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Article pp.223-234 du Vol.8 n°2 (2010)

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Texte intégral

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Dispositifs techniques pour l’éducation, la formation et l’apprentissage

Point de vue des industriels sur les évolutions

Bernard Blandin

CREF (EA 1589)

CESI – Laboratoire d’ingénierie des environnements d’apprentissage 169, rue Georges Auric, Zac de Tournezy

F-34070 Montpellier bblandin@cesi.fr

RÉSUMÉ. Cet article développe l’exposé fait lors du symposium Distances & savoirs des 10 et 11 décembre 2009. Il tente de faire le point sur la vision des industriels sur l’avenir des dispositifs techniques pour l’éducation, la formation et l’apprentissage. Il présente, d’une part, les tendances du marché, et, d’autre part, les technologies émergentes, vues au travers du regard porté par un groupe international de réflexion sur les standards du futur.

ABSTRACT. This article develops the presentation made during the Distances & savoirs Symposium held on December 10 and 11, 2009. It is a tentative presentation of the industry viewpoint on the future of information technologies for learning, education and training. It presents, on one hand, the market trends, and on the other, the emerging technologies, seen as viewed by an international think-tank on the future of standards.

MOTS-CLÉS: technologies émergentes, tendances du marché, futurs standards.

KEYWORDS: emerging technologies, market trends, future standards.

DOI:10.3166/DS.8.223-234 © Cned/Lavoisier 2010

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Introduction

Il s’agit, dans ce texte, de tenter de répondre aux consignes données lors de la préparation du symposium organisé à Poitiers pour les 7 ans de la revue, et de présenter le point de vue des industriels sur le futur des dispositifs techniques. Un tel point de vue n’est généralement pas exprimé clairement, car il ne fait pas l’objet d’études systématiques, et, contrairement aux travaux scientifiques, même lorsqu’il a fait l’objet de recherches ou d’études, le point de vue des industriels ne donne pas lieu à publications : il est généralement gardé confidentiel pour des raisons stratégiques. Il est donc difficile d’y accéder. Pour avoir une idée, non pas de ce qui se prépare dans les laboratoires, mais des tendances que les industriels prennent en considération pour se positionner à moyen terme, il m’a fallu faire un détour par un lieu où ces tendances sont formalisées : les groupes de réflexion sur les normes et standards de demain. Parce que les normes et standards obligent à trouver un consensus entre les fabricants et les utilisateurs. Et pour trouver un tel consensus sur le futur, il faut d’une part, explorer et analyser les besoins des utilisateurs, de l’autre dévoiler quelques éléments sur les futurs produits, et les confronter. Dans la production de ces groupes, le point de vue des industriels est donc perceptible d’une manière implicite. Ce sera donc cette vision implicite que je vais tenter d’expliciter.

Tous les groupes de normalisation réfléchissent sur les normes et standards du futur. Cette question prend de plus en plus d’importance, car les normes et standards actuellement mis en œuvre ont été conçus il y a une dizaine d’année, et dans le domaine technique, dix ans, c’est très long : les technologies dominantes aujourd’hui n’existaient pas il y a dix ans. D’où la nécessité d’une réflexion prospective sur les normes et standards permettant d’anticiper sur les développements des technologies en partant de l’état actuel. Dans ces réflexions, on va retrouver des choses qui sont évoquées dans l’article d’Eric Bruillard pour ce qui concerne la recherche. Mais le côté prospectif sera peut-être un peu moins marqué, et les prédictions seront un peu plus attachées à l’état réel des usages de la technologie d’aujourd’hui.

La source principale de mon exposé, lors du symposium, provenait des travaux d’une organisation constituée en mars 2008, qui s’appelle LETSI (Learning, Education and Training Systems Interoperability). Elle a été constituée pour palier les incertitudes que l’élection américaine faisait peser sur la structure porteuse de l’ensemble de spécifications SCORM, Advanced Distributed Learning (ADL), consortium financé en grande partie par le ministère de la Défense américain : LETSI devait prendre le relais, assurer la responsabilité (stewardship) internationale de SCORM et de son avenir. L’histoire en a voulu autrement : ADL a été maintenue après les élections, et a repris la responsabilité de SCORM. LETSI, qui avait commencé à travailler sur une future version de SCORM, baptisée SCORM 2.0, continue à travailler sur les normes du futur… LETSI a été créée par les acteurs suivants : Adobe, ADL, des représentants des utilisateurs, notamment ceux de l’aviation (AICC), des médecins (MedBiquitous), des écoles américaines (Schools Interoperability Framework Association), des consultants (Booz Allen Hamilton,

