• Aucun résultat trouvé

Styles d'interactions conjugales, socialisation relationnelle, réseau de sociabilité et problèmes d'intimité: Une approche sociologique de la dégradation de l'intimité conjugale

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Styles d'interactions conjugales, socialisation relationnelle, réseau de sociabilité et problèmes d'intimité: Une approche sociologique de la dégradation de l'intimité conjugale"

Copied!
17
0
0

Texte intégral

(1)

Article

Reference

Styles d'interactions conjugales, socialisation relationnelle, réseau de sociabilité et problèmes d'intimité: Une approche sociologique de la

dégradation de l'intimité conjugale

GIRARDIN KECIOUR, Myriam, et al .

Abstract

Cet article vise à dégager l'impact de plusieurs facteurs sur la dégradation de l'intimité conjugale, en partant d'un échantillon représentatif de couples résidant en Suisse, d'âges et de longévités différents. Le degré d'autonomie dans le couple, son ouverture, sa sexuation, la socialisation relationnelle dans la famille d'origine des conjoints, durant leur enfance ou adolescence, ainsi que l'intégration dans un réseau de sociabilité, influencent très significativement l'émergence de problèmes d'intimité. On en tire la conclusion qu'il est nécessaire de contextualiser le couple pour saisir, au moins en partie, la genèse de ses problèmes.

GIRARDIN KECIOUR, Myriam, et al . Styles d'interactions conjugales, socialisation relationnelle, réseau de sociabilité et problèmes d'intimité: Une approche sociologique de la dégradation de l'intimité conjugale. Sexologies , 2005, vol. XIV, no. 51, p. 25–40

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:87122

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

1 / 1

(2)

L’

intimité est considérée comme un des principaux fondements de la réussite conjugale (Sprecher, 1987;

Waring et Russel, 1980 ; Reiss et Lee, 1988 ; Thiérault, 1995; Berscheid et Reis, 1998), et comme un élément fondamen- tal du bien-être psychologique, répon- dant aux besoins d'estime de soi et de reconnaissance de l’identité propre (Diener, 1984; Reis, 1984; Thiérault, 1995;

Berscheid et Reis, 1998). La plupart des recherches traitant de l'intimité conju- gale se sont focalisées sur des dimensions spécifiques, telles que la communication ou la sexualité ; elles n’ont généralement pas cherché à voir la relation existant entre l’intimité et les grands modèles de fonctionnement conjugal ou familial.

Ainsi, alors que la prévalence des pro- blèmes d’intimité et leur importance pour la construction identitaire ont été démontrées, on ne sait presque rien sur la dynamique qui les associe aux styles d’interactions conjugales que la recherche a mis en avant durant les trente dernières années (Kellerhals, Troutot et Lazega, 1994 ; Olson, McCubbin, Barnes, Larsen, Muxen et Wilson, 1989 ; Widmer, Kelle- rhals et Levy, 2003). De même, bien qu’on ait souvent affirmé (Bott, 1957; Burger et Milardo, 1995 ; Widmer, 1999 et 2004) la nécessité de contextualiser l’intimité en considérant les effets de l’environnement

relationnel plus large dans lequel elle s’insère, on ne sait pratiquement rien quant aux effets du réseau de sociabilité du couple sur elle.

On cherchera ici à estimer, sur la base d’un échantillon représentatif, l’impact du fonctionnement conjugal et du réseau social sur l’intimité. On s’interrogera éga- lement sur les effets de la socialisation relationnelle. Pour ce faire, nous avons exploité les données de la grande enquête Stratification sociale, cohésion et conflits dans les familles contemporaines, par question- naire standardisé touchant les couples, mariés ou non, avec ou sans enfants, rési- dant en Suisse. L’échantillonnage était aléatoire, avec une stratification non pro- portionnelle, venant des trois régions lin- guistiques majeures suisses (franco- phone, allemande et italienne). Pour être inclus dans l’échantillon, les répondants – mariés ou non – devaient vivre ensemble depuis au moins un an ; ils devaient avoir au moins vingt ans, et pas plus de soixante-dix, et résider en Suisse (sans pour autant avoir nécessairement la nationalité suisse). Dans chacun des 1534 couples retenus, les deux conjoints ont été interviewés par téléphone. Une des- cription détaillée de l’échantillon et du dessin de recherche est présentée dans l’ouvrage de base sur cette recherche (Widmer, Kellerhals & Levy, 2003).

RÉSUMÉ : Cet article vise à dégager l’impact de plusieurs facteurs sur la dégradation de l’intimité conjugale, en partant d'un échantillon représentatif de couples résidant en Suisse, d’âges et de longévités différents.

Le degré d'autonomie dans le couple, son ouverture, sa sexuation, la socialisation relationnelle dans la famille d’origine des conjoints, durant leur enfance ou

adolescence, ainsi que l’intégration dans un réseau de sociabilité, influencent très significativement l’émergence de problèmes d’intimité. On en tire la conclusion qu’il est nécessaire de contextualiser le couple pour saisir, au moins en partie, la genèse de ses problèmes.

M. GIRARDIN KECIOUR, E. WIDMER, R. LÉVY, J. KELLERHALS

MOTS-CLÉS :

• Problèmes d’intimité

• Fonctionnement conjugal

• Socialisation

• Réseaux de sociabilité

• Suisse

Styles d’interactions conjugales, socialisation relationnelle,

réseau de sociabilité

et problèmes d’intimité : une approche sociologique de la dégradation

de l’intimité conjugale

Myriam Girardin Keciour, Eric Widmer, Jean Kellerhals, René Lévy : Centre Pavie, Universités de Lausanne et Genève.

(3)

Explications psycho- sociologiques des problèmes d’intimité

Un premier facteur dont on a souligné l’im- portance pour la genèse des problèmes conjugaux tient à la place accordée à l’in- dividu dans le couple. Certains couples donnent beaucoup d'importance à la simi- litude des valeurs, au partage des activi- tés, à la mise en commun de l'espace et du temps et au consensus. D'autres couples, au contraire, valorisent l'individu, son indépendance et sa spécificité. Le couple prend alors sens par l’individu qui le dépasse et lui accorde une légitimité condi- tionnelle. Deux conceptions de la cohésion interne du couple s’affrontent donc actuel- lement (Widmer, Kellerhals et Levy, 2003), l’une où le couple est au service du déve- loppement personnel, la seconde, où il est conçu comme un bien, une valeur, à recher- cher pour lui-même, ayant une certaine autonomie par rapport aux projets et orien- tations individuels, qu’il va surpasser. On sait peu de chose, actuellement, sur les pro- blèmes d’intimité associés à chacune de ces deux manières de penser la cohésion du couple.

En second lieu, diverses études (Reiss, 1971, Kantor et Lehr, 1975; Olson et al. 1989;

Widmer, Kellerhals et Levy, 2003) montrent que la manière dont les couples gèrent leur rapport à l'environnement est variable.

Certains couples ont tendance à rechercher les informations et contacts externes, qu'ils considèrent comme un enrichissement ; d'autres, au contraire, bâtissent leur fonc- tionnement sur le “quant à soi” et sur une relative méfiance par rapport à l'extérieur.

Quel impact ont ces deux manières de gérer les frontières externes du couple sur les problèmes d’intimité ? Dans une pre- mière perspective, on souligne que l’envi- ronnement offre aux conjoints des alter- natives à la relation conjugale (loisirs, métier passionnant, relations extraconju- gales, solides amitiés, etc.), comblant leur besoin d’intimité et affaiblissant du même coup l’intimité du couple (Levinger, 1980;

Oliker, 1989; Reid et Fine, 1992; Rubin, 1985; Reiss et Lee, 1988). Dans ce cas, la fermeture est considérée comme favorable à l’intimité car la protégeant des alterna- tives possibles. Mais on a émis également l’hypothèse que les couples ouverts échap- pent à un tête-à-tête étouffant ou stérili-

sant, et seraient donc moins menacés par des problèmes d'intimité.

