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d’exploitation en droit d’auteur français, allemand et
européen
Lisa Heinzmann
To cite this version:
Lisa Heinzmann. L’influence de l’environnement numérique sur les droits d’exploitation en droit d’auteur français, allemand et européen. Droit. Université Paris Saclay (COmUE); Albert-Ludwigs-Universität (Freiburg im Breisgau, Allemagne), 2016. Français. �NNT : 2016SACLS464�. �tel-01591481�
NNT : 2016SACLS464$
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HESE DE DOCTORAT
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OCTORALE N° 578
Sciences de l’homme et de la société (SHS)
Droit privé et sciences criminelles
Par
Lisa Heinzmann
L’influence de l’environnement numérique sur les droits d’exploitation en droit
d’auteur français, allemand et européen
Thèse présentée et soutenue à Sceaux, le 9 décembre 2016 : Composition du Jury :
M. Pierre Sirinelli, Professeur à l’Université Paris I, Panthéon-Sorbonne Président du Jury M. Tristan Azzi, Professeur à l’Université Paris I, Panthéon-Sorbonne Rapporteur M. Axel Metzger, Professeur à la Humboldt Université de Berlin Rapporteur M. Matthias Leistner, Professeur à l’Université Ludwig-Maximilian de Munich Examinateur Mme Agnès Lucas-Schloetter, Enseignant-chercheur à l’Université Ludwig-Maximilian
de Munich et membre du CERDI à l’Université Paris-Sud Directrice de thèse M. Thomas Dreier, Professeur aux Universités de Freiburg et Karlsruhe Co-directeur de thèse
en droit d'auteur français, allemand et européen
THÈSE présentée par
Lisa HEINZMANN
soutenue publiquement le 9 Décembre 2016 dans le cadre d’une co-tutelle entre
l’Université Paris Sud-XI et la Albert-Ludwigs-Universität de Fribourg en Brisgau Directeurs de Thèse :
Mme Agnès Lucas‐Schloetter, enseignant‐chercheur à l’Université Ludwig‐Maximilian de Munich, membre du CERDI (Université Paris‐Sud) M. Thomas Dreier, professeur aux Universités de Freiburg et Karlsruhe Rapporteurs : M. Tristan Azzi, professeur à l’Université Paris I, Panthéon‐Sorbonne M. Axel Metzger, professeur à la Humboldt Université de Berlin Membres du Jury : M. Pierre Sirinelli, professeur à l’Université Paris I, Panthéon‐Sorbonne M. Matthias Leistner, professeur à l’Université Ludwig‐Maximilian de Munich
Je tiens à remercier ceux qui m’ont reçue, écoutée, et qui m’ont répondu, notamment : Ceux dont la confiance est à l’origine de ce projet et qui m’ont guidée et soutenue tout au long de ce parcours laborieux qu’est le doctorat, Madame Agnès Lucas‐Schloetter Monsieur Thomas Dreier Ceux dont la confiance a nourri le projet, Madame Sylvie Nérisson, maître de conférences (Bordeaux), Research Fellow MPI München Madame Silke von Lewinski, Adjunct Professor (N. Hampshire), Wissenschaftl. Referent MPI München Le Centre d’Études et de Recherche en Droit de l’Immatériel (CERDI), Université Paris‐Sud, pour l’excellence des conférences organisées Ceux qui m’ont permis d’échanger, Le Zentrum für Angewandte Rechtswissenschaft (ZAR), Karlsruhe, et ses membres pour l’atmosphère studieuse et conviviale Le Max‐Planck‐Institut für Innovation und Wettbewerb, München, pour son ouverture à l’international et sa bibliothèque impressionnante Ceux sans qui le projet n’aurait pas été possible matériellement, Le Cusanuswerk, Bischöfliche Studienförderung, Bonn Le Max‐Planck‐Institut für Innovation und Wettbewerb, München L’Université franco‐allemande, Saarbruck Ceux qui m’ont aidé pour la mise en place de la co‐tutelle, M. Le Doyen Antoine Latreille, Université Paris‐Sud Mme Maryse Chomette, Université Paris‐Sud Mme Birgit Schönrock, Albert‐Ludwigs‐Universität Freiburg Les membres du jury M. le Professeur Tristan Azzi, Université Panthéon‐Sorbonne (Paris 1) M. le Professeur Matthias Leistner, Ludwig‐Maximilians‐Universität München M. le Professeur Axel Metzger, Humboldt‐Universität Berlin M. le Professeur Pierre Sirinelli, Université Panthéon‐Sorbonne (Paris 1) Ceux dont le soutien est infini et sans lesquels, ce projet n’aurait pas pu voir le jour G. Heinzmann et A.‐M. Merlin Celui qui était patient et appliqué Markus Kring
SOMMAIRE
PRINCIPALES ABREVIATIONS ... 5
ITEMS CITES PAR LE SEUL NOM DE LEURS AUTEURS ... 9
INTRODUCTION ... 11
CHAPITRE PRELIMINAIRE ... 37
SECTION 1‐ TERMINOLOGIE GENERALE………... ... 37 SECTION 2‐ TERMINOLOGIE TECHNIQUE……… ... 44 PARTIE I‐ DE LEGE LATA : SUMMA DIVISIO TRADITIONNELLE ; EXPLOITATION SOUS FORME CORPORELLE ET INCORPORELLE. ... 53
TITRE I‐ DROIT D’EXPLOITATION SOUS FORME INCORPORELLE : LA COMMUNICATION AU PUBLIC ... 53
REMARQUES PRELIMINAIRES ... 54
SECTION 1‐ JURISPRUDENCE DANS UN CONTEXTE HORS LIGNE ... 54 SECTION 2‐ JURISPRUDENCE DANS UN CONTEXTE EN LIGNE ... 59 CHAPITRE I‐ NOTION DE COMMUNICATION AU PUBLIC DANS UN CONTEXTE HORS LIGNE .. 63
SECTION 1‐ PRESENTATION ET ANALYSE DE LA NOTION ... 63
SECTION 2‐ RECEPTION DE LA JURISPRUDENCE EN FRANCE ET EN ALLEMAGNE ... 145
CONCLUSION DU CHAPITRE I………. ... 170
CHAPITRE II‐ NOTION DE COMMUNICATION AU PUBLIC DANS UN CONTEXTE EN LIGNE .... 171
SECTION 1‐ EVOLUTION DU DROIT ALLEMAND, FRANÇAIS ET EUROPEEN ... 171
SECTION 2‐ RECEPTION DE LA JURISPRUDENCE EN FRANCE ET EN ALLEMAGNE ... 206
CONCLUSION DU CHAPITRE II……… ... 218
CONCLUSION DU TITRE I………. ... 219
TITRE II‐ DROITS D‘EXPLOITATION SOUS FORME CORPORELLE : REPRODUCTION ET DISTRIBUTION. ... 221
CHAPITRE I‐ DROIT DE REPRODUCTION ... 221
SECTION 1‐ LE PRINCIPE: NOTION DE REPRODUCTION ... 222
SECTION 2‐ DIFFICULTES PARTICULIERES : LES REPRODUCTIONS TEMPORAIRES ... 250
CONCLUSION DU CHAPITRE I………. ... 271
CHAPITRE II‐ DROIT DE DISTRIBUTION ... 273
SECTION 1‐ LA NOTION DE DISTRIBUTION DANS UN CONTEXTE ANALOGIQUE ... 273
