droit de la propriété intellectuelle et au phénomène de privatisation des connaissances. Et celle de Cécilia Rikap (2018), qui se réfère principalement aux effets de monopolisation de l’innovation et d’accumulation des positions de pouvoir par les firmes dominantes. La première s’illustre par les droits exclusifs qu’une firme possède, par exemple, sur une entité moléculaire ou un traitement thérapeutique. La seconde se réfère au processus de valorisation unilatérale d’une innovation y compris lorsque celle-ci est produite collectivement.

Ainsi, nous proposons l’analyse suivante : dans quelle mesure existe-t-il, aujourd’hui, un modèle alternatif à celui des blockbusters qui permette à Novartis de faire des profits de manière cohérente au sein du secteur pharmaceutique ?

Notre travail se divise en deux chapitres. Le premier revient sur les modalités historiques des différents modèles : la naissance de Novartis, la période des blockbusters, et enfin la mise en place de modèles alternatifs. Nous analysons la diminution tendancielle des profits qui amène la crise du modèle des blockbusters, ainsi que les réactions du groupe à cette dernière. Pour chaque période, un intérêt particulier est donné aux ratios de profitabilité et

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13 aux structures capitalistes du groupe. Nous passons également en revue les multiples fusions-acquisitions et leurs apports stratégiques pour Novartis.

Dans le second chapitre, nous nous intéressons aux enjeux de pouvoir qui structurent les innovations à disposition du groupe. Le but de ce chapitre est de souligner les outils dont dispose Novartis afin de diminuer ses coûts de R&D et de continuellement alimenter son flux d’innovation. Des outils qui doivent répondre, en partie, à la crise du modèle précédent notamment face à l’augmentation des coûts de la recherche et aux difficultés à innover dans le champ des biotechnologies. Dans ce cadre, une attention particulière est donnée aux processus de monopolisation de l’innovation et de partage de l’effort de production. Ces outils prennent la forme d’externalisation ou d’appropriation du travail de la périphérie. Ils nous renseignent sur la position dominante de Novartis en matière d’innovation, et de leur viabilité dans le modèle des nichebusters.

Méthodologie

Dans ce travail, nous utilisons deux approches distinctes : dans le premier chapitre, nous nous intéressons aux données issues de la comptabilité de Novartis par l’intermédiaire de ses rapports annuels. Cette partie fait dialoguer les données financières du groupe avec différentes narrations stratégiques, notamment celle de la direction et du management depuis presque trente ans. Nous nous référons aux variables financières selon les thématiques discutées. Par exemple, lorsque nous discutons du thème de la profitabilité, nous recourons aux variables liées aux marges de l’entreprise telles que la marge brute, la marge opérationnelle ou la marge nette. Lorsque nous nous intéressons à la composition du capital de Novartis, nous recourons principalement aux ratios liés aux actifs du groupe, tels que la rentabilité des actifs ou la part nette des intangibles dans sa base capitaliste.

Une seconde partie recourt aux données sur les essais cliniques qui précèdent la commercialisation d’un traitement. Cette partie « zoome », par des statistiques descriptives, sur le cœur de l’innovation à Novartis. Les données sont extraites du site ClinicalTrial.gov, une plateforme créée en 2000 dont l’objectif est de rendre transparentes les phases de développement qui feront potentiellement l’objet d’une demande de mise sur le marché.

Nous proposons la variable des essais cliniques pour trois raisons. Premièrement, le financement de la R&D pour les grosses firmes pharmaceutiques s’est progressivement

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14 détourné des phases de recherche pour se concentrer sur les phases de développement.

Deuxièmement, l’étendue géographique et les nécessités matérielles des essais cliniques en font des étapes complexes et originales en matière d’organisation industrielle. Enfin, si le contenu de la plateforme est avant tout de nature scientifique et médicale, il est possible de retracer des informations essentielles, telles que la location des phases de développement, les sources de financement ou les noms des institutions qui collaborent avec Novartis.

