A NNALES DE LA FACULTÉ DES SCIENCES DE T OULOUSE
H ENRI G ILBAULT
Nouvel hygrométrie à condensation
Annales de la faculté des sciences de Toulouse 1resérie, tome 6, no1 (1892), p. D1-D6
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D.I
NOUVEL HYGROMÈTRE A CONDENSATION,
PAR M. HENRI
GILBAULT,
Professeur -agrégé au Lycée de Toulouse.
Pour déterminer l’humidité absolue ou l’humidité relative avec un
hy- gromètre
àcondensation,
il faut observer exactement :I ° Le moment
d’apparition
dudépôt
derosée ;
2° La
température
de la surface surlaquelle
seproduit
cedépôt.
Jusqu’ici
ungrand
nombre dephysiciens
se sont attachés àperfectionner
les
procédés
d’observation dupremier point,
c’est-à-dire del’apparition
dudépôt
de rosée.Mais on ne s’est pas
préoccupé également
de la secondepartie
des me-sures, c’est-à-dire de la détermination de la
température
de la surface surlaquelle
seproduit
ledépôt
de rosée. Dans leshygromètres
de Daniell1 ’ ),
de
Regnault ( 2 ),
de M. Alluard(3)
et de M. Crova( ~ ),
on admet que latempérature
donnée par un thermomètreplongé
dans leliquide réfrigérant
est
égale
à celle de la surfacemétallique
extérieure surlaquelle
seproduit
lacondensation;
mais cepoint
ne saurait êtreadmis,
leliquide réfrigérant, qui
est de l’éther ou du sulfure decarbone, ayant
une conductibilité ther-mique
très faible. Récemment M. Dufour( ~ )
aproposé d’employer,
commelame de
condensation,
uneplaque
de cuivre rougeargentée ayant
ocm, 12d’épaisseur, percée
suivant songrand
axe d.’un troupouvant
contenir un thermomètre autour du réservoirduquel
est tassée de la limaille de cuivre rouge très fine. «L’avantage principal
queprésente
cethygromètre
est que( 1 ) DANIELL, Annales de Gilbert, t . . LXV, p. 169 ; 18~~.
(2) REGNAULT, Annales de Chimie et de Physique, 3e série, t. XV, p. 129; t845.
(3) ALLUARD, Journal de Physique, Ire série, t. VII, p. 3z8; ~8~8.
(4) CROVA, ibid., 2e série, t. II, p. 166 ; 1883.
(5) DuFoUR, ibid., 2e série, t. VIII, p. 74; 1889.
la
température
du thermomètre varie d’unefaçon beaucoup plus régulière
et
graduelle
que ce n’est le caslorsqu’il plonge
dans leliquide volatil ;
enoutre et surtout, la
température qu’il
donne serapproche beaucoup plus
decelle de la surface
polie
du métal que nepeut
le faire un thermomètreplongé simplement
dans leliquide. » Mais,
comme le fait observer trèsjustement
M. Dufour
lui-même,
lethermomètre,
dans les conditionsprécédentes,
nedonne pas encore exactement la
température
de la surface extérieure de la lame de cuivreargentée,
à cause de lanon-homogénéité
de la masse ther-mométrique :
bloc de cuivre et thermomètre.Supposons
que l’on prenne une lamemétallique
infiniment mince et de faibledimension, qu’on
la fasse adhérer à l’une des faces d’une lame de verrerefroidie par son autre face et que l’on
puisse
déterminer exactement latempérature
de cetteplaque
demétal, indépendamment
de la lame deverre, au moment de
l’apparition
dudépôt
derosée;
on aurait unhygro-
mètre
parfait.
Or il existe unprocédé
très délicat pour évaluer latempé-
rature d’une lame
métallique
infiniment mince : il suffit d’en mesurer la ré- sistanceélectrique.
C’est ceprocédé que j’ai employé.
’Description
del’appareil.
-Après
un certain nombred’essais, je
mesuis arrêté à un
appareil
en verreayant
la forme d’unprisme
à base carrée( fig. r )
dont la base a 5 de côté et dont la hauteur est de7cm,
5. La faceFig. 1.
antérieure,
en verreplus
mince que le reste, est d’abord recouverte surtoute sa surface de
platine,
parexemple,
par leprocédé
de M. Dodé1 ’ )
etde
Jouglet ( 2 )
ou par celui de M. Cailletet( 3 ), puis,
au moyend’acide,
(1) DODÉ, Bulletin de la Société chimique, t. III, p. 3g8; 1865.
