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Les principes d'assurance et de solidarité : quelle place dans la sécurité sociale ?

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Les principes d'assurance et de solidarité : quelle place dans la sécurité sociale ?

GREBER, Pierre-Yves

GREBER, Pierre-Yves. Les principes d'assurance et de solidarité : quelle place dans la sécurité sociale ? Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, 2002, no. 28, p. 21-46

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http://archive-ouverte.unige.ch/unige:43743

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CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SÉCURITÉ SOCIALE N° 28-2002 Se COLLOQUE

21 P.-Y. GREBER

LES PRINCIPES D'ASSURANCE ET DE SOLIDARITÉ : QUELLE PLACE DANS LA SÉCURITÉ SOCIALE ?

*

Pierre-Yves GREBER Université de Genève

1. INTRODUCTION ... 1

2. LE PRINCIPE D'ASSURANCE ET LA PROTECTION SOCIALE ... 2

2.1 La création de 1' assurance sociale ... 3

2.2 Le modèle bismarckien d'assurance sociale ... 5

2.3 Le grand succès de l'assurance sociale ... 6

2.4 L'assurance sociale devient une technique importante au service de la sécurité sociale ... ; ... : ... 9

2.4.1 En droit' international ... ~ ... 9

2.4.2 Dans les systèmes nationaux ... 20

3. LE PRINCIPE DE LA SOLIDARITÉ ET LA 4. 5.

*

PROTECTION SOCIALE ... 25

3.1 La solidarité avant l'émergence de la solidarité sociale ... 25

3.2 Le principe de la solidarité dans la sécurité sociale ... 30

3.3 Une approche plus technique de la solidarité dans les systèmes de sécurité sociale ... 34

3.4 La solidarité dans les modèles européens de sécurité sociale ... .42

LES PRINCIPES D'ASSURANCE ET DE SOLIDARITÉ : QUELLE PLACE DANS LA SÉCURITÉ SOCIALE DU FUTUR ? ... 46

CONCLUSION ... 51

Version complètement révisée d'un rapport présenté dans le cadre du 5e Collo- que de droit européen de la sécurité sociale (Genève, 7 septembre 2001).

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P.-Y. GREBER

CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SÉCURITÉ SOCIALE No 28-2002 Se COLLOQUE

1. INTRODUCTION

1. Les principes d'assurance et de solidarité sont généralement présents dans les systèmes de sécurité sociale. Ils sont liés à l'Histoire, plus précisément aux origines de la protection sociale. Ils sont liés aux finalités de cette dernière. Leur conjugaison de- vrait permettre de répondre aux besoins des populations, en tenant compte de la diver- sité des situations de revenus et de besoins ; si elle est adéquate, cette combinaison ren- forcera le soutien des populations à leurs systèmes de sécurité sociale.

2. LE PRINCIPE D'ASSURANCE ET LA PROTECTION SOCIALE

2. L'idée d'assurance est antérieure à la protection sociale. C'est la mise en place d'une communauté de risque: des personnes concluent un contrat avec un assureur, lui confient la gestion d'un risque et acquittent pour cela des primes. L'exercice implique une confiance de la part des preneurs d'assurance, qui s'attendent à recevoir la protec- tion prévue par le contrat lorsque le risque envisagé se produit ; il exige de 1' assureur une compétence technique (apprécier le risque pour la population concernée, compte tenu de son évolution) et fmancière (disposer des ressources nécessaires en tout temps et opérer des placements à la fois sûrs et productifs). Ces éléments sont également perti- nents dans le domaine de la protection sociale. Pourtant, celle-ci va devoir modifier, parfois fondamentalement, un certain nombre de règles pour des raisons sociales. Pour comprendre les enjeux, il est utile de remonter à la création de l'assurance sociale, un événement majeur de la fm du XIXe siècle.

2.1 La création de l'assurance sociale

3. La création de l'assurance sociale remonte à la fin du XIXe siècle, dans l'Em- pire allemand dirigé par 1' empereur Wilhelm 1 et son chancelier Otto von Bismarck.

Le contexte économique était caractérisé par le passage d'une économie agraire à une économie industrielle. Or cette transition était accompagnée d'une situation sociale très difficile, soit l'accroissement d'un prolétariat urbain misérable. L'Empire était attaché à une consolidation de son unité nationale tout en étant exposé à 1' évolution marquée des idées sociales, y compris révolutionnaires. La stratégie politique combina ainsi la ré- forme sociale et la répression. La première s'est concrétisée par 1' adoption des premiè- res lois d'assurances sociales dans le monde, relatives à l'assurance-maladie (Gesetz über die Krankenversicherung der Arbeiter, 1883), à l'assurance-accidents (Unfallversi- cherungsgesetz, 1884, à l'assurance-invalidité et vieillesse (Gesetz über die Invaliditats- und Altersversicherung, 1887).1

Jean-Jacques DUPEYROUX : Droit de la sécurité sociale. 13e éd. par Rolande RUEL- LAN. Dalloz. Paris 1998, pp. 36 sv.- Eberhard EICHENHOFER: Sozialrecht. 2. Auf-

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4. La création de ce nouveau mode de protection a des racines, relevées par DUPEYROUX et PERRIN, à la fois dans :

une forme de protection sociale : « Une législation sociale avait en Prusse posé d'importants jalons sur le plan accidents du travail et sur le plan maladie: signa- lons une loi de 1854 accordant aux communes et aux autorités locales l'auto- risation de créer des fonds de maladie et d'imposer une affiliation obligatoire des salariés. La Bavière, le Wurtemberg, le duché de Bade avaient adopté de 1869 à 1875 des dispositions, similaires>/;

l'assurance privée : «L'originalité foncière des premières lois allemandes d'as- surance sociale a consisté à promouvoir 1' assurance, technique ancienne et bien , connue, mais encore peu appliquée aux risques de dommages humains, au rang d'une institution spécifique irréductible aux modes antérieurs de protection et adaptée aux besoins du prolétariat industriel, non seulement dans 1' Allemagne impériale, mais plus généralement dans l'ensemble des pays en voie d'industria- lisation. ( . . . ) Le caractère spécifique de 1' assurance sociale s'est également af- firmé dès l'origine dans la profonde mutation qu'elle a imposée à la technique de 1' assurance, convertie en authentique institution de protection sociale ». 3

2.2 Le modèle bismarckien d'assurance sociale

5. Les lois allemandes adoptées entre 1883 et 18874 constituent un véritable mo- dèle, celui de l'assurance sociale, qui peut être caractérisé de la façon suivante :

a) champ d'application personnel

2

3

4

l'affiliation est obligatoire de par la loi;

1' assurance-maladie et 1' assurance-accidents s'appliquent aux personnes travail- lant dans certains types d'entreprises et dont le salaire est inférieur à un montant

lage. Mohr Siebeck. Tübingen 1997, pp. 17 sv.- Detlev ZOLLNER: République fédé- rale d'Allemagne. In: Un siècle de sécurité sociale 1881-1981. L'évolution en Allema- gne, France, Grande-Bretagne, Autriche et Suisse. Edité par Peter Kôhler, Hans Zacher et Philippe-Jean Hesse. Centre de recherche en histoire économique et sociale de l'Uni- versité de Nantes/Max-Planck-Institut fur ausHindisches und internationales Sozialrecht.