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1 Le modèle des blockbusters : de l’âge d’or à la recherche d’alternatives

Dans ce chapitre, nous nous intéressons aux transformations des stratégies de profit mises en place par Novartis. Nous considérons les différentes contraintes qui conditionnent la croissance du groupe : les impératifs économiques liés aux activités pharmaceutiques telles que la gestion des coûts, ou l’accès à l’innovation, ainsi qu’aux contraintes extérieures telles que les conditions de remboursement des médicaments ou les réglementations d’autorisations de mise sur le marché. Nous passons chronologiquement en revue le cas de Novartis dès sa naissance en 1996, puis de son insertion dans le modèle des blockbusters. Un modèle en déclin dès les années 2010 qui conduit Novartis à de nouvelles stratégies : production de médicaments génériques (des copies de médicaments dont le brevet est expiré), et production de traitements de niches à destination de pathologies beaucoup moins répandues. La stratégie des traitements de niche aussi appelée nichebuster s’ancre aujourd’hui comme le modèle dominant du groupe.

L’innovation est appréhendée différemment selon les deux modèles. Là où celui des blockbusters parie sur la découverte de traitements au sein des laboratoires internes à la firme, celui des nichebusters s’appuie sur un réseau de firmes et d’institutions externes.

L’innovation est progressivement externalisée afin de réduire les coûts et les risques de cette dernière. En termes de profits, la période des blockbusters est marquée par un système de rentes issues principalement du droit de la propriété intellectuelle qui se développe parallèlement à sa stratégie commerciale. La période des traitements de niches, de son côté, est caractérisée par un système de rentes issues principalement des monopoles de l’innovation et induites par la fragmentation des activités scientifiques liées aux biotechnologies. Pour notre firme, les conditions de ces transformations peuvent se résumer de la manière suivante : comment soutenir, dans le temps, un haut niveau de profitabilité en minimisant les coûts et les risques de l’innovation dans un environnement de forte régulation des prix et d’autorisation de mise sur le marché (Matthieu Montalban, 2011) (M. Montalban & Sakinc, 2013). Tous ces éléments sont liés. Par exemple, un médicament considéré comme très innovant -c’est-à-dire dont les effets face aux autres traitements concurrents sont significatifs- se justifiera plus facilement d’une autorisation

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16 de mise sur le marché et d’un prix de remboursement élevé (Abecassis & Coutinet, 2015).

Innover ou démontrer l’innovation est au centre des préoccupations industrielles de Novartis :

« A strong consolidation process is redefining the competitive nature of our traditional business environment. The Healthcare sector, once provider-oriented, is becoming increasingly payor- and consumer-driven. We face increased risks as stringent cost control measures in many national markets make the search for pharmaceutical innovation more expensive and its rewards less attractive. » (Novartis Management, 1996).

À des fins de précision, lors que nous utilisons dans ce travail le terme d’innovation, nous nous référons principalement à des propriétés thérapeutiques. Autrement dit : un nouveau traitement, une nouvelle utilisation d’un traitement existant, ou une nouvelle technique de production d’un traitement. Le degré d’innovation est contenu dans sa capacité à répondre de manière plus efficace, moins coûteuse, ou moins invasive que ses prédécesseurs à un besoin (ou un marché) thérapeutique quelconque. Une définition proche de Rikap (2018):

« Summing up, we are referring to innovations understood as knowledge based creative results. »

Une innovation peut être très satisfaisante au sens des objectifs qu’elle se donne (dans notre cas améliorer la réponse thérapeutique), mais être sous-valorisée par le secteur industriel car présentant une trop faible rentabilité économique -l’inverse étant vrai. C’est le cas, par exemple, des traitements génétiques qui se développent dès la fin du XXe siècle qui présentent un intérêt médical aujourd’hui peu contesté, mais qui restent longtemps marginaux voire boudés par Novartis. Une tension qui nous renvoie à la dualité marxiste entre la valeur d’usage d’un traitement et sa valeur marchande fixée par l’industrie. À noter que la frontière floue entre ces deux notions est souvent entretenue par l’industrie pharmaceutique (Mazzucato, 2018).

En termes de construction, ce chapitre analyse pour chaque période les restructurations du capital du groupe -investissements, désinvestissements, fusions et acquisitions- ainsi que le type d’innovation qui est poursuivie. Nous faisons discuter, autant que possible, ces deux dynamiques avec les positions managériales de Novartis et les transformations du secteur dans son ensemble.

