• Aucun résultat trouvé

Quelle place pour la sécurité sociale en Europe? : une approche générale

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Quelle place pour la sécurité sociale en Europe? : une approche générale"

Copied!
16
0
0

Texte intégral

(1)

Article

Reference

Quelle place pour la sécurité sociale en Europe? : une approche générale

GREBER, Pierre-Yves

GREBER, Pierre-Yves. Quelle place pour la sécurité sociale en Europe? : une approche générale. Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, 1999, no. 22, p. 69-83

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:43529

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

1 / 1

(2)

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999 69

DOCTRINE P.-Y. GREBER

QUELLE PLACE POUR LA SECURITE SOCIALE EN EUROPE ? UNE APPROCHE GENERALE *

Pierre-Yves GREBER

1. REMARQUES INTRODUCTIVES 1.1 Pourquoi traiter un tel sujet ? 1.2 Et sous quel angle ?

2. BESOINS DE PROTECTION ET NECESSITE DE LA SECURITE SOCIALE

3. L'IlVIPORTANCE PARTICULIERE DU SOCIAL EN EUROPE 4. QUESTIONS OUVERTES ET DEFIS

5.

*

4.1 Les besoins de protection vont-ils augmenter ou diminuer à l'avenir?

4.2 Dans quel sens les systèmes de sécurité sociale évoluent-ils ? 4.3 Un équilibre entre mondialisation et sécurité sociale est-il possible?

4.4 Solidarité ou individualisation de la protection?

4.5 Le respect de la sphère privée

4.6 Comment établir un financement efficace et équitable de la sécurité sociale BREVE CONCLUSION

Conférence prononcée dans le cadre du Colloque « Quelle place pour la sécurité sociale en Europe?» Institut d'études sociales, Le Bon Secours, Faculté de Droit. GENEVE, 2 février 1999.

(3)

70 CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE No 22-1999

P.-Y. GREBER DOCTRINE

1. REMARQUES INTRODUCTIVES

1.1 Pourquoi traiter un tel sujet?

1. Il me semble que l'on peut en tout cas invoquer deux raisons qui appellent à s'interroger sur la place de la sécurité sociale en Europe :

d'abord, nous nous approchons de l'an 2000 et c'est le prétexte à toutes une série d'études rétro- et prospectives, de propositions d'évaluations, de bilans;

ensuite, et plus sérieusement, nos sociétés vivent une période de mutations politiques, économiques, sociales, technologiques, qui sont caractérisées par l'in- tensité et la rapidité. Et bien sûr, ces mutations marquent, interpellent, bouscu- lent les systèmes de sécurité sociale1.

2. Les débats ne sont pas toujours clairs et ils peuvent mélanger les questions de choix - que voulons-nous faire ? - et les questions de capacités - que pouvons-nous faire?- p. ex. en fonction des paramètres économiques et démographiques.

3. Et c'est notre affaire à tous. Les systèmes de sécurité sociale représentent l'une des pièces essentielles de nos sociétés européennes. Les ressources de la plupart des Européens sont constituées par la santé, la capacité de travail, la protection sociale. La sécurité sociale est une manière de répartir la richesse créée dans un pays, le pro- duit national : quelle part distribuer selon des critères de justice sociale, en faveur de ceux qui sont atteints dans leur santé, ou privés de travail, ou âgés, ou chargés de famille, et quelle part se ventilera selon les règles du marché ?2 Comment équilibrer la sécurité et la solidarité, d'une part, le risque et la récompense de l'effort, d'autre part (et pour schématiser) ?

4. Il se justifie ainsi pleinement de réfléchir sur la place de la sécurité sociale en Europe. Et même si les capacités peuvent beaucoup varier, c'est de plus en plus dans le cadre de la grande Europe que le débat et la réflexion prennent forme.

5. Si le thème général retenu pour le Colloque ne se rapportait pas à notre conti- nent, il faudrait élargir encore notre perspective. Nous venons en effet de commémorer

2

L'an 2000, et après ... Numéro hors série. Futuribles [Paris], janvier 1999.

Yves CHASSARD :La convergence des objectifs et politiques de protection sociale: une nouvelle approche. Europe sociale, supplément 5/92, pp. 13 sv. (p. 17).

(4)

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999 71

DOCTRINE P.-Y. GREBER

l'adoption, il y a cinquante ans, de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Or, ce texte reconnaît à chaque être humain sur la Terre, sans discrimination, le droit à la sécurité sociale3 . A quelques mois de l'an 2000, nous sommes bien loin de cet objec- tif Et la question ne peut pas être mise de côté, reportée à plus tard. Le Rapport sur le développement humain de 1998, établi par le Programme des Nations Unies pour le dé- veloppement (PNUD), montre que nous avons, maintenant, la capacité de garantir à cha- cun l'accès à des services sociaux de base4.