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Masie Learning Consortium), des éditeurs de logiciel, à travers la Computer Society de l’IEEE, l’Institut coréen du commerce électronique, l’Institut latino-américain de la communication éducative. Pendant sa première année d’existence, LETSI a réuni une soixantaine de personnes en groupes de travail, pour réfléchir aux futurs standards répondant aux besoins du secteur et des utilisateurs. Ces réflexions ont donné lieu à un rapport publié en février 2009 (LETSI, 2009), sur lequel je me suis basé pour la présentation que j’ai faite au symposium. D’autres initiatives, non mentionnées dans ma présentation, seront mobilisées pour la compléter et approfondir le sujet dans cet article.

Cet article comporte deux parties qui ont fait l’objet de ma présentation au symposium, plus une troisième partie, complémentaire, ajoutée, qui reprend et développe quelques éléments de réponse aux questions posées lors du symposium. La première partie est une synthèse des tendances repérées sur le marché et chez les utilisateurs, telles qu’elles sont vues à travers la réflexion prospective des groupes de normalisation. La deuxième porte sur les technologies et les développements technologiques, tels qu’on peut les percevoir au travers de quelques projets de recherche et développement industriels, et notamment ceux retenus dans le cadre d’appels à projets sur financement publics. La troisième partie présente quelques caractéristiques des normes du futur, telles qu’elles émergent des travaux les plus récents.

Les tendances du marché

Cette section s’appuie principalement sur ce qui est tenu pour vrai (assumptions) par les groupes de travail de LETSI, complété et enrichi, le cas échéant, par d’autres sources. Elle présente six tendances.

Un brouillage des frontières

Le premier constat, c’est celui d’un brouillage, comme l’a dit Eric Bruillard, d’un brouillage des frontières. Mais, au-delà du brouillage entre les modalités de présence, entre les espaces, entre les rôles… relevé par Eric Bruillard, il y a aussi un brouillage entre différents mondes de l’entreprise : entre par exemple, la formation, la gestion des contenus, donc la documentation technique, le management des talents – les ressources humaines – les soutiens à la performance… Tous ces mondes sociaux utilisent des outils voisins quand ce n’est pas les mêmes outils, intégrés dans le système d’information de l’entreprise.

Il faut savoir qu’aujourd’hui, le premier vendeur de plateformes e-learning dans le monde, c’est la société Oracle® ! Tout simplement parce que chaque fois que l’on achète une base de données Oracle® avec son système de gestion, on achète en même temps la plate-forme qui est intégrée dedans pour apprendre à se servir de la plateforme Oracle® et pouvoir développer les ressources qui vont permettre d’apprendre à utiliser

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les applications qui sont développées autour. Le deuxième fournisseur, c’est SAP®. Et très loin, très loin derrière, on va trouver des fournisseurs spécialisés de plateformes de e-learning, comme Blackboard®, qui sont en perte de vitesse face à la montée du logiciel libre et de plateformes qui en sont issues, comme MOODLE (Modular Object- Oriented Dynamic Learning Environment).

La tendance, avec les espaces numériques de travail (ENT), à donner accès aux ressources numériques ou à permettre l’organisation de parcours (EDUCNET, 2009) va dans le même sens : le brouillage des frontières entre la gestion administrative de la classe, les activités pédagogiques, la communication…

L’orientation services

Deuxième constat : comme l’a aussi souligné Eric Bruillard, une tendance lourde est « l’orientation service », ou plus exactement la fourniture de logiciel comme un service (Software As A Service – Saas), payé à l’usage. Auparavant, l’activité principale de la formation à distance, que ce soit pour les institutions éducatives, les organismes de formation ou les services de formation des entreprises, était la production de ressources spécifiques et la gestion de ces ressources sur une plate- forme dédiée, à laquelle on donnait des accès contrôlés et généralement limités au sein de l’organisation. La tendance actuelle est à la fourniture de services à la demande, confiés à un prestataire. Ce service peut être l’accès à une ressource en fonction des besoins, aussi bien qu’un parcours complet de formation, composé spécifiquement, fourni avec des prestations d’accompagnement, directement accessibles en ligne par l’utilisateur autorisé.