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17 1.1 L’entreprise Novartis dans le contexte de transformation de la pharmaceutique Cette section revient sur les transformations du secteur pharmaceutique au sein desquels Novartis naît en 1996. Plus précisément, de son éloignement avec le secteur traditionnel de la chimie, ainsi que des alliances précoces en matière de biotechnologies. Durant cette période, Novartis centralise progressivement ses activités autour de la pharmaceutique. La constitution de partenariats scientifiques met à niveau le groupe en matière de connaissances technologiques et intègre à long terme une partie de leurs activités.

Novartis est une entreprise issue de deux conglomérats de la chimie qui, jusqu’aux années 1980, correspondent assez généralement aux normes caractéristiques du capitalisme industriel de l’après-Seconde Guerre mondiale (Chandler, 2005) : forte verticalité de la production par la multiplication des filiales et des investissements directs, ainsi qu’une forte horizontalité par la diversification des activités de l’entreprise. La pharmaceutique bien que particulièrement rentable est uniquement considérée comme une branche de l’industrie chimique :

« Drug innovation was a highly profitable activity for innovating firms during most of this period. Up to the early 1980s, double digit rates of growth in earnings and return-on- equity were the norm for most pharmaceutical companies, and the industry as a whole ranked among the most profitable in the United States and in Europe. » (McKelvey &

Orsenigo, 2001) (Statman, 1983).

L’arrivée dans les années 1980 des nouvelles biotechnologies marque progressivement le renouveau de l’industrie. Ces dernières sont souvent considérées comme d’une révolution dans le champ de la recherche scientifique.

Issue des études sur le vivant (bactéries et autres procédés biologiques) les biotechnologies se renouvellent en 1970 dès lors que les connaissances en matière d’ADN se développent, et que les travaux sur les gènes se matérialisent. Pour le dire plus simplement, ces dernières améliorent la compréhension du processus de création et de reproduction des cellules des organismes vivants. Désormais, un laboratoire peut, par exemple, reproduire artificiellement une molécule à partir d’une base ADN quelconque (Buchholz & Collins, 2013). Outre la production de nouvelles molécules, la biotechnologie permet d’améliorer significativement la méthode scientifique. Elle permet une recherche rationnelle et guidée de l’outil biologique dans la conception d’un traitement médical. Elle s’oppose aux méthodes de

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18 criblage aléatoire, une forme de recherche « à tâtons », de la période précédente (Malerba et al., 2006). Le renouveau de la méthode scientifique ouvre ainsi la porte à un nouveau champ de découvertes moléculaires et à de nouvelles technologies liées à l’ingénierie biologique.

Une partie importante de la littérature (Bell, 1998) (Enriquez & Goldberg, 2000) (Boston Consulting Group & Tollman, 2001) s’est concentrée sur le caractère révolutionnaire de la méthode comme unique facteur explicatif des dynamiques industrielles. Cette perspective manque pourtant d’intégrer les dimensions institutionnelles qui accompagnent ces évolutions. D’un côté, accéder aux connaissances et à l’innovation nécessite un contexte institutionnel favorable. Un point qui fait écho aux travaux de Fabienne Orsi et Benjamin Coriat (2003) :

« Tout se passe en effet comme si, après les très fortes pertes de compétitivité de l’industrie américaine dans les années 1980, une réaction s’était organisée, dans les domaines technologiques nouveaux, pour permettre aux firmes de se doter, à travers un nouveau droit de la PI, d’un accès privilégié aux connaissances de base fournies par le système scientifique américain ». (Orsi & Coriat, 2003).

De l’autre, la complexité et l’amplitude des biotechnologies conduisent à une forte fragmentation du processus scientifique. Leur centralisation est difficile et rend décisif le choix des alliances. En conséquence, si dans le champ scientifique la rupture est considérable, son prolongement dans le système de production des firmes pharmaceutiques ne se fait pas automatiquement et suit un chemin autrement plus sinueux (Hopkins et al., 2007).