(2) JOUGLET, ibid., t. XIII, p. 4~~.
(3) CAILLETET, Société de Physique; I89I. - La Nature, t. I, p. 91; I89I.
on enlève le
platine
de larégion
abcd en mêmetemps
que l’on trace sur lcplatine
restant des traits en chicaneayant
Imm delargeur
et destinés à offrirun
plus long
parcours au courant; la surface de ces traits est enduite de gommelaque.
Leslanguettes
ab et cd deplatine
sont recouvertes d’une forte couche de cuivreélectrolytique,
cequi permet
de leur souder des fils deplatine qui
établissent la communication avec desgodets
de mercure Het H’ où se font les
prises
de contact; cesgodets
sont creusés dans unepièce
d’ébonite A.B
qui
est traversée en son centre par le col du flacon de verreauquel
elle estmastiquée.
De
chaque
côté de la surfacebdef
sont des lames de verreplatiné,
abso-Fig. 2.
lument semblables à celui de la surface
voisine,
etqui
servent de contraste.Cet ensemble est
placé
dans un vasecylindrique
V dont lapièce
d’éboniteAB forme le
couvercle;
un tube t’auquel
est relié un caoutchouc metl’ap- pareil
en communication avec larégion 0
dont on veut déterminer l’étathygrométrique;
un second tube tqui
descendjusqu’au
fond du vase V estrelié par un tube de caoutchouc à une
poire
de même matière Pqui produit
une
aspiration
et détermine le passage de l’air dansl’appareil.
Dans l’inté-rieur du
petit
flacon de verreabcdef,
onplace
de l’éther que l’onvaporise
facilement au moyen d’un barboteur TT’
(fig. 2).
.Détermination du
coefficient
de variation de la résistanceélectrique
du
platine
avec latempérature.
- La mesure de latempérature
de lalame de
platine
infiniment mincebdef
devant être faite par la détermi- nation de sa résistanceélectrique,
ilfaut,
aupréalable,
connaître exactementla résistance de cette lame à o° et la loi de sa variation avec la
température.
Pour déterminer cette loi
j’ai placé
lepetit
flacon de verreaec f
dans unbain d’huile de
naphte
dont latempérature, qu’on pouvait
fairevarier,
était déterminée exactement au moyen d’un bon thermomètre donnant le
2.0
dedegré.
Les résistances étaient mesurées au moyen dupont simple
de
Wheatstone,
car engénéral
lesappareils
ont une résistance variantentre 300 et 600 ohms.
Comme résultat de mes
expériences, j’ai
trouvéqu’entre
o° et 30° on pou- vaitreprésenter
la résistanceRt
à latempérature
de t° en fonction de la résistanceRo
à o° par une formule de la formedans
laquelle
Or de
l’équation précédente
on déduitet,
comme )
est trèspetit,
onpeut,
dans unepremière approximation,
lenégliger ;
on obtient ainsi unepremière
valeur det qui permet,
en se repor-tant à une Table calculée pour
chaque instrument,
d’avoir la valeur du coef-ficient I R0(03B1-03B2t)
et par suite une valeur exacte de t.Marche d’une
expérience.
2014 Lors d’uneexpérience,
la résistance H abde H’(fig. ~ )
forme l’une des branches d’unpont
de Wheatstone. Legalvanomètre employé
est un modèle Thomson à doubleenroulement,
trèssensible et observé par la méthode de
Poggendorff.
On commence par ramener, à latempérature
où l’on se trouve, legalvanomètre
au zéro en nelaissant passer le courant
qu’un temps
excessivement court, cequ’on
estforcé de faire si l’on
emploie
pour les mesures une boîte àpont.
On faitensuite passer dans le vase
V,
en actionnant lapoire
de caoutchoucP,
del’air dont on veut déterminer l’état
hygrométrique ;
en mêmetemps
on meten marche
l’aspirateur qui vaporise
l’éther et refroidit parconséquent
lalame de
platine; pendant
cerefroidissement, qu’on
peut conduire lente- ment, on enlève de temps entemps
des fiches à la boîte de résistance defaçon
à ramener legalvanomètre
auzéro,
de sorte que,lorsque
ledépôt
derosée
apparaît,
on n’a presqueplus
rien à faire pour que legalvanomètre
resteimmobile. On
peut
du reste recommencerplusieurs
foisl’apparition
de larosée
qui
est trèsfugitive
etdisparaît instantanément,
surtoutpendant
lepassage du courant nécessaire aux mesures. La résistance
Rt
ainsi mesuréepermet,
comme nous l’avons ditprécédemment,
de calculer latempéra-
ture t à
laquelle apparaît
ledépôt
de rosée et de connaître par suite la ten-sion de la vapeur dans l’air.