Née avec le développement du web, cette « approche orientée service » (Service- Oriented Approach – SOA) n’est pas spécifique à la formation à distance. Elle procède d’une tendance lourde dans l’évolution des modes de fourniture du logiciel.

Mais elle se développe aussi dans le monde de la formation à distance, et elle est aujourd’hui fortement recommandée, par exemple, par le Center for Educational Technology Interoperability Standards du Joint Information Systems Committee (JISC – CETIS) britannique, qui propose des guides en ligne à destination des responsables du monde de l’éducation et de la formation pour comprendre de quoi il s’agit (JISC-CETIS, 2010). C’est un tournant que le monde de la formation à distance français a du mal à prendre, ce qui le met en situation défavorable face à la concurrence. Des recherches sur les raisons de ces difficultés seraient bienvenues.

L’utilisation de terminaux mobiles

Un troisième constat, c’est bien sûr l’utilisation de plus en plus répandue de terminaux mobiles pour la formation à distance, attestés par une littérature de plus en plus abondante (Traxler, 2007). L’utilisation de tels terminaux pose de nombreuses

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questions nouvelles sur le plan technique. Les réponses à ces questions peuvent modifier la conception des dispositifs de formation à distance : par exemple, la question de la synchronisation entre l’activité de l’utilisateur lorsqu’il est hors connexion et celle qui s’est déroulée lorsqu’il était en ligne auparavant, ou celle de l’adaptation des contenus aux possibilités fonctionnelles et ergonomiques de terminaux très différents (micro-ordinateur et « smartphone » par exemple).

L’utilisation de ces terminaux soulève aussi des questions d’un autre ordre que les questions techniques, et notamment celles de la gestion des données nécessaires à la localisation et à la sauvegarde des contextes : ces données entrent dans la catégorie des données personnelles qui font l’objet de règles de gestion particulières, maintenant édictées par la loi dans de nombreux pays. La prise en compte de cet aspect juridique de la gestion des traces de plus en plus nombreuses rendues nécessaires par la technologie va aussi probablement amener une transformation profonde de la conception des dispositifs de formation à distance.

L’intervention des utilisateurs

Quatrième constat : avec le développement des pédagogies actives et des approches constructivistes ou socioconstructivistes de la formation à distance, les interventions des utilisateurs dans un dispositif de formation à distance se font plus nombreuses, que ce soit au travers de forum ou au travers de productions « off », de toutes natures (textes, images, vidéos…), qui sont ensuite mises en ligne…

Le contenu généré par l’utilisateur (user-generated content – UGC) pose une question majeure pour l’efficacité des systèmes d’information, qui n’est pas spécifique à la formation à distance : comment faire pour indexer et classer les contenus qui ont été produits par les utilisateurs, de manière à pouvoir les retrouver facilement ? Il n’est en effet pas toujours facile de demander à l’utilisateur de remplir une fiche d’information complète pour décrire sa production… Et les systèmes de métadonnées actuels demandent une véritable expertise pour remplir certains champs !

Cela remet en même temps en cause les nombreuses plates-formes de formation à distance traditionnelles (Learning Management Systems) qui ne prévoient pas d’espace pour la production des utilisateurs (Blandin, 2004).

La modularité

Cinquième constat : une autre tendance forte apparaît comme un incontournable pour les industriels, la modularité. Les systèmes d’information ont tendance, aujourd’hui, à être non plus monobloc mais composés de briques fonctionnelles.

L’idée, c’est d’aller vers des plateformes qui soient des assemblages, à la demande, de différents composants, permettant de fabriquer l’application dont on a besoin à un

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instant t, à la limite, même, de le faire d’une manière dynamique, au fur et à mesure des besoins. La vision actuelle d’une plate-forme de formation à distance est celle d’une espèce de Lego®, qui va permettre d’assembler un outil de gestion de parcours avec un outil de gestion de documents… sur lesquels on va greffer des outils d’évaluation, un e-portfolio, des outils qui vont permettre de collaborer, de discuter en ligne… voire donner accès aux réseaux sociaux etc.

Cette approche est illustrée par le projet conjoint du Joint Information Systems Committee – JISC) britannique et du Department of Education, Science and Training (DEST) australien, développé à partir de 2005 : le « e-learning framework » présente une vision modulaire et interactive l’ensemble des services que l’on peut attendre d’une plate-forme de formation en ligne (ELF, 2005). Non complètement développée dans sa première version, cette initiative a ensuite pris de l’ampleur, et, avec l’appui de partenaires supplémentaires (le Ministère de l’éducation de Nouvelle-Zélande et la SURF Foundation néerlandaise), a donné naissance au « e-Framework for Education and Research », une méthodologie permettant de spécifier des services logiciels selon une approche modulaire (e-Framework, 2009).