Nantes/München 1982, pp. 7 sv.

Jean-Jacques DUPEYROUX!Rolande RUELLAN : Droit de la sécurité sociale, cité à la note 1, p.l37 (note 1).

Guy PERRIN: L'assurance sociale- ses particularités- son rôle dans le passé, le pré- sent et l'avenir. In: Beitrage zu Geschichte und aktueller Situation der Sozialversiche- rung. Max-Planck-Institut fur auslii.ndisches und internationales Sozialrecht. Duncker &

Humblot. Berlin 1983, pp. 29 sv. (pp. 34 et 37).

Voir ci-dessus le N° 3.

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déterminé. L'assurance-vieillesse et invalidité est obligatoire pour tous les sala- riés dont les revenus sont inférieurs à ce montant ;

les première et troisième protection peuvent, en plus, faire l'objet, à certaines conditions, d'une assurance facultative;

b) les éventualités : à 1' exception de la maladie, elles sont définies par la législa- tions;

c) les prestations de soins sont octroyées en nature (et non sous la forme du rem- boursement des frais). Detlev ZOLLNER observe que: «La relation bipartite usuelle entre médecin et patient est remplacée par une relation triangulaire entre caisse-maladie, médecin et patient. Cette façon d'organiser une prestation d'as- surance était absolument neuve ( ... ) »5. Les prestations en espèces sont établies en fonction du salaire. Le taux le plus élevé est atteint dans l'assurance-acci- dents;

d) l'organisation administrative ne relève pas de l'Etat, mais elle est confiée à des caisses autonomes, gérées par des représentants des travailleurs et/ou des em- ployeurs, selon la participation financière de ceux-ci ;

e) l'organisation financière de l'assurance-maladie est bipartite (2/3 des cotisations sont payées par les assurés, 113 par les employeurs), celle de l'assurance-vieil- lesse et invalidité est tripartite (cotisations paritaires plus une subvention de l'Etat; le régime fonctionne en capitalisation), les employeurs supportent le coût de l'assurance-accidents. A propos de l'organisation financière, un élément es- sentiel doit être rappelé : les cotisations ne sont pas fixées en fonction du risque, mais elles sont proportionnelles au salaire ; combiné avec l'affiliation obliga- toire, cela signifie l'absence de toute sélectivité- en d'autres termes, la législa- tion ne fait pas de distinction entre « bons et mauvais risque » 6.

2.3 Le grand succès de l'assurance sociale

6. Les qualités de l'assurance sociale sont nombreuses: une protection obliga- toire de par la loi signifie l'absence de sélection (les « mauvais risques » ne sont pas écartés), l'absence d'exclusion (celui qui ne paie pas ses cotisations, p. ex., sera aidé ou poursuivi, selon que cette situation est due à une incapacité ou à une négligence) ; la définition des éventualités (maladie, accident, maternité, invalidité, vieillesse, survi- vants, chômage) par la loi (éventuellement par la jurisprudence) garantit une égalité de traitement, une sécurité du droit; les prestations font aussi l'objet de règles légales

6

Detlev ZOLLNER: République fédérale d'Allemagne, cité à la note 1, p. 48.

Jean-Jacques DUPEYROUX!Rolande RUELLAN: Droit de la sécurité sociale, cité à la note 1, p. 38.

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(éventuellement améliorées par les caisses compétentes si elles en ont la possibilité juri- dique et la capacité financière), d'où à nouveau l'égalité et la sécurité et la protection est généralement élevée ce qui a pour conséquence un soutien de la classe moyenne ; une certaine autonomie à l'égard de l'Etat tout en étant soumis à sa surveillance donne un peu de distance à l'égard des décisions politiques (p. ex. cf. les changements de majorité), de l'état du budget d'un pays (il est plus facile de combler les déficits au sein d'un même budget que d'opérer des transferts entre entités juridiquement indépen- dantes) ; l'organisation financière en répartissant- au moins juridiquement -les charges sensibilise les différents acteurs au rapport coût-protection et la déconnexion coti- sation-importance du risque s'écarte pour des motifs sociaux d'un principe de l'assu- rance privée (normal dans cette dernière). Une telle forme de protection est de nature à protéger de manière adéquate une population, en principe sans exclusions (cela dépend , évidemment du champ d'application personnel) ni discriminations (singulièrement entre

« bons » et « mauvais » risques).

7. L'institution présente aussi des défauts ou des limites : l'absence, en général, de conception globale, un législateur introduit progressivement un certain nombre d'as- surances sociales, centrées autour d'un risque; l'affiliation obligatoire peut être rempla- cée dans certains Etats et régimes par une affiliation facultative, avec la réapparition possible de la sélection7, ou l'imposition de réserves d'assurances, c'est-à-dire p. ex. de maladies exclues à certaines conditions de la protection8; le champ d'application per- sonnel est souvent limité aux salariés (ou à certains salariés), avec ou sans inclusion des membres de leur famille; parfois, la législation restreint l'assujettissement (il faut justi- fier d'un montant minimum de salaire ou d'heures de travail rémunéré) ; la protection peut être minimale dans certains régimes (avec ou sans améliorations par d'autres pro- tections), parfois elle ne couvre pas les besoins vitaux.

8. Cependant, les qualités de l'assurance sociale l'emportent largement sur ses défauts ou limites. L'institution connaît dès lors un large succès pendant la première partie du

xx:e

siècle, singulièrement en Europe9. Et cette réussite se prolonge dans le

7

8

9

Une situation que l'assurance-maladie suisse (LAMA) a connu, avant sa révision de 1965 : une caisse avait le droit de refuser un candidat pour des raisons de (mauvaise) santé.

Une situation que l'assurance-maladie suisse (LAMA) a connu avant la révision com- plète du domaine et l'adoption de la nouvelle loi sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMai). Elle demeure pour l'assurance facultative des indemnités journalières (cf. art. 69 LAMai- réserve d'assurance).

En Suisse, la première loi fédérale sur l'assurance-maladie et accidents (LAMA), du 13 juin 1911, retient cette forme de protection pour les deux éventualités. Cependant, cette législation s'écartait du modèle originel bismarckien, de façon importante : 1' assurance- maladie était facultative (pour des raisons politiques), l'assurance-accidents ne compre- nait pas de plafond d'affiliation, mais elle ne protégeait alors qu'une part des salariés (environ les deux tiers), et le financement de l'assurance-maladie était à mi-chemin en- tre assurance sociale et privée. Voir p. ex. le Message du Conseil fédéral à 1 'Assemblée

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droit international : 1 'Organisation internationale du Travail adopte, dès sa création en 1919, une série de conventions et de recommandations fondées sur l'assurance sociale.

