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La transformation d'une société de personnes en société de capitaux : aspects du contenu de la modification

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Master

Reference

La transformation d'une société de personnes en société de capitaux : aspects du contenu de la modification

GOENCZY, Guillaume

Abstract

La transformation (LFus) d'une société de personne en une société de capitaux constitue plus qu'un changement superficiel de l'habit juridique. En effet, de nombreux domaines sont réglementés de manière totalement différente. Le présent mémoire en présente certains aspects et tente de proposer des solutions afin d'atténuer la rupture que constitue le passage en société de capitaux. Par une approche tant théorique que pratique, ce travail se concentre sur les aspects de personnalité juridique, de raison de commerce, du transfert du sociétariat ainsi que du droit aux renseignements.

GOENCZY, Guillaume. La transformation d'une société de personnes en société de capitaux : aspects du contenu de la modification. Master : Univ. Genève, 2014

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:77613

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(2)

automne 2014

La transformation d’une société de personnes en société de capitaux : aspects du contenu de la modification

GÖNCZY Guillaume 18 décembre 2014

Reconnaissant

que le plagiat est unanimement considéré comme une faute grave, passible de sanctions de la part de l'autorité compétente de l'Université de Genève, indépendamment des possibles poursuites pénales qu'il peut engendrer,

que sa pratique est notamment incompatible avec le Règlement de l'Université de Genève (art. 38), le Règlement d'études de la Faculté de droit et les Directives en matière de plagiat approuvées par le Conseil de Faculté du 10 octobre 2007;

déclarant

avoir pris connaissance des Règlements et Directives précités,

le/la soussigné(e) atteste que, dans son mémoire, toute affirmation qui n'est pas le fruit de sa réflexion personnelle est attribuée à sa source et que tout passage recopié d'une autre source est en outre placé entre guillemets.

Lieu et date: ………

Signature: ………

(3)

Table  des  matières

I. Introduction...3

II. Personnalité juridique...4

1. Les sociétés de personnes ...4

2. Les sociétés de capitaux...6

3. Contenu de la modification ...6

III. Raison de commerce ...7

A. Règles générales ...8

B. Règles liées à la forme juridique...9

1. Les sociétés de personnes ...9

2. Les sociétés de capitaux...9

3. Contenu de la modification ...10

IV. Le transfert du sociétariat ...11

Entrée ...11

1. La société en nom collectif...11

2. La société en commandite ...12

3. La société anonyme ...12

4. La société à responsabilité limitée ...17

5. La société en commandite par actions ...18

6. Contenu de la modification ...19

V. Droit aux renseignements ...21

1. La société en nom collectif...21

2. La société en commandite ...21

3. La société anonyme ...22

4. La société à responsabilité limitée ...24

5. La société en commandite par actions ...25

6. Contenu de la modification ...25

VI. Conclusion...26

VII. Bibliographie ...28

A. Doctrine ...28

B. Arrêts cités...30

1. Jurisprudence fédérale ...30

2. Jurisprudence cantonale ...31

C. Lois ...31

D. Divers ...31

(4)

I. Introduction

L’entreprise n’est pas immuable. Elle change en fonction de l’évolution du marché, de la situation économique, de la conjoncture : en tant qu’entité économique, elle vit et interagit avec le monde qui l’entoure. Ainsi, il arrive que la forme commerciale choisie lors de sa fondation ne soit plus adaptée au marché dans lequel elle se trouve.

Récemment, les autorités gouvernementales de Hong-Kong sont restées perplexes lorsqu’une banque privée de la place genevoise, alors constituée sous la forme d’une société de personnes, a désiré obtenir l’octroi d’une licence bancaire. En effet, cette forme de société n’existe pas dans certaines juridictions, ce qui peut compliquer les opérations de création de filiales1.

Les différences entre sociétés de personnes et sociétés de capitaux sont nombreuses. Des règles parfois radicalement différentes gouvernent les modalités du choix de leur nom, de leur inscription au Registre du commerce, la manière dont ces sociétés peuvent se faire représenter, mais également la façon dont les décisions se prennent, ainsi que la manière dont se transfère leur sociétariat.

De la sorte, si le choix d’une certaine forme commerciale pouvait apparaître judicieux lors de la fondation de la société, elle pourra par la suite se sentir à l’étroit dans son habit juridique et être tentée de le changer.

Ainsi, les sociétés de personnes, qui bénéficient d’une procédure de fondation simple et relativement peu onéreuse, tout en ne nécessitant pas l’apport d’un capital minimum, ne conviennent pas à l’entreprise qui désire s’expandre à l’international, tant en raison du manque de reconnaissance de ces formes de sociétés dans certains pays que de la responsabilité personnelle souvent illimitée que supportent les associés sur l’ensemble de leur fortune.

Le droit suisse autorise diverses transformations de sociétés ; toutefois, par souci de concision, nous ne nous intéresserons qu’à la transformation des sociétés de personnes en sociétés de capitaux, qui représentent environ 30 % de ces opérations de transformation2. De plus, nous renonçons à traiter de la société cotée.

La transformation est l’une des quatre opérations de restructuration d’entreprises prévue par la LFus34. Elle permet à une société de changer d’habit juridique sans que cette modification n’ait d’incidence sur les associés ou le patrimoine de la société5 : l’art. 53 LFus précise justement que les rapports juridiques ne sont pas modifiés par la transformation.

1 BOITELLE,www.bilan.ch.

2 TRIGO TRINDADE /GRIESSEN COTI, p. 146.

3 Loi fédérale du 3 octobre 2003 sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de patrimoine ; RS 221.301.

4 CHAUDET/CHERPILLOD/LANDROVE, N 1220.

5 RUEDIN,N2184.

(5)

Avant l’entrée en vigueur de la LFus le 1er juillet 2004, la transformation par transfert était déjà possible, mais elle impliquait la dissolution de la société6.

Une liste exhaustive des opérations de transformation autorisées est dressée par l’art. 54 LFus7. En particulier, l’art. 54 al. 2 let. a et al. 3 let. a LFus prévoit que les sociétés en nom collectif (« SNC ») et les sociétés en commandite (« SC ») peuvent se transformer en société de capitaux. La notion de société de capitaux est précisée par l’art. 2 let. c LFus, qui inclut dans cette définition les sociétés anonymes (« SA »), les sociétés en commandite par actions (« SCA ») ainsi que les sociétés à responsabilité limitée (« Sàrl »). La transformation se décide à l’unanimité des associés, sauf si le contrat de société prévoit que la majorité des trois quarts de tous les associés suffit (art. 64 al. 2 LFus). C’est l’inscription au Registre du commerce qui fera déployer ses effets à la transformation (67 LFus).

