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L'évaluation dynamique de la syntaxe

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Master

Reference

L'évaluation dynamique de la syntaxe

POZNIAK, Katrina

Abstract

L'évaluation statique du langage oral, qui consiste à évaluer les performances langagières d'un enfant à un moment donné, pose un certain nombre de problèmes. En effet, ce type d'évaluation peut engendrer des biais lors de l'évaluation d'enfants de langues et de cultures diverses. Ainsi, les tests statiques entraînent souvent un sous- ou un sur-diagnostique d'un trouble du langage oral chez ces enfants. L'évaluation dynamique serait une alternative à l'utilisation de tests statiques, car elle évalue le potentiel d'apprentissage, les connaissances fluides de l'enfant et non pas ses connaissances cristallisées, ses performances langagières à un moment donné. Notre étude porte sur l'évaluation dynamique de la morphosyntaxe expressive et fait partie d'un projet pilote sur l'évaluation dynamique du langage oral en langue française. Nous avons donc élaboré une tâche dynamique de morphosyntaxe expressive ainsi qu'une échelle de modifiability et des stratégies d'apprentissage...

POZNIAK, Katrina. L'évaluation dynamique de la syntaxe. Master : Univ. Genève, 2021

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:153840

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MAITRISE UNIVERSITAIRE EN LOGOPEDIE

Section de Psychologie

L’EVALUATION DYNAMIQUE DE LA SYNTAXE

Mémoire réalisé par Katrina POZNIAK

SOUS LA DIRECTION DE

Dr. Hélène DELAGE

Dr. Margaret KEHOE–WINKLER

Juin 2021

15’521 mots

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Remerciements

Je tiens tout d’abord à remercier Mesdames Hélène Delage et Margaret Kehoe-Winkler pour leur aide, leurs précieux conseils et leur disponibilité tout au long de ce travail. J’aimerais également remercier Madame Olivia Hadjadj pour son implication et son aide.

Je remercie chaleureusement ma collègue Jennifer, avec qui j’ai effectué ce projet, pour sa collaboration, son investissement et son soutien. Je tiens également à la remercier d’avoir créé toute seule, lors du confinement dû à la pandémie de COVID-19, les images utilisées dans notre tâche dynamique.

J’aimerais également remercier mes collègues Sarah, Claudia et Giulia pour leur collaboration, leur soutien et leurs encouragements tout au long de ce projet.

Je tiens à remercier Camille Guigout et Emilie Marti pour leur engagement et leur aide lors des passations effectuées dans les écoles.

Je souhaite remercier les Services PPLS des régions Dôle et Venoge-Lac, le Centre La Cédille ainsi que les établissements scolaires pour leur disponibilité et leur collaboration.

Je remercie tous les enfants et familles qui ont participé à ce projet et qui ont permis la réalisation de ce travail.

J’aimerais remercier ma famille et mes amis pour leur soutien et leur positivité tout au long de ce travail.

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En raison de la pandémie de COVID-19, les contenus du mémoire ont dû être adaptés par rapport au contrat initial.

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Résumé

L’évaluation statique du langage oral, qui consiste à évaluer les performances langagières d’un enfant à un moment donné, pose un certain nombre de problèmes. En effet, ce type d’évaluation peut engendrer des biais lors de l’évaluation d’enfants de langues et de cultures diverses. Ainsi, les tests statiques entraînent souvent un sous- ou un sur-diagnostique d’un trouble du langage oral chez ces enfants. L’évaluation dynamique serait une alternative à l’utilisation de tests statiques, car elle évalue le potentiel d’apprentissage, les connaissances fluides de l’enfant et non pas ses connaissances cristallisées, ses performances langagières à un moment donné. Notre étude porte sur l’évaluation dynamique de la morphosyntaxe expressive et fait partie d’un projet pilote sur l’évaluation dynamique du langage oral en langue française.

Nous avons donc élaboré une tâche dynamique de morphosyntaxe expressive ainsi qu’une échelle de modifiability et des stratégies d’apprentissage. Notre échantillon était composé de 42 enfants dont 24 enfants à développement typique et 18 enfants avec un trouble développemental du langage. Au sein de l’échantillon, il y avait 22 enfants monolingues et 20 enfants bilingues. Nous avons administré à tous les enfants une tâche statique de morphosyntaxe expressive (BILO 3C, Production d’énoncés), une tâche dynamique de morphosyntaxe expressive ainsi qu’un test de raisonnement non-verbal (Matrices de Raven).

Nous avons également rempli une échelle de modifiability et des stratégies d’apprentissage en lien avec la tâche dynamique. Cette dernière évalue six structures syntaxiques dont deux structures simples et quatre structures complexes. Lors de la tâche dynamique, l’enfant devait produire la structure cible en réponse à une question posée par l’expérimentateur. S’il n’arrivait pas à produire la structure cible, l’expérimentateur lui présentait plusieurs niveaux d’étayage, jusqu’à ce qu’il réussisse à produire la structure attendue. En effet, cette tâche se base sur la méthode de l’incitation graduée. Nous avons mesuré le nombre d’indices nécessaires pour produire la structure cible et la modifiability. Aux tâches statiques et dynamiques ainsi qu’à l’échelle de modifiability, les enfants avec trouble développemental du langage obtiennent des scores significativement plus faibles que les enfants à développement typique. De plus, la tâche dynamique ainsi que l’échelle de modifiability ne différencient pas les enfants bilingues des enfants monolingues. En conclusion, l’évaluation dynamique semble donc être une évaluation prometteuse pour identifier les enfants avec un trouble développemental du langage. Toutefois, de futures recherches sont nécessaires afin de résoudre les limites de notre étude.

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Table des matières

Introduction ... 8

1. L’évaluation problématique du langage oral ... 9

1.1 Trouble développemental du langage ... 9

1.1.1 Définition ... 9

1.1.2 Diagnostic : les problèmes dus à l’utilisation des tests standardisés ... 9

1.2 L’évaluation dynamique du langage – une alternative... 11

1.2.1 Théories et origines de l’évaluation dynamique du langage ... 11

1.2.2 Définition et objectifs de l’évaluation dynamique du langage ... 12

1.2.3 Méthodes utilisées dans le cadre de l’évaluation dynamique du langage ... 12

1.2.4 Echelle de modifiability ... 15

1.3 Evaluation dynamique de la morphosyntaxe ... 15

1.3.1 Développement typique de la morphosyntaxe ... 15

1.3.2 Difficultés morphosyntaxiques chez les enfants TDL ... 16

1.3.3 Tâche dynamique de production de structures syntaxiques ... 17

1.3.4 Protocole personnel de Leroy (2019) ... 18

1.3.5 Tâche d’amorçage de passives ... 19

2. Partie expérimentale ... 21

2.1 Objectifs du travail de mémoire ... 21

2.2 Question de recherche ... 21

2.3 Méthode ... 21

2.3.1 Participants ... 21

2.3.2 Matériel et procédure ... 23

2.3.3 Plan d’expérience ... 31

2.3.4 Hypothèses opérationnelles ... 31

3. Résultats ... 34

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3.1 Analyses descriptives ... 34

3.2 Analyses statistiques ... 35

3.3 Analyses exploratoires ... 38

4. Discussion ... 42

4.1 Explications des résultats liées aux hypothèses opérationnelles ... 42

4.1.1 Hypothèse 1 : Performances plus faibles des enfants TDL à la tâche dynamique de morphosyntaxe expressive ... 42

4.1.2 Hypothèse 2 : Performances plus faibles des enfants TDL à l’échelle de modifiability et des stratégies d’apprentissage ... 44

4.1.3 Hypothèse 3 : Effet de l’âge sur les performances des enfants TDL et DT à la tâche dynamique de morphosyntaxe expressive ... 44

4.1.4 Hypothèse 4 : Effet du statut linguistique sur les performances à la tâche statique 45 4.2 Explications des analyses exploratoires ... 45