La question principale posée par ce type d’approche est celle de la compatibilité de tous ces outils entre eux, et, plus généralement, celle de l’interopérabilité des modules de service, qui oblige à une standardisation poussée de leurs éléments d’interface.

MOODLE est un bon exemple d’application de cette approche modulaire.

L’intégration

Le dernier constat provient d’une demande récurrente des gestionnaires de dispositifs de formation à distance : la possibilité d’intégration, dans une même plate-forme, du suivi de toutes les activités liées à l’apprentissage, quelles qu’elles soient ; non seulement les activités en ligne, mais aussi les activités qui se déroulent hors ligne. En effet, les situations mixtes (blended learning) sont de plus en plus répandues, et le besoin de pouvoir traiter simultanément les traces et les résultats des activités en ligne avec ceux des activités hors ligne se fait grandissant.

La demande d’intégration a aussi une composante plus technique, et porte notamment sur la possibilité d’intégrer des outils de provenances diverses, conformément à la logique de modularisation constatée précédemment. La demande des utilisateurs est celle de pouvoir agréger des outils de fabricants différents, ou des outils « open source »… ou bien les deux en même temps.

Une troisième composante de cette demande d’intégration porte sur l’intégration des différentes modalités d’accès aux ressources et aux contenus : de l’accès structuré à une suite de ressources sous forme de parcours à l’accès direct à une ressource précise, à partir d’une recherche sur critères. Il s’agit ici de combiner les avantages de différentes approches plus ou moins formelles pour apprendre, par exemple ceux du Knowledge Management et ceux de la formation.

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Dans cette perspective d’intégration, la problématique de l’accessibilité devient très importante, d’une part pour tenir compte de la grande variété des terminaux – ce qui renvoie aux questions posées par le constat fait précédemment du développement de la mobilité –, mais aussi pour tenir compte d’éventuelles difficultés d’accès dues aux handicaps ou aux besoins spécifiques de certaines populations que l’on souhaite intégrer par ce biais dans les dispositifs de formation.

Les développements techniques

Cette deuxième partie s’appuie beaucoup plus sur la veille technologique de l’auteur que sur des documents structurés. Dans ce domaine, les visions des industriels apparaissent un peu moins prospectives que celles des chercheurs, telles que décrites par Eric Bruillard. La vision des industriels semble plutôt extrapoler la généralisation de développements déjà opérationnels.

Environnements immersifs

Une première direction d’évolution technologique, portée notamment par le développement des technologies 3D et du jeu sérieux (serious game) est celle du développement d’environnements d’apprentissage immersifs. On y voit plutôt des environnements de type « Second Life », ou des simulations en trois dimensions, que des applications mettant en œuvre des techniques de réalité virtuelle ou de réalité augmentée, qui semblent, pour un moment encore, devoir demeurer exceptionnelles.

Toutefois, cette préoccupation d’enrichir les environnements d’apprentissage se traduit par une demande pressante d’intégration a minima d’outils de simulation (ou des jeux sérieux) à partir des plates-formes de gestion de la formation en ligne. Ce qui pose en particulier la question des processus d’échange de données entre ces applications et les systèmes de gestion des apprentissages (Learning Management System - LMS), dont la seule interface standardisée aujourd’hui reste l’ECMAScript Application Programming Interface for Content to Runtime Services Communication (IEEE 1484.11.2-2003), utilisée aussi par SCORM. Développée il y une dizaine d’années, cette interface ignore l’évolution technologique actuelle, et en particulier les « web services ». L’évolution de cette interface est d’ailleurs un des premiers chantiers pratiques auxquels s’est attaqué LETSI.

Environnements collaboratifs

Une deuxième direction d’évolution technologique privilégiée par les industriels, c’est l’intégration des environnements collaboratifs. Il ne faut pas oublier que les spécifications sur lesquelles reposent la plupart des plates-formes de formation en ligne ont été conçues il y a plus d’une dizaine d’années, et qu’à l’époque, les

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environnements collaboratifs n’en étaient vraiment qu’au début : le premier wiki a été créé en 1995 ; jusque-là, le Computer-Supported Cooperative Work (CSCW) ne sortait pas des laboratoires, comme le montre l’article de Dominique Cardon (1997) faisant le point sur le sujet dans Réseaux. Leur usage n’a commencé à se développer qu’au 21e siècle (l’encyclopédie collaborative Wikipedia a été lancée en 2001). A ce moment-là, l’objectif premier d’un système de gestion des apprentissages était la gestion de ressources, et souvent, les environnements collaboratifs sont venus se greffer tardivement sur une architecture déjà conçue.