Ce travail a pour objectif de présenter certaines conséquences de la transformation d’une société de personnes en société de capitaux. A cette fin et en premier lieu, nous examinerons les conséquences de la transformation d’une société de personnes en société de capitaux en termes de personnalité juridique (II). Ensuite, nous examinerons les différences qu’entraîne une transformation s’agissant de la raison de commerce des sociétés (III). Nous aborderons également la question du transfert du sociétariat (IV) puis traiterons la problématique du droit aux renseignements des associés (V), avant de conclure (VI).

II. Personnalité juridique

En droit suisse, la jouissance des droits civils appartient à tout être humain ainsi qu’aux entités auxquelles le législateur a reconnu la personnalité juridique, appelées personnes morales (art. 11 CC)8. La personnalité juridique confère la qualité de sujet de droit9, soit l’aptitude à acquérir des droits et des obligations10. Ainsi, la société qui possède la personnalité juridique possède une existence indépendante, tant à l’égard de ses associés que des tiers11.

1. Les sociétés de personnes

Bien que le législateur ait renoncé à décider si la société en nom collectif possède la personnalité juridique12, cette dernière n’est pas une personne morale13. Si elle ne peut se prévaloir de la personnalité juridique entière, elle possède toutefois la

« quasi-personnalité morale »14. D’aucuns la qualifient ainsi de « société hybride »15.

6 Message 2000, p. 4014.

7 Arrêt du Tribunal administratif fédéral B-6755/2013 du 11 août 2014, consid. 5.3 ; CHAUDET/CHERPILLOD/LANDROVE, N 1384.

8 CR CC I-MANAÏ, CC 11 N 3.

9 CR CC I-XOUDIS, Intro CC 52-59 N 2.

10 RUEDIN,N691.

11 Idem,N737.

12 Message 1928, p. 238.

13 ATF 116 II 651, JdT 1991 I 381 (rés.), consid. 2 ; BSK CO II-BAUDENBACHER, CO 552 N 2 ; CHAUDET/CHERPILLOD/LANDROVE, N 152 ; CR CO II-VULLIÉTY,CO552N3.

14 ATF 97 V 60, consid. 1a.

(6)

En effet, le droit suisse reconnaît à la société en nom collectif certains attributs de la personnalité juridique, tels que la possibilité de s’engager, d’agir ou d’être actionnée en justice (art. 562 CO), ainsi que de répondre du dommage causé par les actes illicites d’un associé dans la gestion sociale16. Relevons en outre qu’un associé peut cautionner les dettes de la société en nom collectif (art. 568 al. 3 in fine CO), ce qui serait impossible dans le cas d’une entreprise individuelle, par exemple 17 . Finalement, il est loisible à une société en nom collectif de défendre son honneur18, ce qui constituerait a priori, selon VULLIÉTY, un attribut de la personnalité juridique19. Elle peut également bénéficier, à certaines conditions, de l’assistance judiciaire20. Une partie de la doctrine semble voir dans la soumission de la société en nom collectif à la procédure de faillite (art. 39 al. 1 ch. 6 LP) un aspect de la personnalité juridique21. A tort selon nous, car le chef de l’entreprise individuelle, qui ne possède aucunement la personnalité morale, y est également soumis22. Le critère pour être soumis à la procédure de faillite étant l’inscription au Registre du commerce, il semble des plus discutables de l’ériger en aspect de la personnalité juridique.

Néanmoins, certaines particularités dénient à la société en nom collectif la qualification de personne morale. Ainsi, elle ne possède pas d’actifs sociaux, puisque les biens qui forment sa fortune sont la propriété commune des associés23 (art. 544 al. 1 CO par renvoi de l’art. 557 al. 2 CO). Par ailleurs, les associés supportent, subsidiairement et solidairement, une responsabilité personnelle pour tous les engagements de la société24 (art. 568 CO). En outre, même lorsqu’une action a été effectuée au nom de la société en nom collectif, les associés sont liés par les décisions rendues et pourront se voir opposer, par exemple, l’effet d’autorité de la chose jugée25.

Pour RECORDON,la situation actuelle, et en particulier cette ambiguïté que présente la société en nom collectif quant à sa personnalité morale, n’est pas satisfaisante.

L’auteur se positionne donc en faveur de l’octroi de la personnalité juridique entière à la société en nom collectif. Il relève que la personnalité morale serait compatible avec les règles légales gouvernant cette société26.

A noter qu’à l’instar de la société en nom collectif, la société en commandite n’a pas la personnalité juridique entière mais en possède certains aspects27, ce qui lui vaut également d’être qualifiée de société à « quasi-personnalité juridique »2829.

15 RUEDIN,N790;Pour d’autres qualifications : MEIER-HAYOZ/FORSTMOSER, p. 65.

16 CR CO II-VULLIÉTY,CO552N4.

17 Idem,CO 552N4.

18 ATF 114 IV 14, JdT 1989 I 6, consid. 2b.

19 CR CO II-VULLIÉTY,CO 552N4.

20 ATF 116 II 651, JdT 1991 I 381 (rés.), consid. 2.

21 CR CO II-VULLIÉTY,CO552N4.

22 CHAUDET/CHERPILLOD/LANDROVE, N 85.

23 ATF 116 II 651, JdT 1991 I 381 (rés.), consid. 2.

24 CR CO II-VULLIÉTY,CO 552N8.

25 ATF 71 II 39, JdT 1945 I 322, consid. 2.

26 RECORDON I, p. 9.

27 BSKCOII-BAUDENBACHER,CO 594N 2.

28 MEIER-HAYOZ/FORSTMOSER, p. 65.

29 D’autres entités bénéficient de certains attributs de la personnalité juridique : la masse en faillite et la propriété par étage, par exemple. Pour plus de détails voir : GILLIÉRON, N 1584 et WEBER, p. 58.

(7)

2. Les sociétés de capitaux

La société anonyme acquiert la personnalité juridique par son inscription au Registre du commerce (art. 643 al. 1 CO). Dans le contexte d’une transformation, c’est l’inscription de la transformation au Registre du commerce (art. 67 LFus) qui octroiera à l’ancienne société de personnes la personnalité juridique30, ce que confirme l’art. 52 al. 1 CC.

Il en va de même pour la société en commandite par actions, les règles de la société anonyme étant applicables par le biais de l’art. 764 al. 2 CO, ainsi que de la société à responsabilité limitée, au sens de l’art. 779 al. 1 CO.