1.1.1 Des conglomérats de la chimie à la firme pharmaceutique : la naissance de Novartis Novartis est créé en 1996 par la fusion directe de deux importantes firmes bâloises actives dès la fin du XIXe dans la fabrique de colorant synthétique à destination de l’industrie textile : Ciba-Geigy (Ciba pour l’abréviation de Gesellschaft für Chemische Industrie in Basle, ou Société de l’Industrie chimique de Bâle) et Sandoz. Une fusion qui marque l’époque tant par le montant total de l’opération avoisinant les 30.1 milliards de dollars américains, que par le poids de la firme dans les secteurs qu’elle contrôle. En 1997, selon Sascha Schmidt et Edwin Rühli (2002) Novartis se positionne systématiquement dans le top dix mondial pour

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19 l’ensemble de ses divisions. Ces dernières sont réparties en trois grandes branches : la pharmaceutique, la nutrition et l’agrobusiness (Novartis, 1996). La fusion se donne pour objectif de recentrer les activités des deux précédentes firmes autour des activités à hautes valeurs ajoutées en particulier autour de la pharmaceutique. Cette restructuration affirme les ambitions de Novartis sur le terrain de la pharmaceutique ou plus généralement dans les secteurs de la santé. En 1995, Sandoz préparait le terrain en se séparant de sa division chimique par l’introduction en bourse (IPO) de Clariant, spécialisée dans la production de colorant et d’additifs. Les deux firmes, jusqu’en 1996, déplacent leurs divisions « santé » et

« pharmaceutique » en tête de leurs activités productives (Figure 2.). Dès la fusion en 1996, Novartis se sépare consécutivement de la branche Ciba Spécialités Chimiques, ainsi que de la branche Master Builders Technologies (MBT) spécialisée dans les matériaux de construction.

Figure 2. Création de Novartis et centralisation progressive du capital de Sandoz, et de Ciba- Geigy vers le secteur de la pharmaceutique en pourcentage total des ventes de 1995.

Sources : « Dear Shareholders », document de 1996 à destination des actionnaires lors de la fusion. La dernière catégorie représente une projection de ventes pour l’année 1996 telle qu’anticipée par la direction.

Il faut attendre la fin des années 1990 pour que le processus de centralisation des activités pharmaceutiques se complète. En 1999, la division agriculture est abandonnée et engendre Sygenta, une compagnie implantée en Suisse résultant du partenariat entre Novartis et AstraZeneca. Cet abandon est justifié par l’instabilité des cycles économiques dans le business de l’agrochimie, la nécessité de reconcentrer la production ainsi que la pression

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20 politique sur le développement des organismes génétiquement modifiés. Pour Novartis, il s’agit de la fin du concept de Life Science, hérité de Sandoz, qui pariait sur une synergie entre l’agriculture et la pharmaceutique en matière d’innovation biotechnologique. Un concept longtemps défendu par Danielle Vasella qui prend fin en 1999 :

« From the beginning, it was clear to us that a diversified business portfolio brought with it extra complexities, especially on terms of knowledge, resource allocation and decision- making. At a minimum, the costs of these complexities were to be counter-balanced by real synergies between the sectors. » (Vasella, 1999)

En matière de gestion des coûts, la transition permet notamment de diminuer significativement le prix des marchandises intermédiaires (Cost of Good Sold, COGS) et d’améliorer drastiquement la marge brute –calculée à partir du chiffre d’affaires moins le coût des marchandises intermédiaires (Figure 3.).

Figure 3. Évolution de la marge brute et désinvestissements dans les secteurs de la construction, de la chimie traditionnelle et de l’agrobusiness à Novartis.

Sources : Rapports annuels Sandoz, Ciba-Geigy et Novartis 1993-2019.

Le modèle des conglomérats chimiques, contrairement au secteur pharmaceutique, est marqué par une forte dépendance aux produits intermédiaires qui correspondent à un peu moins de la moitié du total du chiffre d’affaires. Cette dépendance s’explique par la forte

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21 diversification des activités en particulier chez Ciba-Geigy qui comptabilise un COGS proche du double de celui de Sandoz. Cette tendance est radicalement inversée en 1997, dès que les filières de la chimie et de la construction sont abandonnées. Le déclin est spectaculaire et marque le renversement industriel de la firme. Entre 1993 et 2001, le coût des marchandises intermédiaires dans chiffre d’affaires passe de 42% à 25%, autrement dit une diminution de 17% du budget annuel attribué à ce poste et une augmentation inversement proportionnelle de la marge brute. À titre d’exemple, au sein des rapports annuels, les problématiques liées à l’inflation ou aux fluctuations des prix des produits importés ne sont quasiment plus abordées, là où les thématiques liées au remboursement du prix des médicaments deviennent systématiques.