Ces greffes ont été réalisées en réponse à la demande croissante, soulignée dans la première partie, de pédagogies actives et le développement des approches constructivistes. Toutefois, une plate-forme a proclamé, dès le départ, que sa conception était guidée par « une pédagogie socio-constructionniste » : MOODLE (2009). Cette plateforme est d’ailleurs développée à partir d’un wiki, celui utilisé par Wikipedia (Mediawiki).

Nouvelles formes d’interaction

Troisième direction d’évolution des technologies : les interactions… J’ai été un peu surpris qu’Eric Bruillard ne parle pas du tout des travaux sur les agents logiciels, que ce soit les tuteurs intelligents, les agents dits « facilitateurs » ou les agents émotionnels.

C’est peut-être normal, car Eric Bruillard considérait déjà que les tuteurs intelligents étaient dépassés à la fin des années 1990 (Bruillard, 1997). Néanmoins, des chercheurs continuent à travailler sur le sujet : la 10e Conférence internationale sur les Intelligent Tutoring Systems (ITS) a lieu en juin 2010 à l’Université Carnegie Mellon. En ce qui concerne les agents facilitateurs, les plus connus et les plus utilisés sont ceux qui font de la recherche d’information automatiquement sur la base de critères définis par l’utilisateur. Mais d’autres types d’agents peuvent aider à la décision ou au diagnostic. Ils peuvent être utilisés pour des travaux requis dans le cadre d’une formation en ligne. Quant aux agents émotionnels, qui sont issus de travaux plus récents, ils essayent de détecter l’état de l’utilisateur, pour mieux lui répondre en fonction de son état émotionnel. Ce type d’agent est encore à l’état de prototype, mais des réalisations pilotes existent (SEMAINE, 2009) et il est d’ores et déjà envisagé de s’en servir pour le tutorat de formations en ligne.

Nouvelles interfaces

Une autre direction d’évolution des technologies, qui peut donner lieu à des travaux spécifiques en ce qui concerne les environnements d’apprentissage, ce sont les nouvelles interfaces, que ce soient les interfaces tactiles, dont on a vu l’usage se répandre très rapidement avec l’i-phone d’Apple® et les autres téléphones ou

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« smartphones » qui tentent de l’imiter, mais aussi les interfaces haptiques, avec retour d’effort, donnant la possibilité de sentir les actions que l’on produit sur les objets ; ou encore les interfaces multimodales, qui offrent par exemple la possibilité de donner une commande vocale à l’ordinateur tout en lui indiquant d’autres éléments de l’action à réaliser par un autre moyen…

En particulier, une interface comme celle de la console Wii de Nitendo® peut donner lieu à des applications inédites, comme celle mise au point à l’université Lyon 1 pour les travaux pratiques d’anatomie (Lyon 1, 2008).

Techniques du web sémantique

Dernière direction d’évolution repérée : l’utilisation des techniques du web sémantique, pour essayer de résoudre les problématiques liées à l’indexation, à l’utilisation de vocabulaires contrôlés, notamment pour la gestion des entrepôts de ressources multilingues... Bien que l’accent sur les ressources et leur partage ne soit plus aujourd’hui au premier plan, la gestion des ressources, leur assemblage, leurs possibilités de réutilisation font l’objet de nombreux travaux… La création récente de la Common Cartridge & Learning Tools Interoperability Alliance le démontre (IMS, 2010).

De nouvelles applications des techniques du web sémantique se développent avec la mise en ligne de référentiels dans de nombreux domaines, dont notamment celui des compétences. Comme les ressources en ligne, ces référentiels nécessitent des descriptions structurées pour pouvoir y faire des requêtes, rechercher leurs éléments, les comparer, etc.

Les normes du futur

Cette troisième partie a été ajoutée afin de présenter quelques caractéristiques perceptibles des normes du futur, dont certaines ont été évoquées dans mes réponses aux questions posées durant le symposium. Deux caractéristiques surtout me paraissent importantes à présenter.