Un troisième facteur parfois évoqué dans l’explication des problèmes d’intimité tient à la division des rôles et du pouvoir. On a avancé que la complémentarité plutôt que l’indifférenciation ou la “symétrie” des rôles au sein du couple est associée à une moindre prévalence des problèmes d’inti- mité (Lewis, 1973; Levinger, 1980; Brehm, 1985), essentiellement en rendant la com- pétition entre les conjoints moins sévère.

Dans cette perspective, on peut faire l’hy- pothèse que l'interdépendance relation- nelle, dimension centrale de l’intimité, est favorisée par la sexuation des rôles rela- tionnels, voire fonctionnels. D'un côté, elle répond aux besoins identitaires des conjoints et, de l'autre, elle stabilise la rela- tion en maintenant les partenaires dépen- dants l'un de l'autre, quand bien même cette dépendance est de nature inégalitaire.

Plusieurs études suggèrent néanmoins des résultats inverses: les conjoints qui tendent à remplir des rôles similaires au sein du couple – peu ou non sexués – semblent présenter moins de problèmes conjugaux que ceux qui s’inscrivent dans des rôles sexués (Ickes et Barnes, 1978; Houts, Robins et Huston, 1996). La sexuation des rôles et du pouvoir – parce qu'elle implique une certaine inégalité entre les conjoints – serait corrélée à des problèmes conjugaux plus importants, à une communication dans le couple plus difficile, à la perte de désir sexuel chez la femme, à une plus grande insatisfaction et, plus généralement, à la dégradation de l'intimité conjugale (Zammichieli, Gilroy et Sherman, 1988;

Tremblay, 1995 ; Fortin et Thiérault , 1995).

La question de savoir si la sexuation des rôles et du pouvoir dans le couple génère davantage de problèmes d'intimité que l'in- différenciation et l’égalité est donc ouverte.

On peut, d’une part, faire l’hypothèse qu'une régulation stricte des rapports conjugaux, axée sur le pouvoir et la rigi- dité, altère le lien amoureux, favorisant ainsi l'émergence de problèmes d'intimité.

D’autre part, on pourrait se demander si ce n'est pas l'interchangeabilité des rôles et l’emphase sur la négociation qui créent des problèmes d'intimité. En rendant les conjoints moins interdépendants, l'affai- blissement de la sexuation des rôles ne brise-t-elle pas leur relation intime ? Ou, au contraire, l’égalité au sein du couple n’est- elle pas une condition nécessaire du déve- loppement et du maintien de son intimité ?

Si l’on peut faire l’hypothèse générale que les problèmes conjugaux trouvent leur ori- gine dans le mode de fonctionnement du couple, on a également souligné que le contexte relationnel plus large de celui-ci est, lui aussi, significatif (Widmer, 2004).

En particulier, l’importance des styles d'at- tachement que les individus acquièrent dans leur famille d’origine, au cours de l'enfance, a été soulignée (Hazan et Sha- ver, 1987; Thiérault, 1995; Bartholomew, 1990; Mikulincer et Erev, 1991; Klohnen et Bera, 1998). Dépendants étroitement de la qualité des rapports que les individus entretiennent, enfants, avec leurs parents, ces styles d'attachement ont un impact sur la vie relationnelle et notamment sur les relations intimes des individus. Par exemple, les individus ayant acquis au cours de l'enfance un style d'attachement

“évitant” rencontrent des difficultés plus sérieuses à entretenir des relations amou- reuses satisfaisantes (Bartholomew, 1990 ; Klohnen et Bera, 1998). Autrement dit, la qualité des rapports qu'un individu entre- tient avec ses parents, lors de l'enfance, participe à construire une “aptitude à l'in- timité”. À ce propos, la présence d'un conflit conjugal récurrent dans le couple parental, durant l'enfance de l’individu, est associée à des difficultés de communi- cation avec son propre partenaire, à de la jalousie, à des problèmes d'infidélité (Amato et Rogers, 1997; Gottman, 1994;

Leonard et Roberts, 1998; Sanders, Halford et Behrens, 1999), et à une probabilité de rupture du couple sensiblement plus éle- vée (Faust et Mckibben, 1999). L’hypothèse d’un effet d’apprentissage de l’intimité au sein de la famille d’origine a donc reçu plu- sieurs confirmations empiriques sérieuses.

Une autre influence contextuelle, moins étudiée, tient à l’impact du réseau de socia- bilité sur la dynamique conjugale, dont on commence à discerner l’importance (Wid- mer, 2004). On a fait deux hypothèses à son propos (Widmer, Kellerhals et Levy, 2004).

D’abord, le réseau constitue un important réservoir de relations gratifiantes qui peu- vent combler les besoins d'intimité d'un individu que le lien conjugal ne satisfait plus et qui contribueraient au maintien de la relation conjugale (Oliker, 1989; Reid et fine, 1992; Rubin, 1985; Stein, Bush, Ross et Ward, 1992). On parle alors d’effet-tam- pon du réseau conjugal, qui permet de gérer l’effet des problèmes d’intimité sur la probabilité de survie du couple. Prager (1995), par exemple, souligne que les

- VOL. XIV, N°51

(4)

conjoints entretenant des relations ami- cales supportent davantage certains pro- blèmes d'intimité, comme le manque de communication, que ceux qui sont privés de tels liens. En second lieu, le réseau conjugal peut contribuer directement à l’in- timité conjugale en amenant au couple des ressources de diverses natures (psycholo- giques, matérielles, financières) rendant la communication plus aisée. Bien que nombre de chercheurs aient souligné la nécessité de contextualiser l’intimité conju- gale dans un ensemble plus large de rela- tions interpersonnelles, il n’existe qu’un nombre très limité d’études portant sur ces effets (Julien, Markman, Leveille, Char- trand et Begin, 1994; Widmer, Kellerhals et Levy, 2003).

L’effet positif du soutien social sur une variété de dimensions psychologiques a été amplement souligné (par exemple, Cohen and Wills, 1985). On notera, toute- fois, que les choses sont un peu différentes concernant les problèmes conjugaux. On a suggéré que l’effet de l’intégration dans des réseaux sur les problèmes conjugaux est curvilinéaire (Holman, 1981) : l’inté- gration dans un réseau d’une cohésion extrême serait aussi négative pour le couple que l’absence d’intégration. Cette hypothèse a été théorisée par le modèle de l’interférence (Johnson et Milardo, 1984;

Julien et al., 1994), qui avance que le réseau de sociabilité et la relation conjugale sont en compétition l’un avec l’autre. Le déve- loppement d’une relation intime canalise du temps et des énergies qui étaient inves- ties dans d’autres relations. Ce serait pour cette raison que les membres du réseau cherchent parfois à regagner de l’influence en interférant dans la relation intime. Dans cette perspective, un réseau où règne une forte cohésion peut ne pas faire tampon mais, au contraire, augmenter les pro- blèmes d’intimité du couple, ces problèmes étant une occasion pour les membres du

réseau d’intervenir d’autant plus dans la dynamique du couple.

Nous faisons l’hypothèse que le degré de fusion ou d’autonomie, d’ouverture ou de fermeture, de sexuation des rôles et du pouvoir dans le couple, ainsi que la socia- lisation dans la famille d’origine et l’inté- gration du couple dans un réseau de socia- bilité, exercent une influence décisive sur l’émergence des problèmes d’intimité. Bien que l’impact de certains de ces facteurs ait déjà été révélé (notamment l’effet de socia- lisation), on manque d’informations sur la plupart d’entre eux : les résultats obtenus sont parfois contradictoires, notamment quant à l’effet des dimensions de la dyna- mique interne au couple, peut-être parce que les bases empiriques sur lesquelles reposent nombre d’études sont sujettes à caution en raison de leur petite taille et la non-représentativité des échantillons.