6. Dans une autre perspective, l'Europe ferait bien de s'abstenir de nombrilisme.

Nous sommes directement intéressés par la place de la sécurité sociale dans les au- tres régions du monde. Comment celles-ci voient-elles l'institution, positivement ou négativement? Ceci tant pour des raisons de concurrence internationale que pour des raisons politiques et culturelles, l'information circule en effet de plus en plus. Il n'est ainsi pas inintéressant pour l'Europe de voir comment la Chine, l'Etat le plus peuplé de la Planète, essaie d'organiser l'accès de sa population aux soins de santéS, ou Taïwan6 opter en faveur d'une assurance-maladie universelle; il peut être aussi utile de s'interro- ger sur la privatisation de la protection sociale, réalisée au Chili en matière de pensions, un cas qui a fait partiellement école en Amérique latine7. En dépit d'énormes problèmes financiers et de conflits violents, l'Afrique aussi étudie et met en place certains régimes sociaux8 . Si l'idée de sécurité sociale progresse dans le monde au siècle prochain, cela devrait avoir des effets bénéfiques pour nos politiques et systèmes de protection sociale. Sans vouloir donner de leçons, soyons prêts à dialoguer !

7. Nonobstant le caractère fondamental de ces questions, revenons au cadre géo- graphique retenu pour ce Colloque, l'Europe.

3

4

6

7

8

Guy PERRIN: Histoire du droit international de la sécurité sociale. Tome V de La sécu- rité sociale. Son histoire à travers les textes. Association pour l'étude de l'histoire de la sécurité sociale. Paris 1993, pp. 297 sv.

Rapport mondial sur le développement humain 1998. Publié pour le Programme des Na- tions Unies pour le développement (PNUD) par Economica. Paris 1998, p. 41.

Aidi HU : La réforme du régime de sécurité sociale de la Chine : réalités et perspectives.

Revue internationale de sécurité sociale, 3/1997, pp. 51 sv. (pp. 60 sv.).

Ming-Cheng KUO: Grundprobleme der Volkskrankenversicherung in Taïwan. In: Ver- fassung, Theorie und Praxis des Sozialstaats. Festschrift Hans Zacher. 1997 (?),pp. 457 sv.

Monika QUEISSER : Réfonne des pensions. Après le Chili, les réforn1es de la deuxième génération en Amérique latine. Revue internationale de sécurité sociale, 3-4/1995, pp. 27 sv.

Voir AISS :Tendances en sécurité sociale (périodique).

(5)

72 CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE No 22-1999

P.-Y. GREBER DOCTRINE

1.2 Sous quel angle traiter le sujet?

8. L'idée est de partir des besoins de protection et de la question de la nécessité de la sécurité sociale, de l'importance particulière du social en Europe- qui est sou- vent qualifiée de« modèle»- pour arriver aux questions cruciales et aux défis.

2. BESOINS DE PROTECTION ET NECESSITE DE LA SECURITE

SOCIALE

9. Pourquoi instituer et piloter des systèmes de sécurité sociale? Le marché n'est-il pas assez développé pour que chacun puisse s'y approvisionner - en s'achetant, p. ex., une assurance-maladie ou une prévoyance-retraite - selon ses désirs et ses intérêts ? Ne sommes-nous pas assez riches en cette fin de siècle pour assumer nous-mêmes les risques de l'existence, au besoin en contractant une police d'assurance? Ne devrait-on pas don- ner (ou vendre) à chacun un ordinateur, un raccordement à Internet, souhaiter bonne chance et passer à autre chose ? Il se trouve que la réalité est un peu plus compliquée. La vie est ainsi faite qu'elle comporte des risques, dont certains peuvent être lourds. Chacun peut être atteint dans sa santé, plus ou moins fréquemment et longtemps, peut-être de- puis son plus jeune âge. Et si la médecine est devenue performante, elle est aussi coûteu- se (peu de personnes sont capables d'assumer elles-mêmes le coût d'une opération, du traitement post-opératoire et d'une convalescence). Et les progrès médicaux sont parfois contrebalancés par l'apparition de risques nouveaux (SIDA), de l'accroissement de pa- thologies lié à l'allongement de la vie (maladies dégénératives, cancers, perte d'autono- mie), par la résurgence de maladies que l'on croyait disparues (tuberculose).

10. L'être humain est au contraire fragile, même s'il ne veut pas le savoir, et sa fragi- lité croît avec l'âge. Or, nous vivons plus longtemps. Et la maladie, l'accident, la perte d'emploi, la maternité, la charge d'enfant, l'invalidité, le décès, le divorce, la retraite en- traînent le besoin d'un revenu de remplacement, à court ou à long terme, qui garde sa va- leur (indexation). La dépendance (perte d'autonomie), la précarité, l'exclusion, l'obsoles- cence des connaissances professionnelles, le souhait de changer d'orientation nécessitent non seulement des prestations monétaires, mais aussi des services. Tous ces éléments re- présentent des données de 1' existence, suscitent un besoin de protection.

11. Aussi longtemps qu'une personne représente «un bon risque», c'est-à-dire qu'elle est jeune, en bonne santé et au bénéfice d'un revenu convenable- conditions cu- mulatives - elle pourra trouver une protection sur le marché des assureurs privés. Mais le monde, même européen, n'est pas exclusivement composé d'individus jeunes, en bonne santé personnelle comme économique. Et alors le risque devient moins attractif pour une

(6)

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE No 22-1999 73

DOCTRINE P.-Y. GREBER

entreprise commerciale, d'où une sélectivité pratiquée, une pondération en fonction des risques assurés. Une telle logique, propre au monde des affaires, est désastreuse si elle est appliquée à l'ensemble d'une population à l'égard des risques de la vie. D'où l'idée de ne pas laisser les individus se débrouiller seuls, avec leur famille s'ils en ont une, mais au contraire de considérer que la protection à l'égard des soins de santé, des revenus de remplacement ou de compensation, des services est une question sociale, qui interpelle une communauté. C'est ainsi que la sécurité sociale, prolongeant des modes de protec- tion plus anciens, est devenue une pièce centrale de nos sociétés, une part de nos cultu- res.