1.1.2 Les alliances précoces en matière de biotechnologies

Du côté des biotechnologies, plusieurs centres technologiques gravitent autour de la firme et jouent leur rôle périphérie de de soutien à l’innovation. Chez Novartis, le tournant stratégique remonte peu avant la fusion de 1996, précisément du côté de Sandoz. La principale préoccupation qui apparaît dès le milieu des années 1990 est de renouveler les produits en cours de développement (pipeline) et de ne pas prendre du retard sur le niveau des connaissances biotechnologiques. Du côté des divisions pharmaceutiques, ce sont les fameux blockbusters qui deviennent le centre des préoccupations. À cette fin, Sandoz affirme dès le début des années 1990 la nécessité de recourir aux partenariats internationaux en matière d’innovation. La restructuration générale du groupe, cette même année, remplit son objectif en décentralisant le pôle technologique désormais indépendant des directions sectorielles (Sandoz, 1990). En 1991, la compagnie s’ouvre définitivement vers l’extérieur dans le cadre de son programme d’investissement Innovascan : un budget d’un milliard de francs suisses, sur cinq ans, destinés à la biotechnologie (Informa, 1991). Un projet qui conduit à l’achat de 60% des parts de l’entreprise biotechnologique Systemix en 1991–une acquisition complétée à 100% dès 1998 (The New-York Time, 1991). Dans cette direction, en 1995 suivant le spin-off de Clariant, Sandoz prend le contrôle de l’entreprise Genetic Therapy Inc., spécialisée dans les traitements génétiques, lors d’une transaction à presque 300 millions de dollars (The New-York Times, 1995). Les années suivantes, des partenariats publics de long terme pour la recherche sont conclus et forment, aujourd’hui

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22 encore, une partie du cœur périphérique de la recherche à Novartis : le Dana-Farber institute, La Jolla institute, l’Université de Chicago, l’Université John Hopkins ou encore le Max Plank Institute à Berlin (Sandoz, 1993).

Du côté de Ciba-Geigy, il faut attendre 1994 pour voir un tournant en matière d’innovation technologique par l’acquisition de 49.9% des parts de la compagnie biotechnologique Chiron pour un montant de 2.1 milliards de dollars. Un revirement notoire, qui s’oppose à son management traditionnel. La préoccupation jusqu’ici était de maintenir une production diversifiée et de haute qualité dans les strictes frontières de son portefeuille d’entreprises (corporate portfolio management) :

« (…) the necessary innovation were expected primarily from internal research. This was based on the assumption that qualitative growth that built on Ciba’s strengths was superior to the acquisition of external innovation. » (Schmidt & Rühli, 2002).

L’innovation était considérée uniquement comme un complément à la logique industrielle à des fins de compétitivité et de pouvoir de marché (Ciba-Geigy, 1990). La majorité des projets de R&D était, en ce sens, entreprise uniquement à l’intérieur de la firme.

En conclusion, les années qui précèdent la fusion sont importantes pour comprendre la direction que prend Novartis dès sa création. Ces dernières rompent définitivement avec la logique industrielle de la décennie précédente et marquent le virage des nouvelles technologies. En termes d’innovation, cette période peut être considérée comme une période d’intégration, et de mise à niveau des connaissances scientifiques. La majorité des alliances et des acquisitions biotechnologiques garantissent un accès direct aux connaissances qui se développent durant les années 1990, elles reposent sur le pari de découvrir, à l’interne, de nouveaux traitements innovants.