4.2.1 Lien entre les performances à la tâche dynamique et l’échelle de modifiability ... 45

4.2.2 Analyse qualitative des différents types d’étayage ... 46

4.2.3 Impact de la réversibilité sur les performances à la tâche dynamique ... 46

4.2.4 Lien entre le raisonnement non-verbal et les performances aux tâches chez les TDL ... 47

4.3 Limites et améliorations ... 47

4.3.1 Caractéristiques des participants ... 47

4.3.2 Tâche dynamique de morphosyntaxe expressive ... 48

4.3.3 Subjectivité de l’échelle de modifiability et des stratégies d’apprentissage ... 50

4.3.4 Pas d’impact du statut linguistique sur les performances à la tâche statique ... 51

5. Conclusion ... 53

6. Références ... 54

Annexes ... 58

Annexe I : Formulaire de consentement ... 58

Annexe II : Autorisation de conservation des enregistrements audio ... 62

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Annexe III : Questionnaire parental ... 64

Annexe IV : Protocole de passation ... 68

Annexe V : Echelle de modifiability et des stratégies d’apprentissage ... 69

Annexe VI : Protocole de la tâche expressive de morphosyntaxe ... 71

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Introduction

Les logopédistes sont de plus en plus confrontés à l’évaluation d’enfants de langues et de cultures variées. Ils utilisent des tests standardisés afin d’évaluer le langage oral de ces enfants. Or, plusieurs auteurs mettent en évidence des problèmes quant à l’utilisation des tests statiques chez des enfants bilingues et/ou multiculturels. En effet, ces tests engendrent plusieurs biais, ce qui amène les enfants avec un trouble développemental du langage à être sous- ou sur- diagnostiqués. Afin de répondre à ces problèmes, certains chercheurs proposent une approche n’évaluant pas les performances langagières d’un enfant à un moment donné, mais son potentiel d’apprentissage : une évaluation dynamique du langage. Ce travail de mémoire s’inscrit dans le cadre d’un projet pilote portant sur la création d’une batterie d’évaluation dynamique du langage oral destinée aux enfants francophones. Nous avons créé une tâche dynamique de morphosyntaxe expressive afin de déterminer si elle permet de différencier les enfants avec un trouble développemental du langage des enfants à développement typique, aussi bien chez les monolingues que chez les bilingues.

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1. L’évaluation problématique du langage oral

1.1 Trouble développemental du langage

1.1.1 Définition

En clinique, les logopédistes utilisent des tests standardisés afin d’évaluer le langage oral, notamment pour évaluer les enfants avec un trouble développemental du langage (TDL).

Selon le projet CATALISE-2 (Bishop et al., 2017), ces enfants présentent un trouble du langage oral qui peut atteindre les versants expressif et/ou réceptif et qui peut impacter les différents niveaux du langage oral : phonologie, lexique, morphosyntaxe et narration. La prévalence du TDL est estimée à 7 % chez l’enfant, mais peut varier en fonction des critères d’inclusion et d’exclusion du TDL choisis par les auteurs (Tomblin et al., 1997 ; Norbury et al., 2016). Selon CATALISE-2, il n’existe pas d’étiologie connue du TDL. Il existe également une comorbidité entre les troubles neurodéveloppementaux : en plus d’un TDL, un enfant peut présenter, par exemple, un TDAH, des troubles spécifiques des apprentissages, ou un trouble développemental de la coordination (TDC). Contrairement à d’autres classifications comme l’ICD-11, CATALISE-2 souligne le fait que l’enfant TDL peut avoir un raisonnement non- verbal inférieur à la moyenne, sans pour autant présenter une déficience intellectuelle. En effet, une étude de Norbury et al. (2016) met en évidence le fait qu’au niveau de la sévérité du trouble langagier, des problèmes sociaux, émotionnels et du comportement ainsi que des difficultés scolaires, il n’existe pas de différence entre les enfants TDL avec un raisonnement non-verbal dans la norme et les enfants TDL avec des habiletés non-verbales faibles, se situant entre -1 et -2 écarts-types.

1.1.2 Diagnostic : les problèmes dus à l’utilisation des tests standardisés

Les tests standardisés utilisés en logopédie permettent donc d’évaluer les différents niveaux du langage oral que sont la phonologie, le lexique, la morphosyntaxe et la narration.

Ces tests sont caractérisés par l’évaluation des performances de l’enfant à un instant t (Gutiérrez-Clellen & Peña, 2001). Ainsi, ils évaluent les connaissances cristallisées de l’enfant.

L’utilisation des tests statiques a plusieurs avantages. En effet, ces tests sont normés, objectifs et la plupart du temps, les tâches administrées sont relativement rapides et simples au niveau

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du matériel utilisé et de la cotation (Glaspey & Stoel-Gammon, 2007). Toutefois, plusieurs auteurs mettent en évidence des limites lors de l’utilisation de ces tests statiques. Ainsi, les tâches peuvent être culturellement biaisées (De Lamo White & Jin, 2011) : des études ont montré, par exemple, que l’interprétation d’images est propre à chaque culture et que l’utilisation d’images peut donc engendrer un biais culturel. Les tests statiques peuvent également engendrer un biais linguistique, car ils ne tiennent pas compte des différences dialectales. En effet, le niveau de langage et la variante linguistique utilisés dans les tests standardisés ne sont pas toujours compris ou utilisés par l’enfant testé (De Lamo White & Jin, 2011). L’enfant peut donc donner des réponses qui sont non attendues. Les tests statiques peuvent également créer un biais de standardisation car les normes ne sont pas adaptées aux enfants plurilingues (Hasson & Joffe, 2007 ; Kapantzoglou et al., 2011). A cause de ces biais, les enfants TDL sont donc souvent sous-diagnostiqués ou sur-diagnostiqués par les tests standardisés (Camilleri & Law., 2007 ; Kapantzoglou et al., 2011). Pour finir, plusieurs études soulèvent des difficultés dans les apprentissages de manière générale chez les enfants TDL (Lammertink et al., 2017). Selon Kapa et Plante (2015), les enfants TDL ont également des déficits au niveau des fonctions exécutives, aussi bien sur des mesures verbales que non- verbales. Les enfants TDL ont notamment des difficultés au niveau de la mémoire de travail, plus précisément au niveau de l’administrateur central, le système qui contrôle l’attention, tant sur les mesures verbales que non-verbales (Henry & Botting, 2017). Les enfants TDL présentent donc des difficultés hétérogènes dans plusieurs domaines et ces difficultés dépassent la sphère du langage.

Ainsi, plusieurs auteurs proposent d’utiliser une approche dynamique pour identifier les enfants TDL. Cette dernière permettrait de palier les limites des tests standardisés et serait plus adaptée à l’évaluation des capacités d’apprentissage des enfants TDL, étant donné les difficultés qu’ils présentent dans les apprentissages, notamment au niveau des fonctions exécutives. En effet, l’évaluation dynamique du langage permet d’évaluer le potentiel d’apprentissage de l’enfant au lieu de ses performances à un moment donné (Law & Camilleri, 2007).

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1.2 L’évaluation dynamique du langage – une alternative

1.2.1 Théories et origines de l’évaluation dynamique du langage

La Zone Proximale de Développement (ZPD) de Vygotsky (1978) et l’Expérience d’apprentissage médiatisé (Mediated Learning Experience) de Feuerstein (1979) sont les deux théories principales à partir desquelles a été élaborée l’évaluation dynamique du langage oral (Hasson & Joffe, 2007 ; Hasson et al., 2012 ; Camilleri et al., 2014).

La Zone Proximale de Développement (Vygotsky, 1978) correspond à la zone dans laquelle l’enfant peut apprendre grâce à l’aide d’un adulte plus expérimenté ; cette zone correspond au potentiel d’apprentissage de l’enfant. La ZPD se situe entre deux zones : une zone, située en-dessous de la ZPD, dans laquelle l’enfant peut apprendre sans l’aide d’un adulte et une zone située au-dessus de la ZPD dans laquelle l’aide de l’adulte n’est pas suffisante pour que l’enfant puisse apprendre ou réussir une tâche. Evaluer la ZPD, soit le potentiel d’apprentissage de l’enfant, prédirait mieux son fonctionnement et son diagnostic futur (Hasson et al., 2012). Toutefois, dans le cadre des tests standardisés, le clinicien ne doit pas donner de feedback, ni aider l’enfant (Glaspey & Stoel-Gammon, 2007). En effet, les tests statiques évaluent les connaissances cristallisées et non pas fluides de l’enfant (Hasson et al., 2012). L’évaluation dynamique permet donc d’identifier la ZPD de l’enfant, plus précisément d’évaluer quelles sont les compétences maximales dont dispose l’enfant lorsqu’il est aidé par l’expérimentateur. Elle permet également de déterminer quels types d’aide sont utiles pour l’enfant : quels types d’étayage peuvent lui être bénéfiques dans le cadre de ses apprentissages (Hasson et al., 2012).