SECTION 2‐ LA NOTION DE DISTRIBUTION DANS UN CONTEXTE NUMERIQUE ... 313
CONCLUSION DU CHAPITRE II……….. ... 340
CONCLUSION DU TITRE II……….. ... 340
CONCLUSION DE LA PARTIE I……… ... 341
PARTIE II‐ DE LEGE FERENDA: APPRECIATION DE LA STRUCTURE DES DROITS ET NOUVELLE DEFINITION DES DROITS ... 343
TITRE I‐ REMISE EN CAUSE DE LA STRUCTURE ET DE LA DEFINITION TRADITIONNELLE DES DROITS D’EXPLOITATION ? ... 343
CHAPITRE I‐ UNE DISTINCTION CORPORELLE/INCORPORELLE DEVENUE INADAPTEE ? ... 344
SECTION PRELIMINAIRE : STRUCTURE BINAIRE DU DROIT EXCLUSIF D’EXPLOITATION ET SON FONDEMENT………. ... 344
SECTION 1‐ PERTINENCE DU CRITERE DE DISTINCTION DANS UN MONDE NUMERIQUE ? ... 350
SECTION 2‐ EXEMPLES D’ENCHEVETREMENT ET APPLICATION INCERTAINE DES DROITS, EXACERBES PAR L’UTILISATION DE NOUVELLES TECHNIQUES NUMERIQUES ... 369
CONCLUSION DU CHAPITRE I………. ... 425
CHAPITRE II‐ UNE NOTION D’EXPLOITATION TRADITIONNELLE DEVENUE INADAPTEE ? ... 427
SECTION 1‐ APPROCHE TECHNIQUE DE LA NOTION D’EXPLOITATION ... 427
SECTION 2‐ DIMENSION PUBLIQUE D’UNE EXPLOITATION ? ... 464
CONCLUSION DU CHAPITRE II……… ... 471
CONCLUSION DU TITRE I……….. ... 471
TITRE II‐ REDEFINITION DE LA STRUCTURE DES DROITS ET DU CONTENU TRADITIONNEL DE L’EXPLOITATION ... 473
CHAPITRE I‐ NOUVELLE STRUCTURE DES DROITS, NOUVELLES DEFINITIONS ... 473
SECTION 1‐ NOUVEAUX CRITERES PERMETTANT DE DEFINIR UNE EXPLOITATION ... 473 SECTION 2‐ REMISE EN CAUSE DE LA STRUCTURE DES DROITS ? ... 516 CONCLUSION DU CHAPITRE I ... 518 CHAPITRE II‐ AMELIORATION IN CONCRETO DES TEXTES DE LOI. ... 520
SECTION 1‐ PROPOSITION DE REVISION DE L’ACQUIS EUROPEEN ... 520
SECTION 2‐ PROPOSITION DE REVISION DE LA LOI SUR LE PLAN NATIONAL ... 542
CONCLUSION DU CHAPITRE II……… ... 551
CONCLUSION DU TITRE II……….. ... 551
CONCLUSION DE LA PARTIE II……….. ... 552
CONCLUSION GENERALE ... 553
BIBLIOGRAPHIE ... 561
I‐ TRAITES, MANUELS, OUVRAGES GENERAUX…………. ... 561
II‐ MONOGRAPHIE, THESES, OUVRAGES SPECIAUX……. ... 565
III‐ ARTICLES, CHRONIQUES, MELANGES, ACTES DE COLLOQUES ... 573
IV‐ RAPPORT ET AVIS, CONSULTATIONS, COMMUNICATION, PROPOSITIONS DE LOIS ... 637
INDEX NOMINUM ... 643
INDEX RERUM ... 645
TABLE ANALYTIQUE DES MATIERES ... 648
DEUTSCHE ZUSAMMENFASSUNG ... 658
PRINCIPALES ABREVIATIONS
ADPIC Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce AEUV Vertrag über die Arbeitsweise der Europäischen Union (équilalent du Traité FUE). aff. Affaire AfP Archiv für Presserecht (Revue) AG Amtsgericht, tribunal de première instance ALAI Association littéraire et artistique internationale Amtl. Begr. Amtliche Begründung (exposé des motifs) art. Article Ass. Nat. Assemblée nationale Az. Aktenzeichen (numéro d’affaire)
Begr. des RegE Begründung des Regierungsentwurfs (exposé des motifs d’un
projet de loi présenté par le gouvernement)
BGB Bürgerliches Gesetzbuch (Code civil allemand)
BGBl. Bundesgesetzblatt (Recueil fédéral des lois)
BGH Bundesgerichtshof (Cour de cassation, Cour fédérale allemande)
BGHZ Entscheidungen des Bundesgerichtshofs in Zivilsachen (Recueil des décisions des chambres civiles du BGH)
BR.‐Drs. Bundesrat Drucksache (Recueil des débats du Bundesrat, chambre
haute du Parlement allemand)
BRegE Entwurf der Bundesregierung (Projet de loi présenté par le gouvernement)
BT.‐Drs. Bundestag Drucksache (Recueil des débats du Bundestag,
chambre basse du Parlement allemand) Bull. civ. Bulletin de la chambre civile de la Cour de cassation Bull. dr. auteur Bulletin du droit d’auteur (de l’UNESCO) BVerfG Bundesverfassungsgericht (Cour constitutionnelle fédérale) CA Cour d’appel Cah. dr. d’auteur Cah. dr. entreprise Cahiers du droit d’auteur (Revue) Cahiers du droit de l’entreprise (Revue) Cah. propr. intell. Cahiers de la propriété intellectuelle (Revue) CCC Contrats ‐ Concurrence – Consommation CCE Communication – Commerce électronique CE Conseil d’Etat CEE Communauté économique européenne chr. Chronique Civ. 1 Première chambre civile de la Cour de cassation CJCE Cour de justice de la communauté européenne CJUE Cour de justice de l’Union européenne (depuis 2009) COM Communications, recommandations, rapports, livres blancs, livres verts de l’Union européenne Com. Chambre commerciale de la Cour de cassation
CPI Code de la propriété intellectuelle CR Computer und Recht (Revue) ; Zeitschrift für die Praxis des Rechts der Informationstechnologien Crim. Chambre criminelle de la Cour de cassation CSPLA Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique D. Recueil Dalloz
DADVSI Loi sur le droit d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information
Directive 2001/29 Directive du 22 mai 2001 du Parlement européen et du Conseil sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, cité directive
InfoSoc.
Directive 2001/84 Directive du 29 avril 2004 du Parlement européen et du Conseil relative au droit de suite au profit de l’auteur d’une œuvre d’art originale.
Directive 2006/115
Directive du 12 décembre 2006 du Parlement européen et du Conseil relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d’auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle.
Directive 2006/116
Directive du 12 décembre 2006 du Parlement européen du Conseil du 12 décembre 2006 relative à la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins (version codifiée). Directive 92/100 Directive du 19 novembre 1992 du Conseil relative au droit de
location et de prêt et à certains droits voisins du droit d’auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle (abrogée).
Directive 93/83 Directive du 27 septembre 1993 du Conseil relative à la coordination de certaines règles du Droit d’auteur et droits voisins du droit d’auteur applicables à la radiodiffusion par satellite et à la retransmission par câble.