Elle portent sur la maternité, la maladie, l'accident du travail et la maladie profession- nelle, la vieillesse, les survivants, l'invalidité, le chômage. L'approche est sectorielle, un texte portant sur un risque, généralement pour une population salariale déterminée10 Ce modèle, pratiqué de façon autonome jusqu'à la Seconde guerre mondiale, permet de garantir aux personnes protégées des droits (alors que l'assistance traditionnelle était laissée à la discrétion des institutions d'aide), dans le cadre d'une affiliation obligatoire, avec un risque défini par l'instrument, des règles générales relatives aux prestations et aux cotisations, à 1' organisation et au droit de recours 11L'ancienneté de ces textes adoptés avant 1939 ne signifie pas qu'ils soient dénués de toute pertinence à l'heure ac- tuelle. Par exemple, la Convention OIT N° 44 assurant aux chômeurs involontaires des indemnités ou des allocations (1934) envisage aussi bien une protection fondée sur le paiement de cotisations (assurance-chômage) qu'un mode non contributif d'alloca-tions (distinguées de l'assistance aux indigents) (art. 1). Et logiquement, la Convention OIT N° 44 dispose que dans le premier cas, les indemnités de chômage ne peuvent pas être subordonnées à 1 'état de besoin du requérant, alors que dans le second, les allocations peuvent être soumises à une condition de ressources. Le même texte prévoit aussi la possibilité d'imposer l'acceptation d'un travail convenable, une notion qu'il entoure de garanties pour la personne protégée (art. 10). Tous ces éléments demeurent pertinents.

2.4 L'assurance sociale devient une technique importante au service de la sécu- rité sociale

2.4.1 En droit international

9. La sécurité sociale émerge pendant la période 1942-1952, le terrain ayant été préparé notamment par le Social Security Act 1935 des Etats-Unis et par le Social Secu- rity Act 1938 de la Nouvelle-Zélande12Concernant cette émergence, il suffit de rappe- ler 1' adoption :

10

Il

12

Au Royaume Uni, en 1942, du Plan Beveridge «Social Insurance and Allied Services » ;

fédérale concernant les assurances contre les accidents et les maladies, du 10 décembre 1906. Feuille fédérale 1906 VI, pp. 213 sv.

P. ex. :-Convention OIT N° 24 concernant l'assurance-maladie des travailleurs de l'in- dustrie et du commerce et des gens de maison (1927).- Convention OIT N° 36 concer- nant l'assurance-vieillesse obligatoire des salariés des entreprises agricoles (1933).

Voir p. ex. les art. 1, 4, 7, 9, 10 et 11 de la Convention OIT N° 35 concernant l'assuran- ce-vieillesse obligatoire des salariés des entreprises industrielles et commerciales, des professions libérales, ainsi que des travailleurs à domicile et des gens de maison (1933).

Jean-Jacques DUPEYROUX/Rolande RUELLAN: Droit de la sécurité sociale, cité à la note 1, pp. 49-51. - Paul DURAND : La politique contemporaine de sécurité sociale.

Dalloz. Paris 1953, pp. 96 sv.

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par l'Organisation internationale du Travail, en 1944, de la Recommandation OIT No 67 concernant la garantie des moyens d'existence et de la Recommanda- tion OIT N° 69 concernant les soins médicaux ;

par la même Organisation, en 1952, de la Convention OIT No 102 concernant la norme minimum de la sécurité sociale13.

10. Le concept de sécurité sociale, tel qu'il est formulé par le Plan Beveridge, les Recommandations OIT N° 67 et N° 69 et la Convention OIT No 102 fait une place importante à l'assurance sociale. Il est vrai que celle-ci n'est plus considérée pour elle-même, comme une sorte de fin en soi, mais qu'elle est intégrée dans une notion , beaucoup plus large, celle de sécurité sociale. Plus large par ses finalités : l'accès aux soins de santé, la garantie d'un revenu social de compensation, la garantie d'un revenu social de substitution, l'insertion professionnelle et sociale; plus large par son champ d'application personnel- qui vise à l'universalité (couverture de l'ensemble de la po- pulation)- et matériel (inclusion des charges familiales) ; plus étendue par ses modali- tés de protection, qui conjuguent prévention, indemnisation et réadaptation, prestations en nature, en espèces et en services ; plus étendue quant à son organisation administra- tive et financière. L'assurance sociale devient alors une technique privilégiée au service de la sécurité sociale, dont elle ne peut pas remplir toutes les fonctions, mais pour la- quelle elle peut rendre des services hautement appréciables.

11. Comme le montrent la partie centrale du Rapport Beveridge14 et la Recom- mandation OIT N° 67, l'assurance sociale est particulièrement appropriée pour garantir un revenu social de substitution au revenu professionnel en cas de maladie, de maternité, d'accident du travail, de maladie professionnelle, d'invalidité, de décès ou de retraite. La Recommandation OIT N° 67, au début de l'énoncé de ses «Principes directeurs» place l'assurance sociale comme base première, avec en complément quant cela est nécessaire l'assistance sociale. Ainsi, ses paragraphes 1 à 4 ont une teneur qu'il peut être utile de citer ici :

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14

« 1. Tout régime de garantie des moyens d'existence devrait soulager le be- soin et prévenir l'indigence, en rétablissant jusqu'à un niveau raisonnable les moyens d'existence perdus en raison de l'incapacité de travailler (y compris la vieillesse) ou d'obtenir un emploi rémunérateur ou en raison du décès du soutien de famille.

Paul DURAND: La politique contemporaine de sécurité sociale, cité à la note 12, pp.

104 sv., 424 sv. -Guy PERRIN: Histoire du droit international de la sécurité sociale.

In : La sécurité sociale. Son histoire à travers les textes, tome V. Association pour l'étu- de de l'histoire de la sécurité sociale. Paris 1993, pp. 500 sv.

Il était composé d'un triptyque : service national de santé, assurance sociale, service de l'emploi.

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2. La garantie des moyens d'existence devrait être établie, autant que possi- ble, sur la base de l'assurance sociale obligatoire, les assurés remplissant les conditions exigées ayant droit, en considération des cotisations payées à une ins- titution d'assurance, à des prestations payables selon des taux et dans les éven- tualités fixées par la loi.

3. Il devrait être satisfait par 1' assistance sociale aux besoins non couverts par l'assurance sociale obligatoire; certaines catégories de personnes, notam- ment les enfants à charge et les invalides, vieillards et veuves indigents, de- vraient avoir droit à des allocations d'un montant raisonnable selon un barème établi.

4. Une assistance sociale appropriée aux nécessités de chaque cas devrait être fournie à toutes les autres personnes dans le besoin ».