Dimensions et mesures des problèmes d’intimité

Comment approcher empiriquement les problèmes d’intimité ? Cinq dimensions sont généralement retenues pour définir l’intimité conjugale : l’échange de confi- dences, l’expression libre du moi intime et l’écoute de l’autre par l’auto-révélation;

l'intensification des moments partagés et des échanges, notamment et surtout par la sexualité ; l'aplanissement des diffé- rences idéologiques, par l’homologie des valeurs, et la mise en rôles par le renforce- ment des interdépendances ; la construc- tion des frontières externes et l’émergence d’un “nous” par l’exclusivité (Lewis, 1973;

Levinger, 1980; Rubenstein et Shaver, 1982;

Reiss et Lee, 1988; Reis et Shaver, 1988; Pra- ger, 1995; Reis et Patrick, 1996). Dès lors, les problèmes d’intimité concernent des

manques importants dans le couple du point de vue de l’affection, la confiance, la similitude des valeurs, l'interdépendance et l’exclusivité. On a retenu sept indica- teurs se rapportant aux principales dimen- sions de l'intimité conjugale: le manque de communication, les violences physiques, les mésententes sexuelles, la déception sen- timentale, les rudesses sexuelles, les diffi- cultés à se faire au caractère de l'autre et les problèmes d'infidélité. Pour déceler la présence de problèmes conjugaux graves, on a posé la question suivante : "En ce qui concerne votre vie de couple, pourriez- vous me dire si vous avez rencontré dans le passé ou si vous vivez maintenant les difficultés que je vais vous citer, et si oui, si ces difficultés ont créé des disputes sérieuses ou conflits importants dans votre couple ?". Les modalités de réponse sont :

"oui, problème actuel", "oui, problème passé", et "non , pas de problème". Les indi- cateurs suivants ont été sélectionnés pour approcher les problèmes d’intimité : “un sérieux manque de communication (diffi- cultés à exprimer des sentiments, des émo- tions)" ; "des violences physiques contre vous" ; "des mésententes ou des problèmes dans les relations sexuelles" ; "une forte déception sentimentale, du désamour" ;

"des rudesses ou contraintes sexuelles contre vous" ; "d’importantes difficultés à se faire au caractère de l’autre, à sa per- sonnalité, ses rythmes" ; "des problèmes d’infidélité de votre conjoint(e)/compa- gnon(gne)". Les deux conjoints répondaient séparément à ces questions. Chacun d’entre eux précisait, pour chaque type de pro- blème, s’il le rencontrait actuellement dans son couple ou s’il l'avait rencontré dans le passé. Pour les besoins de l’analyse, on a rassemblé les problèmes survenus dans le passé et les problèmes actuels dans une même mesure. S’il l’on se centre sur les problèmes présents, les effectifs associés à certains types de problèmes, notamment Tableau 1 : Fréquences de divers problèmes d’intimité dans le parcours conjugal (en %).

Indicateurs de problèmes conjugaux Hommes Femmes Couples Association des réponses hommes et femmes (Cramer) Sérieux manque de communication,

difficultés à exprimer des sentiments, des émotions 43 46 62 0,19**

Des mésententes ou des problèmes dans les relations sexuelles 32 30 45 0,25**

D’importantes difficultés à se faire au caractère de l’autre,

à sa personnalité, ses rythmes 17 28 36 0,19**

Une forte déception sentimentale, du désamour 16 19 27 0,25**

Des problèmes d’infidélité de votre conjoint(e) 6 8 11 0,25**

Des rudesses ou contraintes sexuelles contre vous 4 5 6 0,33**

Des violences physiques contre vous 3 4 5 0,41**

(5)

l’infidélité et les rudesses sexuelles, sont trop faibles pour qu’une analyse statistique puisse être développée. Le tableau 1 pré- sente la fréquence d’apparition des diffé- rents problèmes d’intimité dans le parcours conjugal.

On voit qu’environ deux tiers des couples ont connu, dans leurs parcours, de sérieux problèmes de communication, alors qu’une moitié d’entre eux admet des mésententes dans les relations sexuelles et qu’environ un couple sur trois parle d’importantes dif- ficultés à se faire au caractère de l’autre et d’une déception sentimentale. Les pro- blèmes d’infidélité, de rudesse sexuelle et de violence sont par contre beaucoup moins souvent rapportés.

Une analyse des correspondances mul- tiples (Lebart, Morineau et Piron, 1997) révèle que ces problèmes, tant pour les mesures provenant des femmes que celles provenant des hommes, forment un conti- nuum sur les deux premiers axes factoriels (qui décrivent respectivement 37 % et 12 % de la variance), allant des problèmes d'in- timité légers (manque de communication, mésententes sexuelles, difficultés à se faire au caractère de l'autre, déception senti- mentale) à ceux plus extrêmes tels que les problèmes d'infidélité, les rudesses sexuelles et les violences physiques (voir figure 1).

Entre les facteurs 1 et 2 se dessine de manière particulièrement nette un conti- nuum sur lequel se positionnent – en fonction de leur gravité – les sept types de problèmes d'intimité considérés. En suivant les facteurs 1 et 2, de gauche à droite et de bas en haut, les problèmes d'intimité apparaissent dans l'ordre sui- vant :

- communication ; - personnalité ; - mésentente ; - déception ; - infidélité ; - violence/rudesse.

Les problèmes de violence physique et de rudesses sexuelles sont si proches sur les deux premiers facteurs qu'il est difficile de les distinguer. Cette analyse semble mettre en exergue un ordre d'apparition des pro- blèmes dans le couple. Elle semble indi- quer que la dégradation de l'intimité au sein du couple commence par un certain manque de communication. S'ensuivent des mésententes sexuelles et des difficultés à se faire au caractère du conjoint, qui engendrent dans certains cas une décep-

tion sentimentale. Celle-ci, s'intensifiant, aboutit parfois à des problèmes d'infidé- lité, voire à des violences (sexuelles et phy- siques).

Pour confirmer cette gradation des pro- blèmes d’intimité (autrement dit cette pré- sence de niveaux, voire “stades” dans la dégradation de l’intimité), nous avons recouru à l'échelle de Guttman, qui a pour but de tester l’ordonnancement d’un groupe d’indicateurs (McIver et Carmines, 1981). Les problèmes d’intimité suivent effectivement une échelle cumulative, puisque leur coefficient de scalabilité est supérieur à 0,60 et leur coefficient de repro- ductibilité est, tant pour les réponses des femmes que pour les réponses des hommes, supérieur à 0,90. Sur cette base, une échelle ordinale de type Guttman a été construite, qui donne à la femme, à l’homme ou au couple, la valeur corres- pondant au problème le plus “grave” qu’il ou elle a rencontré. Les scores couples ont été construits en privilégiant, en cas de per- ception différente de la situation entre les deux conjoints, l’avis de celui ou de celle qui admet le problème. La valeur 0 est don- née aux couples qui ont déclaré n’avoir connu aucun problème important durant leur parcours conjugal. La valeur 1 cor- respond au manque de communication, la valeur 2 aux difficultés à se faire au carac- tère de l'autre et aux mésententes sexuelles, la valeur 3 à la déception sentimentale, la valeur 4 à l'infidélité, et la valeur 5 à la vio- lence physique et sexuelle. Ainsi, nous obtenons une échelle ordonnée en six niveaux progressifs, de l’absence de pro- blèmes d’intimité (stade 0) aux violences physiques et sexuelles (niveau 5). La dis-

tribution des couples sur l'échelle est pré- sentée dans le tableau 2, qui distingue les scores basés sur les réponses des hommes, des femmes, et les scores-couple.

62 % des femmes, 57 % des hommes et 76 % des couples ont été confrontés au processus de dégradation de l'intimité conjugale. Cependant, en moyenne, peu

ont dépassé l'étape 2

“personnalité/mésententes” du proces- sus. Seuls 8 % des couples, 4 % des hommes et 6 % des femmes se situent à l'extrémité de l'échelle (étape 5). Une preuve supplémentaire de la scalabilité et de la fiabilité de notre indice tient au fait que le nombre moyen des problèmes d'intimité augmente très régulièrement en fonction de la position dans l’échelle. Ainsi, les couples qui ont rencontré au cours de leur vie conjugale des mésententes sexuelles déclarent, en moyenne, 3,1 pro- blèmes d'intimité, alors que ceux qui ont été confrontés à des problèmes de violence physique en déclarent 5,5.