Feuerstein (1979), quant à lui, parle d’une triade qui correspond à l’interaction entre l’apprenant qui, ici, est l’enfant, l’évaluateur et la tâche (c’est-à-dire la difficulté de la tâche). L’évaluateur est donc un médiateur qui permet à l’enfant d’acquérir des connaissances.

L’évaluation consiste à identifier comment l’enfant résout le problème et comment il transfère des connaissances apprises à de nouveaux problèmes. Ainsi, l’évaluation met en évidence le potentiel d’apprentissage de l’enfant et sa capacité à changer.

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1.2.2 Définition et objectifs de l’évaluation dynamique du langage

L’évaluation dynamique du langage consiste ainsi à évaluer le potentiel d’apprentissage linguistique de l’enfant, contrairement aux tests standardisés qui évaluent le niveau de performance de l’enfant à un moment t (Hasson & Joffe, 2007). Elle permettrait de contrer les biais culturel, linguistique et de standardisation engendrés par les tests statiques (Hasson &

Joffe, 2007). L’évaluation dynamique serait donc plus adaptée aux enfants bilingues et multilingues, aux enfants de milieux culturels divers et aux enfants qui sont difficilement testables ou qui ne peuvent pas être testés par les tests standardisés (Peña, 2000 ; Hasson &

Joffe, 2007 ; Camilleri et al., 2014). C’est notamment le cas des enfants présentant d’autres troubles que des troubles du langage isolés (Hasson & Joffe, 2007), tels qu’un trouble du spectre de l’autisme (TSA) ou un trouble du comportement. L’évaluation dynamique permettrait donc de limiter le risque de sous-diagnostiquer et de sur-diagnostiquer ces enfants (Hasson & Joffe, 2007). En plus des avantages figurant ci-dessus, l’évaluation dynamique donne également des informations qui permettent de mettre en place une prise en charge plus adaptée et efficace (Gutiérrez-Clellen & Peña, 2001 ; Hasson & Joffe, 2007), en identifiant notamment quels sont les types d’étayage les plus bénéfiques pour l’enfant. Il ne faut toutefois pas négliger les limites de l’évaluation dynamique. Elle peut prendre beaucoup de temps en fonction de l’enfant (Haywood & Tzuriel, 2002 ; Hasson & Joffe, 2007) : plus l’enfant a besoin d’étayage pour, par exemple, produire l’item cible, plus l’évaluation va durer dans le temps.

Certains auteurs se posent également la question de la validité et de la fidélité de l’évaluation dynamique (Haywood & Tzuriel, 2002 ; Hasson & Joffe, 2007). Le fait qu’il n’existe pas, à ce jour, de test d’évaluation dynamique du langage en français constitue une vraie limite à l’utilisation de l’évaluation dynamique en clinique.

1.2.3 Méthodes utilisées dans le cadre de l’évaluation dynamique du langage

Trois types de méthodes sont utilisées dans le cadre de l’évaluation dynamique du langage : le test – enseignement – retest, l’incitation graduée et l’expérience d’apprentissage médiatisé (Gutiérrez-Clellen, 2000 ; Gutiérrez-Clellen & Peña, 2001 ; Hasson & Joffe, 2007).

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• Test – enseignement – retest

La méthode du test – enseignement – retest (test – teach – retest) évalue l’enfant avant et après une phase d’enseignement, phase pendant laquelle l’évaluateur aide l’enfant. Cette méthode est donc composée de trois étapes : la phase de pré-test identifie les connaissances de l’enfant. Lors de la phase d’enseignement, l’évaluateur fait comprendre à l’enfant ce qui est attendu de lui dans une tâche donnée et lui montre comment y parvenir, en lui enseignant des stratégies adaptées. La phase de post-test ou de retest permet de mettre en évidence le potentiel d’apprentissage de l’enfant suite à l’intervention (Gutiérrez-Clellen, 2000). En effet, l’expérimentateur mesure l’amélioration observée ainsi que la modifiability de l’enfant, sa capacité à changer après la phase d’enseignement. Petersen et al. (2017) ont élaboré une évaluation dynamique de la narration dans le but d’identifier un trouble langagier chez l’enfant.

Cette évaluation se base sur la méthode du test – enseignement – retest. Lors du pré-test, l’expérimentateur raconte une histoire à l’enfant, puis il lui demande de raconter la même histoire. Lors du rappel de l’histoire effectué par l’enfant, l’examinateur évalue des éléments de micro- et de macrostructures, afin d’identifier les connaissances de l’enfant en narration.

Pendant la phase d’enseignement, l’expérimentateur lit une histoire qui n’est pas connue par l’enfant, mais qui a une structure similaire aux histoires des pré- et post-tests. Il aide ensuite l’enfant à raconter l’histoire en utilisant des supports visuels et verbaux (indices verbaux, icônes colorées etc.). Ainsi, l’expérimentateur montre à l’enfant ce que l’on attend de lui lorsqu’il raconte une histoire et lui donne les outils pour y parvenir. Pour finir, lors du post- test, l’examinateur raconte une autre histoire, puis il demande à l’enfant de raconter à son tour l’histoire. Ainsi, les phases de pré- et de post-tests suivent les mêmes étapes. Lors de la phase de rappel du post-test, l’expérimentateur évalue à nouveau les éléments de micro- et de macrostructures rapportés par l’enfant. En comparant les scores obtenus lors des phases de pré- et de post-tests, il peut évaluer si l’enfant a réussi à utiliser les stratégies qui lui ont été enseignées et donc évaluer s’il y a une amélioration significative des performances de l’enfant en discours narratif lors du post-test.

• Incitation graduée

La deuxième méthode utilisée par l’évaluation dynamique est la présentation d’indices gradués, du moins au plus aidant (graduated prompting). Ceci permet d’évaluer le nombre

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d’indices dont l’enfant a besoin pour produire l’item cible. A titre d’illustration, dans le Scaffolding Scale of Stimulability (Glaspey & Stoel-Gammon, 2005), un enfant est incité à produire un phonème (consonnes et clusters) à l’intérieur d’un mot. Si le phonème est mal prononcé, l’expérimentateur présente une série d’indices gradués jusqu’à ce que l’enfant réussisse à produire le son correctement ou que l’expérimentateur réalise que le phonème est non stimulable chez l’enfant. Par exemple, l’expérimentateur peut d’abord expliquer à l’enfant comment placer les articulateurs, puis si l’enfant n’arrive toujours pas à produire le phonème cible, il lui donne un modèle verbal. Le modèle verbal est également composé de plusieurs étapes : segmentation, prolongation du phonème, production du son en même temps que l’enfant et manipulation des articulateurs ou représentation tactile du son.

• L’expérience d’apprentissage médiatisée

Enfin, la troisième méthode utilisée en évaluation dynamique est l’expérience d’apprentissage médiatisée (MLE) qui consiste à attirer l’attention de l’enfant sur les stimuli pertinents et à faciliter le transfert et la généralisation des compétences apprises à de nouvelles tâches. Il y a une interaction entre l’expérimentateur et l’enfant pendant l’évaluation afin d’aider l’enfant à prendre conscience de ce qu’il est en train de faire. La MLE est composée de quatre caractéristiques :

- Le sens : l’expérimentateur explicite la signification de l’activité à l’enfant et l’aide à comprendre pourquoi il se trouve dans une situation d’apprentissage ;

- L’intentionnalité : l’évaluateur explicite l’objectif de l’apprentissage ;

- La transcendance : l’expérimentateur rend explicite le lien entre l’activité faite et les expériences vécues par l’enfant ;

- Le sentiment de compétence : l’évaluateur donne un feedback à l’enfant et le félicite.