La personnalité juridique octroie aux sociétés de capitaux la jouissance (art. 53 CC) ainsi que l’exercice des droits civils (art. 54 CC). Contrairement aux sociétés de personnes, les sociétés de capitaux possèdent donc une personnalité juridique pleine et entière, qui diffère toutefois de la personnalité des personnes physiques31. Si certains droits et obligations sont expressément niés aux personnes morales (par exemple la possibilité de fonder une société en nom collectif au sens de l’art. 552 al.

1 CO), d’autres découlent du critère de l’art. 53 CC, soit l’inséparabilité des conditions naturelles de l’homme (par exemple le mariage)32. La jurisprudence connaît donc une pléthore de cas d’application33.

La personnalité juridique n’est toutefois pas absolue. La personnalité distincte de la société de capitaux pourrait inciter celui qui la domine à l’utiliser de manière abusive.

Pour éviter une telle situation, il pourra se voir imputer les actes de cette dernière, selon le principe de la transparence. Il sera alors fait abstraction de la personnalité juridique de la société pour tenir compte de la réalité économique (« Levée du voile corporatif »). Ce principe découle de l’interdiction d’abus de droit (art. 2 al. 2 CC)34. 3. Contenu de la modification

En se transformant en société de capitaux, la société de personnes acquiert la personnalité juridique. Cela signifie qu’elle obtient la jouissance et l’exercice des droits civils35, soit respectivement, l’aptitude à être sujet de droit et d’obligations (art.

11 al. 2 CC) et la capacité d’acquérir des droits et des obligations36.

Toutefois, la transformation d’une société de personnes en société de capitaux et l’acquisition de la personnalité juridique qui en découle n’entraînera pas de conséquences importantes pour les tiers. En effet, comme on a pu le voir, la société en nom collectif et la société en commandite sont presque traitées, sur le plan

30 Comm LFus-PETER,art. 67 N 3.

31 WEBER, p.118.

32 CR CC I-XOUDIS, CC 53 N 3-5.

33 Pour une énumération par thèmes : CR CC I-XOUDIS, CC 53 N 9-16 ; WEBER, p.125.

34 Arrêt du Tribunal fédéral 4A.384/2008 du 19 décembre 2008, SJ 2009 I 424, consid. 4.1 ; CR CC I- XOUDIS, intro art. 52-59 N 12.

35 RUEDIN,N699.

36 Idem,N700,708.

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externe, comme des personnes morales. Selon certains auteurs, la capacité juridique de la société en nom collectif tendrait même à se renforcer dans un avenir proche37. Sous l’angle externe, la transformation ne provoque pas de changement radical : les sociétés de personnes peuvent déjà acquérir des droits, s’engager et ester en justice (art. 562 et 602 CC) ; elles répondent également des actes illicites commis par les associés dans l’exercice de leur fonction (art. 567 al. 3 et 603 CC). Pour les tiers qui traitent avec la société, ce changement sera donc sans grande importance : la société, sous la forme juridique d’une société de personnes, pouvait déjà être partie à des actes juridiques, en particulier des contrats, ou demander réparation du dommage que lui cause l’acte illicite d’autrui38.

C’est sous l’angle interne que l’acquisition de la personnalité juridique aura les plus grandes conséquences, notamment s’agissant de la propriété des actifs, puisque désormais, c’est la société qui sera propriétaire des biens qui la composent, et non plus les associés. Par ailleurs, la personnalité juridique provoque l’assujettissement à l’impôt sur le bénéfice et sur le capital (art. 49 al. 1 let. a et art. 54 al. 1 LIFD39)40. La personne morale peut librement choisir son siège, ce qui n’est pas le cas de la société de personnes41.

En outre, le rapport entre la société et son actif social est différent dans la société de capitaux : la société étant propriétaire de tous les biens qui composent son actif social42, cela signifie, par exemple, que l’actionnaire unique qui détruit par le feu un bien appartenant à la société de capitaux est punissable pour incendie intentionnel43. En effet, le droit pénal juge la question de la propriété du point de vue juridique, et non économique44. Par analogie, l’associé/actionnaire d’une société de capitaux peut commettre une appropriation illégitime ou un vol à l’encontre de la société.

En bref, la transformation de la société de personnes en société de capitaux provoque l’acquisition de la personnalité juridique. Cet attribut ne provoquera pas de changement capital sous l’angle externe, mais aura des conséquences significatives d’un point de vue interne.

III. Raison de commerce

Bien que ce travail ne porte pas sur la procédure formelle de la transformation, il nous semble néanmoins utile de rappeler que lors de cette opération, les dispositions relatives à la fondation des sociétés doivent être respectées (art. 57 LFus). Cet article a pour objectif d’éviter que la transformation soit utilisée afin d’éluder les règles sur la fondation des sociétés45.

37 ZK CO-HANDSCHIN/CHOU,CO 552 N 63.

38 CR CO II-RECORDON,CO 562N3-4.

39 Loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 ; RS 642.11.

40 OBERSON,p. 210, 214.

41 RUEDIN,N988.

42 Idem,N758.

43 ATF 85 IV 224, JdT 1960 IV 51, consid. 3.

44 Idem.

45 CHAUDET/CHERPILLOD/LANDROVE, N 1394 ; Message 2000, p. 4104.

(9)

Ainsi, les règles relatives au choix du nom de la société changent lors de sa transformation et elle devra, le cas échéant, modifier sa raison sociale pour répondre aux exigences légales. L’art. 60 let. a LFus précise que la nouvelle raison de commerce doit figurer dans le projet de transformation, ce qui permettra aux associés de donner leur point de vue, en exerçant leur droit de consultation (art. 63 LFus), et au réviseur de vérifier si les exigences légales sont respectées (art. 62 LFus).

Le droit suisse, assez conservateur sur ce point, limite la latitude de choix de la raison de commerce des sociétés, soit par des règles positives, en leur imposant de faire figurer une information, soit par des règles négatives, en interdisant, par exemple, d’induire en erreur.

Nous suggérons de diviser les règles du CO relatives au choix des raisons de commerce en deux catégories : les règles générales (A) et les règles liées à la forme juridique (B).

A. Règles générales

La transformation d’une société de personnes en société de capitaux n’influence en rien le respect que l’entreprise doit aux règles générales qui gouvernent le choix de la raison de commerce. De la sorte, les art. 944 al. 1 CO et 26 ORC46, qui contiennent un certain nombre de principes, doivent être respectés tant par les sociétés de personnes que par les sociétés de capitaux.