Opérationalisation des facteurs explicatifs

Comment mesurer l’impact postulé des différents facteurs explicatifs ? Pour cer- ner l’effet des axes fusion-autonomie, ouverture-fermeture et de la sexuation des rôles et du pouvoir, on fait référence aux styles d’interactions conjugales (Wid- mer, Kellerhals et Levy, 2003 et 2004). Il s’agit d’une typologie construite par une analyse de classification hiérarchique ascendante, sous SPSS, utilisant la méthode de Ward, et la distance eucli-

- VOL. XIV, N°51

Figure 1 : Analyse des correspondances multiples des indicateurs des pro- blèmes d'intimité.

(6)

dienne au carré (Lebart, Morineau et Piron, 1997). Cinq styles ont été distin- gués.

Les couples de style “Parallèle” (17 %) se caractérisent par une forte sexuation des rôles domestiques et relationnels, de faibles scores de fusion et de forts scores de clô- ture. À l’opposé, les couples du style

“Compagnonnage” (24 %) se définissent par de forts scores de fusion et d’ouver- ture, alors que le degré de sexuation des rôles et du pouvoir est faible. Les couples ayant un style d’interactions “Bastion”

(16 %) présentent une forte tendance à la clôture, à la fusion et à la sexuation. De forts niveaux de fusion et de clôture carac- térisent les couples de style “Cocon”

(15 %). Contrairement aux couples de style

“Bastion”, ils présentent cependant une répartition relativement égalitaire et peu sexuée des tâches domestiques et des rôles relationnels. Enfin, les couples de style

“Association” (29 %) ont une fusion et une clôture peu prononcées ; ils présentent une division du pouvoir égalitaire et des rôles peu sexués.

Pour approcher la dimension de la socia- lisation, on a pris en compte deux indica- teurs très largement utilisés dans les recherches psycho-sociales sur la famille: la présence d’un divorce dans le couple parental et l’évaluation du climat familial durant l’enfance des conjoints. Le divorce parental ne concerne environ qu’un couple sur cinq. Avoir grandi dans un climat conflictuel est une expérience beaucoup plus répandue puisque près d’un couple sur deux inclut un conjoint ayant vécu son enfance dans un climat qu’il ou elle carac- térise de conflictuel. Si le fait d'avoir passé son enfance dans un climat familial conflic- tuel et le divorce parental sont corrélés (V de Cramer de 0,29** pour les femmes, et de 0,10** pour les hommes), leur associa- tion est loin d'être complète : bon nombre d'individus ont connu un climat familial conflictuel dans leur famille d’origine sans qu'il y ait eu divorce des parents. Plus inté- ressant peut-être, un nombre non négli- geable de personnes perçoit le climat fami- lial de leur enfance comme serein, alors que leurs parents ont divorcé. C'est le cas de 35 % des femmes et de 44 % des hommes dont les parents ont divorcé. Il faut donc distinguer la présence d'un divorce chez les parents du couple et la qualité du climat familial durant l'enfance des conjoints, deux dimensions qui ne se recouvrent que très imparfaitement. On a

donc distingué, pour le climat conjugal, les couples dans lesquels aucun des deux conjoints n’a vécu un mauvais climat fami- lial durant l’enfance et l’adolescence (57 %), des couples dans lesquels, respectivement, la femme (21 %), l’homme (14 %) ou les deux conjoints ont fait cette expérience (9 %). On a fait de même quand au divorce parental : dans 86 % des couples, il n’y a pas eu divorce des parents durant l’enfance ou l’adolescence ; 6% des couples ont vu les parents de la femme se séparer durant l’enfance ou l’adolescence de celle-ci ; c’est le cas de 7 % des couples pour les hommes

; dans 1 % des couples les parents des deux conjoints se sont séparés ou divorcés.

Les réseaux de sociabilité des couples ont été approchés à l’aide d’une typologie en six classes (Widmer, Kellerhals et Levy, 2003 et 2004). Le premier type de réseau,

“Lâche” (19 %), rassemble des couples dont le réseau est déficitaire, tant par le petit nombre de personnes qui le compose, l’ab- sence de contacts avec les amis et la parenté, que par la faiblesse du potentiel d’aide psychologique, domestique ou financière. Les couples aux réseaux “Ami- caux” (18 %) entretiennent des relations de proximité avec des amis pour l’essen- tiel, la parenté étant absente. Les interac- tions avec ceux-ci sont fréquentes, chaleu- reuses et maintenues par des échanges actifs. Les réseaux “Androcentriques”

(15 %) sont principalement constitués par les amis et la parenté de l’homme. Lors- qu'au contraire, ce sont les amis et la parenté de la femme qui composent le cercle de sociabilité du couple, on a affaire à des réseaux “Gynécentriques” (15 %).

Les réseaux “Denses” (24 %) se distinguent des autres par l'insertion conjointe des deux partenaires dans un réseau mixte d’amis et de parents, avec lesquels on inter- agit fréquemment, et sur lesquels on peut compter en cas de besoin, tant du point de vue de l’aide psychologique, domestique, que financière. Finalement, les réseaux

“Intrusifs” (9 %) partagent l’essentiel des caractéristiques des réseaux denses, tout en y ajoutant des tentatives de contrôle du couple par sa parenté.

Effets des facteurs explicatifs

Le tableau 3 présente une série de régres- sions ordinales (Kleinbaum et Klein, 2002) faites sous SPSS, qui prennent pour

variables dépendantes les échelles de dégradation de l’intimité associées aux réponses de la femme (A), de l’homme (B) et du couple (C). Les effets des styles d’in- teractions conjugales, de la socialisation et des types de réseaux sont estimés en contrôlant statistiquement les effets de diverses variables intervenant potentiel- lement, telles l’étendue des capitaux cul- turels à disposition (tel qu’indiqué par le niveau d’études de la femme), la phase de la vie familiale (Widmer, Kellerhals et Levy, 2003) et la structure familiale (intacte ou recomposée, avec ou sans mariage).

On considérera tour à tour les trois fac- teurs retenus : styles d’interactions conju- gales, socialisation relationnelle et réseaux de sociabilité.

Au vu des scores issus tant des réponses des femmes (modèle A), que celles des hommes (modèle B) ou encore des couples (modèle C), la dégradation de l’intimité est très sensible au style d’interactions conjugales. Les styles “Compagnonnage”,

“Bastion” et “Cocon” sont très significati- vement moins avancés dans le processus de dégradation de l’intimité que le style

“Association”, choisi comme catégorie de référence. Le style “Parallèle” ne se dis- tingue pas du style “Association”, la dégra- dation de l’intimité étant avancée dans les deux cas. Les couples de style “Compa- gnonnage” présentent, pour les scores

“femmes” et les scores “couples”, la pro- babilité la plus faible de dégradation de l’intimité. Le climat familial durant l’en- fance ou l’adolescence des conjoints exerce un effet significatif sur la dégradation de l’intimité. Les couples dont chacun des conjoints a vécu dans une atmosphère familiale conflictuelle ont une probabilité deux fois plus forte de connaître une dégra- dation de leur intimité que les couples dans lesquels aucun conjoint n’a vécu une telle situation. Un tel climat conjugal dégradé du côté de la femme a des effets similaires.

En revanche, du côté de l’homme, il a des effets beaucoup moins forts. En résumé, le mauvais climat familial pendant l’enfance des conjoints est un facteur important, bien que le couple semble plus sensible au cli- mat familial du côté de la femme que de l’homme. Par contre, la présence d’un divorce dans les familles d’origine n’a aucun effet en soi. L’hypothèse d’une trans- mission intergénérationnelle de la capa- cité à gérer les problèmes d’intimité, au- delà même de la famille nucléaire, est donc confirmée : elle passe par le climat fami-

(7)

lial tel qu’il s’est développé à moyen ou long terme, bien davantage que par la rup- ture brutale occasionnée par le divorce ou la séparation. La différence entre hommes et femmes tient-elle à la plus grande cen- tralité des femmes, en moyenne, dans la vie quotidienne, à la plus grande efficacité de leur gestion des problèmes ou est-elle due à d’autres raisons ? On devra encore répondre à cette question.