3. L'IMPORTANCE PARTICULIERE DU SOCIAL EN EUROPE

12. Il y a une dizaine d'années, trois auteurs éminents - J. V ANDAMME, J.

DELORS et R. DRAPERIE9 - posaient l'affirmation suivante: l'Europe de l'Ouest se caractérise par la conjugaison du libéralisme économique et du souci d'une protection sociale développée. Le premier cité précisait : « Que la politique de protection sociale et de sécurité sociale soit un élément essentiel de notre « modèle » européen de civilisation, n'est contesté par personne. C'est essentiellement par ce biais que l'Europe occidentale se différencie du « modèle » japonais, du « modèle » américain et évidemment du « mo- dèle» soviétique. C'est par la sécurité sociale que s'est développé en Occident, après la seconde guerre mondiale, un équilibre économique et social alliant les bienfaits de la li- berté dans le travail et les exigences de la solidarité avec ceux qui en étaient démunis ou temporairement privés » Jo_

13. Quelles étaient les raisons d'une telle sensibilité sociale et d'une volonté d'inté- gration des différentes catégories de la population? Louis CARTOU met en évidence l'apport de l'humanisme et du christianisme, fondements européens11 Paul DURAND souligne le besoin de sécurité qui marque le XXe siècle, dû à la grande crise économique de 1929, aux deux guerres mondiales, au vieillissement des populations12 . Le développe-

9

10 Il

12

Jacques VANDAMME: Introduction. In : L'avenir de la sécurité sociale en Europe.

Sous la direction de H. Deleeck. Economica. Paris 1987, p. 2. -Richard DRAPERIE:

Sécurité soCiale et échéance 1992. In : La sécurité sociale et 1 'Europe 1992/Social Secu- rity and Europe 1992. Institut européen de sécurité sociale/European Institute of Social Security. Annuaire IESSIEISS Yearbook 1989. Acco. Leuven/Amersfoort 1990, pp. 9 sv. (pp. 16-17). Ce second auteur se réfère à des déclarations de Jacques DELORS, alors Président de la Conm1ission européenne.

Jacques VANDAMME: Introduction, cité à la note 1, p. 2.

Louis CARTOU: L'Union européem1e. Traités de Paris, Rome, Maastricht. Dalloz.

Paris 1994, pp. 3 sv.

Paul DURAND : La politique contemporaine de sécurité sociale. Dalloz. Paris 1953, p.

12.

(7)

74 CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999

P.-Y. GREBER DOCTRINE

ment des systèmes de sécurité sociale a bien sûr bénéficié de la période de haute con- joncture économique. Il convient néanmoins de rappeler que leurs origines précèdent cet- te dernière; trois dates peuvent être évoquées: 1883, pour la première assurance sociale (maladie) en Allemagne, 1942, pour le Rapport Beveridge en Grande-Bretagne, 1945, pour l'ordonnance instituant une organisation de la sécurité sociale en France.

14. A tous ces éléments pertinents, s'en ajoute un, dont on n'a probablement pas fini de comprendre l'importance, c'est celui des systèmes de sécurité sociale qui fonction- naient dans l'ancienne Europe de l'Est et dans l'Union soviétique. Les régimes commu- nistes ne pouvaient guère impressionner l'Ouest en matière de démocratie, de droits de l'homme (au moins dans leur composante civile et politique) et de réussites économi- ques ; mais, en revanche, ils pouvaient faire état de succès en sécurité socialei3 comme en éducation nationale. Face à cette composante, sous la pression des forces sociales, l'Europe de l'Ouest se devait de répondre à l'Europe de l'Est dans le registre du social.

15. Depuis 1989., le rideau de fer qui séparait l'Europe n'existe plus; les anciens ré- gimes communistes non plus. La première puissance économique et militaire du monde, les Etats-Unis, l'économie, sa« mondialisation», dominent. L'accent est mis sur le mar- ché ; priorité est donnée aux libertés de circulation des capitaux, des biens et des servi- ces, à la liberté des investissements. Le courant dominant, chez les acteurs économiques comme politiques, est libéral ou néo-libéral. Le social est souvent sur la défensive : cer- tains lui reprochent d'être trop cher, de pénaliser face à la concurrence, d'encourager un comportement passif des populations; les inégalités qui s'accroissent, en Europe comme dans le monde, semblent moins gêner, choquer.

16. L'Europe pourra-t-elle prétendre, à l'avenir, équilibrer l'économie et le social, considérer la protection sociale comme un élément essentiel de son « modèle » de civili- sation ? La question est posée. La grande Europe est appelée à y réfléchir ; elle ne part pas de rien, mais elle est riche d'expériences sociales et humaines. Il nous faut penser en- semble le futur de nos politiques et de nos systèmes de sécurité sociale.