Dans une étude sur les compétences d’apprentissage de mots (Kapantzoglou et al., 2011), l’expérimentateur explique ainsi l’objectif de l’activité (sens), fait un lien entre l’activité et les expériences de l’enfant qui ont lieu dans sa vie quotidienne (transcendance) et à la fin de l’évaluation, souligne le changement positif que cette activité permet (sentiment de compétence).

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1.2.4 Echelle de modifiability

Lors de l’évaluation dynamique, en plus de l’utilisation d’une ou de plusieurs méthodes mentionnées ci-dessus, certains auteurs utilisent une échelle de modifiability : la Learning Strategies Checklist (Lidz, 1991 ; Peña, 2000). Cette échelle évalue les différents comportements de l’enfant dans une situation d’apprentissage pendant la tâche d’évaluation dynamique du langage ainsi que le niveau d’effort requis par l’examinateur (De Lamo White

& Jin, 2011). Selon Peña (2000), il existe un lien entre le score de modifiability et les capacités langagières de l’enfant. En effet, les enfants qui ont des capacités langagières plus faibles présentent des difficultés plus importantes, en comparaison aux enfants à développement typique à, par exemple, transférer ce qu’ils ont appris.

1.3 Evaluation dynamique de la morphosyntaxe 1.3.1 Développement typique de la morphosyntaxe

Afin de mieux comprendre les difficultés morphosyntaxiques présentes chez les enfants TDL, il est important de connaître le développement de la morphosyntaxe chez l’enfant à développement typique (DT). Le français est une langue dont la structure canonique, l’ordre de base des mots, est la suivante : sujet – verbe – objet (SVO). La structure SVO est donc une structure simple. Les structures complexes, quant à elles, sont engendrées par le déplacement et/ou l’enchâssement d’un syntagme ou d’une proposition, ce qui peut entraîner un ordre non- canonique des mots. Un enfant doit pouvoir maîtriser la production de structures simples avant de pouvoir produire des structures complexes (Satoer, 2006). Les enfants DT maîtrisent la production de structures simples telles que les structures SVO avant l’âge de 4 ans, alors que la production de structures plus complexes est acquise plus tardivement (Satoer, 2006). En effet, selon le F-LARSP 1.0 (Maillart et al., 2012), le taux de production des structures SVO est de 81% chez les enfants âgés de 2;6 à 3;0 ans tandis que la production des passives est acquise vers 4-6 ans (Satoer, 2006). D’autres structures complexes telles que les relatives sujets et objets sont produites vers 6 ans, avec une maîtrise complète des relatives sujets à 6 ans alors que les relatives objets ne sont complètement maîtrisés après l’âge de 6 ans (Satoer, 2006). Les relatives objets sont considérées comme étant plus complexes que les relatives sujets, car elles engendrent un ordre non-canonique (Satoer, 2006). Sur le plan expressif, les enfants DT ont

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déjà, vers 6 ans, une bonne maîtrise des pronoms clitiques objets. Au lieu de dire le garçon mange la pomme, l’enfant peut pronominaliser le thème la pomme en le remplaçant par le pronom la et ainsi produire une structure contenant un pronom clitique objet : le garçon la mange. Cependant, la production de cette structure complexe n’est maîtrisée complètement qu’à l’âge de 8 ans (Tuller et al., 2011). En ce qui concerne la production d’autres structures morphosyntaxiques comme le temps du passé, le taux de production d’un auxiliaire suivi d’un participe passé (= le passé composé) est de 71% chez les enfants âgés de 2;0 à 2;6 selon le F- LARSP 1.0 (Maillart et al., 2012).

Chez les enfants DT, il y a également, sur le plan réceptif, un impact de la réversibilité dans l’acquisition de la morphosyntaxe. Une phrase est dite non-réversible lorsque l’agent de la proposition et le thème ne peuvent pas être inversés, plus précisément lorsque le sujet ne peut pas prendre la place de l’objet et vice-versa. Par exemple, à partir de la phrase la fille porte le sac, le fait d’inverser l’agent et le thème rendrait la phrase agrammaticale : *le sac porte la fille. Les structures réversibles, quant à elles, permettent l’inversion de l’agent et du patient.

Par exemple, il est tout à fait grammatical de produire la fille porte le garçon et le garçon porte la fille. En français, la compréhension de structures non réversibles est acquise avant celle des structures non réversibles. Par exemple, la compréhension des passives et des relatives objets non réversibles est acquise avant la compréhension des passives et des relatives objets réversibles (Segui & Léveillé, 1977). Nous n’avons pas trouvé d’étude portant sur l’effet de la réversibilité en production, à part une thèse de Cronel-Ohayon (2004) qui n’observe pas un effet de la réversibilité sur la production de structures actives et passives chez les enfants DT et TDL.

1.3.2 Difficultés morphosyntaxiques chez les enfants TDL

Plusieurs études mettent en évidence des difficultés morphosyntaxiques persistantes chez les enfants TDL, notamment pour les structures complexes. En effet, les enfants TDL ont des difficultés à produire les pronoms clitiques objets (Parisse & Maillart, 2004). De plus, même les adolescents TDL ont tendance non seulement à les omettre, mais également à éviter de produire ce type de structure (Tuller et al., 2011). C’est pour cela que certains auteurs proposent d’utiliser la production de pronoms clitiques objets comme marqueur clinique lors de l’évaluation d’enfants TDL (Paradis et al., 2003, cités par Parisse & Maillart, 2004). Les enfants TDL ont aussi des difficultés importantes à produire les flexions temporelles du passé :

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ils omettent souvent l’auxiliaire lorsqu’ils emploient le passé composé (Jakubowicz, 2003, citée par Parisse & Maillart, 2004). De plus, ce décalage pour la production des temps du passé persiste chez les enfants TDL (Jakubowicz, 2003, citée par Parisse & Maillart, 2004), et semble également persister chez l’adulte. En effet, dans une étude de cas portant sur un jeune adulte TDL, le pourcentage de productions correctes de l’imparfait et du plus-que-parfait est significativement inférieur à celui du présent (Audollent & Tuller, 2003). Les enfants TDL ont également des difficultés à produire des passives. Dans une tâche d’amorçage de passives (Stanford & Delage, submitted), lorsque les participants ne produisent pas une structure passive alors qu’elle est induite par un indice visuel, ils produisent le plus souvent une structure active.

Toutefois, suite à la présentation d’un indice linguistique, le nombre de structures actives produites par les DT diminue. Or, les enfants TDL produisent dans un tiers des cas une phrase active, une structure simple, après la présentation d’un indice linguistique qui devrait induire la production d’une passive. Enfin, les enfants TDL présentent des difficultés à produire les relatives sujets et objets, en comparaison aux phrases SVO (Damourette, 2007, cité par Jakubowicz & Tuller, 2008). Dans une étude de Tuller et al. (2012), les adolescents TDL de 11 à 16 ans produisent significativement moins de subordonnées relatives en comparaison au groupe contrôle constitué d’enfants DT de 11 ans. De manière générale, les adolescents TDL produisent des structures moins complexes que des enfants DT de 11 ans et des enfants DT plus jeunes, appariés en Longueur Moyenne des Enoncés (LME), âgés de 6 ans. Ainsi, même à l’adolescence, les participants avec TDL évitent la complexité syntaxique, et notamment la production de phrases enchâssées (Tuller et al., 2012). Selon la Derivational Complexity Hypothesis, les difficultés syntaxiques rencontrées par les enfants TDL sont dues à des opérations syntaxiques qui engendrent un coût de traitement important, particulièrement au niveau de la Mémoire de Travail (Jakubowicz & Tuller, 2008). C’est le cas, notamment, des structures complexes qui entraînent des déplacements et enchâssements syntaxiques plus importants et nombreux. Ainsi, plusieurs chercheurs démontrent et tentent d’expliquer l’évitement de la complexité syntaxique chez l’enfant TDL.