La prise en compte du réseau de sociabilité produit, elle aussi, des résultats significa- tifs. On observe dans le tableau 3 que les couples dont le réseau est “Dense” pré- sentent significativement moins de dégra- dation de l'intimité que les couples au réseau “Lâche”, que l’on tienne compte des scores des hommes, des femmes ou des couples. Les réseaux gynécentriques ont un effet positif modéré (significatif à

< 0,05), qui passe essentiellement par les scores féminins. Quant aux autres types de réseaux, “Androcentriques”, “Amicaux”

et “Intrusifs”, ils ne se distinguent pas significativement des réseaux “Lâches”, du point de vue de leurs scores de dégra- dation de l’intimité. Rappelons finalement que ces différents effets ont été estimés en contrôlant statistiquement l’effet de diverses variables associées au statut social et au parcours de vie. De ce fait, on ne peut imputer les résultats à la distribution dif- férentielle des styles d’interactions ou des types de réseaux de sociabilité à travers la structure sociale ou le parcours de vie. Les problèmes d’intimité sont plus nombreux quand les ressources culturelles sont fortes.

On remarque également que la présence d’enfants dans le ménage est associée à un surcroît de problèmes, un résultat corro- boré par les recherches portant sur la satis- faction conjugale (par exemple, Aldous, 1996).

Discussion

Le style d’interactions conjugales est un facteur-clé du processus de dégradation de l'intimité. Certains styles d’interactions contribuent à l'érosion de l’intimité alors que d'autres favorisent son maintien. Les couples dont le style d’interactions repose sur l’autonomie présentent des problèmes plus graves, en moyenne, que les couples fondés sur des attitudes plus fusionnelles.

La recherche de similitudes entre les conjoints, le partage du temps et de l'es- pace ainsi que la pratique d'activités com-

- VOL. XIV, N°51

Tableau 3 : Régression ordinale de l’échelle de dégradation de l’intimité sur les facteurs explicatifs psycho-sociologiques et sur les variables de contrôle.

Rapports des chances et coefficients de significativité.

A) Femmes B) Hommes C) Couples Problèmes d’intimité

0) Pas de problème 0,36** 0,44** 0,17**

1) Communication 0,64** 0,84 0,34**

2) Personnalité/mésententes sexuelles 2,43** 3,17** 1,48*

3) Déception sentimentale 5,71** 9,91** 4,33**

4) Infidélité 10,87** 17,56** 9,02**

5) Violence physique – – –

Styles d’interactions conjugales

Parallèle 1,00 0,69* 0,82

Compagnonnage 0,40** 0,44** 0,39**

Bastion 0,51** 0,38** 0,47**

Cocon 0,56** 0,48** 0,50**

Association – – –

Mauvais climat dans famille d’origine

Aucun – – –

Mauvais climat famille de la femme 1,60** 1,23 1,50**

Mauvais climat famille de l’homme 1,00 1,63* 1,18

Mauvais climat des deux côtés 1,80** 1,96* 1,76**

Divorces dans famille d’origine (parents des conjoints)

Aucun divorce -- -- –

Divorce parents de la femme 1,28 1,38 1,41

Divorce parents de l’homme 1,22 1,39 1,33

Divorce des deux côtés 0,89 2,45 2,47

Types de réseaux de sociabilité

Amicaux 0,92 1,02 0,90

Androcentriques 1,00 0,80 0,90

Gynécentriques 0,71* 0,86 0,67*

Denses 0,61** 0,76* 0,61**

Intrusifs 0,97 0,91 0,86

Lâches – – –

Variables de contrôle

Niveau de formation de la femme

Faible 1,03 0,86 1,03

Moyen -- -- --

Élevé 1,37* 1,37* 1,51**

Phases de la vie familiale

Pré-enfant 0,64* 0,85 0,86

Préscolaire 0,80 0,90 0,86

Scolaire – – –

Post-scolaire 0,96 1,11 1,10

Post-enfant 1,17 0,91 1,17

Couples sans enfant (a) 0,57* 0,79 0,67

Statut matrimonial

Cohabitant 1,38 1,30 1,19

Marié – – –

Structure familiale

Famille recomposée 0,77 0,87 0,81

Famille non recomposée – – –

Qualité du modèle (χ2) 133** 133** 134**

DF 24 24 24

(a) La distinction entre couples pré-enfant et couples sans enfant est fixé à partir de l’âge de la femme : si celle-ci a plus de 36 ans, le couple est dit " sans enfant ". Cette limite a été choisie en tenant compte des statistiques officielles sur la fécondité en Suisse, montrant que les premières naissances après cet âge sont extrêmement rares (Widmer, Kellerhals et Levy, 2003).

(8)

munes – prônés dans les unions fusion- nelles – renforcent l'intimité conjugale. De même, les couples fermés ont davantage de problèmes d'intimité que les couples ouverts. Le contexte, en offrant aux conjoints des sujets variés de discussion et en enrichissant leurs échanges, renforce l'intimité conjugale, si tant est que ces contacts soient rapportés au couple, comme dans le cas du style “Compa- gnonnage”, et non à l’individu. L’hypo- thèse avancée par certains auteurs (Levin- ger, 1980; Oliker, 1989; Reid et fine, 1992;

Rubin, 1985; Reiss et Lee, 1988) affirmant que le repli sur soi favorise l’intimité conju- gale parce qu'il préserve la relation intime des tentations extérieures (relations ami- cales, extra-conjugales, travail ou hobby passionnant) est infirmée. La clôture inten- sifie l'effet négatif de l'autonomie sur la relation intime. En conséquence, les couples survalorisant l’autonomie indivi- duelle et le tête-à-tête sont davantage confrontés au processus de dégradation de l'intimité conjugale.

La sexuation des rôles et du pouvoir, caractéristique de certains styles d’inter- actions, engendre davantage de pro- blèmes d'intimité qu'un mode de régula- tion plus égalitaire. Ces résultats confirment ceux qui ont été obtenus sur des populations cliniques, et montrent que l’inégalité dans le couple rend sa dynamique plus difficile (Houts et al., 1996; Tremblay, 1995 ; Fortin et Thiérault, 1995 ; Johnson et Ferraro, 2000 ; Renzetti , 1992). Cependant, la relative faiblesse de l’impact de cette dimension pourrait être expliquée par le fait que les situations inégalitaires sont plus facilement accep- tables quand elles sont associées à une cohésion de type fusionnel. On observe en effet dans notre étude que la sexuation tend à accentuer l'impact négatif de l'au- tonomie sur la relation intime : les couples à la fois sexués et autonomes connaissent en moyenne davantage de problèmes d'in- timité que n’importe quels autres couples.

Quant aux couples sexués et fusionnels (“Bastion”), ils sont nettement moins confrontés que les couples de style “Paral- lèle” au processus de dégradation de l'in- timité.

La fusion conjugale et, dans une moindre mesure, l'égalité, sont donc nécessaires au maintien de l'intimité conjugale. Les fonc- tionnements conjugaux avec une forte composante d’autonomie individuelle, en survalorisant la singularité de chacun,

encouragent une différence que les conjoints perçoivent souvent, sans doute, comme enrichissante, mais qu'ils ne sont pas en mesure, dans bien des cas, de cana- liser ou de gérer de manière satisfaisante (Widmer, Kellerhals et Levy, 2003 ; Wid- mer, Kellerhals et Levy, 2004). La quête de soi n'équivaut-elle pas en effet parfois à

“exister sans avoir besoin de l'autre” ? Ainsi, s'affirmer, marquer son unicité et son autonomie, valeurs sociales phares actuellement, ne s’accompagne-t-il pas d’une distanciation nécessaire de l’autre et, ainsi, d’une négligence de l'intimité conjugale ? L'avenir du couple se joue dans sa capacité à préserver le lien conju- gal, en canalisant les revendications auto- nomistes des conjoints tout en respectant et valorisant l'identité de chacun. Est-ce la quadrature du cercle? Comme nos ana- lyses le révèlent, certains couples – de style

“Compagnonnage” – parviennent à rele- ver ce défi en alliant la fusion, l'ouverture et une faible sexuation des rôles et du pou- voir.