13 Voir p. ex. : Vladimir RYS : La sécurité sociale dans une société en transition: l'expé- rience tchèque. Quels enseignements pour l'Europe? Réalités sociales. Lausanne 1999.- Les AlmuairesN earbook 1992 et 1993 de 1 'Institut européen de sécurité sociale, publiés chez Acco, Leuven! Alnersfoort en 1993 et 1994, peuvent être consultés avec profit.

(8)

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999 75

DOCTRINE P.-Y. GREBER

4. QUESTIONS OUVERTES ET DEFISI4

17. Quelle place pour la sécurité sociale en Europe ? Pour continuer la réflexion, essayons de poser quelques questions ou de formuler des défis, dont l'importance pour- rait être déterminante.

4.1 Les besoins de protection vont-ils augmenter ou diminuer à l'avenir?

18. II faudrait une boule de cristal pour apporter la réponse ! En matière de soins de santé, l'amélioration de la couverture des populations- soit l'avancement de l'universa- lité - les progrès de la médecine tant sur le plan diagnostique que curatif, les recherches pharmaceutiques, l'assistance par ordinateur, l'utilisation de nanomachines qui se glisse- ront dans le corps humain, devraient exercer des effets positifs sur la santé humaine.

Mais ces sciences et techniques ont un coût ! La détérioration de l'environnement, la précarité influencent négativement la santé. L'allongement de la vie augmente la durée d'exposi-tion aux maladies dites de civilisation. Les virus, anciens ou nouveaux, remet- tent en cau-se des progrès que l'on croyait acquis. Au vu de ces éléments brièvement rappelés, il se-rait peu prudent de compter sur une diminution des besoins de pro- tection sanitai-re.

19. La fragilisation des familles, le chômage, l'avancée des travaux dits atypiques- certains diraient les progrès de la flexibilité - rendent moins solides deux piliers - la famille et le travail salarié- sur lesquels se sont a,ppuyés les systèmes de protection sociale. La première problématique a incité les législateurs à écarter les droits dérivés des membres de la famille au profit de droits individualisés, ceci également pour réaliser l'égalité de traitement entre femmes et hommes (éviter que l'épouse ne dépende, en ma- tière de sécurité sociale, de son mari). Les législations tendent également à valoriser des activités non rémunérées, telle 1' éducation de ses enfants, en leur octroyant des « bonifi-

14 ASSOCIATION INTERNATIONALE DE LA SECURITE SOCIALE (25e Assemblée générale, Nusa Dua, 1995) : Développements et tendances de la sécurité sociale, 1993-

1995 : rapport du Secrétaire général. Revue internationale de sécurité sociale, 2/1996, pp. 5 sv. - ASSOCIATION INTERNATIONALE DE LA SECURITE SOCIALE (26e Assemblée générale, Marrakech, 1998) : Développements et tendances de la sécurité so- ciale, 1996-1998. -Jean-Jacques DUPEYROUX: Droit de la sécurité sociale. 13e éd.

par Rolande Ruellan. Dalloz. Paris 1998, pp. 119 sv. -lan PEARSON (éd.): Atlas du XXIe siècle. Quelle société, quelle planète, demain, pour nous et nos enfants ? Editions Autrement. Paris 1998. -La sécurité sociale en Europe à l'aube du XXIe siècle. Muta- tions, nouvelles voies, réfom1es du financement. Helbing & Lichtenhalm. Basel/Frankfurt am Main 1996.-La sécurité sociale en Europe et en Suisse. Réalités sociales. Lausanne

1996.

(9)

76 CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999

P.-Y. GREBER DOCTRINE

cations» prises en compte lors du calcul des prestations. Un début de réponse aux tra- vaux dits atypiques ou aux « working poors » consiste à développer des garanties mini- males de ressources.

20. L'allongement de l'espérance de vie, la dépendance liée au grand âge, les re- conversions professionnelles sont d'autres éléments, juste mentionnés, qui entraînent également une augmentation des besoins de protection. Même en rationalisant (p. ex.

grâce à la reconfiguration des régimes, à l'appui de l'informatique) et en opérant certai- nes économies, il n'apparaît pas que les besoins de protection vont diminuer; au con- traire, l'on peut s'attendre à leur croissance.

4.2 Dans quel sens les systèmes de sécurité sociale évoluent-ils ?15

21. Les systèmes européens présentent aussi bien des développements que des re- culs en matière de protection. Parmi les premiers : des extensions de la protection à certaines personnes qui en étaient exclues (cf. p. ex. le débat en France sur l'universali- sation de l'assurance-maladie); l'instauration de garanties minimales de ressources et d'insertion; introduction de dispositifs de prise en charge de la dépendance des per- sonnes âgées; le développement de mesures actives qui devraient permettre le retour à une activité rémunérée. Les développements concernant les garanties minimales, la dé- pendance et les mesures actives, sont généralement présents dans les pays de l'Union eu- ropéenne.

22. Parmi les reculs, l'on peut par exemple mentionner: l'augmentation du ticket modérateur dans les régimes de soins de santé; l'élévation progressive de l'âge d'ou- verture à la pension de retraite ; des règles de calcul moins favorables pour une telle prestation; des normes plus sévères quant à l'obligation pour un chômeur d'accepter un emploi. Il s'agit également de tendances générales en Europe.