1.3.3 Tâche dynamique de production de structures syntaxiques

Il existe peu d’études sur l’évaluation dynamique de la morphosyntaxe. Dans la littérature scientifique anglophone, la tâche dynamique de production de structures syntaxiques du DAPPLE (Hasson et al., 2012) est la référence principale. Les méthodes utilisées sont la

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méthode du test – enseignement – retest et la présentation d’indices gradués. Lors des pré- et post-tests, l’enfant décrit des images en réponse à la question « Qu’est-ce qu’il se passe ? ».

Pendant la phase d’enseignement, l’expérimentateur utilise des indices gradués. Si, en décrivant l’image, l’enfant produit une phrase correcte qui contient trois à quatre syntagmes, par exemple le garçon mange une banane ou la grand-mère dort sur une chaise dans le jardin, l’expérimentateur cote 3 points pour l’item, puis il présente l’item suivant. Cependant, si la phrase est erronée ou si l’enfant n’arrive pas à la produire, l’évaluateur entame l’étape de l’incitation graduée. En effet, l’expérimentateur pose des questions plus ciblées telles que Que mange-t-il ? ou Où dort-elle ? Si, suite à la présentation de ces indices, l’enfant réussit à produire la structure cible, l’expérimentateur cote 2 points et présente le prochain item. Si l’enfant n’arrive toujours pas à produire la phrase cible, l’expérimentateur modélise la phrase afin de permettre à l’enfant de la répéter. Si l’enfant réussit cette étape, la cotation est de 1 point, sinon elle est de 0 points. Dans les deux cas, l’expérimentateur introduit l’item suivant.

Les auteurs de cette étude ont comparé les performances entre le groupe d’enfants bilingues suivis en logopédie et le groupe contrôle constitué d’enfants bilingues à développement typique. Lors de la phase d’enseignement, le groupe avec un suivi logopédique a besoin d’un plus grand nombre d’indices que le groupe contrôle. Cette différence entre les deux groupes est significative. Les auteurs concluent donc que leur tâche de production de structures syntaxiques permet une bonne discrimination des enfants DT et TDL et qu’elle permettrait de diagnostiquer les enfants bilingues qui ont un trouble du langage oral.

1.3.4 Protocole personnel de Leroy (2019)

Il n’existe pas, dans la littérature scientifique francophone, une étude qui porte sur l’évaluation dynamique de la morphosyntaxe. Toutefois, en clinique, Leroy (2019) a élaboré un protocole personnel non normé. Cette logopédiste l’utilise pour identifier les cibles en morphosyntaxe qui doivent être travaillés lors de la prise en charge d’enfants avec un trouble du langage oral. Leroy utilise, comme méthode, la présentation d’indices gradués. La première étape du protocole est l’étape sans indice : l’enfant produit correctement la structure cible en décrivant une image, par exemple la fille a attaché le chien (la cible ici est la production d’une structure contenant un temps du passé). Si l’enfant n’arrive pas à la produire correctement, Leroy passe à l’étape priming qui consiste à présenter un exemple de la structure cible.

L’exemple pour le passé composé est la phrase la fille a attaché la vache. L’enfant doit ensuite

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produire correctement une phrase qui contient la structure cible. Si l’enfant ne réussit pas à faire ceci, Leroy passe à l’étape de complétion de phrase lors de laquelle l’enfant doit compléter la phrase commencée par la logopédiste. Si l’enfant ne réussit pas à compléter la phrase, la logopédiste demande à l’enfant de répéter la phrase cible (étape répétition).

Grâce à ce protocole clinique, Leroy peut identifier les structures syntaxiques stimulables (c’est-à-dire celles que l’enfant peut produire avec étayage), qui se trouvent dans la Zone Proximale de Développement de l’enfant. Ce protocole clinique permet donc également d’identifier les structures syntaxiques qui ne sont pas stimulables, les structures que l’enfant ne réussit pas à produire, même avec un étayage maximal (répétition). Ces structures sont donc hors de la ZPD de l’enfant. Ainsi, le protocole permet d’identifier les structures qui peuvent être ciblées lors de la prise en charge ultérieure.

1.3.5 Tâche d’amorçage de passives

Nous nous sommes également intéressées à des études portant sur l’amorçage de structures syntaxiques, étant donné que l’incitation graduée est une méthode utilisée dans le cadre de l’évaluation dynamique. La tâche d’amorçage de passives s’inscrit dans une étude de Stanford et Delage (submitted). Elle évalue l’impact des indices visuels et linguistiques sur la production de passives chez des enfants TDL et TDAH francophones ainsi que chez deux groupes contrôles constitués d’enfants et d’adultes DT francophones. Les enfants TDL et TDAH présentant des difficultés au niveau de la production des structures non-canoniques et des fonctions exécutives, il peut être difficile de différencier ces deux populations et de poser le bon diagnostic. Ainsi, le but de l’étude de Stanford et Delage (submitted) est d’analyser la production de passives chez les enfants TDL et TDAH francophones. La tâche d’amorçage de passives contient plusieurs étapes : la production de passives sans indice, avec indice visuel et avec indice linguistique. Pendant la phase de familiarisation, l’expérimentateur demande à l’enfant d’identifier les huit personnages qui apparaissent lors de la phase de test. Il lui montre également sous forme d’images les douze actions de la phase de test et lui demande de les nommer. Lors de la phase de test, l’expérimentateur demande à l’enfant de décrire des images en faisant une phrase. Ainsi, les auteurs de cette étude peuvent évaluer à quelle fréquence les enfants et adultes francophones produisent des structures passives sans amorçage. Ensuite, lors de la deuxième étape de la phase test, deux types d’indices visuels sont présentés : soit l’image d’un des deux référents (l’agent ou le patient) est présentée rapidement avant l’image à décrire

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(= amorce référentielle), soit, sur l’image cible, un des référents est en noir et blanc et l’autre en couleur (= amorce attentionnelle). Lors de la troisième étape, l’expérimentateur utilise des indices linguistiques. Le premier indice linguistique est le suivant : suite à la présentation de l’image cible, l’expérimentateur pose une question qui contient une topicalisation ; il met en position de thème un syntagme nominal précis. La topicalisation porte soit sur l’agent de la phrase cible (Que fait la dame ?), soit sur le patient (Qu’est-ce qui arrive à la fille ?). Dans ce dernier cas, on induit la production d’une structure passive. Pour le deuxième indice linguistique, l’expérimentateur pose également une question qui contient une topicalisation du patient ou de l’agent, puis il produit le début de la phrase cible. L’expérimentateur demande ensuite à l’enfant de compléter la phrase cible (Qu’est-ce qui arrive à la fille ? La fille…).

D’après les résultats de cette étude, tous les enfants produisent plus de passives après la présentation d’un indice portant sur le patient de la proposition, que l’indice soit visuel ou linguistique. Toutefois, la présentation d’indices linguistiques génère une production significativement plus élevée de passives que la présentation d’indices visuels. De plus, les enfants TDL sont plus sensibles aux indices visuels tandis que les enfants TDAH sont plus sensibles aux indices linguistiques. Selon les auteurs de cette étude, la sensibilité à un type d’indice pourrait être utilisée lors du diagnostic d’enfants TDL et TDAH, car elle permettrait de différencier ces deux troubles.

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2. Partie expérimentale

2.1 Objectifs du travail de mémoire

L’objectif des travaux de mémoire de la Maîtrise universitaire en logopédie de l’Université de Genève portant sur l’évaluation dynamique du langage est de créer une batterie pilote d’évaluation dynamique en français qui permet d’évaluer les différents niveaux du langage oral (phonologie, lexique, morphosyntaxe et narration). Le but de notre propre travail de recherche est de créer une tâche dynamique du langage évaluant les compétences en morphosyntaxe expressive chez des enfants d’âge scolaire.

2.2 Question de recherche

Notre question de recherche est la suivante : est-ce que la tâche dynamique évaluant la morphosyntaxe expressive permet de différencier un groupe d’enfants présentant un TDL d’un groupe contrôle d’enfants à développement typique, y compris chez des enfants bilingues ?