Directive 93/98 Directive du 29 octobre 1993 du Conseil relative à l’harmonisation de la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins (abrogée).
Doc. Document
DPMA Deutsches Patent‐ und Markenamt (Office allemand des brevets
et des marques, anciennement DPA, Deutsches Pantentamt).
EGV Vertrag über die Gründung der Europäischen Gemeinschaft
(équivalent du traité CE). EIPR European Intellectual Property Review (revue) EUV Vertrag über die Europäische Union (équivalent du traité UE). Fasc. Fascicule FAZ Frankfurter Allgemeine Zeitung (quotidien national) ff. fortfolgende (et suivants) Gaz. Pal. Gazette du Palais
GEMA Gesellschaft für Musikalische Aufführungs‐und mechanische Vervielfältigungsrechte (société de gestion des droits musicaux, équivalent de la SACEM en France).
GmbH Gesellschaft mit beschränkter Haftung (équivalent de la SARL)
GRUR Gewerblicher Rechtsschutz und Urheberrecht (revue)
GRUR‐Int GRUR Internationaler Teil (revue)
(revue) INPI Institut national de la propriété industrielle IRPI Institut de recherches en propriété intellectuelle Henri Desbois J.‐Cl. Juris‐Classeur JCP éd. G (ou éd. E)
Juris‐Classeur périodique (La semaine juridique) édition générale (ou édition entreprise) Jnl Journal (dans le titre d’une revue) JOCE Journal officiel de la Communauté européenne JORF Journal officiel de la République française JOUE Journal officiel de l’Union européenne Jp Jurisprudence (section d’une revue) KG Kammergericht (cour d’appel de Berlin) KUR Kunst und Recht (revue) LCEN Loi sur la confiance dans l’économie numérique LG Landgericht (tribunal d’instance) LGDJ Librairie générale de droit et de jurisprudence MMR Multimedia und Recht (revue) NJW Neue Juristische Wochenzeitschrift (revue) obs. Observations OLG Oberlandesgericht (cour d’appel) OMPI Organisation mondiale de la propriété intellectuelle p. Page P. aff. Les petites affiches (revue) P.U.A.M. Presses Universitaires d’Aix‐Marseille préc. Précité Propr. intell. Propriétés intellectuelles (revue)
Rec. Recueil des décisions de la Cour de justice des communautés européennes Réf. Référé RIDA Revue internationale de droit d’auteur RIDC Revue internationale de droit comparé RLDC Revue Lamy du droit de la concurrence RLDI Revue Lamy du droit de l’immatériel RTD civ. Revue trimestrielle de droit civil RTD com. Revue trimestrielle de droit commercial RTDE Revue trimestrielle du droit de l’entreprise s. Suivants SABAM Société belge des auteurs, compositeurs et éditeurs SACEM Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique SAIF Société des auteurs de l’image fixe
SGAE Sociedad General de Autores y Editores (Société espagnole de gestion collective des droits musicaux)
sic ! Zeitschrift für Immaterialgüter‐, Informations‐ und
Wettbewerbsrecht (revue) SOFIA Société pour la défense des intérêts des auteurs de l’écrit SPADEM Société de la propriété artistique des dessins et modèles SPEDINAM Société de la protection artistique et des dessins et modèles Supra ci‐dessus T. civ. Tribunal civil
TGI Tribunal de grande instance Traité CE Traité des Communautés européennes
Traité FUE Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (anciennement, traité CE ou traité de Rome). Equivalence en allemand, AEUV.
Traité UE Traité sur l’Union européenne. Equivalence en allemand, EUV.
UE Union européenne
UFITA Archiv für Urheber‐, Film‐, Funk und Theaterrecht (revue)
UrhG Urheberrechtsgesetz oder Gesetz über Urheberrecht und
verwandte Schutzrechte (littéralement : loi sur le droit d’auteur ou
loi relative aux droits d’auteur et droits de protection apparentés du 9 septembre 1965).
UWG Gesetz gegen den unlauteren Wettbewerb (loi allemande sur la
concurrence déloyale)
VerlG Verlagsgesetz (loi allemande sur l’édition du 19 juin 1901)
VG Verwertungsgesellschaft (société de gestion collective)
VG BildKunst Verwertungsgesellschaft BildKunst (société de gestion pour l’art pictural)
VG Wort Verwertungsgesellschaft Wort (société de gestion collective pour
le mot)
WahrnG Gesetz über die Wahrnehmung von Urheberrechten verwandten Schutzrechten (Loi allemande sur la gestion des droits d’auteur et
des droits voisins du 9 septembre 1965)
WuW Wirtschaft und Wettbewerb (revue)
ITEMS CITES PAR LE SEUL NOM DE LEURS AUTEURS
Les ouvrages ou articles dans cette liste sont cités par le seul nom de leur auteur ou selon une manière abbrégée, indiquée par ‘cité’.
C. BERNAULT, C. CLAVIER, A. LUCAS SCHLOETTER, F.‐X, LUCAS, Mélanges en l’honneur du
Professeur André Lucas, Paris 2014, LexisNexis ; cité MÉLANGES LUCAS.
Ch. CARON, Droit d’auteur et droits voisins, Paris 2013, LexisNexis, Litec. ; 4ème éd. 2015.
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, Paris 1987, PUF, coll. Quadrige ; 10ème éd. 2014.
H. DESBOIS, Le droit d’auteur en France, Propriété littéraire et artistique, Paris, 3ème éd. 1978, Dalloz.
Th. DREIER, Konvergenz und das Unbehagen des Urheberrechts, in Ahrens, et al. [éd.],
Festschrift für Willi Erdmann zum 65. Geburtstag, Köln/München [e.a.] 2002, Heymann, p. 73 –
88 ; cité TH. DREIER, FS Erdmann.
Th. DREIER, „De fine”: vom Ende des Definierens? ‐ Zur Abgrenzung von Münzkopierern,
Personal Video Recordern und Serverdiensten, in Ahrens/Bornkamm/Kunz‐Hallstein, Festschirft für Eike Ullmann, Sarrbrücken, 2006, juris GmbH, p. 37 – 50 ; cité TH. DREIER, FS Ullmann.
Th. DREIER/ G. SCHULZE, Urheberrechtsgesetz, Urheberrechtswahrnehmungsgesetz,
Kunsturhebergesetz Kommentar, Munich, 3ème éd. 2008, C. H. Beck ; cité DREIER/SCHULZE.
Th. DREIER/ G. SCHULZE/ L. SPECHT, Urheberrechtsgesetz, Urheberrechts‐ wahrnehmungsgesetz, Kunsturhebergesetz Kommentar, Munich, 4ème éd. 2013, 5ème éd. 2015, C.H. Beck ; cité DREIER/SCHULZE/SPECHT 4. A. / 5. A. K. FROMM/ W. NORDEMANN, Urheberrecht Kommentar zum Urheberrechtsgesetz und zum Urheberrechtswahrnehmungsgesetz, 1966, dirigé pour sa dixième édition en 2008 par A. JAN‐BERND et W. NORDEMANN, Stuttgart, Kohlhammer ; cité FROMM/NORDEMANN, 10. A.
P.‐Y. GAUTIER, Propriété littéraire et artistique, Paris, 7ème éd. 2010, 8ème éd. 2012, 9ème éd.
2015, PUF, Droit fondamental.