L’hypothèse de la socialisation est égale- ment confirmée. On observe, en effet, que l’union de deux conjoints ayant vécu dans un climat familial difficile se distingue par une forte dégradation de l’intimité conju- gale. Les femmes sont plus sensibles que les hommes à l'atmosphère familiale de leur enfance. Par contre, le divorce des parents n’est que faiblement corrélé à l’émergence de problèmes d’intimité dans le couple. Ainsi, le divorce, acte juridique, ne recouvre qu’imparfaitement les dimen- sions relationnelles du conflit conjugal. Son impact propre, dégagé de celui du climat relationnel dans la famille d’origine, est nul par conséquent.

Finalement, l'hypothèse d’un effet du contexte relationnel large, dépassant le couple, sur le processus de dégradation de l’intimité conjugale, est, elle aussi, confir- mée. Les couples dont le réseau est dense profitent d’une insertion sociale “équili- brée” de plusieurs points de vue : les deux conjoints sont également intégrés dans le réseau ; les amis et la parenté y sont éga- lement présents ; l’investissement du réseau dans le couple, bien que fort, ne viole pas les frontières de ce dernier par des tentatives d’intrusion. Cette constella- tion est favorable à l’intimité conjugale, sans doute parce qu’elle empêche les pro- blèmes d’émerger en fournissant au couple les ressources psychologiques, relation- nelles et matérielles, qui rendent la vie

conjugale plus aisée. Les réseaux déséqui- librés, parce qu’unilatéraux ou manquant de la composante “famille”, ou encore n’ac- cordant pas assez d’importance au respect des frontières du couple, sont inefficaces à lutter contre la dégradation de l’intimité conjugale, voire l’amplifient. Soulignons cependant que le cas le plus négatif est celui de l’absence d’affiliation sociale (réseaux lâches), situation dans laquelle le couple se retrouve seul face à lui-même, sans l’appui d’un réseau de sociabilité, pour gérer ses problèmes, trouver des solu- tions. Dans tous les cas, la dégradation de l’intimité conjugale n’est pas seulement l’affaire du couple, mais plus généralement celle de son réseau de sociabilité, une constatation essentielle à notre sens, qui pourrait nourrir les approches thérapeu- tiques.

Conclusion

Il faut noter certaines des limites de cette étude. L'indice de Guttman utilisé com- porte seulement 7 indicateurs. On pour- rait, en se basant sur les dimensions fon- damentales de l'intimité conjugale – comme la fusion, l'amour, l'interdépen- dance, l'exclusivité et la confiance – mul- tiplier et varier les indicateurs afin d'obte- nir un instrument d'analyse plus précis. À partir de là, il serait possible de construire une typologie des “relations intimes pro- blématiques”. Une telle typologie nous per- mettrait de mettre en évidence des facteurs qui sont davantage associés à des types de relations intimes problématiques que d'autres. De plus, nous nous sommes heur- tés, dans cette étude, à l’impossibilité de mesurer la dégradation de l’intimité de manière séquentielle : seule une étude lon- gitudinale – avec des mesures répétées dans le temps de l'impact des structures conjugales sur la relation intime – pourrait éviter ce biais.

RÉFÉRENCES

- Aldous J. (1996) Family careers : Rethin- king the developmental perspective.Thousand Oaks, CA: Sage Publications.

- Amato P.R., Rogers S.J. (1997) A longitu- dinal study of marital problems and subsequent divorce.Journal of Marriage and the Family, 59 : 612-29.

- Bartholomew K. (1990) Avoidance of inti-

(9)

macy: An attachment perspective.Journal of Social and Personal Relationships, 7 : 147- 78.

- Berscheid E., Reis, H.T. (1998) Attraction and close relationships.In : D.T. Gilbert, S.T.

Fiske, G. Lindzey (Eds), The Handbook of Social Psychology(4th ed., pp.193-281), 2, New York: Oxford University Press.

- Bott E. (1957) Family and social networks.

London: Tavistock.

- Brehm, S.S. (1985) Intimate relationships.

New York: Random House.

- Burger E., Milardo R.M. (1995) Marital interdependence and social networks.Journal of Social and Personal Relationships, 12 (3) : 403-15.

- Cohen S., Wills T.A. (1985) Stress, social support and the buffering hypothesis.Psy- chological Bulletin, 98 (2) : 210-357.

- Diener E. (1984) Subjective well-being.Psy- chological Bulletin, 95 : 542-75.

- Faust K.A., McKibben J.N. (1999) Marital dissolution: Divorce, separation, annulement, and widowhood.In : S. Sussman, S. K. Stein- metz, G.W. Peterson (Eds), Handbook of Marriage and the Family(pp. 475-499). New York: Plenum Press.

- Fortin N., Thiérault J. (1995) Intimité et satisfaction sexuelle.Revue sexologique, 3 (1), 37-58.

- Gottman J.M. (1994) What predicts divorce?

The relationship between marital processes and marital outcomes.Hillsdale, NJ: Lawrence Erlbaum.

- Hazan C., Shaver P.R. (1987) Roman love concept as an attachment process.Journal of Personality and Social Psychology, 52 : 511- 24.

- Holman T.B. (1981) The influence of com- munity involvement on marital quality.Jour- nal of Marriage and the Family, 143 (1), 43- 149.

- Houts R.M., Robins E., Huston T.L. (1996) Compatibility and the development of prema- rital relationships.Journal of Marriage and the Family, 58 : 7-20.

- Ickes W., Barnes R.D. (1978) Boys and girls together and alienated: On enacting stereoty- ped sex roles in mixed sex dyads.Journal of Personality and Social Psychology, 36 : 669- 83.

- Johnson M.J., Milardo R.M. (1984) Net- work interference in pair relationships: A social psychological recasting of Slater’s theory of social regression.Journal of Marriage and the Family, 46 (4): 893-99.

- Johnson M.P., Ferraro K.J. (2000) Research on domestic violence in the 1990s: Making dis- tinctions. Journal of Marriage and the

Family, 62 : 948-63.

- Julien D., Markman H.J., Leveille S., Char- trand E., Begin J. (1994) Networks’support and interference with regard to marriage : Dis- closure of marital problems to confidants.Jour- nal of Family Psychology, 8 : 16-31.

- Kantor D., Lehr W. (1975) Inside the family : Toward a theory of family process.San Fran- cisco, Jossey-Bass.

- Kellerhals J., Troutot P.-Y., Lazega E. (1994) Microsociologie de la famille[2eéd.] Paris:

Presses universitaires de France, collection

“Que sais-je?”.

- Kellerhals J., Perrin J.-F., Steinauer-Cres- son G., Vonèche L., Wirth G. (1982) Mariages au quotidien. Inégalités sociales, ten- sions culturelles et organisation familiale.Lau- sanne: Editions Favre.

- Kleinbaum D.G., Klein M. (2002) Logistic regression. A self learning text.Berlin, New York: Springer Verlag.

- Klohnen E.C., Bera S.J. (1998) Behavioral and experiental patterns of avoidantly and secu- rely attached women across adulthood: A 30- year longitudinal perspective.Journal of Per- sonality and Social Psychology, 74 (1) : 211-23.

- Lebart L., Morineau A., Piron M. (1997) Statistique exploratoire multidimensionnelle.

Paris: Dunod.

- Leonard K.E., Roberts L.J. (1998) Marital agression, quality, and stability in the first year of marriage: Findings from the Buffalo New- lywed Study.In : T. N. Bradbury (Ed.), The developmental course of marital dysfonction (pp. 44-73). New York: Cambridge Uni- versity Press.

- Levinger G. (1980) Toward the analysis of close relationships.Journal of Experimental Social Psychology, 16 : 510-44.

- Lewis R.A. (1973) A longitudinal test of a developmental framework for premarital dya- dic interaction.Journal of Marriage and the Family, 35 : 16-26.

- McIver J., Carmines E. (1981) Unidimen- sional Scaling.Beverly Hills: Sage Publica- tions.

- Mikulincer M., Erev I. (1991) Attachment style and the structure of romantic love.British Journal of Social Psychology, 30 : 273-91.

- Oliker S.J. (1989) Best friends and marriage.

Berkeley: University of California Press.

- Olson D., McCubbin H., Barnes H., Lar- sen A., Muxen M., Wilson M. (1989) Fami- lies: What makes them work?[2eéd.]. Beverly Hills, CA: Sage Publications.