2.3 Méthode 2.3.1 Participants

Nous avons testé au total 42 enfants francophones. Deux enfants TDL ont été exclus de l’étude, car ils obtenaient un score non déficitaire à l’épreuve standardisée de morphosyntaxe.

Notre échantillon est composé d’enfants bilingues et monolingues. Dans notre étude, un enfant est bilingue lorsqu’il parle, en plus du français, une autre langue au moins 30% du temps (voir le questionnaire parental en Annexe III). Nous avons également séparé les bilingues en deux groupes : un enfant est bilingue simultané lorsqu’il a acquis ses deux langues avant l’âge de 3 ans alors qu’un enfant qui a acquis sa deuxième langue après 3 ans est considéré comme étant bilingue consécutif. En effet, certains enfants de notre échantillon ont appris le français lorsqu’ils ont commencé à aller à l’école. Le tableau I, ci-dessous, résume les caractéristiques des participants.

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Tableau I

Caractéristiques des participants

Enfants DT et TDL Enfants DT Enfants TDL

Nombre total 42 24 18

Moyenne et étendue d’âge

8;2 ans 6;0 – 11;9

8;0 ans 6;0 – 10;6

8;5 ans 6;8 – 11;9

Statut linguistique

22 monolingues

20 bilingues : 9 simultanés 11 consécutifs

15 monolingues

9 bilingues : 5 simultanés 4 consécutifs

7 monolingues

11 bilingues : 4 simultanés 7 consécutifs

Sexe 17 filles

25 garçons

10 filles 14 garçons

7 filles 11 garçons

Les passations des enfants DT ont été effectuées au domicile de l’enfant, à l’Université de Genève, dans les écoles des enfants (Canton de Genève) ou encore à l’aide du logiciel de visio-conférence Zoom pour des raisons de logistique, telles que la distance géographique et le respect des normes liées à la pandémie de COVID-19. Les enfants testés habitent en Suisse, dans les Cantons de Vaud et de Genève ainsi qu’en France voisine. Deux auxiliaires de recherche ont contacté les Directrices et Directeurs de différents établissements scolaires du Canton de Genève et ont effectué cinq passations dans l’Ecole de Beaulieu et l’Ecole des Genêts. Les passations des enfants à développement typique ont eu lieu de juillet 2020 à décembre 2020 ; elles ont été retardées à cause du confinement dû à la pandémie de COVID- 19.

Nous avons recruté les enfants TDL en contactant des logopédistes travaillant dans les services PPLS (Psychologues, Psychomotriciens et Logopédistes en milieu scolaire) de La Dôle et de Venoge-Lac (Canton de Vaud) ainsi que dans le Centre La Cédille (Genève). Nous avons également contacté, via des groupes sur Facebook, deux parents d’enfants résidant dans les Cantons de Fribourg et de Genève. Les enfants TDL de notre échantillon présentent tous au moins une atteinte de la morphosyntaxe expressive : lors du bilan effectué par leur logopédiste, ils avaient obtenu des scores déficitaires, inférieurs à -2 écarts-types, à des tests statiques évaluant la morphosyntaxe expressive. Les passations des enfants TDL ont eu lieu en

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présentiel, à l’exception de deux passations qui ont été réalisées à l’aide du logiciel Zoom. Elles ont été effectuées de novembre 2020 à mars 2021.

2.3.2 Matériel et procédure

• Création de la tâche dynamique évaluant la morphosyntaxe expressive

La tâche dynamique de morphosyntaxe que nous avons créée est inspirée de la tâche de syntaxe expressive du DAPPLE (Hasson et al., 2012), du protocole de Leroy (2019) et de la tâche d’amorçage des passives (Stanford & Delage, submitted) que nous avons présentés en section 1.3. Cette tâche, qui utilise la méthode de l’incitation progressive (graduated prompting), est divisée en deux phases : une phase de familiarisation, suivie par la tâche dynamique évaluant la morphosyntaxe expressive. Nous avons pris des photos de scènes de Playmobil qui ont été présentées, lors des deux phases, sur un écran d’ordinateur, à l’aide du programme PowerPoint.

Lors de la phase de familiarisation, l’expérimentateur montre des images qui illustrent les sept verbes utilisés pendant la phase test. Nous avons choisi les verbes transitifs directs suivants, facilement imageables : laver, tirer, pousser, prendre, couvrir, porter et lancer.

L’expérimentateur montre les images les unes après les autres à l’enfant. Pour chaque photo, il énonce l’action ; il dit par exemple : « ça, c’est laver » (voir Figure 1). Il peut également demander à l’enfant d’essayer de trouver l’action, afin de rendre cette phase plus ludique. Le verbe écrit apparaît aussi sous l’image correspondante, ce qui permet de fournir une aide supplémentaire à l’enfant.

Figure 1

Photo d’une scène de Playmobil représentant le verbe laver, issue de la phase de familiarisation

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Lors de la tâche dynamique de production de structures syntaxiques, nous testons six structures. Deux de ces structures sont des structures simples, car elles sont acquises plus tôt dans le développement des structures syntaxiques et suivent l’ordre canonique du français. Ces structures sont les suivantes :

- La structure sujet-verbe-objet (SVO)

- Une structure contenant un temps du passé (passé composé ou imparfait)

La structure SVOA (sujet-verbe-objet-groupe prépositionnel ou ajout) a été enlevée du protocole suite aux passations effectuées auprès des enfants à développement typique, car les enfants ne comprenaient pas quelle cible ils devaient produire. En effet, la plupart des enfants à développement typique produisaient une structure SVO au lieu d’une structure SVOA. Si nous prenons, comme exemple, l’item 1 de la structure SVOA qui est le garçon lave la télévision avec le chiffon, un enfant pouvait répondre le garçon lave la télé, suite à la question Que fait le garçon ? Ces enfants avaient également besoin de beaucoup d’étayage pour produire une phrase contenant un groupe prépositionnel. Les enfants à développement typique n’obtenant pas de bons scores aux items de la structure SVOA et ces scores ne reflétant pas leurs réelles compétences, nous avons décidé d’enlever cette structure. La version finale du protocole contient donc six structures dont deux structures simples et quatre structures complexes. Etant donné que les enfants TDL présentent des difficultés importantes et persistantes pour la production de structures complexes (Parisse & Maillart, 2004 ; Jakubowicz

& Tuller, 2008 ; Stanford & Delage, submitted), celles que nous avons retenues sont les suivantes :

- La relative sujet

- Le pronom clitique objet - La passive

- La relative objet

Tous les items de la tâche dynamique contiennent des phrases avec un accord sujet- verbe au singulier afin de ne pas ajouter une difficulté morphosyntaxique supplémentaire. Etant donné qu’il y a trois items par structure, cette tâche teste dix-huit items en tout. Chaque structure est composée d’un item non-réversible et de deux items réversibles. Il n’est pas clair si la production des structures réversibles est acquise plus tardivement. Toutefois, nous avons

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décidé d’ajouter cette caractéristique afin d’évaluer si elle apporte un élément de difficulté lors de la production correcte de la structure cible. Des exemples d’une structure simple (SVO) en (1, 2 et 3) et d’une structure complexe (pronom clitique objet) en (4, 5 et 6), ainsi que des items les composant figurent ci-dessous :

(1) Le garçon lance la pomme.

(2) Le papa pousse le cochon.

(3) La mamie tire le chien.

(4) Il les prend (les fleurs).

(5) Il la couvre (la fille).

(6) Elle le pousse (le cheval).

Se basant sur la méthode de l’incitation progressive (graduated prompting), la tâche dynamique de morphosyntaxe est constituée de cinq niveaux d’étayage progressif (voir Tableau II). En effet, le but de cette tâche est d’évaluer si, avec de l’étayage (et avec quel type), l’enfant arrive à produire la structure cible. Si l’enfant arrive à la produire grâce à un des niveaux d’étayage, la structure cible se trouve dans sa Zone Proximale de Développement (ZPD). Si, même avec de l’étayage, l’enfant ne parvient pas à produire la structure cible, cette structure est hors de sa ZPD.

