Université Claude Bernard Lyon 1 Semestre printemps 2016 - 2017 Préparation aux épreuves écrites du CAPES
Fiche 5 CALCUL INTÉGRAL
Partie II : Intégrales généralisées
Notions abordées
• Notion d’intégrale généralisée : définitions et exemples.
• Critères de comparaison pour les fonctions à valeurs positives (majoration, équivalence).
• Intégrales de Riemann et de Bertrand.
• Critères de convergence (convergence absolue, théorème d’Abel ...).
• Applications :
-Convergence des intégrales du type Z +∞
a
f (t) sin(t)dt et Z +∞
a
f (t) cos(t)dt avec f positive dé- croissante.
-Convergence et calcul de Z π/2
0
ln(sin(t))dt.
PARTIE II : Intégrales généralisées
Dans cette partie, on s’intéresse aux intégrales de fonctions définies sur des intervalles du type [a, b[
(avec a < b, b pouvant être égal à +∞) ou du type ]a, b] (a < b, a pouvant être égal à −∞).
A - PREMIÈRES DÉFINITIONS ET EXEMPLES
Définitions (intégrabilité locale). Soit I un intervalle de R et f une fonction définie sur I. On dit que f est localement intégrable sur I si elle est Riemann intégrable sur tout sous-intervalle fermé borné de I.
Définitions (intégrales généralisées). Soit f une fonction localement intégrable sur [a, b[
avec b ≤ +∞. On dit que l’intégrale de f sur [a, b[ converge si la fonction F définie par F (x) =
Z x a
f (t)dt pour tout x ∈ [a, b[ admet une limite ` lorsque x tend vers b. Cette limite est alors notée
` = Z b
a
f (t)dt ,
et est appelée l’intégrale généralisée (ou impropre) de f sur [a, b[. Dans le cas où F n’admet pas de limite en b, on dit que l’intégrale de f sur [a, b[ diverge.
On définit de manière analogue l’intégrale généralisée sur des intervalles de la forme ]a, b] avec a ≥ −∞.
Exemples classiques.
1 - Montrer que Z +∞
0
exp(−t)dt converge.
2 - Montrer que Z +∞
0
dt
1 + t2 converge.
3 - On considère la fonction f : t ∈]0, 1] 7→ t ln(t) − t.
(a) Calculer f0.
(b) En déduire que l’intégrale Z 1
0
ln(t)dt converge.
B - CRITÈRES DE COMPARAISON
1 - Majoration
Propriété. Soient f et g localement intégrables sur [a, b[, telles que 0 ≤ f ≤ g sur [a, b[.
Alors :
• Si Z b
a
g(t)dt converge, alors Z b
a
f (t)dt converge, et on a : Z b
a
f (t)dt ≤ Z b
a
g(t)dt .
• Si Z b
a
f (t)dt diverge, alors Z b
a
g(t)dt diverge.
Application : convergence de l’intégrale gaussienne.
Soit λ > 0. Montrer que l’intégrale Z +∞
0
exp(−λt2)dt converge.
Indication : on pourra poser g : t 7→ exp(−λt) et utiliser la propriété précédente sur [1, +∞[.
2 - Équivalence
Propriété. Soient f et g localement intégrables et positives sur [a, b[. Si f et g sont équivalentes en b alors les intégrales
Z b a
f (t)dt et Z b
a
g(t)dt sont de même nature.
Application : convergence de l’intégrale Z 1
0
sin(t) t3/2 dt.
(a) Montrer que l’intégrale Z 1
0
√1
tdt converge.
(b) En déduire que l’intégrale Z 1
0
sin(t)
t3/2 dt converge.
3 - Intégrales de référence
A titre d’exercice, il pourra être intéressant de démontrer les théorèmes suivants.
Indication : on pourra s’inspirer des preuves proposées pour les séries numériques.
Propriété (intégrales de Riemann).
• L’intégrale Z +∞
1
1
tαdt converge si α > 1 et diverge si α ≤ 1.
• L’intégrale Z 1
0
1
tαdt converge si α < 1 et diverge si α ≥ 1.
Propriété (intégrales de Bertrand).
• L’intégrale Z +∞
e
1
tα(ln(t))βdt converge en +∞ ssi α > 1 ou α = 1 et β > 1.
• L’intégrale Z
1 e
0
1
tα| ln(t)|βdt converge en 0 ssi α < 1 ou α = 1 et β > 1.
C - AUTRES CRITÈRES DE CONVERGENCE
Les résultats qui suivent reposent sur le critère de Cauchy (hors programme). On ne demande pas de les démontrer.
1 - Un premier résultat
Propriété. Soit f une fonction localement intégrable sur [a, b[, avec b fini.
• Si f est bornée sur [a, b[, alors Z b
a
f (t)dt converge.
• Si f admet une limite à gauche finie en b, alors Z b
a
f (t)dt converge.
Exemple : Montrer que l’intégrale Z π/2
0
ln sin(t) t
dt converge.
2 - Convergence absolue
Définition. Soit f une fonction localement intégrable sur [a, b[. L’intégrale Z b
a
f (t)dt est dite absolument convergente si l’intégrale de |f | converge.
Exemple.
(a) Montrer que l’intégrale Z +∞
0
cos(t)e−tdt converge absolument.