En particulier, les raisons de commerces doivent être conformes à la vérité. Elles ne peuvent rien contenir qui puisse induire en erreur ou être contraire à un intérêt public47. Une raison de commerce ne doit donc pas contenir un ou plusieurs termes qui se rapportent à une activité, un produit ou un service qui n’est pas contenu dans le but statutaire48. L’activité indiquée dans la raison de commerce doit être effectivement exercée49. Les raisons de commerces contenant une référence à une activité soumise à autorisation (« banque »), étatique (« fédéral ») ou confuse (« Société anonyme Ravel SA ») sont prohibées50.

Par ailleurs, les raisons purement génériques (« Usine SA ») sont exclues par l’OFRC51. En outre, l’usage de désignations géographiques n’est certes plus soumis à autorisation, mais doit être conforme au principe de vérité52. Une telle indication ne se justifie donc pas quand la société n’a aucun lien avec celle-ci53. Finalement, des règles particulières existent pour certaines professions, notamment pour les avocats54.

46 Ordonnance sur le registre du commerce du 17 octobre 2007 (RS 221.411).

47 SCHLOSSER, p.1.

48 Guide OFRC, p. 2.

49 ATF 117 II 198, JdT 1992 I 369, consid. 3

50 Guide OFRC, p. 3-7.

51 CR CO II-CHERPILLOD,CO 944N11.

52 Idem,CO944N21.

53 Guide OFRC, p. 8.

54 BOHNET/MARTENET, N 2465.

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B. Règles liées à la forme juridique 1. Les sociétés de personnes

Au sens de l’art. 947 al. 1 CO, deux cas de figure sont possibles s’agissant de la raison de commerce d’une société en nom collectif. La raison doit contenir les noms de famille de tous les associés ou le nom de famille d’un seul d’entre eux55. Dans ce dernier cas, une adjonction figurant immédiatement après le nom du dernier associé devra indiquer l’existence d’une société (« et associés » ; « et Co »). A noter que selon l’OFRC, l’adjonction « SNC » n’est pas admise dans la mesure où il n’existe pas, en Suisse, d’abréviation officielle de la société en nom collectif56. Elle est toutefois admise en pratique57.

La raison de commerce de la société en nom collectif peut contenir des adjonctions, pourvu qu’elle respecte les règles générales susmentionnées (art. 944 CO). L’entrée d’un nouvel associé n’impose pas de modifier la raison de commerce (art. 947 al. 2 CO). En revanche, lorsqu’un associé quitte la société, son nom doit être supprimé de la raison, au sens de l’art. 948 al. 1 CO, sauf quand l’existence d’une société est exprimée par un rapport de parenté et que ce lien de parenté ou d’alliance perdure entre les deux associés indéfiniment responsables (art. 948 al. 2 CO).

Les règles relatives à la société en nom collectif sont applicables par analogie à la société en commandite58. En sus, la raison de commerce d’une société en commandite doit contenir le nom de famille d’au moins un des associés indéfiniment responsables, ainsi qu’une adjonction indiquant l’existence d’une société 59 (947 al. 3 CO). Il est interdit d’y faire figurer le nom d’un commanditaire60 (947 al. 4 CO). Le commanditaire dont le nom est tout de même inscrit dans la raison de commerce est tenu envers les créanciers de la même manière que les associés indéfiniment responsables, au sens de l’art. 607 CO - soit subsidiairement, indéfiniment et solidairement61. Cette règle exprime, à notre avis, toute l’importance qui est conférée à la raison de commerce de la société de personnes dans ses relations avec les tiers. Plus qu’un simple nom inscrit au Registre du commerce, elle est un véritable indicateur de l’identité des associés indéfiniment responsables.

2. Les sociétés de capitaux

Contrairement à la réglementation stricte relative aux sociétés de personnes, la raison de commerce des sociétés de capitaux peut être librement formée (950 al. 1 1ère phr. CO), dans la limite des règles générales susmentionnées. Depuis l’entrée en vigueur du nouveau droit, le 1er janvier 2008, les sociétés de capitaux doivent toutefois indiquer leur forme de juridique dans leur raison (art. 950 al. 1 2ème phr.

CO)62.

55 BSKCOII-BAUDENBACHER,art. 947N 2.

56 Guide OFRC, p. 28.

57 Il suffit de taper “SNC” dans le moteur de recherché du site www.zefix.ch pour s’en rendre compte.

58 CR CO II-CHERPILLOD,CO947N7-8.

59 BSKCOII-ALTENPOHL,CO 947N 7.

60 ATF 71 I 270, JdT 1945 I 499 (rés.), consid. 4.

61 CR CO II-RECORDON,CO608N8.

62 SCHLOSSER, p.8.

(11)

Néanmoins, les règles applicables à la société en commandite étant applicables à la société en commandite par actions, celle-ci est soumise aux règles énoncées plus haut63 (art. 947 al. 3 et al. 4 CO), ce qui ne renforce pas l’attractivité de cette forme juridique, bien au contraire.

3. Contenu de la modification

La raison d’être des règles strictes qui encadrent la formation des raisons de commerce des sociétés de personnes est d’éviter d’induire en erreur les tiers au sujet des rapports de responsabilité64. Ceci est tellement vrai que la seule mention du nom d’un commanditaire dans la raison de commerce le place dans une situation de responsabilité illimitée, au même titre qu’un associé indéfiniment responsable. En revanche, les sociétés de capitaux ne répondant des dettes que sur leur propre fortune, l’existence du nom des associés est sans importance, puisqu’elle n’est pas susceptible d’induire des tiers en erreur65.

La réglementation qui régit la formation des sociétés de personnes est donc plus rigide que celle des sociétés de capitaux. Cette rigidité n’est pas sans incidence. En effet, à notre avis, la raison de commerce peut jouer un rôle commercial, voire publicitaire66. Car si les entreprises sont généralement connues du public par leur nom commercial, l’utilisation de la raison de commerce est obligatoire dans un certain nombre de cas. Ainsi, l’art. 954a al. 1 CO impose à l’entreprise d’utiliser la raison de commerce, de manière complète, sur toute correspondance ou communication commerciale, y compris sur Internet67. Cela comprend donc également les factures, bulletins de commande et procurations68.

Nous voyons dans la transformation d’une société de personnes en société de capitaux l’occasion de quitter les règles strictes, imposant la présence d’un nom de famille, et de saisir ainsi la possibilité de former plus librement sa raison de commerce 69 - ce qui peut même être fait à l’occasion de l’opération de transformation. L’entreprise pourra par exemple y ajouter une connotation publicitaire70.