P.‐Y. GAUTIER, Propriétés intellectuelles. Mélanges en l’honneur d’André Françon, Paris, 1995, Dalloz ; cité P.‐Y. GAUTIER, Mélanges Françon.
A. LUCAS, H.‐J. LUCAS, A. LUCAS‐SCHLOETTER, Traité de la propriété littéraire et artistique, Paris, 4ème éd. 2012, LexisNexis SA ; cité TPLA LUCAS, LUCAS‐SCHLOETTER.
A. OHLY, Urheberrecht in der digitalen Welt – Brauchen wir neue Regelungen zum
Urheberrecht und dessen Durchsetzung?, Thèses présentées à la suite de l’expertise ayant pour
sujet le droit d’auteur dans un monde numérique, à l’occasion de la 70ème journée des juristes allemands en 2014; cité A. OHLY, Gutachten zum 70. Deutschen Juristentag.
F. POLLAUD‐DULIAN, Le droit d’auteur, Paris, 2ème éd. 2014, Economica.
G. SCHRICKER, Urheberrecht, Kommentar, München, 3ème éd. 2006, C.H. Beck.
G. SCHRICKER /U. LOEWENHEIM, Urheberrecht, Kommentar, München, 4ème éd. 2010, 5ème éd. 2017, C.H. Beck ; cité SCHRICKER /LOEWENHEIM, 4. A. / 5. A.
M. VIVANT et J.‐M. BRUGUIERE, Droit d’auteur, Paris 2009, Dalloz ; 3ème édition 2015. A. A. WANDTKE et W. BULLINGER, Praxiskommentar zum Urheberrecht, München 3ème éd. 2009, C.H. Beck ; 4ème éd. 2014.
Introduction
« Quiconque regarde le droit d’auteur seulement comme un obstacle technique sur le chemin de l’achèvement du marché Unique numérique ne rend pas justice à son importance »1 1. L’hypothèse de départLa présente étude se fonde sur l’hypothèse initiale suivante : le droit d’auteur est confronté à une crise de légitimité en raison de l’inadaptation de la structure et de la définition des droits d’exploitation aux nouvelles utilisations des œuvres, dans un environnement numérique. Dans quelle mesure l’utilisation d’une œuvre relève‐t‐elle du droit d’exploitation au sens du droit d’auteur ? Concrètement, les actes qui consistent par exemple à poser un lien envers une œuvre illicite, relèvent‐ils du champ d’application du droit d’auteur permettant à l’auteur d’exercer un contrôle sur l’utilisation de ces œuvres ? Alors que dans un monde analogique, les critères constitutifs de l’exploitation d’une œuvre semblent clairs, les contours et les caractéristiques d’une exploitation sont plus complexes à cerner dans un monde numérique, en raison notamment de la dématérialisation, de la convergence accrue des techniques et de l’interactivité qui en résulte. La restriction du sujet aux seuls droits d’exploitation est justifiée par une conception diamétralement différente de ces droits en France et en Allemagne.
2. Justification de l’approche comparative
Comment justifier une approche comparative du droit d’auteur français et allemand, si complexe déjà sur le plan purement terminologique ? La réponse est simple : les droits d’exploitation que l’on croyait pourtant harmonisés au niveau européen, présentent néanmoins une structure et des définitions différentes en France et en Allemagne. La restriction du sujet aux seuls droits d’exploitation, est justifiée par une conception différente de ces droits en France et en Allemagne, témoignant de l’existence de deux grandes traditions juridiques en Europe continentale. Ces deux pays jouent un rôle important dans l’élaboration du « droit d’auteur européen »2 et leur coopération est souhaitée sur le plan politique comme le souligne une déclaration commune franco‐allemande en droit d’auteur : « la France et l'Allemagne s'engageront donc activement et de manière constructive dans la démarche de
1 Droit d’auteur, Déclaration commune franco allemande du 31 mars 2015, Bundesministerium der Justiz und für Verbraucherschutz, ministère de la culture et de la communication, p. 1. 2 A. LUCAS‐SCHLOETTER, Is there a concept of european copyright law ? History, evolution, policies, and politics and the acquis communautaire, in EU Copyright law, a commentary, Cheltenham 2014, p. 7.
modernisation du droit d'auteur initiée par la Commission européenne » 3. Non seulement un haut niveau de protection de l’auteur rapproche les deux systèmes juridiques mais également l’existence d’une summa divisio au niveau des droits d’exploitation, permettant de reconnaître un droit d’exploitation sous forme corporelle (le droit de reproduction en France) et un droit d’exploitation sous forme incorporelle (le droit de représentation), une distinction que ne reprend pas très clairement la directive de droit commun d’auteur InfoSoc.
On a mentionné que les deux grands systèmes juridiques d’Europe continentale reconnaissent deux prérogatives attachées à l’auteur ou au titulaire de droits, à savoir le droit de représentation et le droit de reproduction. Néanmoins, devant la grande diversité des modes d’exploitation d’une œuvre, la France et l’Allemagne connaissent deux manières d’appréhender la structure des droits exclusifs d’exploitation. La présentation de ces approches diamétralement différentes, constituant une des plus grande différence structurelle entre le droit d’auteur allemand et français, précédera son appréciation.
Summa divisio et approche synthétique en France
« Les prérogatives patrimoniales de l’auteur, à l’image de celles qui avaient été reconnues par les révolutionnaires, sont présentées dans la loi du 11 mars 1957 […] de façon synthétique4». Le style législatif adopté pour la rédaction de l’énoncé est emblématique de
l’économie de moyens5, caractéristique de la loi de 1957, partiellement imitée par la loi de codification de 19926. Cet esprit de synthèse est largement soutenu par la doctrine7 française. Limitée à deux droits patrimoniaux, conçus de manière suffisamment large et compréhensive, la sphère patrimoniale a, en principe, vocation à couvrir tous les actes d’exploitation possibles8. Comme l’a développé M. Pollaud‐Dulian en 1989 dans sa thèse, « cette division en deux droits principaux, ayant chacun une acception très large, a permis et permet encore au droit français de faire face aux mutations et aux besoins nouveaux du droit d’auteur, d’une façon satisfaisante : elle donne à la législation sur la propriété littéraire et artistique une capacité d’adaptation bien plus grande que l’énumération de prérogatives spéciales, strictement définies… »9. En bref, l’art législatif français offre l’avantage de la souplesse et
3 Voir la déclaration commune franco‐allemande en droit d’auteur du ministère de la culture et de la communication et du Bundesministerium der Justiz und für Verbaucherschutz, signé à Berlin, le 31 mars 2015, téléchargeable sur : (http://www.culturecommunication.gouv.fr/Presse/Communiques‐de‐ presse/Fleur‐Pellerin‐et‐Heiko‐Maas‐signent‐a‐Berlin‐une‐declaration‐franco‐allemande‐sur‐le‐droit‐d‐ auteur).
4 Voir entre autres : A. ROBIN : J.‐Cl. PLA, Fasc. 1240 : Propriété littéraire et artistique. – Droits des
auteurs. – Droits patrimoniaux. Généralités. Droit d’exploitation. Présentation, n° 13.
5 Voir notamment : F. POLLAUD‐DULIAN, « La loi du 11 mars 1957 a cinquante ans : bilan et perspectives » : RIDA n°213, juill. 2007, p. 3 et suiv. (Particulièrement, p. 17). De manière plus générale, sur les vertus d’une législation a minima, voir J. CARBONNIER, Droit et passion du droit sous la Ve
République, réed. Champs Flammarion, 2006, p. 106 : « Une limitation du nombre des normes, mesurée
aux besoins réels de la société, uns sobriété qui bride la passion du droit ».