12. La Recommandation OIT N° 67 concernant la garantie des moyens d'existence met en évidence d'autres éléments importants relatifs à l'assurance sociale :

15

une série de définitions-cadres des éventualités à couvrir(§§ 9 sv.) ;

si l'accent est mis sur la protection des salariés, l'instrument recommande de couvrir les épouses et enfants «à charge» en vertu de l'assurance du soutien de famille(§ 17) 15;

l'employeur est appelé à percevoir à la source les cotisations des personnes qu'il emploie(§ 18);

une extension de la protection, au moins par étapes, est recommandée en faveur des travailleurs indépendants ( § 21) ;

les prestations devraient être proportionnées aux gains antérieurs sur lesquels 1' assuré social a cotisé, la recommandation contient des pourcentages qui vont de 20% (rente d'orphelin) à 100% (prestations de maternité pour les travailleuses non qualifiées et donc à petits salaires) ( § § 22 sv) ;

« La gestion des assurances sociales devrait être unifiée ou coordonnée dans un système général de services de sécurité sociale et les cotisants devraient être re- présentés par 1' entremise de leurs organisations aux organes qui arrêtent ou conseillent les lignes générales de la gestion et qui présentent des projets législa-

Si cette conception est actuellement considérée comme dépassée (elle retient 1 'image traditionnelle de la famille), il faut rappeler que les droits dérivés ont permis et permet- tent encore, dans certains régimes, de couvrir des personnes sans activité rémunérée qui n'ont pas de droits propres selon la législation applicable.

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tifs ou établissent les règlements» (§ 27). L'idée de participation est effective- ment associée au concept d'assurance sociale16

13. Guy PERRIN relève que l'assurance sociale a dû s'adapter aux objectifs de la sécurité sociale et qu'elle a ainsi subi certaines transformations :

traditionnellement tournée vers les salariés, elle a dû s'étendre à d'autres catégo- ries de travailleurs et même à l'ensemble d'une population17 ;

la condition de stage18 a été généralement supprimée ou alors elle est utilisée dans un autre sens, pour le calcul des pensions ;

dans certains Etats, la réalisation de l'universalité a été accompagnée de l'aban- don de l'autonomie des caisses et de la participation;

des régimes d'assurances sociales sont devenus mixtes, combinant des presta- tions à montant fixe et d'autres à montants variables, ou associant des prestations ordinaires et des prestations non contributives19,20

.

14. En revanche, l'assurance sociale n'est pas mise en avant pour la garantie des soins de santé. Le rapport Beveridge lui a, au contraire, préféré le service national de santé, universel et financé par les impôts. La Recommandation OIT N° 69 concer- nant les soins médicaux met sur le même pied 1' octroi indirect et 1' octroi direct: « Les soins médicaux devraient être fournis soit par un service de soins médicaux relevant de 1' assurance sociale, complété par l'assistance sociale en ce qui concerne les besoins de personnes nécessiteuses qui ne bénéficient pas encore de 1' assurance sociale, soit par un service public de soins médicaux». (§ 5). Dans les deux cas, l'universalité est recom- mandée : « Le service des soins médicaux devrait englober tous les membres de la

16

17

18

19

20

Michel VOIRIN: L'organisation administrative de la sécurité sociale. Un enjeu social et politique. Bureau international du Travail. Genève 1991, pp. 7 sv.

En Suisse, l'assurance-maladie obligatoire des soins et l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité utilisent la technique de l'assurance sociale et ont un champ d'application personnel universel.

Soit une période pendant laquelle une personne est déjà assurée et cotisante, sans pou- voir encore prétendre aux prestations. L'ancienne loi suisse sur l'assurance-maladie (LAMA) autorisait les caisses à prévoir un stage limité; la loi actuelle (LAMai) ne pré- voit le stage que dans l'assurance facultative d'indemnités journalières en ce qui con- cerne les indemnités en cas de maternité (art. 74 al. 1 LAMai).

L'assurance-vieillesse, survivants et invalidité suisse (A VS/AI) a représenté un exemple judicieux de la combinaison de prestations ordinaires ( « les rentes ordinaires A VS ou Al>>) et de prestations sous conditions de ressources («les rentes extraordinaires A VS ou Al » ), dans la même législation et le même système financier. Cette solution a été modifiée par le législateur dès la 1

o•

révision de 1 'A VS (entrée en vigueur en 1997) (transfert dans la loi sur les prestations complémentaires à l'A VS/ AI).

Guy PERRIN: L'assurance sociale- ses particularités, cité à la note 3, pp. 59 sv.

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communauté, qu'ils exercent ou non une occupation lucrative»(§ 8). Si le texte même de la Recommandation OIT N° 69 n'exprime aucune préférence pour le service national de santé ou pour l'assurance sociale, le rapport préparatoire établi par le BIT pour la Conférence semble pencher plutôt vers le premier: «Les avantages qu'offre un service public de soins médicaux pour la population entière sont multiples ». Le BIT relève les points suivants : l'accès simple à la protection, une gestion simplifiée, la concentration des médecins sur la santé et non sur les formalités administratives, le financement sépa- ré de l'administration des soins, l'absence de rapport entre le paiement de l'impôt et le droit de recevoir des soins21. Il ne formule pas d'observations aussi positives à 1' égard de l'assurance-maladie, mais met plutôt en garde quant aux problèmes que ce mode peut rencontrer : une charge de cotisations trop lourde pour de nombreux bénéficiaires (dès lors, «le montant effectivement versé par l'assuré doit être adapté à la capacité de paiement du cotisant, étant donné que pour de nombreux bénéficiaires, peut-être pour la majorité, le coût relatif moyen du service serait un fardeau trop lourd. En conséquence, une partie du coût devra être supportée par l'employeur ou le contribuable ( ... ) »22, la difficulté d'instituer l'universalité, par l'assurance sociale, à l'égard de ceux qui ne sont pas à même de verser une cotisation et qui ne sont pas ayant droit d'un assuré23,24

.

15. Les Recommandations OIT N° 67 et 69 ont été suivies de l'adoption, en 1952, de la Convention OIT N° § 102 concernant la norme minimum de la sécurité sociale. Un texte qui demeure largement d'actualité, malgré son ancienneté, à l'image des deux re- commandations. La convention OIT N° 102 accueille également l'assurance sociale, en qualité de technique au service de la sécurité sociale.

16. Alexandre BERENSTEIN a relevé la souplesse de cet instrument : « La conven- tion ( ... ) couvre à la fois les systèmes d'assurance sociale, fondés sur la perception de cotisations versées par ou pour les assurés, et les systèmes de garantie de moyens d'existence ou de soins médicaux organisés par les pouvoirs publics et financés par des impôts généraux ou spéciaux. Elle permet même aux Etats de réaliser la garantie des moyens d'existence par un système d'assistance sociale ( ... ) (avec un) droit pouvant dès lors être invoqué devant les tribunaux » 25. Cela illustre à nouveau la mutation de 1' assurance sociale, devenue une technique au service de la sécurité sociale, aux côtés du service public et des régimes liés à des conditions de ressources.

21

22

23 24

25

OIT-CONFÉRENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL (26e session-1944). Rapport IV 1) : Sécurité sociale : ses principes ; les problèmes qui se posent à la suite de la guerre. BIT. Montreal 1944, p. 71.

Idem, pp. 71-72.

Idem, pp. 72.

Ces observations ne constituent guère un plaidoyer en faveur du mode de financement de 1' assurance-maladie sociale en Suisse, basé sur des cotisations indépendantes de la capacité contributive (sous réserve de correctifs limités) et perçues «par tête» (autant de membres d'une famille, autant de cotisations).