Propriété. Soit f une fonction localement intégrable sur [a, b[. Si Z b
a
f (t)dt converge abso- lument sur [a, b[ alors l’intégrale
Z b
a
f (t)dt converge sur [a, b[, et on a
Z b a
f (t)dt
≤ Z b
a
|f (t)| dt .
Définition. Une intégrale convergente qui n’est pas absolument convergente est dite semi- convergente.
Autre exemples.
(b) Montrer que Z +∞
0
ln(t)
1 + t2dt est absolument convergente.
Indication : on pourra utiliser le fait que
ln(t) 1 + t2
= ot→0
1
√t
et
ln(t) 1 + t2
= o
t→+∞
1 t3/2
. (c) On cherche à établir que l’intégrale
Z +∞
1
sin(t)
t dt n’est pas absolument convergente.
(i) Montrer que, pour tout réel x > 1, on a : Z x
1
cos(2t)
t dt = sin(2x)
2x −sin(2)
2 +
Z x 1
sin(2t) 2t2 dt . Indication : on pourra effectuer une intégration par parties.
(ii) En déduire que l’intégrale Z +∞
1
cos(2t)
t2 dt converge.
(iii) Montrer que, pour tout réel x > 1, on a : Z x
1
sin(t) t
dt ≥ 1 2
Z x 1
1 tdt − 1
2 Z x
1
cos(2t) t dt
Indication : on pourra utiliser | sin(t)| ≥ sin2(t) pour tout réel t ≥ 1, et linéariser sin2(t).
(iv) Conclure.
Remarque : nous verrons dans l’exercice 1 que cette intégrale converge. Ainsi, l’intégrale Z +∞
1
sin(t)
t est semi-convergente.
3 - Critère Abel
Propriété. Soient f , g localement intégrables sur [a, +∞[, vérifiant : (i) f est positive et décroissante sur [a, +∞[, et a pour limite 0 en +∞.
(ii) Il existe une constante M telle que
∀x, y ∈ [a, +∞[ ,
Z y x
g(t)dt
≤ M .
Alors Z +∞
a
f (t)g(t)dt converge.
D - EXERCICES D’APPLICATION
Exercice 1 : Un résultat général de convergence
Le but de l’exercice est d’établir le résultat suivant :
Propriété. Soit a un réel et f une fonction positive décroissante sur [a, +∞[, admettant 0 pour limite en +∞. Alors les intégrales généralisées
Z +∞
a
f (t) sin(t)dt et Z +∞
a
f (t) cos(t)dt convergent.
On se concentre uniquement sur les intégrales du type Z +∞
a
f (t) sin(t)dt, l’autre cas se traitant de manière similaire.
1 - Montrer que la fonction h : t 7→ f (t) sin(t) est localement intégrable sur [a, +∞[.
2 - Montrer que pour tout entier k vérifiant kπ > a, on a Z (k+1)π
kπ
h(t)dt = (−1)k
Z (k+1)π kπ
f (t)| sin(t)|dt .
3 - On note à présent k0 le plus petit entier k vérifiant kπ > a. Pour tout réel x vérifiant x > k0π, on notera n(x) l’unique entier tel que
n(x)π ≤ x < (n(x) + 1)π . (a) Soit x > k0π. On pose ε(x) =
Z x n(x)π
h(t)dt . Montrer que
|ε(x)| ≤ πf (n(x)π) . (b) En déduire que lim
x→+∞ε(x) = 0 . 4 - On pose, pour tout k ≥ k0 : vk =
Z (k+1)π kπ
f (t)| sin(t)|dt.
(a) Montrer que la suite (vk)k≥k0 tend vers 0 en décroissant.
(b) Montrer que, pour tout x > (k0+ 1)π, on a Z x
a
h(t)dt = Z k0π
a
h(t) +
n(x)−1
X
k=k0
(−1)kvk+ ε(x) .
(c) Conclure.
Remarque : On déduit immédiatement de cette propriété que l’intégrale Z +∞
1
sin(t)
t dt converge.
Nous avons précédemment établi que cette intégrale n’était pas absolument convergente. En d’autres termes, l’intégrale
Z +∞
1
sin(t)
t dt est semi-convergente.
Exercice 2 : Convergence et calcul de Z π/2
0
ln(sin(t))dt On note f : t ∈]0, π/2] 7−→ ln(sin(t)).
1 - Montrer que pour tout t ∈]0, π/2], f (t) = ln sin(t) t
+ ln(t).
2 - En déduire que Z π/2
0
f (t)dt converge. On notera I la valeur de cette intégrale.
Indication : utiliser A.3- et C.1-.
3 - Montrer que, pour tout x ∈]0, π/2], on a : Z π/2
x
ln(sin(t))dt =
Z π/2−x 0
ln(cos(t))dt .
En déduire que I = Z π/2
0
ln(cos(t))dt.
4 - Montrer que 2I = Z π/2
0
ln(sin(2t))dt −π 2 ln(2).
Indication : on pourra écrire 2I = Z π/2
0
ln(sin(t))dt + Z π/2
0
ln(cos(t))dt, puis utiliser le fait que 2 sin(t) cos(t) = sin(2t) pour tout réel t.
5 - Montrer, par un changement de variable approprié, que Z π/2
0
ln(sin(2t))dt = 1 2
Z π
0
ln(sin(t))dt et Z π
π/2
ln(sin(t))dt = Z π/2
0
ln(cos(t))dt = I .
6 - En déduire que I = −π 2ln(2) .