- Prager J.K. (1995) The Psychology of Inti- macy.New York: Guiford Press.

- Reid H.M., Fine G.A. (1992) Self-disclosure

in men's friendships.In : P.M. Nardi (Ed.), Men's Friendships (pp. 132-152). Newbury Park, CA: Sage.

- Reis H.T. (1984) Social interaction and well- being.In : S. Duck (Ed.), Personal relation- ships 5: Repairing personal relationships (pp. 21-45). London: Academic Press.

- Reis H.T., Patrick B.C. (1996) Attachment and intimacy: Component processes.In : E.T.

Higgins & A. Kruglanski (Eds.), Social psy- chology: Handbook of basic principles (pp.

523- 63). New York: Guilford.

- Reis H.T., Shaver P. (1988) Intimacy as an interpersonal process.In : S.W. Duck (Ed.), Handbook of personal relationships(pp. 367- 89). Chichester, England: Wiley.

- Reiss D. (1971) Varieties of consensual expe- rience.Family process, 10, 1-35.

- Reiss I.L., Lee G.R. (1988) Family systems in America.New York: Holt, Rinehart and Winston, Inc.

- Renzetti C.M. (1992) Violent betrayal: Part- ner abuse in lesbian relationships.Thousand Oaks, CA: Sage.

- Rubenstein C.M., Shaver P. (1982) In search of intimacy.New York: Delacorte press.

- Rubin L. (1985) Just friends: The role of friendship in our lives.New York: Harper &

Row.

Sanders M.R., Halford W.K., Behrens B.C.

(1999) Parental divorce and premarital couple communication.Journal of Family psycho- logy, 13, 60-74.

- Sprecher S. (1987) The effects of self-disclo- sure given and received on affection for an inti- mate partner and stability of the relationship.

Journal of Social and Personal Relation- ships, 4, 115-28.

- Stein C.H., Bush E.G., Ross R.R., Ward M. (1992) Mine, yours and ours: A configural analysis of the networks of married couples in relation to marital satisfaction and individual well-being.Journal of Social and Personal Relationships, 9 : 365-83.

- Thiérault J. (1995) Réflexion sur la place de l'intimité dans la relation érotique et amou- reuse. Revue sexologique, 3 (1) : 59-79.

- Tremblay S. (1995) La différence de désir dans un couple: un problème d'intimité ou de pouvoir ?Revue sexologique, 3 (1), 95-112.

- Waring E.M., Russel L. (1980) Family struc- ture, marital adjustment, and intimacy in patients in referred to a consultation-liaison service.General Hospital Psychiatry, 3 : 198- 203.

- Widmer E. (1999) Family contexts as cogni- tive networks : A structural approach of family relationships.Personal Relationships, 6 : 487-503.

- VOL. XIV, N°51

(10)

- Widmer E. (2004) Couples and their net- works.In : M. Richards, J. Scott, J. Treas (Eds). Blackwell Companion to the Socio- logy of Families (pp. 356-373). Oxford:

Blackwell publisher.

- Widmer E., Kellerhals J., Levy R. (2004a) Quelle pluralisation des relations familiales ? Conflits, styles d’interactions conjugales et milieu social.Revue française de Sociolo- gie, 45 (1), 37-68.

- Widmer E., Kellerhals J., Levy R. (2004b) Types of conjugal networks, conjugal conflict and conjugal quality.European Sociological Review, 20 (1) : 63-77.

- Widmer E., Kellerhals J., Levy R. (2003) Couples contemporains: Cohésion, régulation et conflits. Une enquête sociologique.Zürich:

Seismo.

- Zammichieli M.E., Gilroy F.D., Sherman M.F. (1988) Relation between sex-role orienta- tion and marital satisfaction.Personality and Social Psychology Bulletin, 14 : 747-54.

Myriam Girardin Keciour Centre interfacultaire de gérontologie,

Université de Genève.

Route de Mon-Idée 59 1226 Thônex (Genève) Suisse

<myriam.girardin@cig.unige.ch>

Eric Widmer Centre Pavie Université de Lausanne,

Bâtiment Provence 1015 Lausanne Suisse

<eric.widmer@pavie.unil.ch>

René Levy Centre Pavie Université de Lausanne,

Bâtiment Provence 1015 Lausanne Suisse

<rene.levy@ias.unil.ch>

Jean Kellerhals Département de Sociologie Université de Genève Bd du Pont-d’Arve 40 1211 Genève 4 Suisse

<Jean.kellerhals@socio.unige.ch>

Programme de la journée organisée par la Société Francophone de Dermatologie

Psychosomatique : Être, paraître, apparaître

LE SAMEDI 17 SEPTEMBRE 2005, À L’AUDITORIUM DE L'HÔPITAL EUROPÉEN GEORGES POMPIDOU, 20, RUE LEBLANC, 75015 PARIS.

Des cas cliniques présentés par des dermatologues et un chirurgien plasticien alterneront avec les trois conférences suivantes :

Quand l’habit fait le moine : réflexions sur la surface et la profondeur, Éric Fiat (philosophe) ;

Mal dans sa peau : traces, biffures, ruptures, David Le Breton (sociologue) ;

Apparence et intériorité dans la clinique et l’esthétique, Simone Korff-Sausse (psychanalyste, SPP).

Inscription : chèque de 60 à l'ordre de la SFDPS (50 pour les membres de la SFDPS), à adresser avec vos coordonnées à : Mme Van Vaeck, 35 rue des Baconnets,

92160 Antony.

Informations au 01 56 09 33 71 ou en écrivant à : <pascale.van-vaeck@hop.egp.aphp.fr>

(11)

I

ntimacy is considered to be fundamen- tal to a successful marriage (Sprecher, 1987 ; Waring & Russel, 1980 ; Reiss &

Lee, 1988 ; Thiérault, 1995 ; Berscheid &

Reis, 1998), and is an important element in psychological well-being, meeting the needs of self-esteem and recognition of one’s own identity (Diener, 1984; Reis, 1984; Thiérault, 1995 ; Berscheid & Reis, 1998). The larger majority of researchers treat marital inti- macy by focusing on specific dimensions, such as those of communication or sexua- lity. They do not generally look at the exis- ting relationship between intimacy and the major models of family or conjugal func- tioning. Furthermore, while the prevalence of problems of intimacy and their impor- tance in identity building have been demonstrated, almost nothing is known about the dynamic which associates it with the styles of conjugal interaction which

research has put forward during the last thirty years (Kellerhals, Troutot & Lazega, 1994 ; Olson, McCubbin, Barnes, Larsen, Muxen & Wilson, 1989 ; Widmer, Kellerhals

& Levy, 2003). Similarly, although the need to contextualise intimacy is often stated when considering the effects of the wider relational environment into which it is inte- grated (Bott, 1957; Burger & Milardo, 1995;

Widmer, 1999 & 2004), almost nothing is known about the effects the conjugal net- work of the couple have on it.

On the basis of a representative sample, this paper attempts to measure the impact of conjugal functioning and the conjugal network on intimacy. Similarly, the effects of socialisation will be examined. In order to do this the authors used the data in the

“Social stratification, cohesion, and conflict in contemporary families” research. The sampling was random and carried out in ABSTRACT : This article aims to clarify the

impact of various factors on problems of conjugal intimacy by using a representative sample of couples of all ages and all marital durations resident in Switzerland. The degree of autonomy enjoyed by the couples, their level of openness, their sexuation, the socialisation in the family of origin of the husband and wife during their childhood and adolescence, as well as integration in the conjugal network, have a significant impact on the emergence of problems of intimacy.

M. GIRARDIN KECIOUR, E. WIDMER, R. LÉVY, J. KELLERHALS

KEYWORDS :

• Problems of intimacy

• Conjugal functioning

• Socialisation

• Conjugal networks

• Switzerland

Styles of conjugal

interaction, socialisation, conjugal network

and problems of intimacy:

a sociological approach to problems of conjugal intimacy

- VOL. XIV, N°51

Myriam Girardin Keciouris assistant of research at the Center for Interdisciplinary Gerontology (CIG) of the University of Geneva. Her interests are in mixed couples, conjugal relationships and the quality of life of the oldest old.