6 Voir notamment, A. FRANÇON, « la voie de la codification et systématisation du droit d’auteur – l’exemple de la France (Code de la propriété intellectuelle de 1992) », in : ALAI, La mise en œuvre des droits d’auteur – Le rôle de la législation nationale en droit d’auteur, Congrès de Berlin 16‐19 juin 1999, p. 257 et suiv.
7 Voir entre autres : Ch. CARON, n°308, p. 277 et suiv.; M. VIVANT/ J.‐M. BRUGUIERE, 2015, n°516, p. 460; F. POLLAUD‐DULIAN, n°937 et n°938, p. 699 et suiv.
8 TPLA LUCAS, LUCAS‐SCHLOETTER, n°254, p. 251.
9 F. POLLAUD‐DULIAN, Le droit de destination. Le sort des exemplaires en droit d’auteur : LGDJ, 1989, n°152.
s’adapte aisément aux mutations et aux changements 10 engendrés par l’utilisation de nouvelles technologies.
Summa divisio et approche analytique en Allemagne
Comme le soulignent à de nombreuses reprises les développements, la loi allemande relative au droit d’auteur et aux droits voisins reconnaît de nombreux droits d’exploitation différents, tel le droit de distribution (art. 17 UrhG), le droit de mise à disposition (art. 19 a UrhG), tout comme le droit de communication au moyen d’un enregistrement visuel ou sonore (art. 21 UrhG)11 ou le droit de communication d’émissions radiodiffusées et de mises à disposition (art. 22 UrhG)12. Il est intéressant de constater que la doctrine allemande ne remet que très rarement en cause le bien fondé de cette énumération des droits, et cherche au contraire à distinguer de manière toujours plus précise les différents droits d’exploitation. Les thèses ou travaux de recherche portant sur les droits d’exploitation en Allemagne s’appliquent donc plutôt à affiner et à rechercher des critères permettant de distinguer les droits, plutôt que de remettre en cause cette distinction et de proposer un rapprochement des droits. Dans le cadre de son travail de thèse mené avec une grande précision, M. Koof recherche par exemple de nouveaux critères permettant de distinguer le droit de mise à disposition (art. 19 a UhrG) et le droit de télédiffusion (art. 20 UrhG). Cette distinction systématique des droits se traduit par l’utilisation d’une terminologie symptomatique, puisque M. Koof ne cesse de faire référence à une nécessité de « démarcation13 » des droits, et que la plupart de ses développements sont consacrés à la recherche d’une « délimitation des droits14 », ou encore à la « concrétisation des critères de différenciation15 » etc. En Allemagne, un certain nombre de travaux de recherche propose même la création de nouveaux droits d’exploitation16, jugeant la distinction des droits pas encore assez précise. On constate donc que la structure des droits d’exploitation en France et en Allemagne évolue de lege ferenda de manière diamétralement opposée. Appréciation d’une structure différente des droits sur le plan national Un tel constat permet de comprendre que les deux conceptions des droits d’exploitation de lege lata sont souvent présentées comme s’affrontant : d’une part, la conception française
est large et ouverte et d’autre part, la conception allemande est détaillée et fermée17. A première vue, la « souplesse et la simplicité de la première conception sont mises en balance avec la rigidité et la complexité de la seconde18 ». Ce propos tranché tenu notamment par M.
Pignatari doit cependant être nuancé. Tout d’abord, il ne semble pas approprié de qualifier la conception allemande des droits comme étant fermée. Qu’entend‐t‐on par une conception
10 TPLA LUCAS, LUCAS‐SCHLOETTER, n°255, p. 252. 11 C’est‐à‐dire entre autres, la projection publique. 12 C’est‐à‐dire, entre autres, la transmission dans un lieu public de l’œuvre télédiffusée etc. 13 « Demarkation zwischen dem Senderecht und dem Recht der öffentlichen Zugänglichmachung », voir A. KOOF, Senderecht und Recht der öffentlichen Zugänglichmachung im Zeitalter der Konvergenz der
Medien, Mohr Siebeck Tübingen, 2015, p. 121.
14 « Abgrenzung von den Verwertungsrechten der Wahrnehmbarmachung », p. 85 et suiv. ; « Abgrenzung von den Rechten der Wahrnehmbarmachung », p. 119 et suiv. ; « Abgrenzung mittels der klassischen Auslegungsmethoden » p. 129 et suiv. etc.; voir A. KOOF, ibid.
15
« Konkretisierung des Abgrenzungsmerkmals », voir A. KOOF, ibid., p. 183 et suiv.
16 Tel par exemple le droit nommé « Abrufübertragungsrecht ». L’« Abrufübertragung » est constitué du mot « Abruf » que l’on peut traduire par la terminologie de consultation et du mot « Übertragung » constituant une transmission.
17 O. PIGNATARI, Le support en droit d’auteur, Groupe Larcier s.a., 2013, n°261, p. 185. 18
fermée des droits dans ce contexte ? En Allemagne tout comme en France19, la liste des droits énumérés n’est pas exhaustive et n’est donc pas fermée. En effet, l’art. 15 UrhG est une clause générale20, et l’énumération des droits par ce paragraphe n’est qu’exemplaire21. Une telle compréhension est confirmée par les commentaires allemands relevant que le droit exclusif de l’auteur est conçu de façon ouverte22 et large23, afin que de nouvelles possibilités
d’utilisation des œuvres, qui ne sont pas encore saisies par les droits d’exploitation nommés par la loi, puissent être soumises au contrôle de l’auteur24. Certes, la conception des droits en
Allemagne est détaillée, mais elle est ouverte.
Néanmoins, il est vrai que les avantages d’une conception des droits (analytique ou synthétique) reflètent les inconvénients de l’autre. Ainsi, une conception détaillée des droits en Allemagne présente, à n’en pas douter, des désavantages par rapport à une conception concise et synthétique française. Trois types d’inconvénients peuvent être énumérés. Premièrement, l’approche analytique tend en effet à « imaginer autant de droits qu’il existe de modes d’exploitation »25. D’un point de vue systématique, ceci n’est pas le cas, puisqu’il ne s’agit ici que d’une tendance, bien réelle et qui conduit à se poser la question suivante : la définition d’un droit d’exploitation englobe‐t‐elle aussi des modes d’utilisation des œuvres ou des moyens techniques ne constituant pas des exploitations d’œuvres ? C’est ainsi qu’on cherche à savoir les contours et la définition de l’exploitation d’une œuvre, dans le cadre d’une approche analytique des droits. Deuxièmement, il est évident qu’une conception analytique des droits, descriptive et proche de la technique est plus délicate à mettre en œuvre qu’une conception synthétique des droits, à partir du moment où les délimitations à tracer entre les droits sont plus nombreuses. Toute catégorisation, quelle qu’elle soit entraîne des difficultés liées à la délimitation et aux contours de cette catégorie. La multiplication des catégories implique inévitablement la hausse des difficultés. De plus, une définition pointilleuse des droits occasionne une application plus exigeante du droit à un cas d’espèce bien particulier. Comment qualifier à l’aide de mots, des actes d’exploitation d’œuvres réalisés par le truchement de procédés techniques ? Troisièmement, il est vrai qu’un système analytique entraîne un émiettement des droits26, rendant le système moins lisible, voire moins cohérent. Le système est certes moins lisible, mais est‐il pour autant moins performant? Peut‐on considérer qu’un système clair et lisible, mais quelque peu artificiel soit plus performant ? Comment apprécier la performance d’un système juridique ? Est‐il nécessaire de prendre en compte sa sécurité juridique, les intérêts qu’il protège ? Vaste question ! Cela revient à rechercher la finalité ou la justification du droit d’auteur, une réponse nécessairement politique qui ne peut faire l’objet de développements dans ce paragraphe.