La tâche de morphosyntaxe expressive est constituée de la manière suivante : 1. Question ciblée

L’expérimentateur montre l’image (cf. Figure 2) et pose une question ciblée selon la structure cible. Par exemple, pour l’item 1 de la structure SVO, l’expérimentateur dit :

« Que fait le garçon ? ». Si l’enfant produit la structure attendue (SVO), peu importe les mots qu’il utilise1, l’expérimentateur cote 6 points et présente l’item suivant. Si l’enfant ne réussit pas à produire la structure cible, l’expérimentateur passe au premier niveau d’étayage qui correspond au priming visuel.

1 Il est arrivé que des enfants ne distinguent pas les différents personnages ou qu’ils fassent référence à des personnages et objets qu’ils avaient vus sur des images précédentes.

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Figure 2

Photo d’une scène de Playmobil représentant le premier niveau d’étayage de l’item 1 de la structure SVO, issue de la tâche dynamique de morphosyntaxe

2. Priming visuel

L’expérimentateur remontre la même image. Cette fois-ci, une flèche rouge apparaît au-dessus de l’acteur de la proposition (voir Figure 3). L’expérimentateur repose ensuite la question de l’étape 1. Si l’enfant réussit à produire la structure cible, même s’il utilise des mots qui ne correspondent pas à ce qu’il voit sur la photo, l’expérimentateur cote 5 points et présente l’item suivant. Si l’enfant échoue, l’expérimentateur passe au niveau d’étayage suivant, qui est le priming syntaxique graduel – exemple 1.

Figure 3

Photo d’une scène de Playmobil représentant le deuxième niveau d’étayage de l’item 1 de la structure SVO, issue de la tâche dynamique de morphosyntaxe

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3. Priming syntaxique graduel – exemple 1

L’expérimentateur montre une nouvelle image sur laquelle l’action est la même que celle de l’image de l’étape 1, mais pas l’agent et le patient/thème (voir Figure 4).

L’expérimentateur pose une question similaire à celle de l’étape 1, puis y répond en donnant la structure cible. Par exemple, pour l’item 1 de la structure SVO, l’expérimentateur dit : « Que fait la mamie ? La mamie lance le téléphone. ».

L’expérimentateur remontre ensuite l’image de l’étape 1 (voir Figure 2) et repose la question de l’étape 1. Par exemple, pour l’item 1 de la structure SVO, il dit : « Et là, que fait le garçon ? ». Si l’enfant réussit à produire la structure cible, l’expérimentateur cote 4 points et présente l’item suivant. Si l’enfant ne parvient pas à produire la structure cible, l’expérimentateur passe au niveau d’étayage suivant correspondant au priming syntaxique graduel – exemple 2.

Figure 4

Photo d’une scène de Playmobil représentant le troisième niveau d’étayage de l’item 1 de la structure SVO, issue de la tâche dynamique de morphosyntaxe

4. Priming syntaxique graduel – exemple 2

L’expérimentateur montre une nouvelle image sur laquelle l’agent et l’action sont les mêmes que sur l’image de l’étape 1, mais pas le patient/thème (voir Figure 5).

L’expérimentateur pose la question de l’étape 1, puis y répond en donnant la structure cible. Par exemple, pour l’item 1 de la structure SVO, il dit : « Que fait le garçon ? Le garçon lance la chaussure. ». L’expérimentateur remontre ensuite l’image de l’étape 1 (voir Figure 2) et repose la question de l’étape 1. Par exemple, pour l’item 1 de la

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structure SVO, il dit : « Et là, que fait le garçon ? ». Si l’enfant réussit à produire la bonne structure, l’expérimentateur cote 3 points et présente l’item suivant. Si l’enfant échoue, l’expérimentateur passe au niveau d’étayage suivant, à savoir la complétion graduelle.

Figure 5

Photo d’une scène de Playmobil représentant le quatrième niveau d’étayage de l’item 1 de la structure SVO, issue de la tâche dynamique de morphosyntaxe

5. Complétion graduelle

L’expérimentateur montre l’image de l’étape 1 (voir Figure 2). Il repose ensuite la question de l’étape 1 et donne l’agent de la phrase. Par exemple, pour l’item 1 de la structure SVO, il dit : « Que fait le garçon ? Le garçon … ». Si l’enfant arrive à compléter la phrase en produisant la structure cible, peu importe les mots qu’il utilise, l’expérimentateur cote 2 points et présente l’item suivant. Si l’enfant échoue, l’expérimentateur donne plus d’indices. Ainsi, en fonction de l’enfant, l’expérimentateur peut donner un ou plusieurs syntagmes supplémentaires afin de permettre à l’enfant de compléter la phrase. En fonction du nombre de syntagmes donnés, l’expérimentateur cote 2 ou 1,5 points et introduit l’item suivant. Des explications plus détaillées sont fournies en Annexe VI. Si l’enfant n’arrive pas à compléter la phrase, l’expérimentateur passe au niveau d’étayage suivant : la répétition.

6. Répétition

L’expérimentateur demande à l’enfant de lui répéter la phrase cible. Par exemple, pour l’item 1 de la structure SVO, il dit : « Répète après moi : le garçon lance la pomme. ».

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Si l’enfant réussit à répéter, l’expérimentateur cote 1 point et présente l’item suivant.

Si l’enfant ne réussit pas à répéter, l’expérimentateur cote 0 points et passe à l’item suivant. Dans ce cas-ci, aucun type d’étayage, n’a permis à l’enfant de produire la structure cible, ce qui correspond au point 6 étayages inutiles (voir Tableau II). Cette structure se trouve donc hors de la ZPD de l’enfant.

Tableau II

Les cinq niveaux d’étayage progressif de la tâche dynamique de morphosyntaxe

Etayage Score en fonction de l’indice donné 1. Question ciblée

(Ex : Que fait le garçon ?) 6

2. Priming visuel : apparition d’une flèche

rouge & pointer l’acteur 5

3. Priming syntaxique graduel : donner un exemple, puis un deuxième si besoin

4 (un exemple donné) 3 (deux exemples donnés)

4. Complétion graduelle 2

1.5 (plus qu’un seul syntagme à produire)

5. Répétition 1

6. Etayages inutiles 0

• Echelle de modifiability et des stratégies d’apprentissage

Nous avons élaboré une échelle de modifiability et des stratégies d’apprentissage, en partant d’une adaptation des échelles Modifiability Scale et Learning Strategies Checklist de (Peña, 2000), adaptation qui avait été faite dans le travail de mémoire de Gubser (2016). Dans la checklist des stratégies d’apprentissage, nous avons enlevé deux items (répond aux stimuli pertinents, ignore les stimuli pertinents et transfert inter-tâches) qui n’étaient pas adaptés aux tâches dynamiques créées. De plus, nous avons ajouté un nouvel item (applique les stratégies entre les items d’une même tâche) à la composante Transfert. Notre échelle est donc composée de deux parties :

1. L’échelle de modifiability évaluant l’effort du clinicien et la réponse de l’enfant.

2. La checklist des stratégies d’apprentissage qui comprend trois composantes :

- La composante Attention/Discrimination évaluant l’initiation et le maintien de l’attention avec un minimum de stimuli ;

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- La composante Régulation/Conscience, qui correspond, par exemple, à la capacité de l’enfant à attendre les instructions données par l’évaluateur, à se corriger ; - La composante Transfert évaluant la capacité de l’enfant à appliquer les stratégies

apprises entre les items d’une même tâche.

Le score total est reporté sur une échelle de Likert allant de 0 à 20 (voir Annexe V). Toutes les tâches dynamiques créées dans le cadre du projet pilote sur l’évaluation dynamique du langage oral partagent la même échelle de modifiability et des stratégies d’apprentissage.