Alexandre BERENSTEIN : La Suisse et le développement international de la sécurité sociale. Schweizerische Zeitschrift fur Sozialversicherung 1981, pp. 161 sv. (p. 167).

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17. La Convention OIT N° 102 se réfère implicitement aux régimes d'assurances sociales:

le champ d'application personnel peut être décrit de plusieurs manières, dont par référence aux salariés (voir p. ex. les art. 15 et 27) ;

l'un des trois modes de calcul des prestations en espèces se réfère à une fixation en relation avec le revenu antérieur du bénéficiaire, un plafond pouvant être prescrit (art. 65), ce qui est aussi typique de 1' assurance sociale ;

des règles générales de financement s'appliquent aux cotisations, afin d'éviter qu'elles ne soient trop lourdes pour les personnes protégées (art. 71).

En revanche, la Convention OIT No 102 n'attribue pas une place privilégiée à l'assurance sociale; elle est en quelque sorte« neutre» à l'égard des techniques utilisa- bles.

18. La Convention OIT No 102 concernant la norme minimum de la sécurité sociale fait l'objet d'améliorations apportées par une série de conventions et de recomman- dations. Ces dernières constituent ainsi un deuxième et un troisième étages dans le sys- tème normatif de l'Organisation internationale du Travail. Ces normes supérieures, intéressent d'abord les Etats à économie et protection sociale élevées26. Elles font éga- lement une place à l'assurance sociale en tant que forme de protection permettant de réaliser la sécurité sociale.

19. Ainsi, la Convention OIT N° 130 concernant les soins médicaux et les indemni- tés de maladie (1969) se réfère implicitement à l'assurance sociale, pour les modalités relatives à la fixation du champ d'application personnee7 et des prestations en espèces (art. 22), en matière de recours (art. 29), d'organisation administrative (art. 31). Les autres instruments relevant de ces « normes supérieures » procèdent de manière analo- gue28. Il en va de même des textes de l'OIT qui sont consacrés à des sujets déterminés

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Cependant, elles peuvent aussi contenir des règles souples destinées à faciliter la ratifi- cation par des Etats « dont 1' économie et les ressources médicales n'ont pas atteint un développement suffisant» (cf. art. 2, § 2, de la Convention OIT N° 130, p. ex.). Ces Etats peuvent alors bénéficier de dérogations temporaires, à motiver et à expliquer lors des contrôles (idem, §§1-3).

«Les personnes protégées en ce qui concerne l'éventualité visée à l'alinéa a) de l'article 7 (= soins médicaux) doivent comprendre : a) soit tous les salariés, y compris les ap- prentis, ainsi que leurs épouses et leurs enfants ( ... )»(art. 10 de la Convention OIT N°

130).

Voir ainsi:

- la Convention OIT N° 183 sur la protection de la maternité (2000),

- la Convention OIT N° 121 concernant les prestations en cas d'accident du travail et de maladies professionnelles (1964),

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intéressant la sécurité sociale29. A l'image de la Convention OIT N° 102, l'assurance sociale ne reçoit pas de place privilégiée et ces instruments sont « neutres » quant aux techniques mises en œuvre au service de la sécurité sociale. Cette position du droit in- ternational tient compte de la diversité des législations nationales. Il convient d'ailleurs maintenant de faire une rapide allusion à ces dernières.

2.4.2 Dans les systèmes nationaux

20. Création allemande30, l'assurance sociale a connu et connaît toujours un succès mondial. Une phase d'expansion importante se situe dès le début du

:xxe

siècle jusqu'à l'éclatement de la Seconde guerre mondiale. Elle est marquée par la diversité : il ne s'agit pas de la transposition du« modèle bismarckien »en tant que tel, qui joue un rôle de déclenchement, mais de la reprise des principes de 1' assurance sociale31 et de leur adaptation aux divers pays. Singulièrement, les partisans d'une affiliation obligatoire se sont opposés à ceux qui préféraient une protection facultative, avant que les premiers ne 1' emportent très largement ; des débats ont porté sur le regroupement des risques ou leur traitement distinct.

21. Dans son ouvrage magistral sur « La politique contemporaine de sécurité socia- le », Paul DURAND cite les Etats suivants ayant introduit un ou plusieurs régimes d'assurance sociale avant 1939: Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Bulgarie, Canada, Chili, Danemark, Espagne, Equateur, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Grèce, Hongrie, Islande, Italie, Luxembourg, Mexique, Nouvelle-Zélande, Norvège, Pays-Bas, Pérou, Pologne, Portugal, Roumanie, Russie (juste avant 1917), Suède, Suisse, Tchécoslovaquie, Venezuela, Yougoslavie32.

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30 31 32

- la Convention OIT N° 128 concernant les prestations d'invalidité, de vieillesse et de survivants (1967),

- la Convention OIT N° 168 concernant la promotion de l'emploi et la protection contre le chômage (1988).

Il n'y a pas de norme supérieure pour l'éventualité des charges familiales. Les instru- ments cités ci-dessus sont tous complétés par une recommandation, laquelle élève la protection sur certains points et en précise d'autres.

Voir notamment Guy PERRIN : Histoire du droit international de la sécurité sociale, cité à la note 13, pp. 536 sv. (la Convention OIT N° 183 révise la N° 103). - Daniele CA TT ANEO : Les mesures préventives et de réadaptation de 1 'assurance-chômage.

Prévention du chômage et aide à la formation en droit suisse, international et européen.

Faculté de Droit de Genève. Helbing & Lichtenhahn. Basel/Frankfurt am Main 1992, pp. 193. sv.

Voir ainsi:

- la Recommandation OIT N° 162 concernant les travailleurs âgés (1980), - la Convention OIT N° 175 concernant le travail à temps partiel (1994).

Voir ci-dessus les N° 3 et sv.

Voir ci-dessus les N° 5-8.

Paul DURAND: La politique contemporaine de sécurité sociale, cité à la note 12, pp.

63 sv.

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CAHIERS GENEVOIS ET ROMANDS DE SÉCURITÉ SOCIALE W 28-2002 s•coLLOQUE

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22. Dès 1945, l'assurance sociale a progressé dans le monde entier, de nouveau avec beaucoup de diversité: du support essentiel d'un système développé de sécurité sociale à un régime restreint à quelques pour cents de la population dans un pays en dé- veloppement. Actuellement, il n'y a probablement plus d'Etat qui ne connaisse pas au moins un régime, même très limité, d'assurance sociale33.