19 A ce sujet : « toutes les prérogatives d’ordre patrimonial reconnues aux auteurs relèvent nécessairement de l’un ou de l’autre », voir TPLA LUCAS, LUCAS‐SCHLOETTER, n°254, p. 251.
20 « § 15 als Generalklausel. Unbenannten Verwertungsrechte » voir notamment : J. v. UNGERN‐ STERNBERG, in : Schricker/Loewenheim, 4. A. § 15, n° 21 à 27, p. 350 suiv.
21 Puisque la terminologie « notamment », c’est‐à‐dire « insbesondere » est utilisée par la rédaction de l’article 15 (1) et (2) de la loi sur le droit d’auteur allemand. Exemple de formulation de l’article 15 (1) UrhG : « das Recht umfaßt insbesondere […] » ; H. SCHACK, Urheber‐ und Urhebervertragsrecht, 4. Auflage, n° 372, p. 196.
22 Voir entre autres : AmtlBegr. UFITA 45 [1965] 240/242 f./260; BGHZ 156, 1/13 – Paperboy.
23 En allemand, c’est la terminologie «umfassendes Verwertungsrecht» ou « das umfassende Ausschließlichkeitsrecht » qui est employée. Voir H. SCHACK, Urheber‐ und Urhebervertragsrecht, 4. Auflage, n° 372, p. 196. 24 J. v. UNGERN‐STERNBERG in : Schricker/Loewenheim 4. A. § 15 UrhG, n° 22. 25 O. PIGNATARI, Le support en droit d’auteur, Groupe Larcier s.a., 2013, n°261, p. 185. Selon cet auteur, il semble que la terminologie de « modes d’exploitation» soit ici à comprendre au sens large. 26 O. PIGNATARI, Le support en droit d’auteur, Groupe Larcier s.a., 2013, n°261, p. 185.
Concrètement, il faut tout de même noter qu’aucune conception des droits d’auteur, qu’elle soit allemande ou française n’est meilleure que l’autre. Les deux conceptions de droit d’auteur, analytique ou synthétique, présentent toutes deux des inconvénients et des avantages. Le plus gros inconvénient d’un système analytique est sans doute sa difficulté à traverser les époques. Il est exact de considérer que le système analytique présente moins de souplesse aux innovations technologiques « ce qui oblige le législateur à intervenir pour adapter les textes et pallier l’absence de droit formellement prévu, sous peine de voir l’acte en cause échapper à toute sanction »27. Peut‐on considérer que l’intervention du législateur constitue un désavantage ? D’un côté, la procédure législative conduisant à adopter un texte de loi est souvent longue, puisque l’adoption d’un texte est généralement le résultat d’une recherche de consensus. De l’autre, l’intervention du législateur constitue le fondement même de toute société démocratique où prévaut le dialogue, le compromis, la prise en compte de différents intérêts. De par son passé, l’Allemagne est particulièrement attachée à cette culture du dialogue, tout comme la France. L’intervention du législateur ne peut donc être considérée comme un désavantage puisqu’un tel processus permet de garantir des valeurs communes. Seul un droit accepté par tous peut véritablement être mis en œuvre.
La conception allemande du droit d’auteur présente donc aussi des qualités. La norme prévue dans la loi est claire et détaillée. Par conséquent, l’auteur, simple lecteur du texte de loi, est susceptible d’avoir une meilleure compréhension de ses droits : la loi, même avec ses nuances subtiles est plus accessible. On sait à quoi s’en tenir et les normes sont formulées de manière plus pragmatique. D’une plus grande précision, la conception analytique des droits apporte une certaine sécurité juridique, particulièrement en ce qui concerne l’application de
lege lata de la loi. Une application uniforme de la loi est ainsi favorisée. Une conception
détaillée des droits présente aussi des avantages, dépassant la simple mise en œuvre du droit exclusif de l’auteur stricto sensus. En effet, une conception détaillée des droits exclusifs de l’auteur entraîne aussi une plus grande sécurité juridique quant à l’application des droits voisins28. De plus, l’étendue des droits exclusifs étant intimement liée à l’étendue des exceptions à ces droits, une conception analytique détaillée des droits entraîne, de manière logique, une formulation plus détaillée des exceptions aux droits exclusifs. Or, une formulation plus détaillée des droits29, c’est‐à‐dire plus nuancée des exceptions, permet de concilier de façon plus subtile les différents intérêts en jeu. Par ailleurs, il semble qu’une approche analytique des droits entraîne une gestion collective des droits plus efficace30.
Les avantages d’une conception analytique reflètent bien sûr à leur tour, les désavantages d’une conception synthétique des droits. Certes, une conception synthétique des droits a le mérite de la clarté, de la concision: la loi française est un chef‐d’œuvre sur le plan conceptuel. Cette construction dogmatique traduit‐elle bien la « réalité » concrète ? La cohérence de la
27
O. PIGNATARI, ibid., p. 185.
28 Notamment quant à l’application de l’article 19 a UhrG et l’article 20 UrhG.
29 On ne pourra se satisfaire de réponses simples sur les bienfaits d’un système nuancé; ainsi Th. DREIER : « Die Antworten auf die gestellten Fragen müssen angesichts der Komplexität der angesprochenen Sachverhalte zwangsläufig komplex ausfallen. Einfache Lösungen sind nicht zu haben », : Enquete‐Kommission «internet und digitale Gesellschaft » des Deutschen Bundestages,
« Entwicklung des Urheberrechts in der Digitalen Gesellschaft », Anhörung am 29.11.2010, 43 pages (p.
1).
30 Voir à ce sujet la thèse de S. NERISSON, La gestion collective des droits des auteurs en France et en
conception synthétique française des droits n’est‐elle pas artificielle ? Peut‐on véritablement considérer la conception synthétique française comme étant précise31 apportant une plus grande sécurité juridique que la conception analytique des droits ? Face aux notions larges prévues par le Code de la propriété intellectuelle (CPI) français, on peut se demander si les problèmes de délimitation des droits ne sont pas transférés ou reportés à l’échelle des contrats d’exploitation des droits d’auteur. En effet, les contrats d’exploitation différencient souvent les droits de représentation applicables dans un environnement online et le droit de représentation à mettre en œuvre dans un environnement offline32. En pratique, les contrats d’exploitation ne retiennent donc pas toujours une compréhension large des notions de droit33.