Cette liberté n’est pas le seul avantage qu’obtiendra la société de personnes en se transformant en société de capitaux : contrairement aux sociétés de personnes, la modification du sociétariat des sociétés de capitaux n’entraîne aucune conséquence sur sa raison de commerce : la raison de la société de capitaux pourra rester inchangée malgré les départs éventuels d’associés, ce qui permettra de préserver l’identité de l’entreprise auprès de ses clients. La banque Pictet était, avant sa transformation, constituée en société en commandite. Ainsi, si tous les membres de

63 supra III.B.1.

64 Guide OFRC, p. 10.

65 Idem, p. 12.

66 CR CO II-CHERPILLOD,CO944N12.

67 Idem,CO954aN1.

68 BOHNET/MARTENET, N 2479.

69 A titre d’exemple, la société en commandite « Lombard, Odier & Cie » a profité de sa transformation en société anonyme pour changer sa raison de commerce en « Banque Lombard Odier & Cie SA ».

70 Ce qui est spécifiquement autorisé : Guide OFRC, p. 4.

(12)

la famille Pictet avaient quitté le sociétariat, la banque aurait dû en principe changer de nom, et par là même, abandonner la réputation qui l’accompagne.

Afin de pouvoir identifier les sociétés de manière durable, en dépit de leur transformation de forme juridique, et surtout, du changement de leur raison de commerce, l’art. 936a CO a été introduit en même temps que la LFus. Cet article attribue un numéro d’identification à toutes les entreprises inscrites au registre du commerce, ce qui permet de suivre un sujet au fil de son évolution71.

La problématique liée à la stricte réglementation des raisons de commerce des sociétés de personnes a été identifiée par le législateur. Déposée par le Conseiller aux Etats Pirmin Bischof, la motion 12.3769 propose de moderniser le droit de la raison de commerce par une révision des art. 944 ss. CO72. Acceptée par le Conseil National et le Conseil des Etats sur proposition du Conseil fédéral, cette réforme pourrait venir renforcer l’attractivité des sociétés de personnes en rendant plus libre le choix de leur raison de commerce73.

IV. Le transfert du sociétariat

Lors de la transformation d’une société de personnes en société de capitaux, la question de l’entrée et de la sortie des associés peut s’avérer cruciale. L’art. 56 LFus, qui prévoit le principe de la continuité du sociétariat dans la fusion, garantit aux associés de conserver leur part sociale dans la société transformée74. Toutefois, les règles qui gouvernent l’entrée des associés ne seront pas les mêmes que sous l’ancienne forme juridique. Il conviendra, le cas échéant, de déroger à la solution légale pour tenter d’imiter statutairement les règles applicables aux sociétés de personnes afin d’éviter, par exemple, qu’un tiers malvenu intègre la société après sa transformation en société de capitaux.

Entrée

1. La société en nom collectif

En l’absence de dispositions spéciales du titre vingt-quatrième du CO, les dispositions relatives à la société simple sont applicables à la société en nom collectif, par renvoi de l’art. 557 al. 2 CO75. Or, l’art. 542 CO, qui régit l’admission de nouveaux associés dans la société simple, donc également dans la société en nom collectif, prévoit que l’entrée d’un nouvel associé dans la société requiert le consentement de tous les associés76. L’associé qui désire quitter la société ne peut donc pas simplement céder sa part à un tiers, mais doit obtenir l’accord des autres sociétaires. Ce consentement peut être donné de manière anticipée en faveur d’un tiers déterminé, dans le contrat de société, par exemple77. Le contrat de société peut

71 Comm LFus-BAHAR,art.936a N 1-2.

72 Motion 12.3769.

73 Idem.

74 Comm LFus-PETER,art. 57 N 5.

75 RECORDON I, p. 10.

76 CHAUDET/CHERPILLOD/LANDROVE, N 153-155.

77 RECORDON II, p. 10.

(13)

prévoir qu’une majorité suffise78. En outre, l’entrée d’un nouvel associé n’est en principe soumise à aucune condition de forme, elle peut même se faire par actes concluants79.

Les effets de l’admission d’un nouvel associé (apport, vote, pertes et bénéfices) seront généralement réglés de manière conventionnelle, sinon, on admettra que le nouvel associé dispose des mêmes droits et obligations que les autres sociétaires, et ce dès la conclusion du contrat de société80.

En dernier lieu, il convient de noter qu’au sens de l’art. 569 al. 1 CO, le nouvel associé sera solidairement responsable des dettes existantes, toute convention contraire étant sans effet à l’égard des tiers (art. 569 al. 2 CO).

2. La société en commandite

Les dispositions de la société simple étant applicables à la société en commandite par le renvoi des art. 598 al. 2 et 557 al. 2 CO, il est renvoyé à ce qui a été dit au sujet de la société en nom collectif.

Les sociétés de personnes protègent parfaitement les associés minoritaires, puisqu’en principe, leur consentement est indispensable à la modification de la titularité du sociétariat.

3. La société anonyme

La société anonyme est fondée sur l’idée d’une structure capitalistique. Le caractère librement transmissible d’une action en découle donc naturellement, puisque le capital importe bien plus que la personne qui le détient. Néanmoins, le législateur a instauré des outils qui restreignent la transmissibilité des actions, soit par des mécanismes légaux, soit en donnant à la société la possibilité d’en restreindre la portée statutairement81. En outre, les actionnaires peuvent conclure entre eux des conventions afin de réglementer le transfert des parts82.

Le tiers qui désire entrer dans une société anonyme existante doit acquérir une part du capital-actions. Il peut le faire soit en participant à une augmentation du capital (a), soit en faisant l’acquisition des parts sociales d’un actionnaire sortant, voire en les recevant par dévolution successorale (b)83.

a. Augmentation du capital

Lorsque l’assemblée générale décide d’effectuer une augmentation du capital- actions (650 ss. CO), l’associé de la société de personnes devenu actionnaire risque de ne pas maintenir ses droits patrimoniaux au profit des personnes qui souscrivent

78 RECORDON II, p. 10.

79 CR CO II-CHERPILLOD,CO 542N3.

80 RECORDON II, p. 10.

81 JACQUEMOUD/AUBERSON, p. 348.

82 HÉRITIER LACHAT,p. 88.

83 HARI, p. 394.

(14)

à l’augmentation de capital84. Par ailleurs, l’augmentation peut être décidée sans l’accord de l’actionnaire, puisqu’elle se décide en principe à la majorité absolue des actions représentées (art. 703 CO)85, bien qu’il soit possible de prévoir statutairement des règles plus contraignantes86. Elle peut également être décidée par le conseil d’administration, lorsque cette faculté lui avait été accordée (augmentation autorisée) (art. 651 CO) ou prendre la forme d’une augmentation conditionnelle (art. 653 - 653i CO).