Eric Widmeris associate professor of sociology, at the University of Lausanne, with an appointment at the Center for Life course and lifestyle studies (Pavie). His long-term interests include family relations, life course research, social norms, and social networks.

Jean Kellerhalsis full professor of sociology at the University of Geneva. He has contributed to various dimensions of sociological family research, including conjugal and family functioning, educational strategies within the family, kinship solidarity and distributive justice in small groups.

René Levyis full professor of sociology at the University of Lausanne. He is the direc- tor of the Center for Life course and lifestyle studies (Pavie).

He has revisited various aspects of life in other research areas, especially stratifica- tion, mobility, and family dynamics, in the light of the life course. The relationship bet- ween institutional structuration and life course trajectories has been one of his major research interests.

(12)

the three major linguistic regions of Swit- zerland (Swiss French, German and Italian).

In order to be included in the sample, the respondents – married or otherwise – had to have been living together for at least one year. They had to be at least twenty, and not more than seventy years of age, and be resident in Switzerland (without neces- sarily having Swiss nationality). They were either married or cohabiting, with or without children. In each of the 1534 qualifying couples, the husband and wife were inter- viewed by telephone. A detailed descrip- tion of the sample and the design of the research is presented in the foundational work for this study (Widmer, Kellerhals &

Levy, 2003).

Psycho-sociological explanations of the problems

of intimacy

An initial factor, whose importance in origi- nating conjugal problems is to be underli- ned, is the place given to individuals by the couple. Some partners place a great deal of importance on the similarity between their values, on sharing activities, on the com- mon usage of space and time, and on consensus. In contrast, other couples value individuality, the partners’ independence and uniqueness. So the couple gains mea- ning and identity thanks to the individual, which both surpasses it and confers a conditional legitimacy on it. In reality, two conceptions of internal cohesion between couples confront each other (Widmer, Kel- lerhals & Levy, 2003), one in which the couple serves personal development, the second where it is conceived as a good, a value, a quest for itself, having a certain autonomy in relation to individual projects and directions, which it will surpass. At pre- sent little is known about the problems of intimacy associated with each of these two modes of thinking about cohesion between couples.

Secondly, various studies (Reiss, 1971, Kan- tor & Lehr, 1975 ; Olson & al. 1989 ; Wid- mer, Kellerhals & Levy, 2003) show that the manner with which couples manage their relationship with the environment varies.

Some couples tend to look for external information and contacts as they consider these to be enriching. In contrast, others build their functioning on a relative mistrust

and suspicion of relationships with the external world. What impact do these two modes of managing the external boundaries of the couple have on problems of inti- macy ? From a primary perspective, it is underlined that the environment offers the partners alternatives to the conjugal rela- tionship (hobbies, interesting work, extra- marital relationships, good friendships, etc.), both making up for their lack for intimacy and at the same time weakening the ties of intimacy between the couple (Levinger, 1980 ; Oliker, 1989 ; Reid & Fine, 1992 ; Rubin, 1985 ; Reiss & Lee, 1988). In this case the closure is considered to favour intimacy because it protects it from alter- native possibilities. But equally it can be hypothesised that the open couples avoid stifling or sterile tête à têtes, and so will suf- fer fewer problems of intimacy.

A third factor sometimes used to explain the problems of intimacy concerns the divi- sion of roles and of power. It has been pro- posed that complementarity rather than undifferentiation or “symmetry” between roles within the couple is associated with a lower incidence of problems of intimacy (Lewis, 1973; Levinger, 1980; Brehm, 1985), essentially making competition between the husband and wife less severe. From this perspective, the hypothesis that ratio- nal interdependence, one of the core dimen- sion in intimacy, is favoured by the sexua- tion of relational roles, even functional ones, can be put forward. On the one hand, it answers the need for the husband and wife to have identity, and on the other, it esta- blishes the relationship and keeps the part- ners dependent upon each other, even if this dependence is unequal in nature.

Nevertheless, results in several studies sug- gest the opposite : the husband and wife tending to fulfil similar roles within the couple – a little or not gendered – seems to pre- sent fewer conjugal problems than those fitting gendered roles (Ickes & Barnes, 1978;

Houts, Robins & Huston, 1996). The sexua- tion of roles and of power – because it implies a certain inequality between the partners – will be correlated with more important conjugal problems, with a more problematic communication between the couple, with the loss of sexual desire by the wife, to greater dissatisfaction, and more generally to deterioration of conjugal inti- macy (Zammichieli, Gilroy & Sherman, 1988 ; Tremblay, 1995 ; Fortin & Thiérault, 1995). It is therefore an open-ended ques- tion as to whether or not the sexuation of

roles and of power between the couple generates even more problems of intimacy than does undifferentiation and equality.

From one point of view it is possible to hypothesise that strict regulation of conju- gal relationships, based on power and rigi- dity, changes the bond of love which in turn may favour the emergence of problems of intimacy. On the other hand, it could be that the interchangeability of roles and the emphasis on negotiation create problems of intimacy. By making the husband and wife less interdependent, so begging the ques- tion as to whether or not the weakening of sexuation of roles damages their intimate relationship. Or, on the contrary, is equality between the couple a necessary condition for developing and maintaining their inti- macy ?

If it is possible to form the general hypo- thesis that conjugal problems find their ori- gin in the functioning mode of the couple, it can equally be stressed that the wider relational context, not as yet discussed here, is also significant (Widmer, 2004). In parti- cular, the importance of attachment style that the individuals acquire in their family of origin during childhood has been stres- sed (Hazan & Shaver, 1987; Thiérault, 1995;

Bartholomew, 1990 ; Mikulincer & Erev, 1991 ; Klohnen & Bera, 1998). Closely depending on the quality of relationships that the individuals sustain as children with their parents, these attachment styles impact on their relational life and notably on the intimate relationships individuals later form. For example, individuals who acquire an ‘avoiding’ attachment style during child- hood have more serious difficulties in main- taining satisfactory loving relationships (Bar- tholomew, 1990; Klohnen & Bera, 1998). In other words, the quality of relationships that an individual maintains with his parents during childhood contributes to the deve- lopment of an “aptitude for intimacy”. In this regard, the presence of recurring conju- gal conflict between the parental couple during the infancy of the individual is asso- ciated with communication difficulties with his own partner, with jealousy, with pro- blems of infidelity (Amato & Rogers, 1997 ; Gottman, 1994 ; Leonard & Roberts, 1998 ; Sanders, Halford & Behrens, 1999), and with a significantly higher probability of the couple splitting up (Faust & Mckibben, 1999). The hypothesis of a training effect within the family of origin developing inti- macy has thus received considerable empi- rical confirmation.

Références

Documents relatifs

m arliaC Alain, 2016, Problèmes d’archéologie développementale en Afrique, Paris, L’Harmattan, 216 p., par Jacques Aymeric Nsangou.. n ixon Sam (ed.),

I..:enseignant, cherchant à connaitre, en début d'année scolaire, le niveau de langue de ses élèves, mais également leur capacité à structurer un texte fictif

En France, il n'est perçu que sur la vente de certaines actions, tandis qu'en Angleterre, il ne frappe que l'achat d'actions emegistrées dans le registre des actions britanniques

Nous rassemblons ainsi les coef- ficients de Gini – qui mesurent dans le cas présent l’inégalité des revenus – de l’unique source permettant la comparabilité

Certaines formes d'euthanasie sont considérées comme conformes au droit pénal, ainsi d'ailleurs qu'aux devoirs déontologiques du médecin en vertu des Directives de

Dans ce cas la justice de la distribution d'eau n'aurait plus de lien avec l'égalité mais bien avec un principe inégalitaire qui peut se révéler parfaitement acceptable pour

Les relations entre l'oral et l'écrit dans l'acquisition du langage.. ZESIGER, Pascal Eric, BRUN, Marie,

877 Selon son analyse des travaux de Leibniz, Berkowitz déduit la triple définition de la nature.. Les étants donnés sont ceux qui se sont déjà réalisés alors que les étants