23. L'Europe centrale et orientale a connu un parcours particulier,« en boucle »34. En effet, cette région a appliqué l'assurance sociale avant 1939. Vladimir RYS rappelle que la monarchie austro-hongroise a participé, avant la Première guerre mondiale, à l'implantation des assurances sociales en Europe35. Michel VOIRIN soulime que les pays et régions qui avaient fait partie des Empires allemand et austro-hongrois pou- , vaient se prévaloir d'une cinquantaine d'années d'expérience de l'assurance sociale avant l'instauration des régimes communistes36Ces derniers ont mis fin à ces dévelop- pements pour les remplacer par une forme de protection conçue, pilotée, fmancée et contrôlée par 1 'Etat ; il suffit de donner 1 'exemple des assurances-maladie remplacées par des services publics de santé37. Or, la chute du communisme, la transition vers la démocratie et l'économie de marché ont conduit, d'une part, à une critique générale du

33

34

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36

37

En version papier, voir: Social Security Programs Throughout the World- 1995. Social Security Administration. Washington 1995. En version CD-ROM, voir: Social Security Worldwide. International social security association (ISSA). Geneva (2 éditions par an).

Vladimir RYS : La sécurité sociale dans une société en transition : 1' expérience tchèque.

Quels enseignements pour l'Europe? Réalités sociales. Lausanne 1999, pp. 22 sv.- Die Umgestaltung der Systeme sozialer Sicherheit in den Staaten Mittel- und Osteuropas.

Colloquium des Max-Planck-Instituts München. Herausgegeben von B. von MaydelV E.-M. Hohnerlein. Duncker & Humblot. Berlin 1993.

Vladimir RYS : La sécurité sociale dans une société en transition, cité à la note 34, p.

21.

Michel VOIRIN : La restructuration de la sécurité sociale en Europe centrale et orien- tale. In : ASSOCIATION INTERNATIONALE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE : La restructuration de la sécurité sociale en Europe centrale et orientale. Panorama des dé- veloppements récents. AISS. Genève 1994, pp. 1 sv. (p. 2).

Vladimir RYS a résumé de manière très claire l'ancien« modèle communiste de sécu- rité sociale », reposant sur les principes suivants :

« ( ... ) - la responsabilité d'assurer l'existence de tous les membres de la société in- combe à l'Etat;

-l'Etat est chargé de l'organisation et de la mise en application du système de la sécu- rité sociale, mais peut confier une partie des responsabilités administratives aux syndi- cats;

-le financement de la sécurité sociale est à la charge du budget de l'Etat;

- les prestations sociales sont accordées en fonction de la durée et de la difficulté du travail rendu à la société et tiennent compte des activités méritoires;

- une attention spéciale est portée à la protection sociale de la famille et, plus particuliè- rement, à celle de la femme en tant que mère de famille. »

Vladimir RYS : La réforme de la sécurité sociale en Europe centrale et orientale. Revue française des affaires sociales, N° 3, 1992, pp. 147 sv. (p. 149).

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système social de l'ancien régime38 et, d'autre part, à une «redécouverte» de l'assu- rance sociale ; et 1' on peut reprendre le même exemple : les services publics de santé sont remplacés, les uns après les autres, par des régimes d'assurance-maladie. Ce

«retour» à l'assurance sociale témoigne des mérites de celle-ci; mais il peut être aussi générateur d'illusions : le remplacement d'une protection étatique par celle garantie par des caisses (d'assurance-maladie, retraite, etc.) ne résout pas nécessairement les pro- blèmes d'efficacité, de qualité, de compétence39

24. Il convient maintenant d'aborder l'autre grand principe, celui de la solidarité;

l'on retrouvera l'assurance sociale in fine, dans une esquisse des perspectives.

3. LE PRINCIPE DE LA SOLIDARITÉ ET LA PROTECTION SOCIALE40

3.1 La solidarité avant l'émergence de la sécurité sociale

25. La solidarité considérée dans le domaine de la protection sociale n'est évidem- ment pas née avec la sécurité sociale. Elle est présente, à des degrés divers, dans les ins- titutions qui 1' ont précédée.

26. Comme on l'a déjà vu, le modèle bismarckien d'assurance sociale a crée quel- ques éléments fondamentaux qu'il nous faut garder en mémoire:

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39

40

la législation définit un champ d'application personnel obligatoire. Cela écarte donc la sélection au moment de l'affiliation: il n'y a pas de distinction autorisée entre des risques que 1' on qualifierait de « bons » et d'autres de « mauvais » ; le travailleur jeune et en bonne santé est assuré comme le travailleur âgé qui sup- porte le poids des ans et des labeurs ;

Une critique générale non dépourvue d'ambiguïtés: dans l'ancien modèle, l'Etat était certes omniprésent, mais la protection garantie pouvait être élevée. Les critiques pou- vaient dès lors être motivées par un nouveau partage des responsabilités, une ouverture, une prise en compte des nouvelles réalités économiques; elles pouvaient l'être aussi par un ralliement au néo-libéralisme. Voir l'étude fondamentale de Vladimir RYS: La sé- curité sociale dans une société en transition, cité à la note 34. Cet ouvrage comprend à la fois une chronologie de la réforme tchèque, une analyse des déterminants d'une réforme sociale, le lien ( « quels enseignements pour 1 'Europe ? ») avec notre Continent considé- ré de manière générale.

Il convient notamment de se référer aux études de Otto CZÛCZ, Karel PINC, Vladimir RYS, Vera STANGOV

A,

Petr TROSTER, publiées dans plusieurs numéros des Cahiers genevois et romands de sécurité sociale.

Cette partie est basée sur une conférence, « La solidarité dans la sécurité sociale : quels enjeux?», présentée le 25 janvier 2001 à l'Université de Fribourg.

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les cotisations ne sont pas fixées en fonction du risque, mais elles sont propor- tionnelles au salaire : à nouveau, celui qui serait qualifié de «mauvais risque», en raison de sa santé, de handicaps, de son âge, est traité de la même manière que le« bon risque».

27. Ces éléments ont une grande pertinence, car :

il ne faut pas aggraver les situations qui sont déjà difficiles ;

les parcours de vie peuvent se modifier, pour chacun, à tout moment.

28. Jusqu'à une époque relativement récente, ces éléments qui paraissaient aller de soi, n'étaient pas liés au concept de solidarité, mais étaient simplement rangés sous les termes de communauté quant au risque41

29. Sous l'influence du néolibéralisme, dans des sociétés qui privilégient comme ré- férence l'économie, le marché, cette appréciation pourrait changer. Il y a quelque temps, p. ex., l'idée a été lancée, en Suisse, d'augmenter les cotisations d'assurance-maladie sociale en fonction de l'âge des assurés : le risque de morbidité augmente, en effet, sta- tistiquement avec l'âge et la situation des pensionnés (sur le plan financier) s'est amé- liorée. Ce ballon d'essai, qui vient malheureusement d'être repris, revient à rejeter un élément fondamental de l'assurance sociale. Peut-être faudra-t-il inclure ces éléments d'assurance obligatoire et de cotisations déconnectées du risque dans la notion de soli- darité? Ce débat ne révèle-t-il pas une confusion entre l'apport des secteurs public et privé, entre les champs du social et de l'économie ?