Impuissant quant à la décision d’augmentation du capital-actions, l’actionnaire bénéficie néanmoins d’un droit préférentiel de souscription (art. 652b CO), qui lui permet de participer de manière prioritaire à la souscription des nouvelles actions, de manière à éviter la dilution de ses droits sociaux et patrimoniaux87.

L’art. 652b al. 1 CO précise que l’actionnaire a droit à la part des actions nouvellement émises correspondant à sa participation antérieure. Ainsi, s’il décide d’en faire usage, le droit préférentiel de souscription permettra à l’actionnaire de conserver la proportion de parts sociales qu’il possédait avant l’augmentation de capital.

Le droit préférentiel de souscription n’est toutefois pas absolu : il peut être restreint, voire supprimé. En cas d’augmentation ordinaire du capital, les conditions de restriction ou de suppression du droit préférentiel de souscription sont au nombre de trois, elles sont par ailleurs impératives88 :

- la restriction ou la suppression doit être décidée par l’assemblée générale, simultanément à la décision d’augmentation de capital (art. 652b al. 2 1ère phr.

CO). La jurisprudence a ainsi exclu que la compétence de supprimer ce droit soit prévue dans les statuts89 ou déléguée au conseil d’administration90. La double majorité de l’art. 704 al. 1 CO est exigée, au sens du chiffre 6 de la même disposition. En outre, la suppression doit être décrite dans la convocation de l’assemblée générale, et pas seulement mentionnée, afin de permettre l’exercice du vote par procuration91 ;

- la décision de suppression doit être basée sur de justes motifs (art. 652b al. 2 CO). La notion de justes motifs constitue un cas d’application de l’art. 4 CC92. Une liste exemplative est donnée à l’art. 652b al. 2 2ème phr. CO. On reprendra ici la définition donnée par MONTAVON, selon qui un juste motif est

« […] une justification objective de l’exclusion du droit préférentiel, qui se fonde sur un intérêt de la société, est nécessaire et constitue la mesure la moins dommageable possible. »93 ;

84 MONTAVON, Droit commercial,p. 287.

85 Idem,p. 289.

86 HARI, p. 394.

87 RUEDIN,N1458.

88 CR CO II-VENTURI/ZEN-RUFFINEN, CO 652b N 7.

89 ATF 121 III 219 ; JdT 1996 I 162, consid. 1d. bb.

90 Idem, consid. 1d. cc.

91 CR CO II-VENTURI/ZEN-RUFFINEN, CO 652b N 9.

92 BSKCOII-ZINDEL/ISLER,CO 652bN 13.

93 MONTAVON, Droit de la SA, p. 353.

(15)

- les principes d’égalité de traitement, de proportionnalité et de la bonne foi doivent être respectés94. En particulier, l’égalité de traitement sera respectée lorsque le droit préférentiel est supprimé pour tous les actionnaires, de la même manière95.

Les conditions susmentionnées s’appliquent également en cas d’augmentation autorisée. Toutefois, en dépit de la lettre de la loi (art. 650 al. 2 ch. 8 CO), l’assemblée générale délègue fréquemment au conseil d’administration la compétence de décider de la suppression du droit préférentiel de souscription96. Le Tribunal fédéral, constatant une lacune de la loi, a admis cette pratique à certaines conditions97.

En bref, l’actionnaire minoritaire est impuissant face à une décision d’augmentation du capital. Ses moyens de protection se limitent à l’exercice du droit préférentiel de souscription, à condition qu’il n’ait pas été supprimé. Si l’exercice de son droit préférentiel de souscription évite la dilution de ses droits, cela n’empêchera en principe pas l’entrée de nouveaux actionnaires dans la société.

b. Entrée par transfert des parts

L’entrée d’un nouvel actionnaire peut également se faire par transfert des parts.

L’associé, bientôt actionnaire, qui ne désire pas qu’un autre associé puisse céder sa part à un tiers peut se protéger à l’aide des mécanismes de restriction de la transmissibilité des actions, légales ou statutaires. Ces règles diffèrent selon qu’il s’agisse d’actions au porteur (A) ou d’actions nominatives (B).

A. Les actions au porteur i) Les restrictions légales

En dépit du silence de la loi, les actions au porteur sont librement transmissibles98 (art. 685 a contrario CO).

ii) Les restrictions statutaires

Il n’est pas possible de prévoir des restrictions statutaires à la transmissibilité des actions au porteur99.

iii) Les restrictions conventionnelles

Les actionnaires peuvent conclure une « convention de blocage »100, par laquelle l’actionnaire s’oblige à ne pas céder ses actions (« interdiction d’aliéner »). Si une telle convention est conclue, les actions pourront être bloquées auprès d’un

94 MONTAVON, Droit de la SA, p. 353.

95 ATF 117 II 290, JdT 1992 I 318 (rés.), consid. 4e.

96 CR CO II-VENTURI/ZEN-RUFFINEN, CO 652b N 10.

97 ATF 121 III 219, JdT 1996 I 162, consid. 1d.

98 MONTAVON, Droit de la SA, p. 189.

99 CR CO II-TRIGO-TRINDADE, CO 683 N 24.

100 MARTIN,p. 376.

(16)

dépositaire qui ne les libérera que moyennant une décision unanime des actionnaires parties à la convention101. De telles clauses vont certes à l’encontre du principe de la libre transmissibilité des titres, mais elles sont parfaitement valables102. Ces conventions peuvent être assorties de clauses pénales, au montant suffisamment dissuasif (art. 160 CO)103, mais pas trop élevé, afin qu’il ne soit pas réduit par le juge, le cas échéant (163 al. 3 CO )104. Le montant de la clause pénale peut toutefois être aménagé de manière assez libre, par exemple au prorata du nombre d’actions détenues ou aliénées indûment105.

La convention d’actionnaires peut également prévoir une clause de préemption par laquelle l’actionnaire s’engage à céder ses actions prioritairement à d’autres actionnaires plutôt qu’à un tiers106.

B. Les actions nominatives

Les actions nominatives sont en principe librement transmissibles (art. 684 CO). Ce droit est toutefois limité par des restrictions légales (i) (art. 685 CO) et, le cas échéant, statutaires (ii) (art. 685a ss. CO) et conventionnelles (iii).

i) Les restrictions légales

La loi prévoit trois types de restrictions, qui n’ont pas besoin d’être expressément décrites dans les statuts pour être invoquées : la solvabilité douteuse, l’escape clause et la clause anti-fiduciaire. A l’exception du cas de la solvabilité douteuse, ces restrictions ne peuvent s’appliquer que si la société a adopté une clause statutaire d’agrément107.