23. Cette présence simultanée d'avances et de reculs, illustre bien la double pres- sion des besoins de protection et des problèmes de financement. L'évolution écono- miques et démographique risque de maintenir une telle dichotomie.

15 ASSOCIATION INTERNATIONALE DE LA SECURITE SOCIALE: Protection so- ciale en Europe: aperçu des régimes de sécurité sociale, 1996. AISS. Genève 1996.-Et pour continuer, AISS : Tendances en sécurité sociale (périodique).

(10)

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE No 22-1999 77

DOCTRINE P.-Y. GREBER

4.3 Un équilibre entre mondialisation et sécurité sociale est-il possible ?16

24. La mondialisation de l'économie se caractérise par un développement du commerce international et par une « explosion des mouvements internationaux des capitaux »17. Sous l'égide du GATT puis de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), les règles du commerce international ont été libéralisées. L'ouverture sans entraves des marchés doit permettre aux acteurs économiques d'avoir des stratégies mondiales, d'opérer sur toute la planète; l'accent est mis sur la concurrence, sur les rè- gles du marché, sur un rôle plus restreint de l'Etat. Quant aux capitaux, ils doivent pou- voir circuler le plus librement possible, à la recherche des meilleurs rendements. Le terme de mondialisation (globalization) est en soit critiquable, puisque les échanges s'opèrent essentiellement entre les pays économiquement développés et les nouveaux pays indus- trialisés.

25. Le concept actuel de mondialisation, d'inspiration américaine (Etats-Unis) mais largement suivie par l'Europe, est fondé sur la primauté presque absolue de l'écono- mie. En d'autres termes, la philosophie politique peut être qualifiée d'ultra-libérale ou de néo-libérale. Selon celle-ci, la croissance d'une économie la plus libre possible va entraî- ner des effets bénéfiques pour chacun. Le social, le développement durable, la culture ne sont pas des priorités ; le secteur public doit rester en retrait.

26. Michel ALBERT a bien montré l'opposition vive, depuis la chute du mur de Ber- lin, entre le capitalisme qu'il appelle néo-américain et celui nommé rhénan : le pre- mier « est fondé sur la réussite individuelle et le profit financier à court terme», le se- cond, notamment allemand et proche aussi de celui du Japon, « valorise la réussite col- lective, le consensus, le souci du long terme »18 . Le premier modèle est fondamentale- ment opposé à l'idée de sécurité sociale, qui crée un esprit d'assistés et est défavorable au développement économique. Au contraire, la sécurité sociale appartient au deuxiè- me modèle, « considérée par tous comme la juste conséquence du progrès économique et même, par beaucoup, comme une institution favorable au développement économi- que: au-dessous d'un certain seuil de pauvreté, l'exclu devient irrécupérable »19.

ALBERT relève ainsi que : «Partout, la logique du capitalisme est, aujourd'hui, d'une manière ou d'une autre, confrontée à celle de la protection sociale »20 •

16

17 18 19 20

Roland SIGG: L'impact de la mondialisation sur les systèmes de sécurité sociale: quel- ques réflexions en marge d'un vaste débat. Aspects de la sécurité sociale, bulletin de la FEAS, 1/1998, pp. 19 sv.

Idem, p. 20.

Michel ALBERT: Capitalisme contre capitalisme. Seuil. Paris 1991, p. 25.

Idem, p. 14.

Idem, p. 15.

(11)

78 CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999

P.-Y. GREBER DOCTRINE

27. Dans le domaine des pensions de retraite, le rapport de la Banque mondiale sur la crise du vieillissement21 , publié en 1994 et qui a eu un immense retentissement dans le monde22, se rattachait manifestement au modèle ultra-libéral. Il prônait une in- tervention minimaliste des régimes publics, 1' essentiel de la protection devant incomber à des régimes privés en capitalisation. Il semble que cette institution financière internatio- nale soit en train, non pas d'abandonner sa« philosophie», mais de la nuancer.

28. Le débat est autant politique qu'économique et l'issue est incertaine. La mondialisation, dans sa conception actuelle, exerce des effets sur les systèmes de sé- curité sociale, en Europe comme dans le monde. La compétition économique très vive incite les politiques et les entreprises à limiter les cotisations sociales et les impôts, ce qui a pour effet des réductions des prestations, des reports du coût sur les personnes protégées. La concurrence est considérée comme un élément positif également dans le domaine social : ainsi, une compétition est introduite entre assureurs sociaux, entre fournisseurs de prestations (surtout dans le secteur de la santé). Les caisses de pensions des régimes en capitalisation exercent un pouvoir plus grand dans l'économie, avec heu- reusement un souci des aspects sociaux et de développement durable lorsqu'elles opèrent des placements.

29. En Europe et dans le monde, le phénomène de la mondialisation ultra-libérale suscite inquiétudes et oppositions. Même sur un plan strictement économique, le suc- cès n'est guère assuré (cf. la toute récente crise asiatique). Et sur le plan social, la com- pétition accrue creuse les inégalités, aggrave le chômage, produit des exclus. Le 29e Forum économique de Davos a accroché, dans son titre, l'adjectif« responsable» à côte de globalisation ! Une mondialisation encadrée, plutôt que sauvage, devrait pouvoir trouver un équilibre avec la protection sociale. L'avenir de la sécurité sociale en dé- pend.