Par conséquent, la conception synthétique des droits permet d’adapter celui‐ci aux technologies nouvelles, mais son adaptabilité dépend avant tout du travail d’interprétation de la norme par le juge34 qui devra développer des concepts pour les faire vivre. L’interprétation d’une norme par le juge permet‐elle de garantir une sécurité juridique ? En pratique, on ne peut négliger le fait que l’interprétation d’une norme peut varier suivant le juge ou les chambres saisies. Un tel recours permet‐il une uniformité d’application de la norme ? Peut‐on raisonnablement considérer que l’intervention du juge et la construction d’une jurisprudence stable et confirmée permettent de réagir plus rapidement à l’évolution des technologies que ne le ferait une intervention législative ? L’intervention du juge est‐elle représentative de l’intérêt général, est‐elle démocratique ? Quel est le rôle du juge, quel est le rôle du législateur ? Est‐il préférable d’élargir les contours de concepts existants (par l’intervention des juges) plutôt que de créer de nouveaux droits (par l’intervention du législateur) ? La différence de conception des droits d’auteur dévoile en fait une profonde différence des systèmes juridiques allemands et français… le droit d’auteur faisant pourtant l’objet d’une politique ambitieuse d’harmonisation (ou tout au moins de rapprochement) sur le plan européen. 3. Délimitation du sujet Le sujet met tout particulièrement l’accent sur une approche comparative en droit français et allemand, justifiée principalement par une structure et une définition différente des droits d’exploitation en France et en Allemagne. La terminologie de « structure » fait référence à une analyse des éléments des droits d’exploitation. Ni le droit moral ni le droit de suite ne font l’objet d’une analyse dans le cadre de cette thèse.
Le sujet s’attache aux nouvelles exploitations des œuvres dans un environnement numérique. Par conséquent, une analyse détaillée du droit de communication au public dans le sens d’une représentation de théâtre ou d’un concert, est exclue, s’il y a unité de temps et de lieu du public. Le considérant 23 de la directive InfoSoc prévoit explicitement que le droit de communication au public tel qu’il est prévu par la directive InfoSoc, « doit s’entendre […] comme couvrant toute communication au public non présent au lieu d’origine de la communication ». De plus, il faut souligner que l’on était conduit à inclure une analyse du droit
31 O. PIGNATARI, Le support en droit d’auteur, Groupe Larcier s.a., 2013, n°262, p. 187. 32
Sur les difficultés d’application du droit de représentation et de reproduction, lorsqu’un ouvrage prévu initialement pour l’imprimerie traditionnelle retrouve une nouvelle vie, à travers le numérique. Le contrat d’édition initial couvre‐t‐il cette « nouvelle » exploitation numérique ?
33 D’autres contrats d’exploitation en revanche, évoquent de manière cumulative, sans précision particulière, le droit de reproduction et le droit de représentation.
34
de distribution35, limité à des œuvres incorporées dans un support intangible. Ainsi le droit de distribution a été appliqué dans un contexte de transfert en ligne. Des œuvres incorporées dans un support matériel peuvent bien sûr faire l’objet d’une commercialisation online, mais le sujet s’intéresse surtout aux modes d’utilisation online des œuvres, lorsque ces dernières sont incorporées dans un support numérique.
Ce travail n’a pas non plus pour ambition d’étudier des exceptions et limitations aux droits exclusifs d’exploitation pourtant très différentes en France et en Allemagne. Bien que l’étendue d’une exception soit liée à l’étendue d’un droit exclusif d’exploitation, la définition, par exemple, d’un copiste ne concerne pas — dans le cadre de l’exception de copie privée — l’essence de la définition d’une exploitation accordée à un titulaire de droit. Seule sera abordée l’exception de reproduction provisoire, participant pleinement à la définition du droit de reproduction. De plus, une analyse détaillée des différentes exceptions serait longue, descriptive et n’apporterait pas d’éléments de réflexion en vue d’une analyse plus globale du système de droit d’auteur dans son ensemble. Ne sont pas non plus abordés ni les contrats d’exploitation ni les questions liées à la cession des droits à différents titulaires dans le cadre d’œuvres multimédias. La responsabilité des intermédiaires n’est pas approfondie, ni même la procédure et les sanctions liées à un acte en contrefaçon. Pour finir, le sujet traite bien du droit d’auteur au sens strict et non des droits voisins du droit d’auteur. Bien que les bénéficiaires de droits voisins et le contenu de ces droits présentent de grandes différences en France et en Allemagne, le sujet ne traite que des droits exclusifs d’exploitation d’auteur faisant a priori l’objet d’une harmonisation à l’échelle européenne. La thèse exclut donc un examen de la directive des bases de données. En effet, le droit destiné à rentabiliser l’investissement d’un producteur de base de données reconnu par l’art. 7 de la directive de 1996 participe bien de la nature d’un droit voisin, alors même que la directive préfère l’appellation de droit sui generis. Cette analyse est d’ailleurs confirmée par la loi allemande du 22 juillet 1997 transposant la directive, et une telle analyse est généralement confirmée par la doctrine aussi bien en France qu’en Allemagne. C’est pourquoi, l’analyse de la directive InfoSoc
et de la jurisprudence européenne interprétant cette dernière fait l’objet de très larges
commentaires dans cette thèse, tout en s’autorisant des références à la directive dite des « logiciels » et à la directive dite « location/prêt » traitant aussi des droits voisins, lorsque l’analyse de ces directives présente un intérêt pour le « droit commun » d’auteur.
4. Contexte européen
Harmonisation des droits par les directives
L’acte unique européen entrée en vigueur le 1er juillet 1987 qui a ouvert la voie à la réalisation d’un marché unique marque une nouvelle ère dans l’évolution du droit d’auteur au sein de l’Union européenne. Trente ans après l’adoption du traité de Rome, le contexte politique, légal et technologique a bien changé. De nouvelles technologies tels la télédiffusion par câble et par satellite ont favorisé l’exploitation internationale des œuvres.
Dans son livre vert sur le droit d’auteur et le défi technologique publié en 198836, la commission européenne identifie des problèmes qui requièrent une « action immédiate ». L’une d’elles ayant porté ses fruits quelques années plus tard est sans aucun doute l’adoption de la première directive dans le domaine du droit d’auteur, à savoir la directive concernant les
35 Voir l’arrêt usedSoft, analysé plus bas.
36 Livre vert sur le droit d’auteur et le défi technologique : problème de droit d’auteur appelant une
logiciels en 199137. On le sait, la protection des programmes d’ordinateur en tant qu’œuvre littéraire et artistique protégée par le droit d’auteur était une décision politique en vue d’encourager la compétitivité et le dynamisme de l’industrie du logiciel en Europe. C’est à juste titre qu’on peut faire la remarque selon laquelle le droit d’auteur a alors perdu de sa spécificité culturelle, mais gagné en importance politique38.C’est également dans le but de renforcer la
compétitivité de l’économie européenne que la directive sur les bases de données a été adoptée en 199639. D’autres directives dites de la « première génération » avaient pour but
d’améliorer le fonctionnement du marché intérieur. Il en va ainsi de la directive dite de « la location et le prêt »40 (1992), la directive dite « satellite/câble »41 (1993), de la directive relative à la durée42 (1993) et au droit de suite43 (2001). La plupart de ces directives sont des réactions face aux décisions de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) ayant admis des restrictions à la libre circulation des marchandises et des services, justifiées par des règles de droit d’auteur national44. La compétence45 de l’Union européenne était/est limitée par les
principes de subsidiarité46, de proportionnalité47 et l’art. 114 TFUE, constituant la base légale pour adopter des directives dans le domaine du droit d’auteur. Il n’est donc pas étonnant que l’approche de la Communauté européenne se soit révélée parcellaire et morcelée, réglementant soit une catégorie d’œuvres particulières48, soit un aspect du droit patrimonial49, 37 Dir. CEE n°91/250 du 14 mai 1991 sur la protection juridique des programmes d’ordinateur : JOCE 17 mai 1991, n° L 122, p. 4. Version consolidée, Dir. 2009/24/CE du 23 avril 2009. 38 Voir à ce sujet W.R. CORNISH, Copyright Across the Quarter‐Century, (1995) : IIC, 801‐12, p. 806. 39 Dir. CE n°96/9 du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données : JOCE 27 mars 1997, n° L 077, p. 20.