3.2 Le principe de la solidarité dans la sécurité sociale

30. La reconnaissance à chaque être humain du droit à la sécurité sociale, im- plique un principe de solidarité. En effet, les situations de revenu, de fortune, de capa- cité de travail, de santé, de formation peuvent varier beaucoup d'un individu à l'autre;

chacun peut voir son statut changer, favorablement ou défavorablement, pendant son existence. La fragilité est une composante de la condition humaine. Il en découle que l'accès de toute personne à la protection implique:

41

que certains puissent la recevoir sans avoir contribué financièrement (le cas ty- pique est celui de l'invalide de naissance);

Alexandre BERENSTEIN : Le principe de la solidarité. Son application dans les assu- rances sociales en Suisse. In : Pratiques des solidarités. Hommage au professeur Roger Girod. Réalités sociales. Lausanne 1991, pp. 15 sv. (p. 17).

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que d'autres reçoivent davantage que ce qu'ils auront apporté sur le plan finan- cier;

que d'autres enfin, bénéficiant d'une situation matérielle bonne voire très aisée, s'acquittent des contributions de solidarité au bénéfice des deux premières caté- gones.

Il ne s'agit pas de groupes figés : un individu peut, selon les circonstances de la vie, passer de 1 'un à 1' autre.

31. L'évolution des coûts des soins de santé, la dépendance du grand âge, la fragili- sation des familles et des emplois, le chômage, la pauvreté mettent en évidence l'exi- gence de la solidarité. Comme le nom même de l'institution l'indique, la sécurité re- cherchée est sociale.

32. Les enjeux pour le futur ne sont pas négligeables:

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47

nos sociétés semblent être marquées par une montée de l'individualisme. Il faut éviter que ce dernier ne s'oppose à la solidarité. Des études ont montré qu'une coexistence de l'individualisme et de la solidarité était possible, compte tenu de l'élévation générale du niveau d'éducation42. Cela implique cependant de trans- mettre le message social, de garder cette valeur vivante43 ;

les déficits budgétaires des collectivités publiques et la concurrence accrue pour les entreprises exigent une attention plus grande : quelle solidarité prévoir, jus- qu'où (il faut garder l'incitation au travail lorsque celui-ci est possible, éviter d'écraser sous les prélèvements obligatoires ceux qui exercent une activité ré- munérée) ? Des évaluations doivent permettre de s'assurer que la solidarité est protégée des abus44, des effets pervers45 ;

il faut entendre la voix des plus faibles, des moins organisés, « la voix du monde sans voix »46. Il paraît difficile que les personnes les plus faibles «puissent dé- fendre seules leurs intérêts propres.47 ;

Etienne SCHWEISGUTH : La montée des valeurs individualistes. In : Numéro spécial : L'évolution des valeurs des Européens. Futuribles, 1995, N° 200, pp. 131 sv.

Guy PERRIN: L'avenir de la protection sociale dans les pays industriels. Futuribles, N°

92-93, 1985, pp. 28 sv. (pp. 47-49).

La solidarité est aussi liée au sentiment d'appartenir à une communauté, dans laquelle on pratique le partage ; 1' abus ronge et peut détruire ce sentiment.

La solidarité inversée : des plus faibles vers les mieux lotis.

La voix du monde sans voix: Dom Helder Câmara. Par G. Weigner et B. Moosbrugger.

Ed. Pendo. Zürich 1971.

Ce qui pose question d'un éventuel élargissement du tripartisme des organes de l'OIT lorsqu'il s'agit de traiter de questions de sécurité sociale. Voir p. ex. Jef Van Langen-

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un consensus politique doit être trouvé, qui tienne compte des besoins sociaux, de 1 'interdépendance croissante de nos sociétés ;

l'époque est pour le moins paradoxale : d'un côté, une évolution forte, ces der- nières décennies, de la médecine, des sciences, de l'informatique et de la com- munication, du produit national des Etats économiquement développés; de l'au- tre, un fossé Nord-Sud, le vieillissement des populations, le chômage important et de longue durée, l'extension de la pauvreté et de l'exclusion même dans les pays dits riches.

33. Face à ces problématiques de première importance, le droit international de la sécurité sociale apparaît largement déconnecté. Certes, il contient des principes direc- teurs de grande valeur, mais il ne dit presque rien sur le principe de la solidarité, sur la recherche d'un financement équitable et supportable. Quelques règles ont pour but d'éviter qu'une charge financière trop lourde ne pèse sur les travailleurs (cf. p. ex. l'art.

71 de la Convention OIT N° 102 concernant la norme minimum de la sécurité sociale, (1952), le BIT publie des études48, conseille, propose49. Difficile pour un Etat, aux pri- ses avec le pilotage concret d'un système de sécurité sociale dans la conjoncture ac- tuelle, de trouver là suffisaiilment d'inspiration. L'un des plus éminents spécialistes du droit international de la sécurité sociale, Michel VOIRIN, ne dit pas autre chosé0D'au- tres institutions, qui connaissent nettement moins bien la sécurité sociale que le BIT, n'ont guère cette prudence.

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49

50

donck : Le rôle des organisations internationales dans le développement de la sécurité sociale. In: Repenser la sécurité sociale. Réalités sociales. Lausanne 1995, pp. 112-113.

BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL : Sécurité sociale : Quelle méthode de financement? Une analyse internationale. BIT. Genève 1983.- Le BIT publie périodi- quement des enquêtes sur le coût de la sécurité sociale.

OIT-CONFÉRENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL (89e session-2001): Rap- port VI: Sécurité sociale. Questions, défis et perspectives. BIT. Genève 2001 (cf. not.

pp. 15, 46).

Tout en formulant son appréciation de manière plus diplomatique. Michel VOIRIN : Les normes internationales de sécurité sociale à l'épreuve du temps. In: Repenser la sé- curité sociale. J.-P. Fragnière (éditeur). Réalités sociales. Lausanne 1995, pp. 85 sv. (pp.

93-94). Pour continuer la réflexion :-Alain et Chantal EUZEBY (éditeurs) : Les soli- darités. Fondements et défis. Economica. Paris 1996.- Albert JACCARD: Le souci des pauvres. Calmann-Lévy. Paris 1996.

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3.3 Une approche plus technique de la solidarité dans les systèmes de sécurité sociale51

34. Prenons tout d'abord la dimension horizontale, dans son aspect le plus intéres- sant. Dans le domaine des retraites, la solidarité est associée à la technique financière de la répartition des dépenses. En résumé, les prélèvements des personnes actives servent immédiatement au paiement des pensions ou rentes. Lorsque la génération active atteint l'âge de la retraite, c'est celle qui suit qui supporte les cotisations. Et ainsi de suite. Cela suppose une pérennité et n'est donc applicable qu'aux régimes publics. L'assurance- vieillesse et survivants suisse fonctionne ainsi, les régimes équivalents des pays indus- trialisés font de même. Les qualités sont connues : le régime protège bien dès son intro- duction, il s'adapte convenablement à l'inflation. Son défaut est aussi notoire : cette technique est exposée défavorablement au vieillissement de la population. La capitali- sation présente les résultats inverses, quant aux qualités et défauts. L'expérience histori- que- cf. la crise des années trente- montre que cette seconde technique n'est pas plus sûre que la première. Elle a cependant le vent en poupe lorsque les résultats de la bourse sont bons voire excellents. Une sécurité raisonnable consiste à combiner les techniques de la répartition et de la capitalisation. C'est ce que la Suisse a réalisé dans son archi- tecture relative aux pensions : l'assurance-vieillesse et survivants fonctionne en réparti- tion, la prévoyance professionnelle essentiellement en capitalisation ; 1' exemple est loin d'être unique.