4.4 Solidarité ou individualisation de la protection ?

30. La solidarité, considérée dans le domaine de la sécurité sociale, comprend deux dimensions. La première, appelée solidarité verticale ou entre revenus, demande un effort contributif variable selon la capacité économique : une personne jouissant d'une bonne situation financière est amenée à contribuer davantage au système qu'elle ne le fe- rait si l'équivalence23 était appliquée, que ce soit par le moyen de cotisations, d'impôts

21

22 23

Rapport de la Banque mondiale sur les politiques de développement : La crise du vieillis- sement. Mesures destinées à protéger les pers01mes âgées et à promouvoir la croissance.

Résumé. Banque mondiale. Washington 1994.

Voir le N° 3/1996 de la Revue intemationale de sécurité sociale.

Contributions et prestations sont théoriquement équivalentes.

(12)

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999 79

DOCTRINE P.-Y. GREBER

directs ou d'une combinaison de ceux-ci. La seconde dimension, appelée solidarité hori- zontale ou, dans le domaine des pensions, solidarité entre générations, crée un lien entre les contributeurs au financement et les personnes bénéficiant des prestations24. Son as- pect le plus marquant est lié à 1' emploi de la technique de la répartition, classique dans le cadre des régimes publics de pensions25,26.

31. La solidarité est-elle nécessaire, si oui, pourquoi ? Le monde est ainsi fait que les situations de revenus, de fortune, de capacité de travail, de santé, d'éducation peuvent varier beaucoup d'un individu à un autre. De plus, chacun peut voir son statut changer pendant son existence, favorablement ou défavorablement. La fragilité est inhérente à la condition humaine. Et pour lui faire face, mieux vaut agir ensemble, selon des « commu- nautés » à définir, qu'en ordre dispersé. L'éthique et 1' efficacité se réunissent. Pensons, un instant, aux ressources nécessaires pour faire face au décès et à l'invalidité survenus à un âge encore jeune pour un chargé de famille. L'accès à une protection convenable, pour chaque personne, implique ainsi : que certains puissent la recevoir sans avoir con- tribué financièrement (cas typique : l'invalide de naissance); que certains reçoivent da- vantage que ce qu'ils auront apporté (petits revenus, familles nombreuses, p. ex.); que d'autres, bénéficiant d'une situation bonne voire excellente, s'acquittent de contributions de solidarité (par cotisations, impôts ou mixages).

32. C'est ainsi que la solidarité verticale, plus ou moins développée, caractérise les régimes publics de sécurité sociale, en se focalisant sur l'accès aux soins de santé, la garantie de ressources de base, l'accès à des services. La fragilisation des familles et des emplois, l'importance prise par le grand âge, la résurgence de la précarité montrent la né- cessité d'appliquer une solidarité entre revenus, qui tienne compte de la capacité contri- butive de chacun (sans considérer le seul travail). D'autre part, la solidarité entre géné- rations, liée à la technique de la répartition, se justifie dans les régimes publics de pensions: elle permet leur démarrage rapide, l'indexation à l'évolution du coût de la vie, d'éviter l'accumulation de capitaux qui serait énorme vu la capitalisation déjà pratiquée, en principe, dans les régimes professionnels.

24

25

26

Une personne peut remplir simultanément les deux situations, p. ex. en acquittant des co- tisations d'assurance-maladie tout en étant soignée à la charge du régime de soins de santé.

Chaque année, les ressources nécessaires pour couvrir les dépenses de cette même atmée sont prélevées. Ainsi, p. ex. les ressources perçues en 1999 servent immédiatement à fi- nancer les pensions servies en 1999.

Ernst KAISER : Les possibilités et les limites d'une solidarité conçue dans le cadre des générations et des revenus. RCC [Berne] 1971, pp. 317 sv.- Alexandre BERENSTEIN:

Le principe de la solidarité. Son application dans les assurances sociales en Suisse. ln : Pratiques des solidarités. Hommage à Roger Girod. Réalités sociales. Lausanne 1991, pp. 15 sv.

(13)

80 CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999

P.-Y. GREBER DOCTRINE

33. Qu'en sera-t-il à l'avenir? La valeur solidarité, qui fonde la sécurité sociale, de- meurera-t-elle forte ou, au contraire, allons-nous vers une individualisation de la protec- tion, une sorte d'assurance ou d'épargne; chacun pour soi ?