Des normes transparentes

Aujourd’hui, on parle beaucoup des normes dans le monde de la formation en ligne, mais elles sont loin d’être appliquées d’une manière systématique. Elles sont même souvent contestées, pour des motifs divers : elles sont complexes, elles sont contraignantes, elles brident la créativité… En fait, ces critiques émanent d’utilisateurs qui, dans n’importe quel autre domaine, respectent les normes proposées par les fabricants, sans même s’en rendre compte : les normes régissant

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les produits et les services utilisés au quotidien sont transparentes pour l’utilisateur, heureusement. Il n’en n’est pas encore de même pour les normes concernant les technologies de l’information pour l’éducation, la formation et l’apprentissage, mais cela viendra, à terme, lorsqu’elles seront mises en œuvre d’une façon généralisée dans les systèmes…

Il ne faut pas oublier que la normalisation dans ce domaine est récente… Bien que créé fin 1999, le comité technique a vraiment pris sa vitesse de croisière à partir de 2004. La première norme a été publiée en 2004, la seconde en 2005. Par contre, à partir de 2008, le nombre a fortement augmenté : 14 normes et 4 rapports techniques ont été publiés entre le dernier trimestre 2008 et le début de 2010, et une cinquantaine sont actuellement en chantier. Donc c’est tout neuf. Ces normes commencent tout juste à être mises en œuvre, à être traduites dans des implémentations techniques. Une fois que cela sera fait, qu’elles seront dans les systèmes, les utilisateurs n’auront plus à s’en soucier.

Aujourd’hui, c’est là que le bât blesse : la mise en œuvre technique des normes. De fait, peu d’éditeurs ont conscience de l’importance d’y travailler. Ce sont plutôt les communautés de développement du logiciel libre qui s’en emparent, mais cela ne génère pas de développements industriels : la plate-forme aujourd’hui la plus avancée dans la mise en œuvre des standards, c’est, encore une fois, MOODLE. Et le paradoxe est que ses utilisateurs ne se soucient pas de savoir quels standards elle met en œuvre !

Des normes portant sur les processus

Les discussions dans plusieurs groupes de travail sur la normalisation ont révélé deux approches de la normalisation en opposition : une position que l’on pourrait appeler « structuraliste », qui considère que ce qui doit être normalisé, ce sont des structures de données ou d’informations. Cette position est celle qui a dominé les premiers standards développés, comme par exemple les LOM (Learning Object Metadata). Mais aujourd’hui, devant l’évidence de l’incompatibilité des différents profils des LOM, une autre approche est apparue, pour résoudre ces problèmes d’incompatibilité. Il s’agit d’une position que l’on pourrait qualifier

« d’interopérationnaliste », qui considère que la normalisation doit porter sur des processus permettant de rendre interopérables des structures d’information ou de données qui resteront hétérogènes.

Cette dernière position, initiée par une partie des participants aux travaux visant à permettre l’interopérabilité des métadonnées décrivant les ressources, est celle adoptée par les projets les plus récents qui sont confrontés à l’interopérabilité des structures d’information ou de données qui portent la marque de pratiques culturelles différentes, et donc forcément irréductibles les unes aux autres : description de ressources pédagogiques, description de compétences, description d’une offre de formation, etc.

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Les normes du futur suivront très probablement la position interopérationnaliste, et porteront sur des processus de type comparaison d’éléments, agrégation ou décomposition d’éléments, navigation entre des éléments.

Conclusion

Le point de vue des industriels qui s’est dessiné au fil de cet article révèle six tendances, cinq axes technologiques et deux caractéristiques concernant les normes du futur.

Les six tendances peuvent être regroupées de la manière suivante : un brouillage des frontières d’usage qui s’accompagne d’une multiplication des accès possibles grâce aux terminaux mobiles ; des logiciels avec une orientation service, modulaires et prenant en compte le brouillage des frontières d’usage par des possibilités d’intégration accrues ; enfin, une intervention plus importante des utilisateurs.

Les cinq axes technologiques suggèrent le développement d’environnements plus riches, en 3D ou immersifs, en même temps que collaboratifs, avec de nouvelles possibilités d’interaction et de nouvelles interfaces. Les recherches y sont facilitées par le développement des techniques du web sémantique.

Les normes du futur porteront sur des processus plus que sur des structures d’information ou de données, et seront transparentes à l’utilisateur.

Bibliographie

Toutes les références pour cet article sont en ligne, et donc faciles d’accès au lecteur.

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Références

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