La ratio legis de l’art. 685 CO (solvabilité douteuse) est d’éviter qu’une action nominative non entièrement libérée soit acquise par une personne qui n’a pas les moyens d’effectuer le versement. Les conditions du refus d’agrément au sens de l’art. 685 CO sont au nombre de deux. En premier lieu, il faut que l’acquéreur soit de solvabilité douteuse, par exemple lorsqu’il a fait l’objet de mesures d’exécution forcée, qu’il est endetté, ou que ses revenus et sa fortune sont insuffisants vis-à-vis de l’importance de la libération108. Si cette première condition est remplie, la société doit exiger des sûretés dont la somme doit couvrir le montant de la libération. Si ces conditions ne sont pas remplies, la société peut refuser d’agréer l’actionnaire. Elle dispose, pour ce faire, d’un délai de 3 mois (art. 685c al. 3 CO par analogie). Lorsque l’agrément de la société est refusé, l’aliénateur conserve la propriété des actions et tous les droits qui en découlent109.

101 BLOCH,p. 276.

102 Idem,p. 275

103 HÉRITIER LACHAT,p. 96.

104 CHAPPUIS,Clause pénale,p. 71.

105 Idem, p. 68.

106 MARTIN,p. 377.

107 CR CO II-TRIGO-TRINDADE, CO 685b N 9-12

108 Idem, CO 685 N 12.

109 Idem, CO 685 N 16.

(17)

L’escape clause, prévue par l’art. 685b al. 1 i. f. CO, donne la possibilité à la société d’empêcher le transfert des actions sans motif en les rachetant à leur valeur réelle110. La société ne peut pas acquérir plus de 20 % des titres (art. 659 al. 2 CO), sauf lorsque d’autres actionnaires ou d’autres tiers assurent de reprendre ces actions. Par ailleurs, les règles relatives au rachat d’actions propres restent applicables (art. 659 ss. CO)111.

En outre, l’art. 685b al. 3 CO prévoit que la société peut refuser de donner l’agrément lorsqu’une personne n’acquiert pas les actions en son propre nom et pour son propre compte, soit lorsqu’il agit à titre fiduciaire112.

ii) Les restrictions statutaires

L’acquisition de droits de sociétariat peut être restreinte par les statuts de la société (art. 685a CO), sauf bien évidemment si les actions sont acquises via l’exercice d’un droit préférentiel de souscription (art. 652b al. 3 CO). Le refus d’agrément doit toutefois intervenir pour certains motifs. Il n’est donc pas possible que les statuts prévoient une interdiction d’aliéner pure et simple113.

Ainsi, l’agrément peut être refusé pour juste motif expressément prévu par les statuts (art. 685b al. 1 i. i. CO ; 685b al. 2 CO). Les justes motifs doivent faire l’objet d’une disposition statutaire expresse114. Par ailleurs, ces derniers doivent être relatifs au but social ou à l’indépendance économique de l’entreprise, par exemple si l’acquéreur est un concurrent (il sera judicieux de définir ce terme)115. Selon certains auteurs, les clauses prévoyant comme juste motif le fait de ne pas appartenir à un cercle de personnes déterminées (par exemple : une famille) sont licites116. Des clauses « pour-cents », qui limitent le pourcentage d’action que peut acquérir un actionnaire sont aussi autorisées117.

Dans les cas plus rares où l’acquisition intervient par la loi ou par une décision de l’autorité (succession, liquidation du régime matrimonial, scission, fusion, transfert de patrimoine, transformation d’une société de personnes en société de capitaux, etc.118), la société ne peut refuser l’agrément que si elle offre de reprendre les actions à leur valeur réelle119.

L’agrément étant une condition du transfert de propriété des actions, l’acquéreur à qui cette approbation n’est pas donnée ne sera pas propriétaire des actions et ne pourra donc pas exercer les droits patrimoniaux et sociaux qui en découlent (art.

685c al. 1 CO)120.

110 BSKCOII-OERTLE/DU PASQUIER,CO 685bN 9.

111 CR CO II-TRIGO-TRINDADE, CO 685 N 29.

112 Idem, CO 685, N 11-15.

113 MONTAVON, Droit de la SA, p. 773.

114 BSKCOII-OERTLE/DU PASQUIER,CO 685bN 2.

115 Idem,CO 685bN 5.

116 Idem,CO 685bN 4 ; REYMOND, p.262.Sur la famille, contra : CR CO II-TRIGO-TRINDADE, CO 685b, N 17.

117 Le seuil ne devra toutefois pas être trop bas : CR CO II-TRIGO-TRINDADE, CO 685b N 24.

118 Pour une liste complète voir : CR CO II-TRIGO-TRINDADE, CO 685b N 53.

119 CR CO II-TRIGO-TRINDADE, CO 685b N 55.

120 Idem, CO 685c N 6.

(18)

Soulignons que la compétence de refuser l’agrément revient en principe au conseil d’administration. Elle peut toutefois être déléguée statutairement à l’assemblée générale121 (art. 716 al. 1 CO). En conséquence, l’actionnaire minoritaire n’a pour ainsi dire aucun poids quant à la décision d’accepter ou de refuser l’agrément.

iii) Les restrictions conventionnelles

Des conventions d’actionnaires contenant des clauses de blocage ou de préemption peuvent être également conclues s’agissant des actions nominatives, de la même manière que pour les actions au porteur122. La solution n’est toutefois pas totalement satisfaisante car elle n’empêche pas le transfert mais se contente de le sanctionner123.

En résumé, l’actionnaire minoritaire d’une société anonyme dispose donc de trois moyens de protection contre la dilution de ses droits et l’arrivée d’un nouvel associé/actionnaire. Il semblerait toutefois que seule une convention de blocage seule soit efficace, puisque la décision d’exercer les moyens légaux ou statutaires qui permettent d’empêcher un tiers d’acquérir des actions ne dépend pas de lui mais du résultat d’un vote.