1.2 L’âge d’or des blockbusters, un haut niveau de profits et une innovation empêchée

Cette section revient sur la période blockbuster de Novartis, de son expansion jusqu’à son déclin dès le début des années 2010. Schématiquement, on peut résumer ses objectifs théoriques de la manière suivante : commercialiser un traitement qui réponde à un besoin thérapeutique largement répandu au sein de la population (un traitement de masse) et dont l’efficacité face aux traitements concurrents peut être démontrée. Le revenu des ventes,

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23 proche du milliard de dollars annuels, permet d’amortir l’ensemble des dépenses de la R&D nécessaires à sa découverte, ainsi qu’aux frais de marketing nécessaires à sa commercialisation. Cette stratégie, lorsqu’elle est menée à bien, est caractérisée par un haut niveau de profit, mais d’une dépendance à quelques produits phares. En matière d’institutions, l’intensification des droits de la propriété intellectuelle et le recours massif aux outils du marketing soutiennent les ventes. Les revenus de la propriété intellectuelle constituent une part essentielle des profits : le droit international, sous l’effet du traité ADEPIC, permet en effet aux firmes de breveter une nouvelle entité moléculaire pendant 20 ans, garantissant par la même occasion un pouvoir de monopole sur sa production et sur sa commercialisation. D’un côté, les produits vendus sont protégés internationalement par le système des brevets. L’extension des marchés permettant de continuellement diluer l’utilisation de leurs monopoles intellectuels. De l’autre, le marketing s’occupe de la concurrence résiduelle en justifiant auprès des institutions payeuses les effets

« significatifs » du traitement face aux produits similaires.

Toutes ces exigences conditionnent la direction de l’innovation vers des traitements au format « simple » à commercialiser, pour lesquels des économies d’échelles sont possibles.

Nous présentons à cet égard le cas des activités de l’entreprise Systemix, acquise par Novartis pour sa spécialisation dans les thérapies génétiques, mais abandonnée au cours de l’année 2000, car présentant une trop faible valeur marchande dans le portefeuille du groupe.

1.2.1 Centralisation du capital et concentration des ventes : la recette des profits élevés Chez Novartis, la période blockbuster débute, comme nous l’avons vu, peu de temps avant la naissance du groupe, mais s’ancre véritablement dès lors que le concept de Life Science est abandonné en 1999. Selon Montalban et Erdem Sakinç (2013), le modèle productif des blockbusters est en ce sens le résultat de l’échec des stratégies alternatives. Un modèle principalement ex post plutôt qu’une stratégie ex ante. Si le modèle est définitivement présent au sein de Novartis, le maintien des activités « Nutrition » ainsi que le développement progressif de sa division de médicaments génériques expliquent le faible ratio des blockbusters sur les ventes totales du groupe. À titre de comparaison, toujours selon les travaux de Montalban et d’Erdem Sakinç (2013), Novartis comptabilise en 2000 un

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24 ratio de blockbusters (en fonction de son chiffre d’affaires) de 6% contre une moyenne européenne à 9%. De même en 2011, avec un ratio de 26% contre une moyenne européenne de 30%. Une dynamique à la hausse, pour un niveau légèrement inférieur à la moyenne des firmes européennes. L’année 2007 est une année pivot puisque vendant successivement son unité « Gerber » puis son unité « Nutrition Médicale » au géant suisse de l’agroalimentaire Nestlé pour un montant respectif de 5.5 et de 2.5 milliards de dollars américains.

En matière de ventes, deux tendances importantes se complètent : une augmentation généralisée des blockbusters sur les activités du groupe et un accroissement significatif du poids moyen de ces derniers sur l’ensemble du chiffre d’affaires (Figure 4.). Pour le dire différemment, le ratio moyen par blockbuster atteint dans les années 2000 un niveau extrêmement élevé –avec un pic en 2007. Quant à la « norme blockbuster » (atteindre le milliard), celle-ci s’implante durablement comme une condition nécessaire aux futurs traitements commercialisés par le groupe. Ce schéma de croissance marque une période de haute rentabilité dans les affaires de Novartis. L’amélioration significative de la marge opérationnelle –le rapport entre le résultat d’exploitation et le chiffre d’affaires- dès 1997 et jusqu’à 2010 illustre ce propos (Figure 5.). La marge opérationnelle est un ratio financier qui nous renseigne sur la profitabilité des activités productives de l’entreprise, c’est-à-dire sa capacité à améliorer son chiffre d’affaires en fonction de l’évolution des charges. Outre la diminution du coût des marchandises intermédiaires, que nous avons présentées plus haut, l’accélération des ventes est soutenue principalement par un haut niveau de dépenses en marketing avec une croissance de 26% en valeurs absolues entre 1996 et 2001. En proportion du chiffre d’affaires, ce poste de dépenses passe de 32% à 38% dès les cinq premières années de la fusion.