34. Sur l'évolution de la solidarité, les op miOns divergent. Certains, tel Guy PERRIN27, la rattachent au contexte particulier de la seconde guerre mondiale, pé- riode depuis laquelle la solidarité serait en recul. D'autres estiment que la solidarité ne s'oppose pas nécessairement à l'individualisme qui caractérise notre société contem- poraine: d'une part, celui-ci n'est pas monolithique, d'autre part, l'on ne constate pas un déclin général de l'altruisme. SCHWEISGUTH souligne ainsi que: «L'idée d'égale di- gnité des êtres humains est en progrès sur le long terme, sous l'effet notamment du pro- cessus continu d'élévation du niveau culturel ». 28

35. Deux éléments doivent particulièrement être pris au sérieux :

27

28

29

le «modèle dominant» actuel met en avant la compétition, le dépassement des autres ; le terme « d'agressivité » est considéré par certains comme positif, plus marqué que celui de dynamisme. Personne ne prétend que la mondialisation ac- tuelle est un exercice de solidarité pratiqué à 1 'échelle planétaire !

les progrès de la génétique médicale vont permettre de déterminer, pour cha- que individu, les prédispositions à certaines maladies. Une approche personnalisée d'une part des risques d'atteintes à la santé est en train de s'ajouter voire de rem- placer une appréciation statistique globale. Cela permet d'apprécier les coûts po- tentiels par individu. Si l'on peut établir pour chacun, scientifiquement, une car- te des risques, cela aura-t-il des effets sur l'accès à une protection en matière de soins de santé, sur les cotisations, sur le contrôle des comportements?

L'idée de sécurité sociale repose sur une communauté créée face aux risques, sans distinguer selon la vulnérabilité des personnes protégées ou leur patrimoine génétique. Pierre ROSANV ALLON écrit ainsi que : « Il nous faudra désormais repenser la solidarité en sachant plus clairement ce que sont les situations et les chances de chacun ».29

Guy PERRIN : L'avenir de la protection sociale dans les pays industriels. Crises, défis et mutation des valeurs. Futuribles, 1985, N° 92-93, pp. 28 sv. (pp. 47 et 49).

Etienne SCHWEISGUTH : La montée des valeurs individualistes. In : Numéro spécial : L'évolution des valeurs des Européens. Futuribles, 1995, N° 200, pp. 131 sv. (pp. 159-

160).

Pierre ROSANVALLON: La nouvelle question sociale. Repenser l'Etat-providence.

Seuil Paris 1995, p. 36.

(14)

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE No 22-1999 81

DOCTRINE P.-Y. GREBER

36. Solidarité ou individualisation de la protection ? La question est posée, dans un contexte qui paraît peu favorable. La voie des comptes personnels de santé ou des as- surances-maladie avec bonus n'indique-t-elle pas déjà une dérive ?

4.5 Le respect de la sphère privée

37. La sécurité sociale est une institution qui est fondamentalement au service des êtres humains. Le développement technologique, la recherche d'une plus grande ef- ficacité, la maîtrise des coûts ne doivent pas changer ce principe de base.

38. Les institutions de sécurité sociale ne pourraient plus se passer de l'informa- tique. Mais jusqu'où aller dans la précision des informations stockées ? De la naissance à la mort, beaucoup d'informations peuvent être réunies. Pour quelle utilisation? Quelles connexions opérer entre fichiers ? II n'est plus difficile d'établir le coût total des presta- tions reçues par une personne, une famille, d'introduire des paramètres liés au sexe, à l'âge, à la nationalité, etc. Attention aux dérives qui devraient être considérées comme inadmissibles, le cas échéant, sanctionnées. Et quid de la carte de santé, de la grandeur d'une carte de crédit bancaire, qui peut stocker quantité d'informations? Elle est certai- nement pratique pour suivre un dossier médical, éviter la répétition de mesures diagnos- tiques ou thérapeutiques, tenir compte des allergies, etc. Mais peut-on être sûr que son utilisation restera soumise au secret médical, que son accès ne sera pas utilisé lors de l'embauche d'un travailleur? Comment encadrer la prévention sanitaire, faire en sorte qu'elle soit au service de l'assuré, en respectant sa sphère individuelle? Que faire si un individu ne recourt pas aux mesures de prévention prévues par un régime . . . le do- maine n'a rien à voir avec, p. ex. le contrôle obligatoire des véhicules automobiles ! Donc, absence de sanctions ?

4.6 Comment établir un financement efficace et équitable de la sécurité sociale

39. II n'est guère sérieux d'évoquer en quelques lignes la question du financement30 mais il serait encore plus grave de ne rien en dire du tout ! La place de la sécurité so- ciale dans l'Europe de demain dépendra aussi des choix et des capacités en la matière.

30 Gabrielle ANTILLE/Beat BURGENMEIER/Yves FLUCKIGER: L'économie suisse au futur. Une réfonne en trois piliers. Réalités sociales. Lausmme 1997.- Alain EUZEBY:

Les prélèvements obligatoires. Presses Universitaires de France. Paris 1992. - Yves FLUCKIGER/Javier SUAREZ : Propositions de réfonne du financement de la sécurité sociale en Suisse. In : La sécurité sociale en Europe à l'aube du XXIe siècle. Mutations, nouvelles voies, réfonnes du financement. P.-Y. Greber (éditeur). Helbing & Lichten- hahn. Basel/Frankfurt am Main 1996, pp. 145 sv.- Pascal MAHON: Le financement de

(15)

82 CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999

P.-Y. GREBER DOCTRINE

40. Choix d'abord. Parce que l'Europe peut, si elle le veut, consacrer une part des ressources économiques à la protection sociale. Pour revenir sur un point évoqué, c'est décider quelle proportion du produit national d'un Etat doit être redistribuée selon des critères non pas de marché mais de justice sociale. C'est s'interroger aussi sur l'accrois- sement des inégalités de revenus et des statuts précaires. Capacités ensuite, parce que la sécurité sociale entretient des relations étroites avec l'économie - donc la concurrence internationale - et la démographie - donc le vieillissement de nos populations.