4. La société à responsabilité limitée

Le tiers qui désire intégrer une société à responsabilité limitée peut le faire en acquérant des parts sociales à l’occasion d’une augmentation du capital (a), ou en se les faisant céder par un associé (b).

a. Augmentation du capital

L’augmentation autorisée et l’augmentation conditionnelle n’existent pas en droit de la société à responsabilité limitée. L’augmentation du capital ne requiert pas l’unanimité des associés, raison pour laquelle ces derniers bénéficient, comme dans le droit de la société anonyme, d’un droit préférentiel de souscription124 (art. 652b par renvoi de l’art. 781 al. 5 ch. 2 CO). On peut donc se réferer à ce qui a été dit au sujet de l’exercice et de la restriction du droit préférentiel de souscription dans la société anonyme125.

L’associé n’est donc protégé que par l’exercice de son droit préférentiel de souscription, à condition que ce dernier n’ait pas été supprimé.

121 JACQUEMOUD/AUBERSON, p. 348.

122 supra IV.3.b.A.iii ; MARTIN,p. 377.

123 HÉRITIER LACHAT,p. 96.

124 MONTAVON, Droit de la SARL, p. 159.

125 supra IV.3.a.

(19)

b. Entrée par transfert des parts

Le nouveau droit de la société à responsabilité limitée prévoit que le transfert des parts sociales doit être approuvé par l’assemblée des associés (art. 786 al. 1 CO)126. L’art. 786 al. 2 prévoit toutefois la possibilité de restreindre ou d’étendre statutairement cette faculté, en renonçant à cette approbation (ch. 1), en fixant des motifs prédéterminés (ch. 2), en prévoyant une escape clause (ch. 3), en excluant la cession des parts sociales (ch. 4) ou en exigeant des sûretés en cas de solvabilité douteuse (ch. 5). Cette liste est exhaustive127.

La décision d’approbation appartient à l’assemblée des associés, de manière impérative (art. 804 al. 2 ch. 8 CO). La décision se prend à la majorité qualifiée des deux tiers des voix représentées et à la majorité absolue du capital social autorisé à voter128 (art. 808b al. 1 ch. 4 CO).

Dans la mesure où l’unanimité des associés n’est pas requise, l’associé minoritaire ne peut pas empêcher l’entrée d’un nouvel associé dans la société, sauf si un régime statutaire plus strict exigeant l’unanimité a été mis en place.

L’entrée d’un nouvel associé peut également se faire par succession (succession, régime matrimonial, etc.). L’agrément de la société sera nécessaire (art. 788 al. 2 et art. 808b al. 1 ch. 4 CO). Toutefois, l’assemblée des associés ne pourra refuser l’agrément que si elle offre de racheter les parts sociales à leur valeur réelle, au nom de la société, dans un délai de six mois (art. 788 al. 3 CO)129.

En bref, le régime légal du transfert du sociétariat prévoit l’acceptation d’un nouvel associé à la majorité, ce qui ne protège pas l’associé minoritaire.

Même si une disposition statutaire exclut la cession des parts sociales (art. 786 al. 2 ch. 4 CO), celle-ci pourra être supprimée à la majorité absolue des voix représentées (art. 808 CO), ce qui permettra à un nouvel associé d’intégrer la société. L’associé ne sera donc complètement protégé que si l’unanimité a été prévue pour modifier les statuts (808b al. 2 CO) et qu’une clause d’exclusion de la cession des parts sociales a été adoptée (786 al. 2 ch. 4 CO)130.

5. La société en commandite par actions

Les dispositions concernant la société anonyme sont applicables à la société en commandite par actions, sauf disposition contraire (art. 764 al. 2 CO). En l’absence de règles spéciales relatives au transfert des parts, nous renvoyons donc à ce qui a été dit concernant le transfert du sociétariat dans la société anonyme131.

126 HARI, p. 395.

127 MONTAVON, Droit de la SARL, p. 215.

128 CR CO II-CHAPPUIS/JACCARD, CO 786 N 7.

129 MONTAVON, Droit de la SARL, p. 217.

130 Idem, p. 135.

131 supra IV.3.

(20)

On notera toutefois qu’en pratique, la liberté statutaire semble être plus grande dans la société en commandite par actions que dans la société anonyme132. Ainsi, les statuts de « Pictet & Cie Group SCA » et de « Compagnie Lombard, Odier SCA »133 prévoient, en substance, que l’aliénation d’actions puisse être refusée par l’administration si l’acquéreur n’est pas l’un des associés134.

Ces clauses permettent donc de conditionner l’agrément de la société à l’appartenance de l’acquéreur à un cercle très précis de personnes, ce qui, à notre avis, serait impossible dans une société anonyme puisque cette restriction est sans lien avec le but social, et excessive quant au critère de l’indépendance de la société135.

Si cette liberté statutaire de la société en commandite par actions se confirme, cette forme juridique pourrait connaître un regain d’intérêt, en particulier pour les sociétés de personnes se transformant en société de capitaux mais désirant conserver l’actionnariat verrouillé.

6. Contenu de la modification

Le caractère personnel des sociétés de personnes est caractérisé par la difficulté de transmission des parts. En effet, sauf disposition contractuelle contraire, le consentement unanime des associés est requis pour accepter l’entrée d’un nouvel associé. L’associé minoritaire est donc assuré de traiter avec les personnes qui lui conviennent : la stabilité de l’actionnariat est assurée.

Certes, lorsque la société de personnes sera transformée en société de capitaux, l’associé a l’assurance de conserver sa participation, tel que le garantit l’art. 56 LFus.

Toutefois, les règles relatives au transfert du sociétariat, à l’entrée et au changement d’associés seront désormais radicalement différentes. Si aucune mesure n’est prise, l’associé minoritaire subira les décisions de la majorité des autres associés sans avoir voix au chapitre, puisque ces derniers pourront céder leurs parts ou accepter de nouveaux associés à l’occasion d’une augmentation du capital. Le principe de continuité des droits sociaux et patrimoniaux énoncé par la LFus doit donc être nuancé136.

Des mécanismes légaux de protection des associés minoritaires existent (droit préférentiel de souscription, agrément) mais ils sont faillibles dans la mesure où ils impliquent d’investir plus dans la société ou d’obtenir une majorité. Par ailleurs, ils peuvent être supprimés.

132 PETER, p. 72.

133 Depuis leur transformation, l’exercice commercial de ces sociétés s’effectue par le biais d’une société anonyme, détenue par une holding constituée en la forme de société en commandite par actions, elle-même détenue par les associés.

134 Art. 8 des statuts de « Pictet & Cie Group SCA » et art. 10 des status de « Compagnie Lombard, Odier SCA ».

135 REYMOND, p.262,admet l’existence de justes motifs conditionnant l’agrément destinés à maintenir un cercle limité d’actionnaires uniquement si des liens familaux ou des capacités professionnelles particulières le justifie.

136 Message 2000, p. 4014.

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