Quant
audépôt
derosée,
onpeut
saisir très exactement le moment où ilse
produit
en observant parréflexion,
sur la lame deplatine, l’image
d’unetige
de cuivre rouge;lorsque
la surface duplatine
est sèche etbrillante, l’image
de latige
est rouge; aucontraire,
dès que la condensation aqueusese
produit, l’image,
tout en conservant sa forme et sanetteté,
se décolore.Évaluation
del’approximation
des résultats donnés parl’appareil.
- On
peut
se demander apriori
si la formation dudépôt
de rosée à la surface de la lame deplatine be f d
n’en modifie pas la résistanceélectrique ;
en outre, à la surface des traits
qui
divisent cette lame pour en augmenter lalongueur,
ilpeut également
se condenser de la vapeurd’eau,
cequi
con-stituerait un conducteur nouveau
produisant
une dérivation.Mais. comme je
l’aidit,
les traits sont recouverts de gommelaque,
cequi
évite le
dépôt
derosée,
et la condensationqui
seproduit
à la surface de lalame
métallique
est sifugitive qu’elle disparaît pendant
les mesures etqu’il
~
n’y
aurait pas lieu d’en tenircompte ; toutefois,
même en admettant la per-sistance, pendant
les mesures, de cedépôt
et luiassignant
uneépaisseur
nécessairement
trop grande,
on reconnaît que son influence nepourrait
même pas s’exercer sur le de la valeur de la
résistance;
or, si l’onpeut
évaluer la résistance de la lame deplatine
avec cetteapproximation,
cequ’on
obtient sans
difficulté
avec lepont
deWheatstone,
onpeut
par contre en évaluer latempérature à ~’-~
dedegré près.
Du reste,
j’ai
fait à cetégard
desexpériences qui
lèvent touteespèce
de doute. Je
prenais
une série de flacons laveurs de faibles dimensions quej’assemblais
defaçon qu’un
courant gazeuxpût
les traverser, tout en barbotant dans leliquide qu’ils contenaient;
à la suite de cesflacons, je plaçais
une colonne contenant du verrepilé
surlequel je
faisais couler le mêmeliquide.
Cet ensemble étaitplacé
dans unegrande
cuve contenantde l’eau à une
température
constante et connue. Si leliquide
contenu dansles flacons laveurs
était, comme je
lefaisais,
unmélange
d’eau et d’acideD.6
sulfurique
enproportions
biendéfinies,
l’airqui
avait traversé cet ensembled’appareils
en sortaitpossédant
de la vapeur d’eau à une tensionparfaite-
ment connue et donnée par des Tables construites par
Regnault (’ ).
.
Or, j’ai opéré
de cettefaçon
à différentestempératures
avec desmélanges
d’eau et d’acide
sulfurique répondant
aux formulesSO3,8HO et SO3,I2 HO.
Le Tableau
suivant,
danslequel j’ai consigné
mesrésultats, contient,
dansla
première colonne,
lestempératures
desappareils
desaturation;
dans ladeuxième
colonne,
lacomposition
des solutionsemployées;
dans la troisièmerangée
sontplacés
les nombres donnés parRegnault
pour les tensions de vapeur des solutions inscrites dans lapremière rangée ;
laquatrième
colonne renferme les
températures t indiquées
parl’hygromètre lorsque
seproduit
lacondensation, l’appareil étant placé
dans de l’air saturé par les solutions dont lacomposition
se trouve dans une mêmeligne horizontale ;
enfin la
cinquième
colonne renferme les tensions de la vapeur d’eau à latempérature
lO.Tableau.
Or les nombres de la troisième et de la
cinquième colonne
sont semblables. et ne diffèrent au maximum que de c’est-à-dire que la tension absolue de la vapeur d’eau dans l’air est évaluée au moins au
près.
En
terminant, je
suis heureux depouvoir
remercierpubliquement
M. leProfesseur Berson de la bienveillante
hospitalité qu’il
a bien voulu m’ac- corder à son laboratoire de la Faculté des Sciences de Toulouse etqui
m’apermis d’entreprendre
ces recherches.(1) REGNAULT, Annales de Chimie et de Physique, 3e série, t. XV, p. 181 ; I845.
(2) Ibid., p. 13g; 1845.