41. La question du financement comporte plusieurs aspects:

La présence d'éléments de solidarité et d'équivalence: où faut-il les placer?

La solidarité devrait s'imposer dans les domaines de l'accès aux soins de santé, des garanties de revenus de base et des services ;

la détermination des sources : les systèmes font généralement appel largement aux prélèvements sur les salaires. Or, ceux-ci ne représentent qu'une part des re- venus et l'économie mondialisée est de plus en plus financière;

le choix des techniques : en matière de pensions, l'option répartition/capitalisa- tion a fait l'objet de vifs débats ces dernières années, de positions très tranchées, qui commencent à s'arrondir au vu des réalités économiques et démographiques;

la recherche de la qualité de la protection au meilleur coût : éviter les organi- sations déficientes ou inutilement compliquées, les abus, développer les incita- tions (auprès des bénéficiaires comme des fournisseurs de prestations);

l'acceptation, par une population, des prélèvements obligatoires, qui dépen- dra d'une bonne réponse aux éléments précédents, comme d'une culture de la sé- curité sociale, qui transmet le message de celle-ci ;

les effets sur l'emploi (éviter de « récom,penser » les entreprises qui licencient

massivement, p. ex.); ··

l'adoption de règles aussi claires que possible, dont les acteurs sociaux com- prennent le bien-fondé (pour éviter le développement de l'économie dite souter- raine);

la prise en compte du développement durable - sauvegarder les chances des générations suivantes - notamment lors du placement de capitaux.

la sécurité sociale en Suisse. Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, N° 14- 1995, pp. 75 sv. - Pierre GILLIAND/Stéphane ROSSINI : La protection sociale en Suisse. Recettes et dépenses, 1948-1997. Comparaisons avec les pays de l'Union Euro- péenne. Réalités sociales. Lausanne 1997.- Bernard VIRET: Aspects constitutionnels et légaux du financement des assurances sociales en Suisse. Aspects de la sécurité sociale, bulletin de la FEAS, 2-3/1996, pp. 63 sv.

(16)

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SECURITE SOCIALE N° 22-1999 83

DOCTRINE P.-Y. GREBER

5. BREVE CONCLUSION

42. S'interroger sur la place de la sécurité sociale dans nos sociétés est une bonne oc- casion de réfléchir au long terme. C'est se préparer à un choix de société. Face aux

risque~ de la vie, face aux besoins de protection, voulons-nous laisser chacun se débrouil- ler seul, au risque des inégalités les plus criantes, ou, voulons-nous faire un bout de che- min ensemble, prévenir, réparer, redonner des chances ? Sommes-nous prêts à discuter, honnêtement, des choix et des capacités ?

43. «Voici bientôt l'an 2000, sur lequel nous avons projeté tant d'espoirs et de craintes, catalyseur de tant de rêves et de cauchemars. Voici bientôt l'an 2000, par delà les innombrables célébrations qu'il suscitera, l'occasion peut-être de s'arrêter un instant pour se remémorer l'histoire tourmentée d'un siècle marqué par des progrès foudroyants aussi bien que par des épisodes de barbarie sans précédent.

Ainsi le siècle qui s'achève nous lèguera-t-il le sentiment que, capables du meil- leur comme du pire, mais jamais vraiment esclaves d'une évolution inéluctable, les hom- mes feraient bien de réfléchir au temps qui vient, à cet avenir qu'il leur incombe de cons- truire.

Jamais l'éventail des futurs possibles (les futuribles) n'a été aussi ouvert ; jamais notre liberté et notre pouvoir aussi grands ».31

31 Hugues de JOUVENEL : L'an 2000, et après, cité à la note 1, p. 1.

Références

Documents relatifs

Deux propositions relevant de la Partie générale semblent avoir de la peine à recueillir le consensus au sein du Conseil des Etats (Chambre des Cantons) :

Le droit international de la sécurité sociale n'impose ni l'octroi indirect ni le sys- tème national de santé (octroi direct). Sa teneur mérite d'être rappelée : «Les

Publié avec le soutien des organisations suivantes : Académie suisse des sciences humaines et so- ciales ; Association suisse de politique sociale ; Domaine du travail social de

-  procède à l’analyse approfondie de la situation des comptes sociaux et formule des recommandations portant, d’une part, sur des voies d’amélioration possibles du contenu et

A propos de la politique sociale des dernières décennies en Suisse, les auteurs de ce livre ont écrit que:« Plus la prospérité générale s'est généralisée (sic) au fil des

Ce modèle applique le principe de 1 'universalité aux soins de santé - au moyen du service national de santé ou de l'assurance maladie nationale- aux pen- sions de

[22] Docteur Izen déclara que l’appelante n’avait pas observé d’amélioration significative des symptômes ressentis dans ses membres supérieurs et qu’elle était très

L’Académie de la sécurité sociale est le programme de formation le plus complet offert par le Centre international de formation de l’OIT (CIF-OIT) dans le domaine de la