35. La dimension verticale de la solidarité est la solidarité entre revenus. L'effort contributif est d'autant plus grand que les capacités de l'intéressé sont elles-mêmes éle- vées. Les personnes aisées vont ainsi acquitter des cotisations- ou des impôts- de soli- darité au profit de personnes protégées modestes. L'assurance-vieillesse et survivants suisse applique cette solidarité. Elle s'oppose à l'équivalence entre contributions et pres- tations, dans laquelle il y a équilibre théorique ; la prévoyance professionnelle suisse ap- plique cette équivalence. A nouveau, la combinaison paraît adéquate. La solidarité est propre aux régimes qui garantissent un premier socle de protection. L'équivalence per- met de construire des régimes destinés à maintenir, dans une certaine mesure, le niveau de vie.

36. Il n'est pas toujours facile de s'assurer que les buts recherchés sont bien réalisés.

Des mesures prises en faveur de l'ensemble de la génération d'entrée peuvent temporai- rement mettre entre parenthèse la solidarité entre revenus. L'espérance de vie, plus lon- gue chez les cadres que chez les manuels, peut induire des solidarités inversées. En d'autres termes, la combinaison est adéquate, mais elle doit être évaluée et, au besoin, faire l'objet de corrections.

51 Alexandre BERENSTEIN: Le principe de la solidarité, cité à la note 41, pp. 17 sv.- Ernst KAISER: Les possibilités et les limites d'une solidarité conçue dans le cadre des générations et des revenus. RCC [Berne] 1971, pp. 217 sv.

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37. Le concept de solidarité dans les systèmes de sécurité sociale comprend donc les dimensions horizontale et verticale. Comme déjà relevé, l'évolution récente des idées pourrait y inclure aussi l'affiliation obligatoire (absence de sélection lors de l'affiliation) et les cotisations déconnectées du risque 52

.

38. L'on peut se poser également la question d'une solidarité des employeurs envers leurs salariés, lorsque les premiers paient une partie- voir la totalité - des coti- sations finançant la protection des seconds. Beaucoup de régimes connaissent cette ré- partition des cotisations- paritaire ou non- entre employeurs et travailleurs. S'agit-il d'une véritable solidarité? L'employeur paie-t-il réellement la cotisation patronale?

Sur le plan juridique, la réponse est affirmative : il y a une obligation de droit public ; un accord défavorable au salarié serait illégal et nul. Sur le plan économique, la question est nettement plus complexe.

39. L'on se référera avec grand profit à l'analyse de Paul DURAND, qui montre toute la complexité du problème. Cet auteur distingue tout d'abord les cas de simple in- cidence pour les cotisations patronales :

a) L'entreprise supporte définitivement la charge : elle ne veut pas ou ne peut pas la transférer, le prélèvement est opéré sur le bénéfice;

b) L'entreprise incorpore la charge dans le prix, celle-ci est alors supportée par les consommateurs ;

c) L'entreprise diminue d'autant les salaires, la charge est supportée par les salariés eux-mêmes.

Paul DURAND relève que la question de l'incidence se pose aussi pour les coti- sations salariales, où deux possibilités existent :

a) Les salariés supportent définitivement leurs propres cotisations (prélèvement sur le salaire) ;

b) les salariés s'efforcent de transférer cette charge à 1' entreprise, en exigeant des salaires plus élevés.

Des cas de double incidence -une tentative de transfert en entraînant une autre - peuvent rendre la situation encore plus compliquée. DURAND conclut qu'il est extrê- mement difficile de déterminer si les employeurs supportent réellement ou non leur charge: aux points relevés ci-dessus, s'ajoutent les divers éléments qui participent à la

52 Voir ci-dessus les N° 26-29.

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formation des prix, la conjoncture, la diversité ou l'unité du système de sécurité so- ciale53.

40. Des régimes de sécurité sociale peuvent aussi inclure une solidarité des person- nes seules en faveur des chargés de famille, dans la mesure où une même cotisation, p.

ex. sur le salaire, peut ouvrir le droit à des majorations pour charges de famille (un pour- centage plus élevé d'indemnités journalières, un complément de pension, etc.) ou à des prestations pour les membres de la famille (soins, etc.).

41. La question de l'existence d'une solidarité des hommes envers les femmes, qui a parfois reçu une réponse positive, est nettement plus complexé4. Les systèmes de sécurité sociale, nés pour la plupart au milieu du

:xxe

siècle, sont partis de bases inégali- taires - ce qui ne veut pas forcément dire discriminatoires - en se fondant sur les modè- les familiaux prédominants et sur les règles du droit civil. Des éléments favorables et défavorables aux femmes étaient souvent présents. Un tel aspect n'appartient plus à la sécurité sociale contemporaine, qui essaie d'achever l'égalité de traitement55. Point n'est besoin de rappeler que, dans la conjoncture politique et économique actuelle, cette éga- lité ne se réalise pas nécessairement au niveau de la protection la plus élevée56.

3.4 La solidarité dans les modèles européens de sécurité sociale

42. Prenons maintenant trois modèles de sécurité sociale, en essayant de les synthé- tiser en quelques lignes, y compris sur le plan de la solidarité. Le modèle bismarckien est le plus ancien, il a été exposé ci-dessus57

. Il a apporté un mode de protection remar- quable et toujours vivant, celui de l'assurance sociale, obligatoire, protégeant d'abord les travailleurs salariés et leurs familles, à l'égard de risques définis par la loi. L'objectif des prestations est devenu ambitieux puisqu'il tend à maintenir le standard de vie. L'or- ganisation administrative est confiée à des caisses indépendantes de 1 'Etat mais sous surveillance de celui-ci. Le financement repose sur les partenaires sociaux, avec des

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57

Paul DURAND : Les équivoques de la redistribution du revenu par la sécurité sociale.

Droit sociall953, pp. 292 sv. (pp. 295-296).

Alexandre BERENSTEIN: Le principe de la solidarité, cité à la note 41, pp. 20-21. - Anne-Marie BROCAS/Anne-Marie CAILLOUXNirginie OGET: Les femmes et la sé- curité sociale. BIT. Genève 1988. - Béatrice DESPLAND : Femmes et assurances so- ciales (suisses). Réalités sociales. Lausanne 1992.- L'égalité entre hommes et femmes.

Sous la direction de Charles-Albert MORAND. Payot. Lausanne 1988.

Les Nations Unies et la Communauté européenne ont fourni des apports substantiels à cet égard, la première par des textes de principes, la seconde par une approche systéma- tique et concrète (y compris jurisprudentielle).

Cf. la question de l'âge d'ouverture du droit aux rentes AVS en Suisse, 10• et projet de 11 e révision.

Voir ci-dessus les N° 3 sv.

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