La nécessité de faire croître à tout prix les ventes a par ailleurs conduit certaines firmes du secteur à influencer les scientifiques ou les médecins à prescrire plus que nécessaire leurs traitements. En 2020, s’est clôturé un procès long de neuf ans perdu par Novartis accusé de verser des pots-de-vin au corps médical :

« Acting U.S. Attorney Audrey Strauss in Manhattan called the incentives for doctors

“nothing more than bribes” and said federal healthcare programs paid hundreds of millions of dollars in reimbursements for prescriptions tainted by kickbacks. » (Reuters, 2020)

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25 Figure 4. Dynamiques du pourcentage total de blockbusters et ratio moyen par blockbuster sur l’ensemble des ventes du groupe Novartis.

Sources : Rapports annuels Novartis 1996-2019. L’échelle de gauche correspond au pourcentage total de blockbuster dans le chiffre d’affaires du groupe. L’échelle de droite correspond au ratio moyen de chaque blockbuster.

Figure 5. Dépenses en marketing, en R&D en pourcentage du chiffre d’affaires, et marge opérationnelle à Novartis

Sources : Rapports annuels Sandoz, Ciba-Geigy, Novartis 1993-2019. L’échelle de gauche correspond au pourcentage des dépenses dans le chiffre d’affaires. L’échelle de droite correspond aux taux de marge opérationnelle.

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R&D/Chiffre d'affaires Marketing/Chiffre d'affaires Marge opérationnelle

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26 Cette pratique constitue, selon Marc-André Gagnon (2011), l’essence même des stratégies de profit de la pharmaceutique en matière de blockbusters : créer des narratifs médicaux autour de leurs produits et coopter les institutions influentes du corps scientifique et médical. Cette dernière s’appuie notamment sur des falsifications de données scientifiques ou sur l’évacuation d’évidents biais dans les essais cliniques (Jureidini & McHenry, 2009) (Astier, 2012). Dans le pire des cas, ces pratiques conduisent aux scandales sanitaires aujourd’hui bien connus en Europe : le cas du Vioxx commercialisé par Merk et retiré en 2004, ou celui du Médiator en 2011, un médicament commercialisé par Les Laboratoires Servier. D’une certaine manière, cette période se distingue par l’objectif mercantile de Novartis qui doit maintenir à tout prix une marge et un niveau de demande élevé. Le dynamisme de la stratégie des blockbusters étant conditionné à sa capacité à écouler, à partir d’innovations périodiques, un volume croissant de ses produits phares. Les critères auxquels l’innovation doit répondre pour s’insérer durablement dans le modèle sont particulièrement difficiles à atteindre, et ce, malgré une augmentation constante des budgets de R&D -à raison de presque 5% du chiffre d’affaires de Novartis lors de ses dix premières années d’existence.

1.2.2 L’innovation sacrifiée : le cas de l’acquisition de Systemix

La limitation des critères de validité d’une l’innovation par l’industrie conduit à tendre le modèle ainsi qu’à abandonner de multiples projets innovants. Autrement dit, le modèle est caractérisé par un écart croissant entre les critères de profitabilité d’une innovation et ses critères thérapeutiques. Si, dans un premier temps l’innovation thérapeutique est nécessaire afin d’intégrer un secteur de masse, son importance passe au second plan dès lors que le processus de monopolisation intellectuelle prend le pas. Les effets de la propriété intellectuelle permettant notamment de contenir le rattrapage technologique de la concurrence sur une échelle aussi vaste que son marché. À cet égard, le choix de la production d’une innovation est avant tout dépendante de critères marchands : niveau de la demande mondiale (universalité du traitement ou non), type de pathologies visé (maladie uniformément répandue dans la population), degré de protection des brevets (avec une priorité sur la nouvelle entité moléculaire (NEM)).

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