40
Dir. CEE n°92/100 du 19 nov. 1992, relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins
du droit d’auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle : JOCE 27 nov. 1992, n° L 346, p. 61.
Version consolidée, Dir. 2006/115/EC du 12 décembre 2006. 41 Dir. CEE n°93/83 du 27 sept. 1993, relative à la coordination de certaines règles du droit d’auteur et des droits voisins du droit d’auteur applicables à la radiodiffusion par satellite et à la retransmission par câble : JOCE 6 oct. 1993, n° L 248, p. 15. 42 Dir. CEE n°93/98 du 29 oct. 1993, relative à l’harmonisation de la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins : JOCE 24 nov. 1993, n° L 290, p. 9. Version consolidée, Dir. 2011/77/CE du 27 septembre 2011. 43 Dir. CEE n°2001/84 du 27 sept. 2001, relative au droit de suite au profit de l’auteur d’une œuvre d’art
originales : JOCE 22 juin 2001, n° L 167, p. 10. Malgré sa date tardive d’adoption, due à d’âpres
négociations, cette directive fait partie des directives de la « première génération ». 44
La directive relative à l’harmonisation de la durée de protection du droit d’auteur a pour origine
l’affaire EMI‐Electrola. Voir CJCE, C‐341/87, EMI‐Electrola v. Patricia, 1989, Rec. 79, et la directive dite de la « location et du prêt » a pour origine l’arrêt Warner Brothers, voir CJCE, C‐158/86 Warner Brothers v. Christiansen. 45 V.‐L. BENABOU, Droits d’auteur, droits voisins et droit communautaire, Thèse, Bruxelles 1997, p. 22‐ 25.
46 Principe de subsidiarité : règle directive en vertu de laquelle la Communauté n’agit – en dehors des domaines de compétence exclusive– que si et dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée ne peuvent être réalisés de manière suffisante par les Etats membres, tant au niveau central qu’à l’échelon régional ou local, et peuvent donc être mieux réalisés au niveau de l’Union. (Art. 5 TUE), G. CORNU. 47 Principe de proportionnalité : principe en vertu duquel l’action de la Communauté ne doit pas excéder ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs du traité de l’Union.
48 Telle la directive CEE n°91/250 du 14 mai 1991 sur la protection juridique des programmes d’ordinateur dite directive sur les « logiciels » et la directive CE n°96/9 du 11 mars 1996, dite sur les « bases de données ».
49 Telle la directive Dir. CEE n°92/100 du 19 nov. 1992 sur le « droit de prêt, location » ou la directive Dir. CEE n°2001/84 du 27 sept. 2001, dite sur le droit de « suite »
soit un mode d’exploitation des droits50, jusqu’à la directive du 22 mai 2001 sur la société de l’information51 (nommée ci‐après « directive InfoSoc »). La logique de la directive InfoSoc contraste fortement avec les précédentes puisque cette dernière ne se contente pas d’une harmonisation ponctuelle « verticale » de certains aspects du droit d’auteur, mais procède bien à une harmonisation « horizontale »52. Ainsi, la directive
InfoSoc s’applique indépendamment de la catégorie d’œuvre, ou du mode d’exploitation ou
d’utilisation d’une œuvre permettant de franchir un pas supplémentaire dans le processus d’harmonisation des législations nationales53. Ayant pour origine le livre vert datant de 199554, et destinée à incorporer les textes de droit international55, la directive InfoSoc a permis l’harmonisation des principaux droits exclusifs d’exploitation en droit d’auteur et pour les titulaires de droits voisins tout comme la protection légale des mesures techniques56. Sans véritable succès, la directive InfoSoc a également tenté d’harmoniser les exceptions, dont seulement celle prévue à l’art. 5.1 de la directive s’impose aux Etats membres, alors que les autres sont supplétives. En 2004, la directive relative au respect des droits de propriété intellectuelle57 a été adoptée, harmonisant de manière horizontale la mise en œuvre des droits de propriété intellectuelle, pour toutes les procédures de contrefaçon au droit d’auteur. Le processus d’harmonisation continue en ce que deux autres directives ont été adoptées, à savoir la directive sur les « œuvres orphelines » en 201258 dans le but d’« encourager la
numérisation des œuvres orphelines afin de faciliter l’accès au patrimoine culturel européen grâce aux bibliothèque numérique »59 et la directive sur « la gestion collective des droits d’auteurs et des droits voisins » en 201460, pour une « meilleure gouvernance et une plus grande transparence de la gestion du droit d’auteur et des droits voisins par les sociétés de
50
La directive sur la radiodiffusion par satellite et sur la retransmission par câble s’attachait par exemple à un mode d’exploitation particulier.
51 Dir. CE n°2001/29 du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des
droits voisins dans la société de l’information, JOCE 22 juin 2001, n° L 167, p. 10.
52 Au sens strict, on peut néanmoins considérer qu’une approche horizontale a déjà eu lieu dans le cadre de la directive relative à l’harmonisation de la durée, puisque cette durée de protection était harmonisée pour tout type d’œuvre protégés par les droits d’auteur et les droits voisins. De même la directive dite « location/prêt » a également permis l’harmonisation des droits voisins pour quatre catégories de titulaire de droits. Ces deux directives ne traitent cependant que d’aspects spécifiques. 53
C. COLIN, Vers un « droit d’utilisation » des œuvres ?, 2008, thèse, version non publiée, p. 97.
54 Livre vert de la commission européenne du 27 juillet 1995 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information : COM (95), 382 final.
55 Tel le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur (WCT) et le traité de l’OMPI sur les interprétations et
exécutions et les phonogrammes en droit européen (WPPT), adoptés à Genève le 20 décembre 1996.
56 Pour un commentaire de la directive InfoSoc voir, entre autre : U. LOEWENHEIM, Handbuch des
Urheberrechts, C. H. Beck München, 2010, § 54, G, p. 1041‐1044 ; M. WALTER, S. v. LEWINSKI, European Copyright law, a commentary, Oxford Univ. Press, 2010, n° 11 (Information Society Directive) ; S.
BECHTOLD, Directive 2001/29/EC – On the harmonization of certain aspects of copyright and related
rights in the information society (Information Society Directive), in Th. Dreier/P.B. Hugenholz [éd.], Concise European copyright law, Alphen aan den Rijn, Kluwer Law International, 2016, p. 421.
57
Dir. 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avr. 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, JO L 157 du 30 avr. 2004, p. 45 et L 195 du 2 juin 2004, p. 16 (rectificatif). 58
Directive n°2012/28 UE du 25 octobre 2012, « sur certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines », JOUE L.299 du 27 octobre 2012, p. 5.
59 F. POLLAUD‐DULIAN, p. 695. 60