• Tâches standardisées

Plusieurs tâches standardisées, statiques, ont été administrées lors des passations. Afin d’obtenir une mesure statique de syntaxe, nous avons fait passer la tâche Production d’énoncés issue du BILO 3C (Khomsi, Khomsi, Pasquet & Parbeau-Guéno, 2007), épreuve standardisée évaluant la morphosyntaxe expressive d’enfants francophones d’âge scolaire. Dans cette tâche, l’enfant voit une image, sur un écran, et entend l’enregistrement audio d’une phrase qui décrit l’image. Il voit ensuite une deuxième image et il entend le début d’une phrase en lien avec cette deuxième image. L’expérimentateur demande à l’enfant de compléter cette phrase. Différentes structures morphosyntaxiques sont testées, comme les flexions nominales au pluriel, les passives, les flexions verbales, etc. Par exemple, lors de l’item 1 de cette tâche (voir Figure 6), l’image de gauche apparaît et l’enfant entend la phrase : Ici, le garçon est debout. Ensuite, l’image de droite apparaît et l’enfant entend le début d’une phrase : Là, la fille…, dont la réponse cible est est assise. Si l’enfant produit l’auxiliaire être conjugué à la troisième personne du singulier ainsi que l’accord du participe passé, l’expérimentateur cote 2 points. S’il ne produit qu’un de ces deux éléments, le clinicien cote 1 point. Si l’enfant ne produit pas les éléments cibles, l’expérimentateur cote 0 points.

Figure 6

Images représentant l’item 1 issu de la tâche Production d’énoncés du BILO 3C

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Nous avons également fait passer les Matrices progressives en couleur (Raven, Raven

& Court, 1998), un test de capacité de raisonnement non-verbal. Dans ce test, l’expérimentateur demande à l’enfant de choisir parmi six images celle qui permet de compléter l’image cible dans laquelle il manque une partie.

En plus des formulaires de consentement et d’autorisation de conservation de l’enregistrement audio (voir Annexes I et II), nous avons demandé aux parents de remplir un questionnaire sur les habiletés langagières de leur enfant (voir Annexe III), version simplifiée du PABIQ (Tuller, 2015). Nous avons également rempli un protocole afin d’obtenir des informations supplémentaires sur l’enfant (voir Annexe IV). La passation dure au total entre 30 minutes et 1 heure, en fonction des capacités attentionnelles et de l’âge de l’enfant.

2.3.3 Plan d’expérience

Les variables indépendantes des tâches standardisés et dynamiques sont les suivantes : - Le statut cognitif de l’enfant, à deux modalités : développement typique (DT) et

trouble développemental du langage (TDL) ;

- Le statut linguistique de l’enfant, à deux modalités : monolingue et bilingue.

Les variables dépendantes des tâches langagières figurent ci-dessous :

- Le score dynamique (score obtenu à la tâche dynamique de morphosyntaxe), sur un total de 108 points ;

- Le score de modifiability, sur un total de 20 points ;

- Le score statique (score obtenu à la tâche de production d’énoncés), sur un total de 36 points.

2.3.4 Hypothèses opérationnelles

• Hypothèse 1 : Performances plus faibles des enfants TDL à la tâche dynamique de morphosyntaxe expressive comparativement aux enfants DT

Selon Parisse et Maillart (2004), les erreurs effectuées par les enfants TDL en morphosyntaxe expressive, notamment au niveau des structures complexes, persistent dans le

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temps. Les auteurs du DAPPLE (Hasson et al., 2012) ont également observé que les enfants TDL ont besoin de significativement plus d’indices que le groupe contrôle à leur tâche dynamique de syntaxe expressive. Ils concluent donc que leur tâche différencie de manière significative les enfants TDL bilingues des enfants DT appariés en âge et en statut socio- économique. Ainsi, si notre tâche dynamique évaluant la morphosyntaxe expressive permet de différencier un groupe contrôle d’enfants à développement typique d’un groupe d’enfants présentant un TDL, y compris chez des enfants bilingues, les enfants avec TDL présenteront des résultats significativement plus faibles que les enfants DT à la tâche dynamique de morphosyntaxe expressive. Plus précisément, si la tâche dynamique évaluant la morphosyntaxe expressive différencie les enfants TDL et les enfants DT, alors nous pouvons formuler l’hypothèse suivante : H1 : Les TDL obtiendront des scores dynamiques significativement plus faibles que les DT.

• Hypothèse 2 : Performances plus faibles des enfants TDL à l’échelle de modifiability comparativement aux enfants DT

Selon Peña (2000), la modifiability est reliée aux capacités langagières. En effet, le score de modifiability permet de distinguer les enfants avec de faibles capacités langagières et les enfants à développement typique, et ce même chez des enfants dont les langues et les cultures sont variées. Par conséquent, si notre tâche dynamique de morphosyntaxe expressive permet de distinguer un groupe d’enfants présentant un TDL d’un groupe contrôle constitué d’enfants à développement typique, les enfants TDL devraient obtenir des résultats significativement plus faibles que les enfants DT à l’échelle de modifiability, c’est-à-dire un score de potentiel d’apprentissage plus faible. Ainsi, si notre tâche dynamique permet de différencier ces deux groupes d’enfants, alors, nous pouvons émettre l’hypothèse suivante : H2 : Les TDL obtiendront des scores de modifiability significativement plus faibles que les DT.

• Hypothèse 3 : Effet de l’âge sur les performances des enfants TDL et DT à la tâche dynamique de morphosyntaxe expressive

Etant donné que l’acquisition des structures syntaxiques suit un ordre plus ou moins stable jusqu’à l’âge de 5 ans au moins (Brown, 1973, cité par Maillart et al., 2012 ; Satoer,

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2006), il devrait exister un effet de l’âge sur les performances à la tâche dynamique, aussi bien parmi les enfants TDL que parmi les enfants DT. Ainsi, nous pouvons émettre l’hypothèse suivante : H3 : plus un enfant est âgé, plus son score dynamique sera élevé.

• Hypothèse 4 : Effet du statut linguistique sur les performances à la tâche statique

Alors que les tests standardisés ont souvent tendance à sous-diagnostiquer ou à sur- diagnostiquer les enfants TDL bilingues (Camilleri & Law., 2007 ; Kapantzoglou et al., 2011), l’évaluation dynamique permettrait de réduire ce risque (Hasson & Joffe, 2007). Ainsi, si la comparaison des tests statique et dynamique évaluant la morphosyntaxe expressive met en évidence, au sein du groupe DT et au sein du groupe TDL, des scores significativement différents chez les enfants monolingues et les enfants bilingues, alors nous pouvons formuler l’hypothèse suivante : H4 : Les enfants monolingues (TDL/DT confondus) auront un score significativement plus élevé que les enfants bilingues au test statique, alors que les enfants monolingues et bilingues auront des performances comparables sur les mesures d’évaluation dynamique.

(35)

3. Résultats

Nous commencerons par présenter les analyses descriptives, puis les analyses statistiques, suivies par quelques analyses exploratoires afin d’améliorer notre tâche dynamique. Nous avons utilisé le logiciel Statistica afin d’effectuer les analyses à partir des données récoltées.

3.1 Analyses descriptives

Nous présentons ci-dessous les moyennes (m) et les écarts-types (σ) du groupe DT et du groupe TDL au test statique (Tableau III), à la tâche dynamique (Tableau IV) et au test de raisonnement non-verbal (Tableau V).

Tableau III

Moyennes et écarts-types des groupes DT et TDL à la tâche standardisée de morphosyntaxe expressive

BILO 3C DT TDL

Production d’énoncés /36 17.38 (8.82) 6.83 (3.78)

Tableau IV

Moyennes et écarts-types (scores totaux) des groupes DT et TDL à la tâche dynamique de morphosyntaxe expressive

Tâche dynamique DT TDL

Score dynamique/étayage /108 88.21 (13.72) 65 (14.18)

SVO /18 17.33 (1.55) 17.17 (1.57)

Passé /18 16.25 (2.35) 12.25 (4.21)

Relative sujet /18 14.83 (3.16) 10.56 (4.05)

Pronom clitique objet /18 13.19 (4.44) 7.47 (4.43)

Passive /18 15.23 (3.07) 10.44 (3.64)

Relative objet /18 12 (3.09) 6.78 (3.7)

Modifiability /20 16.04 (3.39) 13.5 (2.92)

Références

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